Le Vent de la Chine Numéro 32 (2019)
Le 13 septembre, les Chinois célébraient la « fête de la mi-automne » (中秋节), une occasion de se retrouver en famille autour de gâteaux de lune (月饼, yuèbǐng). Or, deux fabricants de ces « mooncakes » se faisaient remarquer, non pas pour leurs recettes, mais pour leurs opinions politiques. Garic Kwok, le fils du fondateur de la chaîne Taipan Bread and Cake aux 100 points de vente en Chine, était mis au pilori le 2 septembre par le Quotidien du Peuple. Sa faute ? Avoir affiché sur Facebook son soutien aux actions des « t-shirts noirs » hongkongais (militants pro-démocratie), et avoir diffusé des images ridiculisant le gouvernement et la police de la région administrative spéciale (RAS). Cette publication valait aux fameuses pâtisseries couleur blanc-neige la mise au ban des plus grandes plateformes d’e-commerce comme Tmall ou JD.com et le boycott par les clients… Quelques jours après, le même journal était beaucoup plus élogieux concernant Annie Wu, 71 ans, fille du cofondateur de la chaîne Maxim’s, qui avait mis en garde les élèves et les professeurs de son collège, d’éviter de participer aux manifestations secouant l’île. Elle regrettait d’ailleurs que l’histoire chinoise ne soit pas obligatoire au programme des écoles hongkongaises…
Dans l’ancienne colonie britannique, l’économie est à la peine, marquée par trois mois de protestations. En août, la fréquentation des visiteurs à Hong Kong reculait de 40% par rapport à l’an dernier. C’est le pire résultat depuis 2003, année marquée par l’épidémie du SRAS. Les avions sont à moitié vides, et les hôtels cassent les prix pour attirer les quelques voyageurs qui s’aventurent à Hong Kong.
Sur le continent, le rythme ralentit aussi, mais pas pour les mêmes raisons. Sous la contrainte des taxes américaines, les producteurs chinois cassent leurs prix pour avoir une chance de remporter des commandes. En août, l’indice des prix à la production (IPP) chutait de 0,8% par rapport à 2018 – baisse la plus importante depuis trois ans. Le mois dernier, les ventes d’automobiles continuaient leur lente dégringolade pour la 14ème fois en 15 mois, à 1,564 million d’unités (-9,9% comparé à l’an dernier). Ainsi, le 27 août, le Conseil d’Etat appelait les gouvernements locaux à assouplir les restrictions d’achats de véhicules, contredisant ainsi leurs objectifs anti-pollution et de lutte contre la congestion routière… Le prix des denrées alimentaires gonflait de 10%, accentué par celui du porc, viande de base dans l’assiette des Chinois, dont le prix explosait (+46,7% par rapport à 2018) suite à l’épidémie de fièvre porcine. Pour faire face, villes et provinces piochent dans leurs réserves de porc congelé pour les vendre à prix cassés aux supermarchés. Elles espèrent de cette manière apaiser le mécontentement de la population, surtout à l’approche des fêtes.
Pour le gouvernement, il devenait urgent de prendre une décision plus radicale pour tenter d’enrayer le ralentissement économique. En recourant à la planche à billets ou en procédant à des coupes fiscales ? Finalement, la Banque Centrale chinoise annonçait le 6 septembre l’abaissement du taux de réserves bancaires (RRR) de 0,5% pour libérer 900 milliards de yuans de crédit. Pour Iris Pang de la banque ING, cette coupe n’aura pas l’effet escompté : les firmes préféreront rembourser leurs dettes avec un nouveau crédit à plus bas taux, et cela ne boostera pas l’activité économique.
Il n’y a pas que l’élite qui s’inquiète. Le pessimisme gagne la classe moyenne urbaine avec des perspectives économiques moins brillantes qu’hier. Une guerre commerciale qui s’éternise, un yuan et un pouvoir d’achat qui s’affaiblit, le marché de l’immobilier qui n’augmente plus, des capitaux difficiles à sortir du pays… On parle déjà de « stagflation », combinaison d’une croissance qui s’essouffle et d’une inflation galopante. Elle craint aussi que la détérioration des relations de la Chine avec le reste du monde (surtout avec les puissances occidentales), nuise à sa liberté de voyager à l’étranger. Dans ces conditions, puissent les « mooncakes » calmer les faims et faire oublier les craintes, au moins le temps d’un week-end prolongé !
