Le Vent de la Chine Numéro 11 (2017)

du 20 au 26 mars 2017

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Alors que la pandémie contribue à creuser un fossé entre la Chine et le reste du monde, l’éclairage qu’offre Le Vent de le Chine n’a jamais été aussi nécessaire qu’à présent.

Média indépendant publié depuis 1996Le Vent de le Chine va plus loin qu’une simple revue de presse, en proposant chaque semaine une analyse pertinente et concise de l’actualité chinoise.

Nous vous remercions pour votre intérêt à nous lire.

L’équipe du Vent de la Chine


Editorial : Xi et Trump – après la hache de guerre, les jeux d’échecs

Le conflit qui couvait entre USA et Chine n’aura pas lieu. D. Trump et Xi Jinping doivent se rencontrer les 7-8 avril à Mar-a-Lago, chez Trump en Floride – un dialogue qui s’engage après des mois d’hostilités. Trump avait osé prendre langue avec Tsai Ing-wen Présidente de Taiwan : il était le premier Président-élu à le faire, depuis la rupture formelle des relations avec l’île en 1979. Mais après son intronisation, le ton a vite changé. Trump remisa sa prétention de lâcher le principe d’« une seule Chine », et de taxer de 45% les importations chinoises. De son côté, Pékin a évité les mots qui fâchent et a fait reconnaître au groupe Trump son droit de marque en Chine, victime d’innombrables usurpations.

La hâte à faire des concessions de part et d’autre, laisse deviner l’urgence : il y a trop à perdre. A Mar-a-Lago, le point crucial sera la Corée du Nord – dossier qui nécessitera une forte concertation, pour calmer ensemble l’ombrageuse quasi-puissance nucléaire. Mais Pékin le sait, Washington restera ferme sur son exigence de règles plus équitables d’accès au marché chinois. A Pékin les 17-18 mars, après des étapes nippones et coréennes, R. Tillerson le tout nouveau Secrétaire d’Etat, faisait son baptême du feu avec son homologue Wang Yi et le Conseiller d’Etat Yang Jiechi. Un autre sujet d’inquiétude chinoise sera une apparente indifférence du nouvel exécutif américain, sur le principe-même de la diplomatie : Trump veut couper 29% du budget de fonctionnement de sa chancellerie, et interrompre bon nombre des 100 mécanismes bilatéraux mis en place par Obama, à commencer par les Sommets annuels tenus depuis 2006 sous l’égide du Dialogue Stratégique et économique…

Trump venait de faire à Xi un « cadeau » en tuant l’accord de Partenariat Trans-Pacifique (TPP), qui devait fédérer les économies de 12 pays riverains et 40% du commerce mondial, tout en tenant la Chine à l’écart. Trump se désengageait du TPP – fruit de 9 ans d’efforts sous Obama. Mais les 11 pays restants s’accrochent au TPP. Les 14-15 mars à Viña del Mar (Chili), ils entamaient les palabres pour un accord sans les USA, mais avec la Corée du Sud et la Chine (représentée par un haut diplomate, Yin Hengmin). Ainsi une immense mutation géostratégique se prépare, avec ce recul des USA dans leurs frontières. Méditant de rejoindre le TPP, la Chine va à Viña del Mar, d’abord plaider son propre projet transpacifique de Partenariat Régional Inclusif Economique (RCEP), à 16 pays autour de l’ASEAN. Mais ces deux chantiers ne sont pas de même nature, ni même substituables. Le RCEP se limite à un accord de coupes douanières, et le TPP vise en outre des règles de bonne conduite. Il exige des membres l’ouverture de leurs marchés publics, un règlement des litiges privés-publics, des normes éco-sociales et des aides publiques. Aussi, ses fruits se trouveront moins dans les baisses de taxe, que dans une meilleure compétitivité de leurs usines. Or la Chine peut viser presque tous ces objectifs, dans sa propre réforme des entreprises d’Etat. Entrer au TPP lui permettrait d’asseoir son influence sur ces pays, qui sont prêts à remplacer les USA comme modèle. Ce TPP pourrait également faire tremplin aux Routes de la Soie chinoises (OBOR).

