Le Vent de la Chine Numéro 37 (2021)
La Chine « s’est levée » sous Mao, « s’est enrichie » sous Deng Xiaoping, et « devient puissante » sous Xi Jinping (从站起来,富起来到强起来). Tel est le déroulé historique promu par la « résolution » que viennent d’adopter les 350 membres du Comité Central lors du 6ème Plénum (8 au 11 novembre).
Durant son siècle d’existence, le Parti n’a promulgué que deux documents de ce genre. Le premier remonte à 1945 et était venu renforcer l’autorité de Mao au sein du Parti, quatre ans avant l’avènement au pouvoir des communistes. Le second date de 1981 et a été rédigé sous l’impulsion de Deng Xiaoping. Il avait permis de tourner la page maoïste, en reconnaissant les erreurs du « Grand Timonier ».
Pour cette troisième résolution, il ne s’agit pas pour Xi Jinping de critiquer le bilan de ses prédécesseurs, mais plutôt de valoriser ses propres réalisations et inaugurer une nouvelle ère politique : la sienne. C’est ainsi que les années Xi Jinping (de 2012 jusqu’à aujourd’hui) occupent près de la moitié du communiqué officiel (en attendant le texte intégral) ; l’autre moitié étant consacrée aux années Mao (de 1921 à 1976) puis Deng Xiaoping, Jiang Zemin et Hu Jintao (de 1976 à 2012)…
L’un des passages clés du communiqué avance que la « pensée de Xi Jinping » incarnerait « la quintessence de la culture et de l’âme chinoise ». En faisant preuve d’un « courage énorme » et d’un « fort sens des responsabilités », le leader aurait réussi à « surmonter des problèmes que ses prédécesseurs n’ont pas pu résoudre » et aurait su « transformer des crises en opportunités » sur le plan international.
Grâce à lui, la gouvernance « laxiste » qui menaçait la suprématie du Parti, appartient désormais au passé ; « une victoire écrasante » a été remportée contre la corruption ; le développement économique du pays est devenu « plus équilibré, coordonné et durable » ; le système « démocratique » chinois a été amélioré ; l’influence chinoise à travers le monde s’est « nettement accrue » ; « l’ordre a été restauré » à Hong Kong …
Autant d’arguments censés convaincre les 95 millions de membres du Parti, mais aussi les citoyens ordinaires, des progrès réalisés sous Xi Jinping et de la nécessité de le maintenir à la tête du pays, particulièrement dans un monde en proie « à des changements inédits » et au Covid-19.
Sous-estimé par de nombreux analystes à son arrivée aux affaires en 2012, Xi Jinping s’est révélé être un stratège politique hors pair. Il s’est très tôt attelé à la consolidation de son pouvoir, de manière à entrer au panthéon communiste, au même titre que Mao et de Deng Xiaoping.
Ces dernières années, une série d’événements politiques interconnectés ont clairement laissé transparaître cette ambition. Le premier a eu lieu fin 2016, lorsque Xi Jinping a été nommé « cœur » du Parti. L’année suivante, la « pensée de Xi Jinping sur les caractéristiques chinoises du socialisme de la nouvelle ère » a été enchâssée à la Constitution du Parti. Début 2018, le leader a fait supprimer la limite de deux mandats de cinq ans accordés au Président de la République Populaire de Chine, garde-fou mis en place en 1982 par Deng Xiaoping pour éviter tout retour au pouvoir solitaire…
Ce sont ces trois étapes qui ont conduit au « couronnement idéologique » auquel on assiste aujourd’hui, à travers cette résolution historique, qui permet à Xi Jinping de mettre son héritage à l’abri de tout reproche ou toute attaque. Désormais, critiquer Xi Jinping (ou « sa pensée ») reviendra à attaquer le Parti lui-même.
L’épilogue de tous ces efforts sera sans aucun doute le XXème Congrès à l’automne 2022, grand-messe durant laquelle Xi Jinping devrait se voir octroyer un troisième mandat de cinq ans. Cependant, il pourrait exercer son pouvoir et son influence bien au-delà de 2027, surtout s’il réussit à ressusciter le titre de Président du Parti, ce qui pourrait lui permettre de superviser sa succession.
Au final, peu importe la position qu’il occupe, Xi Jinping va devoir se montrer à la hauteur de la tâche qui l’attend pour justifier cette entorse historique au processus d’alternance politique. Même si le dirigeant a tiré crédit de toutes les récentes réalisations de la nation, il portera également la responsabilité de tout échec.