Sans même être projeté officiellement en Chine, un documentaire suscite beaucoup d’intérêt auprès du public chinois depuis sa sortie sur Netflix (US) fin août : avec plus de 13 millions de commentaires sur Weibo, il récoltait la note de 8,4/10 sur Douban. Premier de la société de production Higher Ground du couple Obama, le reportage engagé « American Factory » (美国工厂) relate la reprise en 2014 d’une ex-usine General Motors près de Dayton (Ohio), dans la Rust Belt américaine, par le groupe Fuyao, leader chinois des vitrages automobiles. Avec la fermeture de GM en 2008, des milliers d’ouvriers perdaient leur emploi. Grâce à Fuyao, 2 200 jobs furent créés, certes payés deux fois moins cher. « Un boulot mal payé, c’est mieux que rien du tout », relativise une mère de famille.
Au début du reportage, Cao Dewang, le président de Fuyao, prône l’adaptation : « à Rome, fais comme les Romains ». Pour les 200 ouvriers chinois venus former leurs collègues américains, un stage d’interculturel accéléré est dispensé durant la pause déjeuner : « les Etats-Unis sont un pays où l’on peut s’exprimer, même faire des blagues sur le Président de la République ! Les Américains sont généralement enthousiastes, francs, et sont plus réceptifs aux encouragements qu’aux punitions ». Rapidement des liens se tissent entre les binômes sino-américains, et les nouveaux venus découvrent rapidement les spécificités locales : armes à feu, pêche à la carpe, ou dinde de Thanksgiving.
Pourtant, la lune de miel va tourner court. Les Chinois fustigent leurs collègues américains, « aux gros doigts lents, à la langue bien pendue, et à l’attitude fainéante ». « Ils ont 8 jours de repos par mois. De quoi se plaignent-ils ? » se demandent-ils. Les Américains eux, critiquent leurs collègues chinois qui « ne font que donner des ordres, sans expliquer pourquoi ». Pour améliorer la compréhension mutuelle, une poignée de travailleurs américains est alors envoyée à l’usine mère à Fuqing, dans la province du Fujian. Ils y découvrent une discipline quasi-militaire et un paternalisme ambiant : ici pas de syndicat, mais une cellule du Parti. Selon les mots de son Secrétaire : « si les ouvriers ne rament pas fort, c’est tout le navire Fuyao qui coulera ».
Cela n’empêchera pas le conflit de s’envenimer. Les ouvriers américains dénoncent leurs conditions de travail, le manque de sécurité dans l’usine et menacent de faire appel au principal syndicat automobile d’Amérique du Nord (UAW) : « on s’est battus il y a un siècle pour nos droits, on ne va pas le refaire aujourd’hui ». De son côté, M. Cao prévient : « si un syndicat se forme, je ferme les portes ». Un bras de fer s’engage alors entre la direction et les travailleurs américains… Deux ans après son ouverture, Fuyao Glass America (FGA) finira par afficher un revenu net de 34,3 millions de $.
Ce documentaire dresse donc un portrait honnête de la mondialisation des entreprises, de son coût humain et social, de Dayton à Fuqing. Le clash entre les ouvriers américains et leurs managers chinois était prévisible, lié à leur différence de perception de conditions de travail acceptables, ou non. Alors que l’on pouvait attendre une certaine solidarité de classe, il n’en est rien. Pourtant, ouvriers chinois comme américains seront impactés par l’automation : Fuyao Glass America installait déjà ses premiers bras « robotisés » en 2018.
Aux Etats-Unis, ce reportage donnera sans doute matière à réflexion sur l’impact de la mondialisation sur ses travailleurs, et sur la montée en puissance de la Chine. L’objectif affiché de M. Cao était de « changer la perception des investissements chinois aux USA ». Pourtant, après visionnage, difficile d’imaginer que les téléspectateurs en aient une meilleure image. Au contraire, il pourra alimenter les craintes, et pas seulement celles de l’électorat de Trump. A tort car ces investissements chinois ne sont pas tous destinés à être conflictuels. A Lancaster en Californie, la firme chinoise automobile BYD assemble des bus électriques pour différentes villes américaines depuis 2013 et fait figure de « success story », selon Madeline Janis, directrice de l’association Jobs to Move America. D’abord réticente, BYD a accepté de travailler avec un syndicat et les communautés locales pour mettre en place des pratiques de recrutement équitables, de bonnes conditions de travail et proposer des salaires décents – mesures qui bénéficient à toutes les parties. Les autorités locales ont donc un rôle primordial à jouer, en demandant des comptes aux entreprises étrangères s’installant sur leur territoire.