Enfin, la Chine n’a pas le choix, car les pays signataires vont s’astreindre à cette gouvernance. Or, à rester sur la touche, elle serait vite dépassée. D’ailleurs, même les Etats-Unis risquent de retourner dans le TPP – un fort lobby américain se met en place en ce sens… Autour de l’Océan Pacifique, c’est donc le sort de l’économie mondiale qui se joue. A long terme, ces négociations sont condamnées à réussir. La vraie question est de savoir, sous quelles conditions : moindres comme au RCEP, ou plus sévères suivant le TPP actuel. Mais avec son régime fort, la Chine, si elle est convaincue de la qualité du remède, est capable de s’imposer cette amère potion.


Politique : Petites chroniques des « Deux Assemblées »

Sous un ciel d’azur qui se maintint précisément durant les 10 jours des « Deux Assemblées », la 12ème session du Parlement (ANP) clôtura ses travaux le 15 mars, deux jours après celle de l’Assemblée consultative (CCPPC).

Xi Jinping, « superstar »

Le 15 mars, jour de clôture de l’ANP, le rapport sur la performance du pouvoir du Président Xi Jinping (incessamment déclaré ‘Camarade Xi, cœur du Parti’) ne reçut que 14 voix « contre », sur 2838 votants—seulement un septième du score dont avait été gratifié Hu Jintao en 2013.

Surpuissant, Xi prépare le XIXème Congrès et laisse planer le doute sur le choix de son successeur, à l’issue de son second quinquennat en 2022. Comme pour éviter toute imputation de favoritisme, il s’est gardé de se montrer dans les salles du Guizhou, du Guangdong et de Chongqing, fiefs respectifs des hommes en lice.

D’ailleurs, selon un Général d’infanterie de l’APL, Xi se prépare à parader le 1er août, pour le 90ème anniversaire de l’Armée, en tête d’un grand défilé qui mettra en valeur le n°1 du pays, du Parti et de l’Armée, à quelques semaines du Congrès.

Li Keqiang jusqu’en 2022 ?

Quant à Li Keqiang, Premier ministre dont chacun se demande s’il sera reconduit pour la période 2017-2022, ou relayé par Wang Qishan, (Président de la commission centrale de discipline, très proche de Xi), il confirma un objectif de PIB pour 2017 le plus bas des trois dernières décennies—6,5% « voire plus si cela se peut » et conclut d’une manière sibylline, par cet adieu à l’auditoire : « à la prochaine, si cela se présente » !

Voix critiques

De rares voix critiques s’élevèrent contre le contrôle excessif de l’opinion.

À la CCPPC, Cui Yongyuan, ex-animateur vedette de la TV et militant anti-OGM, dénonça (10 mars) la cybercensure, lui reprochant de n’être utile ni au Parti, ni au gouvernement.

Yu Minhong, PDG de New Oriental (groupe qui envoie tous les ans des milliers d’étudiants en Amérique) qualifia de « stérile » la campagne contre les « fausses valeurs occidentales » dans les écoles.

Luo Fuhe, vice-Président de l’ANP et n°2 de l’Association pour la promotion de la démocratie (un des 8 mini-partis entretenus par le système) dénonça la Grande Muraille de feu de l’internet, comme « excessive et nuisible » au développement économique, à la recherche scientifique.

Liu Binjie, du bureau de l’ANP, ancien président de la GAPP (Administration Générale de la Presse et du Livre) plaida pour une nouvelle loi qui allégerait la censure sans l’abolir, et concilierait mieux intérêts sécuritaires de l’Etat et protection des libertés de parole et d’échange garanties par la Constitution.

Censure et portes fermées

Que de belles paroles… Le problème fut qu’elles restèrent invariablement laissées à l’insu du public, non-publiées.

Le système s’efforça-même de limiter au maximum les échanges. Au Grand Palais du Peuple, le hall d’entrée rebaptisé « Hall des ministres », disposait d’un espace délimité par un cordon rouge, depuis lequel les journalistes pouvaient tenter d’interroger les dignitaires—initiative saluée par la propagande sous le slogan : « de ‘fuir la presse’ à ‘rencontrer la presse’ ».

De plus, divers panels de discussion ne furent ouverts qu’aux reporters chinois : « sciences sociales », « éducation », et les commissions « minorités ethniques » et « religions ». Plus exposés aux risques de sanctions et directement chapitrés, les journalistes chinois risquaient moins de poser des questions gênantes, où d’interroger des personnalités sensibles.