Alors que le bouclier sanitaire chinois se fissure dans une vingtaine de provinces sous les assauts du variant Delta (plus de 1000 cas au 10 novembre), la Chine dégaine sa dernière arme de traçage : le « compagnon spatio-temporel » (时空伴随者”: shí kòng bànsuí zhě).
Derrière ce nom intriguant, ayant suscité plus de 3 millions de recherches sur Baidu en quelques jours, un système dérivé de la fameuse « flèche verte » obtenue à partir des données mobiles de son téléphone. Ce traçage 2.0 consiste à repérer tous ceux dont le smartphone a été détecté à moins de 800 mètres de celui d’un cas confirmé de Covid-19, pendant plus de 10 minutes, durant les 14 derniers jours. Les personnes concernées reçoivent alors un SMS pour les prier de se signaler auprès des autorités et de rester chez eux le temps de réaliser trois tests PCR en 72 heures. Naturellement, toutes ces personnes perdent leur code QR de santé « vert », nécessaire pour pénétrer dans les lieux publics et voyager à travers le pays.
Cette méthode, initialement employée à Chengdu (Sichuan), a permis de retracer au moins 82 000 potentiels « cas contacts » en analysant les données mobiles de ses 20 millions d’habitants. Elle a également été adaptée dans d’autres villes : Changsha (Hunan), Shijiazhuang (Hebei), Xi’an (Shaanxi) ou encore Pékin.
En théorie, ce système pourrait permettre d’éviter de coûteuses et massives campagnes de dépistage à grande échelle. Sauf qu’en pratique, les autorités y ont toujours recours. C’est ce qui pousse certains internautes à qualifier ce système de « sur-prévention », voire de « pratique illégale » puisque les données personnelles sont utilisées sans le consentement des utilisateurs (au lendemain même de l’entrée en vigueur d’une loi à ce sujet). D’autres s’insurgent contre la stigmatisation sociale qui en découle, sachant que depuis le début de la pandémie, toutes les personnes ayant contracté le virus (puis l’ayant transmis à d’autres) sont pourchassées sur internet et souvent mises au ban de la société.
Face à cette politique stricte, les cas de fraudes se multiplient : certains tentent de s’enfuir pour échapper au dépistage et surtout à l’éventuel confinement, d’autres montrent de faux tests PCR ou code QR de santé… Indéniablement, une certaine « fatigue pandémique » se fait sentir, en Chine comme ailleurs.
Cependant, la population ne va pas jusqu’à remettre en cause la stratégie « zéro cas » qui les a protégés du virus jusqu’à présent. Cette perception est accentuée par les médias officiels qui relatent constamment les ravages de la Covid-19 à travers le monde, aux États-Unis surtout.
En parallèle, les habitants savent mieux que personne que le système de santé chinois, souffrant de disparités criantes, ne saurait faire face à une déferlante de cas nécessitant une hospitalisation. Les scènes de panique dans les hôpitaux de Wuhan saturés, en janvier 2020, l’ont démontré…
Plusieurs experts chinois questionnent néanmoins la pertinence de cette stratégie « zéro cas », alors que la plupart des pays asiatiques ont décidé d’assouplir leur approche sanitaire. Après l’expert shanghaien Zhang Wenhong qui avait « osé » avancer l’idée de « coexister avec le virus » (avant de voir sa réputation personnelle attaquée), c’est au tour du virologue Guan Yi – qui avait prédit en janvier 2020 que l’épidémie de Wuhan serait 10 fois pire que celles du SRAS – d’écorner cette politique « néfaste pour l’économie » lors d’une interview avec Phoenix TV diffusée le 8 novembre (jour d’ouverture du 6ème Plenum).
Alors que le Parti a officiellement décrété avoir « remporté la guerre contre le virus » dès septembre 2020, le spécialiste de l’université de Hong Kong a affirmé que « nous ne devrions pas déclarer victoire trop vite », le virus étant aujourd’hui « totalement adapté aux humains » (ce qui n’était pas le cas du SRAS en 2004). Dans ces conditions, « cette stratégie est trop coûteuse et l’objectif ‘zéro cas’ ne sera jamais atteint », a-t-il déclaré. C’est exactement l’inverse des déclarations formulées quelques jours plus tôt par l’expert de référence auprès du gouvernement, Zhong Nanshan, qui a défendu cette stratégie, « moins coûteuse » que de soigner les personnes infectées.
