Le Vent de la Chine Numéro 36 (2019)

du 20 octobre au 10 novembre 2019

Editorial : Jeux d’influence

En moins d’une semaine, le Président Xi Jinping rencontrait ses homologues (et voisins) pakistanais, indien et népalais. Entre le quatuor, le jeu d’influence est complexe.

Lors de sa venue en Chine (7-8 octobre), l’allié pakistanais Imran Khan avait plusieurs demandes pour Xi. Islamabad cherchait l’appui de Pékin pour échapper à la liste noire du financement du terrorisme (GAFI), et son soutien dans le conflit du Cachemire qui l’oppose au grand rival indien. Puis Xi s’envolait à la rencontre de Narendra Modi à Mamallapuram (au sud de Chennai) pour leur second sommet informel (11-12 octobre), après celui de Wuhan l’an dernier. Les deux hommes n’évoquèrent aucun sujet qui fâche (leurs différends frontaliers, la révocation de l’autonomie du Cachemire indien), pour se concentrer uniquement sur les questions économiques. D’abord, Modi fit part de ses inquiétudes concernant l’accord de libre-échange régional (RCEP) proposé par la Chine. Puis il demanda la réduction du déficit commercial de son pays avec la Chine (53 milliards de $) et plus d’accès au marché chinois pour les entreprises indiennes, notamment pharmaceutiques. En  échange, Xi appela l’Inde à considérer la candidature de Huawei pour son réseau 3G, sans tenir compte des pressions américaines. Surtout, il aurait souhaité que Modi revoie ses positions concernant les nouvelles routes de la soie (BRI).

Enfin, Xi Jinping termina sa tournée sud-asiatique par le Népal (12-13 octobre), première visite présidentielle chinoise dans le pays depuis 23 ans. Enclavé, le petit pays cherche à améliorer sa connectivité avec la Chine, étant dépendant de l’Inde pour deux tiers de ses importations et pour son pétrole. A la clé de cette rencontre, Katmandou obtenait une ligne ferroviaire de 70 km partant de la capitale népalaise jusqu’à Gyiron au Tibet, et un tunnel de 28 km permettant de diviser par deux le temps de trajet jusqu’à la frontière chinoise. Ces projets seront intégrés à l’initiative BRI. En contrepartie, Pékin espérait signer avec le Népal un traité d’extradition. S’il est acté, certains experts craignent que les 20 000 réfugiés tibétains au Népal n’en fassent les frais. Finalement, Xi n’obtint qu’un pacte d’assistance mutuelle en matière de criminalité, le Népal étant déjà engagé dans de longues tractations avec le voisin indien pour revoir leur propre accord d’extradition.

Sur la même thématique, Xi Jinping faisait une allusion menaçante à Hong Kong lors de la visite népalaise : « quiconque se livre au séparatisme dans une quelconque partie de la Chine sera réduit à l’état de poussière et taillé en pièces ». Le jour même, un policier hongkongais était attaqué à la gorge au cutter, et une bombe artisanale télécommandée explosait près d’un commissariat, sans faire de victimes. Cet engrenage violent affaiblit la crédibilité du mouvement à l’approche des élections des conseils de districts le mois prochain. Il donne aussi une excuse tout faite à ceux qui veulent le réprimer. Dans l’autre camp, les attaques sanglantes d’activistes et de manifestants font encore monter la colère… Or, la désescalade sera impossible si elle ne provient pas des deux camps. En une tentative d’apaisement, la cheffe de l’Exécutif Carrie Lam prenait la parole le 16 octobre devant le Parlement hongkongais. Elle fut cependant contrainte de s’interrompre devant les huées de l’opposition. Mme Lam présenta alors, en un message vidéo, 200 initiatives, parmi lesquelles des allocations pour les étudiants et familles à bas revenu, et des conditions de prêts immobiliers simplifiées pour une première acquisition. Mais comment espérer résoudre une profonde crise politique par des mesures économiques ?

C’est alors que les États-Unis s’immiscèrent dans le conflit. Le 15 octobre, la Chambre des Représentants du Congrès américain approuva un projet de « loi sur les droits de l’Homme et la démocratie à Hong Kong » qui conditionne le statut économique spécial accordé par les USA à l’ancienne colonie britannique, à une évaluation annuelle du respect des droits civils dans la RAS. Le texte doit encore être discuté au Sénat. En réaction, Pékin dénonça un « complot politique », accusant Washington de soutenir ouvertement les radicaux hongkongais.