« La dernière chose dont nous aurions besoin, commenta in petto l’attaché d’un candidat au poste suprême, serait l’apparition de nos patrons dans la presse étrangère ». A 8 mois du XIXème Congrès, au cœur d’un processus de sélection de l’équipe politique du prochain quinquennat (2017-2022), pour ces étoiles montantes, la meilleure chance d’assurer leur promotion était de rester dans l’ombre.

NB : On voit ici planer le fantôme de Bo Xilai, politicien ambitieux qui avait l’habitude d’échanger avec la presse étrangère, croyant ainsi donner à ses pairs la preuve de sa capacité à défendre la Chine dans le monde. Or, ce comportement hors-norme avait fini par agacer. Considéré comme déviant, il avait été écarté, précipitant sa chute.

Justice et Code civil

Le préambule du (futur) Code civil, voté le 12 mars, créa le délit de « diffamation des héros et martyrs » pour quiconque se risquant à s’attaquer à leur « nom, portrait, réputation ou honneur », ou mettant en doute tel ou tel haut fait de leur légende.

Dans leur rapport annuel aux deux Assemblées, juge suprême et procureur suprême placent en tête de leur bilan le fait d’avoir fait condamner deux activistes des droits de l’Homme, Zhou Shifeng et Hu Shigen, à 7 ans et 7 ans et demi de prison pour « tentative de subversion ». L’un et l’autre faisaient partie des 300 avocats du cabinet Fengrui raflés le 9 juillet 2015.

Ces Bureaux du juge et du procureur suprêmes se trouvaient être, année après année, les mal-aimés des Assemblées, sanctionnés lors des votes du plus grand nombre de voix « contre ». Mais en 2017, année des promotions du prochain quinquennat, les magistrats ne pouvaient se permettre un tel désaveu.

En montant en épingle leur fermeté contre la dissidence, juge et procureur avançaient donc un argument que les édiles ne pouvaient pas ne pas soutenir. Au moment du scrutin électronique, ils virent leurs voix négatives fondre à 180 voix, c’est-à-dire au tiers et au quadruple des scores récoltés en 2013 sous Hu Jintao.

Armée

Tout va bien pour l’APL, qui a obtenu 7% de hausse de budget, franchissant la barre des 1000 milliards de yuans. Xi Jinping désire qu’elle fasse plus d’efforts d’équipement et de recherche en technologie, en collaboration avec l’univers civil.

Une bonne nouvelle, donnée par Chen Xiangbao président d’un institut des matériaux aéronautiques, est la mise au point « proche » d’un réacteur d’aviation autochtone—jusqu’à présent, la Chine dépend de la Russie pour la propulsion militaire, de l’Occident pour celle civile. Ce sera la première percée pour l’AECC, méga-groupe fusionné en septembre 2016. Autre développement encourageant pour « notre nouvelle grande muraille » la marine de guerre recrute et forme à tour de bras, pour quintupler ses effectifs à 100.000 combattants embarqués, en 6 brigades, en plus des 235 000 matelots et membres du personnel à terre. Li Xiaojiang, ex-commissaire politique, voit parmi les missions futures, un déploiement de ses bases entre Djibouti (jusqu’à 10.000 hommes) et Gwadar (Pakistan), le maintien de la paix au large de la péninsule coréenne, et bien sûr, le rêve de toujours, la reprise de Taiwan.

Taiwan—le torchon brûle 

« Toute tentative de séparer Taiwan de la patrie restera interdite ». Voici l’avis proféré le 5 mars par Li Ke-qiang, qui dénotait d’une impatience quant à la stagnation depuis 5 ans, de la réunification de l’île à la mère-patrie. Depuis 2016 surtout, après son arrivée aux affaires, la Présidente indépendantiste Tsai Ing-wen n’a pas répété le mantra du « consensus de 1992 », qui aurait reconnu l’existence « d’une seule Chine ». La salve de Li Keqiang en a inspiré d’autres, telle celle de Li Yihu le 11 mars, professeur à Beida qui tonnait contre les « manœuvres dilatoires» taiwanaises et réclamait une date limite de réunification (2021, pour le centenaire du Parti), sous peine d’intervention armée. Une telle option est pourtant impossible pour l’heure, vu la protection contractuellement promise à Taïwan par les Etats-Unis en fait de défense. Miao Wei, ministre de l’Industrie, remarqua que le meilleur moyen de réunifier serait l’investissement et le commerce. Mais sous cet angle aussi, les choses ne vont pas simplement : Zhu Shuping, patron des douanes admet que pour des raisons politiques, 43% des exportations taïwanaises alimentaires ou cosmétiques ont été retournées ou détruites en janvier.