Toujours selon Guan Yi, au lieu de s’acharner à tester pour détecter le virus, la Chine devrait avoir « le courage » de conduire une large campagne de tests pour évaluer le niveau d’anticorps et leur durée dans le temps afin de véritablement connaitre l’efficacité des vaccins chinois. Au passage, le virologue n’a pas manqué de dénoncer « les groupes d’intérêt » et « les profiteurs malhonnêtes » qui tirent bénéfice de cette campagne massive d’inoculation (plus de 2 milliards de doses injectées)…
Même si ces propos sont pleins de bon sens et courageux, tant que le virus présentera un risque de contagion qui pourrait mettre à mal le système national de santé, tant que les vaccins chinois n’offriront pas une « barrière immunitaire » suffisante ou qu’un traitement efficace n’aura pas été trouvé, Pékin ne bougera pas d’un pouce.
Yu Minhong (俞敏洪), charismatique fondateur du n°1 du soutien scolaire New Oriental (新东方), fait contre mauvaise fortune, bon cœur.
Lors d’une session en live-streaming sur Douyin le 8 novembre, le patron a annoncé que son entreprise allait désormais vendre des produits agricoles (viande, poissons, fruits et légumes…) sur une nouvelle plateforme de e-commerce, notamment grâce à plusieurs centaines de ses anciens professeurs, reconvertis en « influenceurs ».
Quoique surprenante, cette reconversion a toutes les chances d’être bien vue par le gouvernement, puisqu’elle s’aligne sur son objectif de « revitalisation du monde rural », voire de « prospérité commune » en enrichissant les paysans.
Le PDG a pris cette décision radicale trois mois après que le gouvernement interdise aux firmes du tutorat de gagner de l’argent en enseignant des matières présentes au programme scolaire, comme le chinois ou les mathématiques. En appliquant cette réglementation, l’État espère faire baisser les coûts exorbitants de l’éducation qui pèsent sur les naissances, et réduire les inégalités.
Depuis l’introduction de ces nouvelles règles, la valeur de l’action New Oriental en bourse de New York et de Hong Kong, a été divisée par dix, ce segment d’activité représentant près de 80% des revenus du groupe. C’est un véritable coup de massue pour Michael Yu, qui voit son empire s’écrouler, mais aussi sa fortune personnelle divisée par quatre, à 7,5 milliards de yuans. Lors d’une réunion interne, le fondateur n’aurait pas pu retenir ses larmes… « L’ère du tutorat privé a pris fin », a-t-il sobrement commenté.
New Oriental a un temps envisagé de se diversifier en offrant des cours de pédagogie aux parents ou des services de garderie, mais le groupe a finalement préféré tourner la page en annonçant se retirer du marché du soutien scolaire. 1500 centres vont fermer (le mobilier sera offert à des écoles rurales) et 40 000 professeurs seront licenciés.
La firme s’est néanmoins engagée à rembourser tous ses clients et à payer tous les employés congédiés – une attitude « responsable » saluée par le public, alors que d’autres entreprises ayant fait faillite laissent des montagnes de dettes derrière elles… « Yu Minhong se tient sous la pluie, mais il n’oublie pas de tenir un parapluie pour les autres » (“自己淋着雨还不忘为别人打伞”), a commenté un internaute.
Né dans un petit village du Jiangsu, Yu Minhong a grandi dans la pauvreté. Cela ne l’a pas empêché d’intégrer la prestigieuse université de Pékin après deux tentatives, puis de quitter un emploi stable pour ouvrir sa propre école (cf photo) en 1993. Une « success story » qui a suscité l’admiration du pays entier.
Mais rien ne garantit que l’entrepreneur réussisse à nouveau son pari, le marché de la vente en ligne de produits frais étant déjà occupé par de redoutables concurrents, tel Pinduoduo, qui a réalisé un chiffre d’affaires de 270 milliards de yuans en 2020 (deux fois plus que l’année précédente).
De plus, Michael Yu n’est pas le seul à s’intéresser à ce secteur : le fondateur d’Alibaba Jack Ma, a démontré ces derniers mois un soudain intérêt pour les technologies agricoles. Mais à l’inverse de Ma Yun, aujourd’hui méprisé par l’opinion, Yu Minhong a réussi à susciter l’empathie du public. Et si c’était là le véritable tour de force de cette reconversion ?