Ce projet de loi pourrait-il compromettre le mini-accord commercial annoncé le 11 octobre entre Chine et États-Unis ? A en croire le vice-Premier ministre Liu He, les négociations vont dans le bons sens. Car même si la Chine s’est engagée à acheter des dizaines de milliards de produits agricoles américains (dont elle a besoin), elle doit d’abord baisser ses propres tarifs douaniers afin de booster ses achats. Or, Pékin ne le fera que si Washington fait de même !


Diplomatie : Entre Pékin et Prague, le torchon brûle

Sous l’impulsion de son nouveau maire de 38 ans, Zdenek Hrib, la capitale tchèque se rebelle. Deux mois après sa prise de fonction en novembre 2018, lors d’une rencontre avec des diplomates étrangers, Hrib refusait de faire sortir le représentant taïwanais de la salle à la demande de l’ambassadeur chinois. En mars, il accueillait le leader du gouvernement en exil tibétain, Lobsang Sangay. Pour l’occasion, le jeune maire renouait avec une tradition instaurée par l’ex-Président Vaclav Havel (premier de l’ère postcommuniste, décédé en 2011) en faisant flotter le drapeau tibétain sur l’Hôtel de Ville de Prague. Il enchaînait par une visite officielle à Taïwan, l’île où il a réalisé son internat de médecine. Interrogé par le Guardian, le jeune maire du Parti Pirate ne s’arrêtait pas là, en critiquant le système chinois de crédit social et affirmant que les investissements taïwanais, notamment technologiques, étaient particulièrement bénéfiques. Enfin, début octobre, il remettait en cause le jumelage de sa ville avec Pékin, car l’accord contenait une clause reconnaissant le principe « d’une seule Chine ». Le jeune maire se justifiait : « cette mention n’a rien à faire dans un accord culturel. Ce principe est une affaire d’ordre politique, de niveau national et qui, de surcroît, concerne deux pays étrangers, et en aucun cas la ville de Prague ». Un argument mal reçu par les interlocuteurs chinois, qui refusèrent de faire disparaître cette clause, et révoquèrent donc le jumelage pour « interférence dans les affaires internes chinoises ». Détail important, lors de sa signature en 2016, cette disposition n’était pas demandée par la Chine, mais par les prédécesseurs de Hrib qui espéraient en échange recevoir des faveurs chinoises (comme deux pandas au zoo de Prague, qui ne sont finalement jamais venus). Pékin menaçait le gouvernement tchèque de représailles si la mairie ne changeait pas rapidement ses positions. S’ensuivait donc une cascade d’annulations de concerts en Chine, dont ceux de la tournée de l’Orchestre philharmonique de Prague…

Pourtant, ces dernières années ont vu un rapprochement sino-tchèque avec l’arrivée du Président Milos Zeman en 2013. De passage dans le pays trois ans plus tard, le Président Xi Jinping promit 3,7 milliards d’euros, notamment dans le tourisme et dans un canal reliant les bassins du Danube, de l’Oder et de l’Elbe. De son côté, Zeman déclarait vouloir « apprendre de l’expérience chinoise dans le contrôle social ». Puis, Ye Jianming, patron du conglomérat privé CEFC, fut pris d’une folie acheteuse dans le pays, rachetant entre autres, des parts dans l’équipe de football FC Slavia Praha, une chaîne de TV, et la firme qui contrôle la compagnie aérienne nationale Czech Airlines… En 2017, le Président tchèque choisissait Ye comme son conseiller personnel, avant que ce dernier ne soit arrêté par Pékin pour corruption l’année suivante.

Cette situation est intéressante sous plusieurs angles. Côté chinois, elle montre que la campagne anticorruption (couplée à celle contre la fuite des capitaux), lancée par Xi Jinping n’a pas été sans conséquences hors frontières. En effet, depuis que Ye Jianming a disparu du paysage, les relations avec le pays le plus à l’Ouest de l’Europe de l’Est, se sont détériorées. Les investissements chinois se sont interrompus, les projets ne se sont jamais matérialisés, le canal promis est à moitié construit. Désabusés, certains Tchèques se disent qu’il n’y a pas tellement à perdre économiquement à soutenir Taïwan ou le Tibet, le volume des exportations de République Tchèque vers la Chine restant bas, tandis que le déficit commercial s’élargit.