Europe

Si Marine Le Pen remportait en France les présidentielles, qu’est-ce que cela coûterait à la Chine ? Shi Mingde, ambassadeur à Berlin, évoque un risque pesant l’Euro, que la présidente du Front National veut quitter. « Le risque sur nos avoirs en eurobonds a augmenté », ajouta Shi, précisant que « quelque soit le vainqueur, nous avons préparé plusieurs scénarios, et appliquerons celui correspondant au résultat des urnes ». En attendant, Pékin ne manque pas une occasion de soutenir partout en Europe les défenseurs d’un ordre multipolaire, contre le populisme. « Depuis 1957, note Shi, les Européens ont su puiser dans toutes leurs crises, des énergies d’intégration supplémentaires. Mais savoir s’ils y parviendront cette fois encore, après le Brexit, est dur à prédire ».

Voiture électrique

An Jin, patron du groupe JAC (Anhui), révèle que deux agences se disputent sur le futur régime de quotas de production aux constructeurs automobiles. La NDRC, chef d’orchestre de l’économie, veut dès 2018 les forcer à produire 8% de véhicules électriques ou hybrides (12% en 2020), et de devoir racheter en bourse des droits pour la part non atteinte du quota. Mais le MIIT, ministère des Industries de l’Information souhaite un régime plus souple, estimant le secteur encore incapable de suivre un tel rythme. Mais la NDRC insiste : les 8% dès 2018 seraient sine qua non pour conserver le rythme de « décarbonisation » du parc auto chinois, et le déphasage progressif des primes.

Education

En quête de louanges, le ministre de l’Education Chen Baosheng s’autocritiqua face aux élus, sur la médiocrité des cours politiques et l’indifférence des étudiants. Les modules étaient  « dépassés », et « l’emballage, vieux jeu ». Ce qu’il fallait transmettre aux jeunes, était le corpus des « valeurs fondamentales du socialisme à la chinoise », la « culture traditionnelle » et la « culture socialiste avancée ».

Ces propos vont de pair avec l’annonce récente d’une inspection politique en cours, dans les universités de pointe du pays. À rapprocher aussi des restrictions juste annoncées sur les livres étrangers pour enfants (tels Winnie l’ourson ou Babar), traduits en chinois. Vu l’engouement des parents pour de belles histoires, la Chine publie 40.000 titres par an, dont bon nombre sont conçus hors frontières. C’est le segment de l’édition chinoise le plus rémunérateur. Mais la Chine redoute toujours l’influence de l’Occident.

Les thèmes « oubliés »

Parmi ceux-ci figurent la super-agence anticorruption aux pouvoirs étendus, devant entrer en fonction en 2018 et qui serait prête ; le système de crédit social (de notation) pour toute personne physique et morale, et conditionnant l’accès à différents types de métier ou d’avantages sociaux, prévu pour 2020 ; la disparition énigmatique à Hong Kong d’un milliardaire chinois (trop) proche des couches supérieures de la nomenklatura, et la normalisation rapide des liens avec le Vatican. Autant de thèmes appelés à modifier l’image et le paysage des droits en Chine, mais sur lesquels le pouvoir ne peut envisager à cette heure, de consulter ses édiles.

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En fin de compte, les deux Assemblées ont exprimé à la fois un désir d’ouverture des autorités et des élus, mais en pratique, ce qui se produisit fut un raidissement de la discipline, une limitation du dialogue public. Sans doute inévitable en phase de renouvellement du pouvoir, cette atmosphère exprimait aussi, en filigrane, les luttes de pouvoir derrière le rideau.


Monde de l'entreprise : Émission « 315 » à la CCTV—Nike ET MUJI, épinglés
Émission « 315 » à la CCTV—Nike ET MUJI, épinglés

Chaque 15 mars pour la Journée mondiale du consommateur, la CCTV, en son  émission « 315 », épingle des firmes pour infractions diverses. Programme très populaire, d’autant que les entreprises fautives sont la plupart étrangères. 