« Les femmes soutiennent la moitié du ciel » a dit Mao. C’est encore plus vrai depuis que Wang Yaping (王亚平, 41 ans) est devenue, dans la nuit du 7 et le 8 novembre, la première femme astronaute chinoise à faire une sortie dans l’espace, dans le cadre de la mission Shenzhou-13, lancée mi-octobre.
Cette « sortie extravéhiculaire », aux côtés du général Zhai Zhigang (55 ans), aura duré 6h30 et avait pour but d’installer de nouveaux éléments d’un bras robotique extérieur, de s’assurer de la fiabilité des équipements ou encore de tester de nouvelles combinaisons spatiales.
L’équipage devrait séjourner six mois dans le module Tianhe (« Harmonie céleste »), le seul déjà en orbite sur les trois qui constitueront à terme la station spatiale Tiangong (« Palais céleste ») qui devrait être achevée fin 2022. Ce long séjour – un record pour la Chine – testera les capacités de résistance des taïkonautes, l’apesanteur mettant à rude épreuve les organismes.
Née en 1980 à Yantai (Shandong), Wang Yaping était auparavant pilote de chasse au sein de l’armée chinoise, avec 1600 heures de vol à son actif. En 2013, elle est devenue la seconde femme chinoise à être envoyée défier les lois de la pesanteur, ce qui lui valait le surnom de « déesse des cieux » (飞天女神).
Durant ce précédent séjour, la colonelle de l’armée de l’air avait fait sensation en donnant en direct un cours de physique à 60 millions d’écoliers grâce à une liaison vidéo (cf photo). Elle devrait renouveler l’expérience lors de cette mission.
Si la presse officielle n’a pas manqué de saluer l’exploit de Wang Yaping – vu 670 millions de fois sur Weibo -, l’attention médiatique s’est surtout focalisée sur sa condition féminine (et de mère), soulignant que des serviettes hygiéniques, du chocolat, et des cosmétiques ont été embarqués dans le module. « Les femmes astronautes pourraient se sentir mieux si elles se maquillent », a déclaré Pang Zhihao, expert de l’agence spatiale chinoise.
Autres clichés repris par les organes de presse officiels : les représentantes du « beau sexe » seraient plus méticuleuses, moins sujettes aux sautes d’humeur, plus attentives aux éventuels problèmes qui les entourent, et douées de capacités de communication qui aideraient l’équipage « à garder le moral » …
Pour les internautes, ce sont les capacités physiques de Wang Yaping – particulièrement lors de sorties dans l’espace – qui ont le plus inquiété avant son départ. « Je dois reconnaitre que les femmes ont moins de force que les hommes, a-t-elle un jour déclaré en interview. Comme les exigences ne seront pas revues à la baisse, la seule solution pour moi est de m’exercer ». C’est la raison pour laquelle elle s’est régulièrement entrainée sous l’eau avec une combinaison pesant 200 kg. Lucide, la taïkonaute a affirmé que « les conditions dans l’espace ne changeront pas pour l’arrivée d’une femme ». Mais les mentalités sur Terre, peut-être un jour ?
- Compagnon « spatio-temporel » : 时空伴随者” ; shí kòng bànsuí zhě
有中国网民发挥创意,写成一首新诗《时空伴随》
Yǒu zhòng guó wǎngmín fāhuī chuàngyì, xiěchéng yī shǒu xīnshī “shíkōng bànsuí”
Des internautes chinois ont exprimé leur créativité en écrivant un nouveau poème prénommé « compagnon spatio-temporel ».
- Entrepreneur : 企业家 ; qǐyèjiā
« 网友普遍称赞俞敏洪终究是个有情怀的企业家 »
Wǎngyǒu pǔbiàn chēngzàn Yú Mǐnhóng zhōngjiù shìgè yǒu qínghuái de qǐyè jiā
« Au bout du compte, les netizens ont globalement fait l’éloge de Yu Minhong comme un entrepreneur attentionné ».
- Live-streaming : 直播 ; zhíbò
« 几百位老师将通过直播带货 »
Jǐ bǎi wèi lǎoshī jiāng tōngguò zhíbò dài huò
« Plusieurs centaines de professeurs vont employer le live-streaming pour promouvoir des produits ».