Ensuite, il semble que le maire Hrib en ait fait une affaire personnelle, ayant tissé des liens forts avec Taïwan. Mais ce positionnement n’est peut-être pas totalement désintéressé, lui permettant de satisfaire ses ambitions politiques. En effet, en apportant son soutien à la cause tibétaine et à Taïwan, le maire se place en digne héritier du feu Président Havel.  C’est un acte rare de rébellion d’un politicien alors que son propre gouvernement prône le rapprochement avec la Chine. Cela démontre la division qui règne au sein du pays sur l’attitude à adopter face à la superpuissance. Une fracture qui était bien visible en décembre 2018, lorsque l’agence nationale de cybersécurité tchèque avertissait que Huawei pouvait représenter une menace à la souveraineté nationale. Milos Zeman accusait alors ses propres services de faire des « coups fourrés », la présidence ayant confié au groupe de Shenzhen le soin de ses télécommunications depuis 2015. « Mis à part pénétrer les cercles d’influence du Président Zeman, le soft power chinois est en échec dans le pays », déclarait le chercheur Rudolf Furst, de l’Institut des relations internationales à Prague. Et cela se ressent dans les sondages : en Europe de l’Est, la République Tchèque est le pays le plus sino-sceptique. Selon les derniers résultats de l’Institut Pew, ils sont 57% à avoir une opinion défavorable du pays – une tendance qui persiste déjà depuis plus de 12 ans. Et le jeune maire compte bien surfer sur cette vague !


Santé : Un docteur numérique

En quelques décennies, la Chine a réalisé d’énormes progrès pour moderniser son système de santé. L’espérance de vie de ses citoyens s’est sensiblement améliorée, la mortalité infantile fortement réduite… Toutefois, avec une population vieillissante, les dépenses nationales de santé augmentent 5 à 10% plus vite que le PIB depuis 2008. Et les disparités régionales sont fortes. Les hôpitaux sont submergés dans les villes, tandis que les campagnes manquent cruellement de praticiens. Résoudre ces problèmes est une des priorités du plan décennal « Healthy China 2030 ».

Pour y parvenir, l’Etat a mis en place depuis 2008 une cohabitation structurée entre un secteur public dont le but est d’assurer l’accès aux soins basiques pour tous, et un secteur privé devant accélérer la mise en place d’un système de santé au niveau des standards internationaux. Cela nécessite une coopération étroite entre des acteurs aussi différents que les autorités locales et centrales, les assureurs privés, et les trois géants Baidu, Alibaba et Tencent (BAT). Ces trois géants du net, en recherche de nouveaux relais de croissance alors que l’économie marque le pas, espèrent changer la donne sur le marché chinois de la santé.

C’est le cas de Tencent Trusted Doctor (TTD) (企鹅杏仁), créé en 2018, suite au rachat par Tencent de Trusted Doctor, une startup de la e-santé fondée à Shanghai par Martin Shen. Cet Australien d’origine chinoise, ancien lieutenant-chirurgien de la Royal Australian Navy et passé par l’industrie IT (Isoft, Siemens Healthcare), décide de revenir en Chine pour créer sa propre entreprise. Martin Shen, devenu président de la nouvelle entité, est enthousiaste : « Désormais épaulé par Tencent, et grâce à une levée de fonds de 250 millions de $ réalisée en avril 2019, nous ambitionnons de proposer un nouveau système de santé universel. Cette transformation est encore inédite à l’échelle mondiale ».

Initialement, le concept consistait en une plateforme de mise en relation entre médecins et patients. Début 2019, 440 000 médecins chinois utilisaient TTD sur un total de 3 millions. Aujourd’hui, l’ambition affichée est de mettre en place, à côté du système de santé historique, une offre globale et intégrée.