Nike (USA) est attrapé en flagrant délit de vente de 300 paires de baskets « Hyperdunk » à 1499¥, en 2016, qui prétendaient indûment disposer de coussins Zoom Air. Nike s’est excusé le soir-même, a retiré ce modèle de son site web, et remboursé les acheteurs. Sans crainte du paradoxe, le groupe de l’Oregon a pourtant aussi contesté avoir trompé ses clients. C’est que Nike a gros à perdre : ayant augmenté ses ventes chinoises de 17% au 4ème trimestre de 2016, il voit en ce pays sa meilleure chance pour atteindre 50 milliards de $ de ventes à travers le monde en 2020  – à condition de sauvegarder sa bonne image !

Muji (du groupe nippon Ryohin Keikaku, célèbre pour ses produits design) se vit reprocher de vendre des boissons et des snacks fabriqués non loin de Fukushima, d’avoir recouvert l’étiquette d’origine par un sticker flou. CCTV le précisait, 13.000 détaillants dont Muji et Calbee revendaient des produits de la même région, interdits en Chine, mais importés quand même, débarqués en zones franches puis revendus sur internet. Quoique ces snacks de Muji et Calbee, ne soient pas signalés comme radioactifs, les révélations ont coûté cher aux groupes : dans les heures suivantes, 265 millions de $ furent perdus en valeur boursière—les porteurs ayant revendu leurs parts.

Comme dans les précédentes émissions, les experts ont réitéré leur critique aux firmes mises en cause : une part de la responsabilité revient à leurs services marketing, pour avoir sous-estimé la capacité des média et des associations de consommateurs, à détecter leurs négligences face à la loi.

Pour « 315 », cibler des entreprises étrangères peut paraître inéquitable : leurs produits et leur réputation sont souvent meilleurs que ceux des firmes locales. Mais leur sélection ne relève pas forcément d’un esprit anti-étranger. Elle peut aussi refléter la position forte de ces multinationales en Chine, ainsi que leur vulnérabilité face à l’opinion. Une fois mises sur la sellette, ces entreprises estimeront de bonne politique de faire preuve d’humilité en pliant l’échine. Le cas le plus marquant fut celui d’Apple en 2013, où Tim Cook en personne dut faire des excuses publiques. En comparaison, « le 315 de cette année fut bien fade – pourquoi continuer à diffuser cette émission ? », commentait, lassé, un internaute.


Santé : Le casse-tête nataliste

« Non la Chine ne manque pas de bras », affirmait aux élus Wang Pei’an, vice-ministre du Planning familial. En 2016, la population active (15-64 ans) s’élevait à 1,02 milliard. Elle baissera à partir de 2021 pour atteindre 952 millions en 2030 et 800 millions en 2050. Mais même à cette date, la cohorte chinoise dépassera toujours celle d’Europe et des Etats-Unis d’aujourd’hui – qui en compte 730 millions. Ce qu’il faut viser, selon Wang, est donc moins une « quantité » qu’une « qualité ». Santé et éducation permettront de maintenir le cap de croissance économique. Le ministre veut rassurer, car la première phase du plan n’a pas bien marché. En 2015, la Chine autorisait 2 enfants par couple, et attendait donc 4 millions de naissances supplémentaires par an. Mais en 2016, l’augmentation n’a été que de 1,31 million. On était loin du compte !

Les raisons du « manque à naître » sont multiples. Après 40 ans de restrictions rigides à un enfant par foyer, les jeunes parents ne veulent plus de bébés, préférant privilégier leurs carrières et leurs vies privées. Aussi, 60% des  mères d’un premier enfant reculent devant une seconde grossesse. Elles craignent le coût prohibitif d’un enfant en plus (en habillement, éducation, santé et nourriture), le risque d’être congédiée, et le manque de soutien, de crèche…

Li Wei, ancien maire de Jiangmen (Guangdong) pense que le carcan du planning doit disparaître au plus vite, pour des raisons sociopolitiques. Cumulé depuis tant d’années, le déficit démographique fait peser sur le pays la catastrophe d’une Chine sans jeunes pour nourrir ses vieux, « devenue vieille avant d’être devenue riche ».