- Marcher dans l’espace : 行走太空 ; xíngzǒu tàikōng
« 王亚平成为第一位行走太空的中国女性 »
Wáng Yàpíng chéngwéi dì yī wèi xíngzǒu tàikōng de zhōngguó nǚxìng
« Wang Yaping devient la première femme chinoise à marcher dans l’espace ».
- Station spatiale Tiangong: 天宫空间站 ; Tiāngōng kōngjiānzhàn
« 天宫空间站预计至少运行10年 »
Tiāngōng kōngjiānzhàn yùjì zhìshǎo yùnxíng 10 nián
« La station spatiale devrait être en service au moins pendant 10 ans »
- « en essayant de voler le poulet, il/elle a perdu une poignée de riz », tenter de tirer avantage de quelque chose mais se retrouver dans une situation plus grave encore : 偷鸡不成蚀把米 ; tōu jī bù chéng shí bǎ mǐ
«如果安排不善,恐怕会偷鸡不成蚀把米 »
Rúguǒ ānpái bùshàn, kǒngpà huì tōu jī bùchéng shí bǎ mǐ
« Si ce n’est pas préparé correctement, j’ai bien peur de ‘perdre une poignée de riz, en essayant de voler le poulet’ ».
À Pinghai (Fujian), après cette catastrophe qui venait de frapper Ou Jinzhong et les siens, la bicoque de tôle ondulée qui venait d’être montée à titre provisoire, allait désormais devoir durer pour une période évidemment beaucoup plus longue que prévue initialement. Courageusement Zhanxi, sa femme entreprit de calfeutrer avec de vieux cartons les murs et le plafond. Le moral était bas.
Découragée, Xiying la mère de Ou, marmonnait qu’il avait lâché la proie pour l’ombre : « voulant voler le poulet, il avait perdu le riz » ( 偷鸡不成蚀把米, tōu jī bùchéng shí bǎ mǐ). D’habitude racontée comme drôle, cette histoire prenait à présent un ton bien sombre : pour faucher la poule à la fermière sans se faire prendre, le voleur répand au sol des grains de riz pour attirer sa proie dans un coin hors vision. La poule picore dans le bon sens, mais advient un imprévu : la poule s’enfuit en caquetant, et le voleur a tout perdu, et la poule et le grain. C’était un peu ce qui venait d’arriver à Ou Jinzhong qui se retrouvait sans maison du tout, après avoir démoli la vieille sans pouvoir construire la nouvelle.
Il fallait s’arracher à ce piège, et vite ! Plusieurs fois, Ou Jinzhong alla en ambassade chez Chen Wuxin, son voisin de 78 ans, à l’origine de l’annulation du permis, pour le supplier de lui laisser bâtir son bien. Mais l’homme ne voulut même pas le recevoir.
On envoya la grand-mère négocier, chargée d’une bouteille de Shaoxing. Chen prit le cadeau et dit qu’il allait réfléchir. Mais une semaine après quand y retourna la vieille femme, un Chen irascible, lui retourna le flacon, avec une telle violence que la pauvre la laissa exploser à terre, sous les éclats de rire du méchant voisin.
Pourtant le temps pressait. À chaque pluie, l’eau passait en déluge dans la guitoune. Vêtements, vivres, tout moisissait, se perdait. Le courant avait été depuis longtemps coupé, après un court-circuit.
En juin 2018, Ou Jinzhong alla porter plainte. Mais en vain, car rien ne suivit. Il n’avait été reçu qu’en raison d’une campagne exhortant les cadres à « écouter du peuple ». Les policiers devaient feindre d’obéir, et donc recevoir le plaignant. Mais pour autant, pas question de donner suite, et prendre parti contre Chen, ami personnel du commissaire !
En juillet, Ou Jinzhong sollicita une entrevue avec le maire. Quatre mois plus tard, quand l’édile daigna enfin lui accorder une entrevue, il ne se gêna pas pour rappeler son statut de réprouvé politique. Ou ferait mieux d’améliorer son image citoyenne, se soumettre à des séances de rééducation ou aux campagnes de replantation des arbres : après, peut-être, on pourrait l’aider.
Au bureau des parcs et forêts, Ou eut plus de chance. Ce bureau municipal envoya un cadre chez Chen pour faire le « médiateur ». Mais sans contester l’exorbitante prétention de Chen de posséder le sentier d’accès chez Ou, ce qui fait que la démarche perdait dès le départ toute chance d’aboutir : un Chen bouffi d’orgueil refusait tout et attendait au chaud.