Globale, car Tencent entend couvrir tous les aspects du parcours du patient : de la prise de rendez-vous, au suivi post-chirurgical. Pour cela, le géant de Shenzhen sort de son expertise numérique pour investir dans l’économie réelle. Il affiche ses ambitions : disposer, d’ici deux ou trois ans, d’un parc de 500 cliniques contre 40 aujourd’hui et de 45 centres de chirurgie ambulatoire contre 7 actuellement. TTD déploie également sur le territoire ses « Health kiosks », sorte de « distributeurs automatiques », proposant des examens aussi variés que des tests de grossesse, des tests génétiques, des analyses d’urine, mais aussi la délivrance de produits de première nécessité. Plus de 1 000 seraient déjà en activité dans les gares, les aéroports, les galeries commerciales et les immeubles de bureaux ou d’habitation.    

Son offre est aussi intégrée, puisque la promesse de Tencent est bien de fluidifier et d’optimiser le parcours, devenu numérique, des 10 millions de patients qui utilisent déjà les services de TTD. Il sera bientôt possible de faire un test ou une radio, se faire livrer un médicament, préparer une intervention chirurgicale, gérer le suivi médical ou souscrire à une assurance adaptée. Ce système présente l’avantage de pouvoir procéder à des services à distance, jusque dans les campagnes les plus reculées, à condition d’avoir du réseau ! Pour les médecins, cela représente un revenu complémentaire à leur salaire.

Si Tencent semble avoir pris une longueur d’avance, Alibaba n’est pas en reste : 15 000 médecins offrent déjà des consultations en ligne via Alibaba Health qui permet aussi de se faire livrer ses médicaments. Baidu de son côté a intégré un « chat médical » à sa plateforme Baidu Doctor. Cet assistant virtuel, nourrit à l’intelligence artificielle, permet, en questionnant le patient sur ses symptômes, de poser un diagnostic. Il ne faut pas oublier l’assureur Ping An qui, à travers sa plateforme Good Doctor, rassemble près de 300 millions d’utilisateurs enregistrés.

Le secteur de la e-santé est encore balbutiant, et doit faire ses preuves. Cette année, la valeur en bourse de Ping An Good Doctor a baissé de 15% et celle du secteur santé d’Alibaba a diminué de 8% en 12 mois. Il soulève de nombreuses questions : ces entreprises high-tech chercheront-elles à collaborer avec le système de soin traditionnel, ou essayeront-ils de le remodeler à leur image ? Comment sont sélectionnés et contrôlés les médecins exerçant virtuellement ? Enfin, même si ce genre d’innovation est aujourd’hui encouragé par des programmes nationaux, l’Etat laissera-t-il ces mastodontes privés, déjà détenteurs de montagnes de données utilisateurs, en récolter davantage, parmi les plus personnelles puisque touchant à la santé de chacun ? Dans ces conditions, les échanges entre médecins et patients pourront-ils encore rester confidentiels ? …

Finalement, la santé, dopée au numérique, est entrée dans une transition irrésistible, dont les seules limites, seront la capacité des sociétés à accepter les changements profonds. La Chine entend, aussi dans ce domaine, être aux avants postes, en essayant, comme à son habitude, de tirer le meilleur des améliorations attendues pour faire face aux enjeux liés aux évolutions de sa population et de son économie.

Par Jean-Dominique Séval


Environnement : Une bouffée d’air pas si anodine

En septembre, le ressenti des habitants de la capitale chinoise était confirmé par les chiffres : la qualité de l’air de Pékin s’est sensiblement améliorée. Selon les données du groupe suisse IQAir AirVisual, le niveau de concentration de microparticules (PM 2,5)  dans l’air a chuté de 20% depuis le début de l’année par rapport à 2018. Ainsi, Pékin devrait sortir du classement des 200 villes les plus polluées au monde dès la fin de l’année, si elle continue sur cette voie !

Toutefois, ce succès n’est pas généralisé : si l’on exclut la région Jing-Jin-Ji (Pékin, Tianjin et la province du Hebei), objet de toutes les attentions, les émissions nationales de microparticules ont en fait augmenté de 1,6% entre 2012 et 2017. En cause, la relocalisation des industries dans des régions moins développées ayant aggravé le phénomène, utilisant des méthodes de production souvent plus polluantes que les régions plus prospères.

Le gouvernement lui-même en a fait les frais lors des célébrations du 70ème anniversaire de la RPC le 1er octobre : le ciel était gris, alors que tout avait été tenté aux alentours pour s’assurer qu’il soit bleu… Une vague de pollution venue du Jiangsu serait venue jouer les trouble-fêtes. Des chercheurs de l’université de Tsinghua prédisent que le changement climatique va empirer la qualité de l’air en Chine avec ses périodes de fortes chaleurs, sans une brise de vent.