En Chine, les internautes dressent des comparaisons plutôt étonnantes : « ce n’est pas un conflit interculturel, mais un conflit entre un capitalisme du 19ème siècle et un autre du 21ème siècle ». Un autre commentaire est plus ironique : « quel est le pays socialiste, et quel est celui capitaliste ? Le pays socialiste exploite ses travailleurs, et bafoue leurs droits, et le pays capitaliste prône la sécurité au travail et supporte la participation des syndicats. C’est le monde à l’envers ». Enfin, parallélisme intéressant : le groupe américain Tesla s’apprête à inaugurer sa « Gigafactory 3 » à Shanghai, l’occasion peut-être d’inverser les rôles en y tournant un « China Factory » ?
Depuis la fin des années 80, les relations sino-indiennes sont ponctuées d’affrontements et de réconciliations. La pierre d’achoppement porte sur le tracé de leur frontière commune de 3 488 km, du Cachemire à l’Arunachal Pradesh (que la Chine revendique sous le nom de « Sud Tibet »). Le plus sévère incident récent remonte à 2017 suite à l’incursion inopinée, pendant 73 jours, de troupes chinoises pour construire une route sur le plateau du Doklam – même scénario en 2014 au Ladakh, juste avant la première visite de Xi Jinping en Inde en tant que Président.
Les tensions étaient ravivées le 5 août par une décision controversée du Premier ministre indien, Narendra Modi. Fort de sa réélection triomphale en mai dernier, il abolissait l’autonomie, déjà plus théorique que réelle, du Cachemire indien, seule province à majorité musulmane du pays. Fidèle à sa promesse de campagne de 2014, Modi révoquait le statut spécial du Jammu-Cachemire, en abrogeant la dispense octroyée en 1954 d’application des articles 370 et 35A de la Constitution. En effet, lors de la partition de l’ancien empire britannique en 1947, Inde et Pakistan se disputèrent le Cachemire, alors état princier. Après une guerre de 12 mois (première guerre du Cachemire), celui-ci sera finalement divisé entre les deux belligérants. Le conflit impliquait aussi – marginalement – la Chine qui contrôle le territoire voisin de l’Aksai Chin enclavé entre le Tibet le Xinjiang, et la Vallée de Shaksgam cédée en 1963 par le Pakistan. Ces deux territoires sont depuis revendiqués par l’Inde.
Pour comprendre les tenants et aboutissants du coup de force de Modi, il faut se représenter les forces géopolitiques en présence, et les deux camps qui se font face, avec d’un côté Japon, Inde, Australie et États-Unis (alliance soutenue par Paris qui permet des ventes d’armements sophistiqués à Canberra et New Delhi), et de l’autre, la Chine, le Pakistan et l’Iran.
Ainsi, les réactions locales ont été vives. Le Pakistan, par la voix de son Premier ministre Imran Khan cria sa colère, comparant Modi à Hitler et menaçant d’entrainer le monde dans une guerre nucléaire. En théorie pourtant, la décision indienne est une affaire interne, concernant une région sous contrôle indien. De plus, le Pakistan lui-même a procédé à un découpage de « son » Cachemire, le subdivisant en un Gilgit-Baltistan au nord, un Khyber Pakhtunkhwa à l’ouest et un Azad Kashmir à l’est.
Dans l’espoir de mobiliser l’attention internationale, le Pakistan réclama un débat au Conseil de Sécurité de l’ONU, soutenu par son allié inconditionnel chinois, qui finance sur son sol un projet à 62 milliards de $. Mais la discussion, le 16 août, n’est pas sortie du cadre informel (sans communiqué attendu), malgré l’appui discret du Royaume-Uni (sans doute eu égard à la forte communauté pakistanaise sur son sol). Turquie exceptée, nul pays musulman ne s’est levé pour soutenir le Pakistan. A l’inverse, le 24 août, Modi en visite aux Emirats Arabes Unis se voyait décerner l’Ordre de Zayed, la plus haute distinction décernée aux civils dans le pays.
La Chine a également tenté de mobiliser l’opinion sur le thème du respect des droits des musulmans du Cachemire mais sa propre politique au Xinjiang ou au Tibet ne la place pas dans une situation idéale pour se poser en défenseur de la liberté de religion. De même, la volonté de la Chine d’internationaliser le problème se heurte à son discours sur la souveraineté et contre l’ingérence : il semble difficile d’impliquer l’ONU au Cachemire indien alors que la Chine défend son droit à organiser comme elle l’entend la vie de la population dans ses provinces ou territoires administrés, que ce soit le Tibet, le Xinjiang et plus encore en ce moment Hong Kong.