Sun Xiaomei, de l’Université des femmes de Pékin, vient pourtant positiver, évoquant la situation dans les petites villes. Là, le coût de la vie est moindre, le stress moins intense. Néanmoins, Sun espère que Pékin se donnera au moins 5 ans avant de restaurer la liberté totale de natalité, car les maternités sont débordées et les pédiatres risquent le surmenage avec  100 consultations par jour. Pour faire vacciner leurs nouveau-nés, les mères doivent attendre des semaines. Huang Xihua, élu, suggère un subterfuge : abaisser à 18 ans l’âge légal du  mariage (22 ans pour les garçons, 20 pour les filles). 

Li Bin, la ministre de la Santé, réaffirme les récents engagements du Conseil d’Etat : 89.000 lits de maternité à créer sous 3 ans, des milliers de pédiatres supplémentaires à former, des congés de maternité déjà généreux des provinces, et le début d’un régime de baisses d’impôts et d’allocations… Tout ira bien —si les promesses publiques sont tenues.


Petit Peuple : Yushutun (Heilongjiang) – David contre Goliath (2ème partie)

Pour défendre son village de Yushutun contre la pollution du groupe pétrochimique Qihua, Wang Enlin étudia le droit pendant 16 ans…

En 2004, après trois ans passés à déchiffrer les ouvrages de droit tombant entre ses mains, ce fermier tout sauf bête et animé par la rage contre l’injustice, trouvait la faille légale dans la muraille du formidable adversaire : un district ne pouvait louer plus de 20% d’hectare de biens communaux. Le prêt régalien signé à Qihua en 2001, 100 hectares communaux pour 27 ans, était donc caduc. Wang détecta d’autres fautes tout aussi prometteuses. Qihua avait enfreint la loi en omettant d’imperméabiliser le bassin d’épandage, permettant ainsi aux déversements d’empoisonner le terroir du village et la nappe phréatique.

Wang multiplia les plaintes aux niveaux local, provincial, national, auprès des bureaux du Sol, de l’Environnement, de l’Agriculture ; il écrivit aux Commissions de discipline du Parti, aux tribunaux de base et intermédiaires. Durant 5 ans il s’épuisa à guerroyer sans rien obtenir, pas même d’être reçu pour plaider sa cause. Tel Don Quichotte face aux moulins, il allait d’échec en échec : ses courriers en mauvais chinois passaient invariablement au classement vertical. Fétu de paille face à l’establishment, Wang ne représentait que lui-même, David contre Goliath.

Il s’acharnait pourtant—faute d’alternative. Au fil des années, ses récoltes baissaient, celles des voisins aussi. Le sorgho jaunissait, les poules faisaient la grève des œufs. Wang voyait aussi sa santé baisser : à l’hôpital de Qiqihar, il était soigné d’un début de tuberculose…

 Tout changea en mars 2007, à la visite des cadres du Centre d’aide aux victimes de pollution, ONG pékinoise créée deux ans plus tôt par un groupe d’avocats. Pour les deux parties, la rencontre s’avéra inespérée. En dépit de ses efforts, le Centre ne trouvait pas en Chine de plaignants prêts à aller ester en justice. Intimidées par ces collusions de barons rouges politiques et industriels, les victimes de pollution, paysans, résidents ou PME, renonçaient à porter plainte. Mais voilà qu’à Yushutun, ils avaient enfin un cas, Wang Enlin qui promettait de tenter le pari et de se battre jusqu’à la mort… Eblouis par tant de courage, ils résolurent de défendre cette communauté paysanne quoiqu’il leur en coûte. Pour Wang, ce fut le jour la remontée de l’enfer !

La première action des juristes volontaires du Centre fut d’évaluer la nuisance des effluents industriels de Qihua. Ils filmèrent les collines de sel séché sous le soleil, les reflets mordorés du lac croupissant. Forçant les cadres, à les rencontrer, ils enregistrèrent leur argumentation laborieuse, leur prétention à l’absence de tout préjudice à la communauté villageoise. Ils aidèrent aussi Wang à rédiger désormais ses plaintes dans un langage juridique, sur les bons formulaires, « dans les clous ».