En désespoir de cause, Ou Jinzhong écrivit à la presse à Quanzhou, à Putian, à Pékin. « Était-il le seul citoyen », demandait-il, « interdit par des gangsters de se loger ? ». Mais il n’eut aucun écho : en ce pays où la presse est aux mains du Parti, quel journaliste serait assez fou pour risquer son poste en soutenant un quasi-dissident ?
Sur son smartphone, Ou inondait tous les jours son compte Weibo, recevant de rares messages de soutien en retour. Il paya le sur classement de son compte en niveau « professionnel » qui lui promettait, pour de l’argent, dix fois plus d’écoute, puis il lança une pétition – mais n’obtint qu’une famélique poignée de signatures. Inutile de dire que tous ces efforts et dépenses ne faisaient rien pour adoucir les conditions économiques du foyer.
La nuit du dimanche 10 octobre se leva un ouragan. Des pointes à 145km/h emportèrent la moitié du toit, faisant hurler de terreur les femmes, et forçant les hommes à sortir pour ceinturer les parois extérieures à l’aide de cordes pour éviter que la maison ne s’envole.
Tôt le lendemain, tous se mirent à nettoyer la boue, récupérer les ustensiles et effets envolés aux alentours. Les 6m² de toit manquant étaient sur le terrain de Chen. Ou Jinzhong pour la première fois, osa franchir le barbelé pour récupérer son bien. Ce fut pour trouver un Chen grimaçant, bâton en main, lui criant « ah non, tu restes chez toi, pas de toit pour toi ! ».
Pour Ou, c’en était trop de tant de vexations et souffrances, et Chen pensait qu’il battrait en retraite, aujourd’hui encore, comme toutes les fois précédentes. Ou, sous sa ceinture, avait emporté un surin. Incapable de se contenir davantage, il le sortit et par trois fois, frappa le vieillard, à la poitrine et au cou, faisant gicler le sang de sa jugulaire. Et comme le reste de la famille venait à la rescousse, il blessa son fils de 36 ans, tua sa belle-fille, écorcha le petit fils de 10 ans, avant de retourner chez lui, son cœur battant la chamade, portant à bout de bras son pan de toit reconquis, qu’il remit en place avec son fils.
Ces choses faites, Ou Jinzhong embrassa les siens et s’enfuit dans la lande, vers la bande de terre sauvage entre collines et falaise. Il ignorait que c’était un dernier adieu. Mais ce dont il ne pouvait douter, c’était le retour de flamme vengeur des pouvoirs publics : il ne tarderait pas, et serait sans pitié !
17-19 novembre, Canton : PHARMCHINA 2021, Salon international de l’industrie pharmaceutique.
17-21 novembre, Shenzhen : CHINA HI-TECH FAIR, Salon international des ordinateurs et des télécommunications, des applications et services logiciels, de l’électronique grand public, et pour l’automobile.
18-20 novembre, Canton : POWER EXPO 2021, Salon international des équipements et technologies de l’énergie en Asie-Pacifique.
23-25 novembre, Shanghai : BOILER SHANGHAI 2021, Salon international des technologies de chauffage.
24-26 novembre, Shanghai: ITB CHINA, Salon des professionels du tourisme EN LIGNE
25-29 novembre, Canton: TEA EXPO GUANGZHOU 2021, Salon du thé de Canton
30 novembre-2 décembre, Shanghai : ELECTRICAL SHANGHAI 2021, Salon international des équipements électriques
1-3 décembre, Shangahi : ICIF CHINA 2021, Salon international de l’industrie de la chimie
1-5 décembre, Shanghai : CIIF 2021, Foire industrielle internationale de Shanghai. Industrie du métal et machine-outil. Automatisation industrielle. Technologies de l’environnement. Technologies de l’information et des télécommunications. Énergie. Technologies aérospatiales
1-5 décembre, Shanghai : FACTORY AUTOMATION ASIA 2021, Salon international de l’automatisation des usines, de l’ingénierie mécanique et électrique, de l’informatique industrielle et de l’ingénierie
4-6 décembre, Canton : GUANGZHOU INTERNATIONAL TRAVEL FAIR 2021, Salon international du voyage
10-12 décembre, Shanghai : SHANGHAI INTELLIGENT BUILDING TECHNOLOGY 2021, Salon professionnel chinois des technologies de construction intelligentes