Tout ceci fait que les relations sino-indiennes traversent un nouveau froid. En une tentative de médiation, le ministre des affaires étrangères chinois Wang Yi devait se rendre en Inde puis au Pakistan début septembre. Mais New Delhi a décommandé, refusant toute visite qui aurait été associée à une escale au Pakistan. Islamabad de son côté, croyait pouvoir expliquer que l’annulation était à imputer à Pékin, en rétorsion à la décision de Modi… L’absence de Wang Yi n’a pas empêché le 6ème dialogue économique stratégique (SED) sino-indien d’avoir lieu à New Dehli le 9 septembre pour évoquer leur coopération économique, priorité de Pékin. Dans ce contexte, les résultats du second sommet informel en Inde entre Xi Jinping et son homologue, programmé en octobre, s’annonçent incertains.
Sur les marchés du pays, la grogne gagne : le prix de la viande préférée des Chinois, avec 55kg annuels consommés par personne, a presque doublé (+46,7%) sous l’effet de l’épidémie de fièvre porcine (ASF) qui fait rage depuis 13 mois. Et les prix ne baisseront probablement pas avant le nouvel an chinois, fin janvier 2020… Des internautes tournent la situation en dérision, l’un exhibant une belle poitrine de porc à son cou pour afficher sa richesse.
Cette inflation devient un sérieux sujet d’inquiétude pour les autorités qui ont déroulé une série de mesures d’urgence. D’abord, l’Etat a décaissé 2,4 milliards de yuans depuis avril, pour aider les foyers les plus fragiles à faire leurs courses. A Nanning (Guangxi) et Canton (Guangdong), chaque habitant pourra acheter un kilo de porc 10% moins cher que le prix du marché. La réserve nationale, créée en 1996 pour contrôler les prix de certaines denrées alimentaires, sera également mise à contribution, en décongelant des dizaines de milliers de tonnes de porc, bœuf, et agneau. Selon Lei Yi de China Merchant Securities, elle contiendrait 1,09 million de tonnes de porc, mais il en faudrait 10 millions pour que le pays satisfasse à son appétit !
Selon des chiffres officiels, le cheptel porcin est 22% moins important que l’an dernier. D’autres estimations sont plus pessimistes : dans le Shandong par exemple, il a été réduit de 41%. Plus de 200 millions de porcs vont manquer à l’appel, décimés par la maladie ou abattus, selon la banque hollandaise Rabobank. Et de nouveaux cas continuent à être déclarés chaque semaine, comme dans une petite ferme du Yunnan le 26 août ou dans une autre au Ningxia le 10 septembre. Les recherches de l’institut vétérinaire de Harbin pour mettre au point un vaccin, ont fait « des progrès significatifs ». Les essais cliniques devraient débuter prochainement. Des vaccins expérimentaux circulent déjà, ce qui forçait le ministère de l’Agriculture à traquer ces faux remèdes, pouvant faire plus de mal que de bien.
Début juillet, le Conseil d’Etat reconnaissait que la gestion de cette épizootie avait connu des manquements. Si le virus s’est propagé sur tout le territoire chinois, ce n’est pas uniquement à cause du manque de mesures de biosécurité. En effet, les gouvernements locaux ont rechigné à signaler de nouveaux cas de contaminations afin de ne pas avoir à payer aux fermiers les subventions promises par le pouvoir central. C’est la raison pour laquelle les éleveurs ont dû se débrouiller pour vendre leurs porcs contaminés aux abattoirs, parfois à des centaines voire milliers de kilomètres, dans des provinces voisines…
De ce fait, le Conseil d’Etat appelait à ce que les subventions aux élevages touchés soient distribuées « plus rapidement ». Des aides, jusqu’à 5 millions de yuans, seront désormais proposées aux larges élevages, afin d’élargir leurs exploitations et améliorer le niveau de sécurité sanitaire du secteur. Ils devraient atteindre 58% du total des élevages d’ici à 2022. C’est un objectif ambitieux si l’on se réfère aux chiffres de Rabobank : en 2016, les fermes de plus de 10 000 têtes ne représentaient que 18%. La transition entre un secteur reposant essentiellement sur des exploitations familiales et petits élevages, à un autre constitué de larges exploitations ne sera pas sans écueils. De quoi vivront les modestes paysans à qui on aura pris leur gagne-pain ? Et quid de leurs terres ? Surtout, cette transformation ne se fera pas du jour au lendemain. A tout le moins, cette épidémie représente pour l’Etat une occasion de professionnaliser son secteur.