Depuis 2003, avec ses maigres connaissances en droit, Wang défendait ses voisins contre les appétits fonciers des notables – sauvant la mise à ses amis une dizaine de fois. De ce fait, parmi les apparatchiks, il ne faisait depuis belle lurette plus rire personne. De 2008 à 2014, il fut 5 fois trainé en prison sous des délits spécieux comme celui de « détruire la prairie » en cultivant ses propres lopins—que la mairie, Dieu seul sait pourquoi, avait reclassifiée comme pâturage quelques années en arrière. Averti, le Centre n’avait aucun mal à le faire sortir, démontrant bien viste l’aspect dilatoire du chef d’accusation. Le but des accusateurs –briser Wang– ne fut bien sûr jamais atteint.

Wang recueillit les premiers fruits de sa croisade en 2012. La cour de Mudangjiang au Heilongjiang (où Pékin avait déplacé le procès, pour en finir avec la collusion entre Qihua et les juges de Qiqihar) – condamna la firme à 300.000 ¥ de dommages, et à « remettre en conformité » sa licence. Choqué, mais confiant en les appuis politiques de sa maison-mère, SinoChem, Qihua ignora le verdict et poursuivit ses déversements.

La filiale dut s’arracher à sa passivité en avril 2014 : suite à l’injonction du bureau provincial de l’Environnement, lui-même activé par un ordre du ministre en personne, un test fut procédé, sur les terres du dépôt et des champs vicinaux. Il détecta un taux de mercure de 1,6 mg/kg (près du décuple du plafond légal), et une acidité des eaux un PH de 9,2… Dès lors pour Qihua, le torchon brûlait !

Au 1er janvier 2015, la loi révisée de l’Environnement permit au Centre de se porter partie civile aux côtés des habitants. Ainsi, le tribunal local et la cour intermédiaire, qui depuis 2001, reportaient studieusement l’instruction des plaintes déposées par le comité villageois, n’eurent d’autre option que de les enregistrer.

Un jour, débarqua un reporter du Journal de la loi, suivi d’une équipe de la CCTV. Un déluge de médias enhardis leur succéda, qui se mirent à bombarder l’opinion. L’administration dut se mettre au travail pour désamorcer ce cas désagréable, potentiellement déstabilisateur.

En février 2017, la logique l’emporta : Qihua fut condamné à verser 820.000 yuans aux 55 familles victimes, et à réhabiliter les terroirs contaminés. Le coût dépassera immensément le montant du dédommagement accordé : Qihua devra faire tourner pendant des mois des norias de bulldozers et camions, pour renouveler des milliers de mètres cubes de terre souillée. C’est un verdict-choc : pour la première fois dans l’histoire, un petit paysan a fait ployer l’échine à un géant industriel national !

SinoChem bien sûr a fait appel. Mais Wang Enlin ne doute de rien. Après 16 ans, 12 mois de plus ou de moins ne changent rien. Comme dit le dicton, face au vice, la vertu finit toujours par triompher : xié bù dízhèng (邪不敌正) !


Rendez-vous : Semaine du 20 au 26 mars 2017
Semaine du 20 au 26 mars 2017

20-22 mars, Pékin : China Maritime, Salon international des technologies et équipements offshore

20-22 mars, Pékin : CIOOE, Salon international du pétrole et du gaz offshore

20-22 mars, Pékin : CIPE : Salon international des équipements pour les pipelines, stockage et transport du pétrole et du gaz

20-22 mars, Pékin : CIPPE, Salon international du pétrole, des technologies pétrochimiques et de leurs équipements

20-22 mars, Pékin : CISGE, Salon international des technologies et équipements liés à l’exploitation de gaz de schiste

20-22 mars, Pékin : EXPEC, Salon international des technologies et équipements contre le risque d’explosion

21-23 mars, Shanghai : DOMOTEX, CHINAFLOOR, Salon international du revêtement de sol pour l’Asie Pacifique et la Chine

21-23 mars Shanghai : INTERMODAL Asia, Salon et Conférence sur le transport naval et la logistique portuaire

21-23 mars Shanghai : IT&CM, Salon de la création d’événements en Chine

22-24 mars, Shanghai : CAFEEX, Salon international du thé, café et des boissons

23-25 mars, Chengdu, China FOOD & DRINKS, Salon de l’alimentation et des boissons

23-31 mars, HOTELEX, Salon des équipements et fournitures pour l’hôtellerie

24-26 mars, Pékin : China MED, Salon des équipements et instruments médicaux

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