Une récente évaluation estimait à 38 milliards de $ (soit 0,7% du PIB) le coût de la pollution de l’air en Chine, réduisant le rendement des cultures de riz, blé, maïs et soja de 22 millions de tonnes, et provoquant 1,1 million de morts prématurées chaque année dans le pays. Selon une étude publiée le 14 octobre par des chercheurs de l’Université de Pékin, l’exposition à de fortes concentrations en polluants atmosphériques serait associée à un risque accru de fausse couche dite « silencieuse » (passée inaperçue pour la femme enceinte). Sur 255 000 patientes suivies, presque 7% étaient victimes d’une fausse couche de ce type au premier trimestre de grossesse.

Enfin, Zheng Siqi, chercheur au MIT, souligne le coût émotionnel de la pollution, en mettant en corrélation certains mots-clés publiés sur les réseaux sociaux avec la qualité de l’air. Contraints de passer moins de temps dehors ou de porter des masques, la pollution impacterait l’humeur des habitants, leur envie de sociabiliser. Les jours gris, les gens seraient contrariés, malheureux, et donc plus impulsifs et sujets à des comportements à risques… A court terme, cela pourrait créer de l’anxiété, voire mener à une dépression. Dernières trouvailles : les femmes seraient plus affectées que les hommes, tout comme les classes sociales aisées, probablement plus sensibilisés aux risques de la pollution sur leur santé.


Petit Peuple : Xilinhot – La saga de Xi Guijin, Malandrin (1ère partie)

A Hohhot (Mongolie intérieure), Xi Guijun, 44 ans, est un génie du mal, le vice chevillé au corps. Il a pourtant des qualités multiples, qui lui auraient permis de réussir tout aussi bien dans le droit chemin : avenant, courageux, endurant, il est aussi doté d’une imagination débordante. Mais non, ce qui l’intéresse, c’est la transgression. Voler lui procure, depuis l’enfance, un frisson d’excitation et passer son prochain à tabac, un plaisir presque sensuel. A cela s’ajoute un souci du détail dans la préparation de ses coups qui lui a fait gagner une réputation de grand professionnel dans le milieu du crime. En 2002, à seulement 27 ans, il était déjà à la tête de la triade des « loups blancs », qu’il avait fondée en 1995, entre 70 « frères » liés par un serment. Ensemble, ils exécutaient les plans minutieux de Xi : extorsions de fonds, hold-up, réseau de prostitution, trafic de la drogue du Triangle d’or… La prudence qu’il appliquait à l’exécution de ses méfaits lui valut longtemps une quasi-impunité. Même dans les rares occasions où il se faisait prendre, la police et les juges avaient le plus grand mal à cerner exactement sa responsabilité au sein de la bande, avec pour résultat immuable qu’il s’en tirait, au bénéfice du doute, avec une peine bénigne.

Jusqu’à ce jour de 2002, où il fut pris la main dans le sac, au beau milieu du casse de la villa du secrétaire provincial du Parti. Enfin, la police pouvait lui imputer un délit lourd et à l’issue du procès, il était condamné à 11 ans de prison. Au prétoire, cependant, cela jasait ferme : « il s’en tirait à bon compte », car pour les mêmes chefs d’accusation n’importe qui d’autre aurait écopé de 20 à 30 ans …

La main douce du juge n’était pas due au hasard. Au fil des ans, Guijun avait su mettre de côté la meilleure part de ses rapines. Avec tel magot, il avait des moyens pour s’organiser et dès sa garde à vue, il avait commencé à arroser de « hongbao » (enveloppe remplie d’argent) la moitié du tribunal, du juge au greffier. A la prison de Hohhot, un établissement de haute sécurité où il commençait à purger sa peine, il comprit vite qu’il n’y avait là aucune chance d’adoucir ses conditions de détention. Mais au moyen d’une ou deux Mercedes offertes aux bonnes personnes, il réussit en un temps record à se faire transférer en un lieu plus souriant : la prison de Xinlinhot, petite bourgade à 620km de Hohhot. Là, le jeune bandit fut accueilli comme un prince, sa réputation d’opulence et de générosité l’ayant précédé, et sa bourse commençant immédiatement à verser à flots les cadeaux. Dès la première nuit, il eut sa cellule privative remeublée et retapissée avec goût.  Ses repas lui furent livrés chaud du meilleur hôtel de la ville, avec nappe sur la table, verre en cristal et baguettes d’argent. Bien évidemment, il fut exempté du labour obligatoire, et dispensé des sessions d’études marxistes destinées à la réforme des âmes. Lui seul, après le couvre-feu, pouvait maintenir sa lampe allumée ou éteinte, suivant sa convenance.

Autre privilège, à peine une semaine après son arrivée, Xi reçut le droit de reconstituer sa triade en recrutant les membres parmi les prisonniers. Et sans perdre une minute, il lança ses « loups blancs » dans une mission exceptionnelle. Chaque nuit après le dîner, tandis que les matons se retiraient dans leurs quartiers, les hommes à sa solde sortaient à tour de rôle par équipe de trois, par les portes des cellules laissées « inopinément » ouvertes. Dans la remise des instruments aratoires, ils se servaient en pelles, pioches et brouettes, et dans un recoin obscur du pénitencier, piochaient le sol pour forer un tunnel. Xi dirigeait les travaux en personne, et toutes les deux heures, ordonnait le changement d’équipe. A trois heures du matin, on arrêtait le labeur pour retourner se coucher.

Les surveillants leur laissaient une paix royale, regardant ostensiblement dans l’autre direction -une enveloppe hebdomadaire les encourageant en ce sens. Les détenus creusaient avec enthousiasme, et le chantier avançait vite : les 500m entre le sas dans la prison et la sortie dans la forêt voisine, furent évidés en 18 mois. En février 2004, Xi, sur son trente-et-un, costume et chaussures blancs, borsalino sur le chef, inaugurait de nuit le tunnel et rejoignait en 10 minutes à travers champs le taxi commandé par smartphone.

Par la suite, Xi allait ressortir chaque semaine, tantôt pour ses plaisirs, tantôt pour le travail – car ses finances commençaient à s’amoindrir sérieusement. Le directeur de la prison, lui, se faisait des cheveux blancs en pensant aux conséquences si l’affaire venait à s’ébruiter : car le tunnel de son prisonnier l’enfonçait lui-même toujours plus vers la catastrophe, 陷入泥坑  (xiànrù níkēng). C’est pourquoi il dû protéger activement les incartades de Xi, toujours plus audacieux : comme lorsqu’en mars 2005, en fuite suite à un casse raté, sa voiture volée en percuta une autre, tuant sur le coup le chauffeur. Ou quand, deux mois plus tard, l’attaque d’un casino se solda par un blessé grave. Chaque fois cependant, il parvint à regagner sa prison par le tunnel, tandis que le directeur le couvrait du plus solide des alibis : comment aurait-il pu se trouver en même temps sur un lieu de crime, et dans sa cellule ?

Et c’est ainsi que nonobstant ces forfaits et son retour au grand banditisme, Xi Guijun se retrouva bientôt libéré par anticipation – une décision judiciaire rarissime en Chine, justifiée par son « bon comportement ». C’était en février 2007, il avait 32 ans. Il n’avait purgé que cinq ans et demi, à peine plus de la moitié de la sentence.

Mais croyez-vous que ce bandit dans la force de l’âge va se contenter de vivre de ses rentes, rentrant ainsi dans le droit chemin sur le tard ? Vous le saurez au prochain numéro !


Rendez-vous : Semaines du 21 octobre au 24 novembre
Semaines du 21 octobre au 24 novembre

 18 – 21 octobre, Foshan : CERAMbath, Salon de la céramique et des sanitaires

19 – 22 octobre, Shanghai : CMEF-China Medical Equipment Fair/ICMD, Salon des équipements médicaux

20 – 23 octobre, Shenzhen : International Gifts And Home Products Fair, Salon international du cadeau et des produits pour la maison

20 – 26 octobre, Tianjin : CFDF – China Food & Drink Fair, Salon chinois bi-annuel renommé dans l’industrie du vin et plus largement dans l’industrie F&B

22 – 24 octobre, Pékin : China WindPower, 12ème édition de ce salon et conférences sur l’énergie éolienne

22 – 25 octobre, Pékin : IEEV China – International New Energy and Intelligent Connected Vehicles Exhibition, Salon et conférence sur les véhicules électriques et sans chauffeur

23 – 25 octobre, Shanghai : Vinexpo, Salon international du vin

23 – 26 octobre, Shanghai : CEMAT ASIA, Salon des matériels de manutention, des techniques d’automatisation, de transport et de logistique

23 – 26 octobre, Shanghai : COMVAC ASIA, Salon mondial de l’air comprimé et du vide

23 – 26 octobre, Shanghai : PTC ASIA, Salon de la transmission et du contrôle de puissance, l’hydraulique et la pneumatique, les techniques de l’air compressé, les moteurs à combustion interne et les turbines à gaz

24 – 25 octobre, Pékin : AT@CHINA, Forum dédié à l’aviation et au tourisme chinois à l’étranger

26 – 27 octobre, Shanghai : CHINA EDUCATION EXPO, Salon international de l’éducation et des formations supérieures

26 – 28 octobre, Qingdao : CIAME, Salon asiatique des machines agricoles

29 octobre, Shanghai : ACCESS MBA, Forum d’information sur les opportunités de MBA dans le monde

30 octobre – 1 novembre, Shanghai : CEF – China Electronic Fair, Salon chinois de l’électronique

30 octobre – 1 novembre, Pékin : ILOPE, Salon international de l’industrie de l’optoélectronique et de la photonique

30 octobre – 1 novembre, Shanghai : ILTM, Salon asiatique du tourisme de luxe

30 octobre – 1 novembre, Qingdao: China Fisheries & Seafood Expo,  Salon chinois des fruits de mer

30 octobre, Pékin : World’s Leading Wines – Pékin, Rencontres d’affaires pour les plus renommés des importateurs et distributeurs de vins de qualité

31 octobre, Pékin : ACCESS MBA, Forum d’information sur les opportunités de MBA dans le monde

1 novembre, Shanghai : World’s Leading Wines – Shanghai, Rencontres d’affaires pour les plus renommés des importateurs et distributeurs de vins de qualité

2 – 4 novembre, Xiamen : WCO – World Ocean Congress, Salon mondial et congrès des ressources de l’océan

4 – 6 novembre, Shanghai puis Pékin : Visite officielle du Président de la République Française, Monsieur Emmanuel Macron

5 – 11 novembre, Shanghai : CIIE – China International Import Expo, Salon international des importations

6 – 8 novembre, Shanghai : EP Shanghai & Electrical Shanghai, Salon international des équipements, de la production et de la distribution électriques

7 – 10 novembre, Shanghai :  Shanghai Contemporary Art Fair, Foire internationale d’art contemporain de Shanghai

7 – 9 novembre, Wuxi : CREC – Chinese Renewable Energy Conference & Exhibition, Conférence et salon des énergies renouvelables

9 – 11 novembre, Canton : Interwine China , Salon chinois international du vin, de la bière, et des procédés, technologies et équipements pour les boissons

12 – 14 novembre, Shanghai : FHC – Food and Hotel China, Salon international de la restauration et de l’hôtellerie

12 – 14 novembre, Shanghai  : Metro China Expo, Salon international et conférence sur la transport par rail urbain et régional

12 – 14 novembre, Shanghai  : PROWINE, Salon international du vin et des spiritueux en Chine

13 – 15 novembre, Shanghai : OI China – Oceanology International China Exhibition, forum durant lequel l’industrie des sciences de la mer, les universités et les gouvernements partagent leurs connaissances en océanologie

13 – 17 novembre, Shenzhen : China Hi-Tech Fair, Salon international des nouvelles technologies

15 – 17 novembre, Shanghai : AirExpo China, Salon international des technologies et des services liés à l’aviation

15 – 17 novembre, Shanghai : Paperworld, Salon international de la papeterie, de matériel de bureau et de loisir créatif

20 – 23 novembre, Shanghai : CIPS – China International Pet Show, Salon international des animaux de compagnie

21 – 23 novembre, Shanghai : BIC, Salon asiatique international de l’ingénierie du bâtiment

21 – 23 novembre, Shenzhen : C-Touch & Display,  Salon international des écrans tactiles et de la chaîne de fabrication des téléphones mobiles de dernière génération

22 novembre – 1er décembre, Canton : Auto Guangzhou, Salon international de l’automobile