En 2012, pour Huang et Lai qui y débarquaient, le Yunnan fut comme le décor d’une guerre fraiche et joyeuse, où à tous les coups l’on gagnait sans risque, loin du regard de la capitale – comme on dit en Chine, « le ciel est haut et l’empereur est loin » (天高皇帝远tiān gāo huángdì yuǎn). Parfois cependant, il arrivait à Huang de se retrouver assailli de doutes et de terribles pressentiments lorsque par exemple un mystérieux visiteur venant non annoncé de Pékin lui posait toutes sortes de questions étranges, ou bien lui l’interrogeait sur un ordre de mission sentant à un « li » (500m) ses services frauduleux … En de telles circonstances, une fois Huang de nouveau seul dans son immense chambre à coucher, il se mettait à trembler de tous ses membres.
Pour s’affranchir de ses démons, il avait heureusement une méthode infaillible. Seul ou avec Lai, il revêtait sa toge impériale, et reprenait son calme à travers les allées de son parc privé, autour de son étang où nageaient paresseusement ses cygnes blancs et noirs. Cela suffisait à lui rendre une sérénité parfaite.
Peut-être à cause de ces épisodes de grandes inquiétudes, Lai et Huang redoublaient de prudence. Ils communiquaient surtout par téléphone satellitaire, hors de prix, mais seule assurance de n’être pas écoutés… Ils ne se voyaient plus qu’une à deux fois par semaine, lors d’événements mondains, histoire de faire le point sur leur sécurité ou se présenter des prospects utiles à leurs affaires.
A peine arrivé dans son nouveau fief, Huang avait placé ses hommes aux postes clés, à la tête de la police et de la commission économique municipale, laquelle préparait et votait les chantiers à lancer à travers la province – plantations de caféiers, centre de recherche en ginseng, chaîne de montage d’hélicoptères. Ces contrats étaient ensuite alloués à Lai, ainsi qu’à d’autres amantes du Secrétaire provincial. En 2016, Lai donna au monde un indice de sa capacité d’influence, en privant le premier groupe national de génie civil d’une affaire qu’il venait d’emporter, la 5ième ligne de métro de Kunming, estimée à 25 milliards de yuans, coût énorme dû au nombre de tunnels et de viaducs à bâtir à travers cette ville au relief tourmenté. Lai travaillait avec le rival de ce groupe, un n°2 national. Quoique respecté et compétent, ce candidat avait été écarté de l’appel d’offres, laissant la voie libre au n°1 conformément au vœu affiché du ministère de tutelle.
Mais c’était compter sans Lai et surtout Huang, décideur final dans sa province : défiant Pékin, il osa dissoudre le comité de sélection, en appeler un autre et convoquer un nouvel appel d’offres, qui tranchait tambour battant en faveur du n°2…
Tout semblait bien aller pour Huang. Au printemps 2016, il reçut le chef de l’Etat en personne, qui le félicita sobrement pour son dynamisme économique. Loin d’être anodine, cette visite pouvait laisser présager qu’il était choisi comme successeur à la tête du pays. Ce soir-là, une fois le Président reparti, Huang organisa une fête peu : 80 de ses proches embarquèrent à bord de cinq jonques naviguant sur le lac illuminé de la ville avec orchestre embarqué et feux d’artifice célébrant sa victoire.
Hélas, ce que Huang ignorait, c’est que cette visite marquait le début de sa chute. L’affaire de la cinquième ligne de métro avait fait des remous, entretenus par le consortium national spolié de sa victoire. Les jalousies se multipliaient dans bien d’autres secteurs aussi. Par ses manœuvres illégales, le tandem Lai-Huang avait dérangé de nombreux intérêts. D’ailleurs, c’était surtout au plan politique que le couple avait fauté, en briguant si ouvertement le poste suprême. Averti, le n°1 du pays n’était pas du tout prêt à lui céder son trône.
Durant toute sa carrière, Huang, véritable anomalie sur l’échiquier chinois, était parvenu à grimper les différents échelons sans protecteur. Avec beaucoup de chance, à chaque tour de promotion, il avait pu monter, évinçant des adversaires plus puissants que lui, mais soutenus par des factions rivales. On l’avait donc choisi comme homme de compromis, afin d’éviter de froisser les sensibilités locales ou de déstabiliser les délicats équilibres nationaux. Obnubilé par le souci de maintenir la stabilité, l’appareil craignait de devoir choisir entre deux ténors : il optait pour un troisième – Huang. Sa jeunesse aussi avait joué en sa faveur, ainsi que sa réputation d’administrateur dynamique. Mais plus il se rapprochait du sommet, et plus l’état-major y réfléchissait : cet homme qui désormais affichait ouvertement sa prétention d’exercer le mandat suprême, devenait le rival du dirigeant en place – c’était inadmissible !
C’est alors qu’on commença à découvrir que Lai n’était pas forcément si bonne administratrice – finalement peut-être, seul l’entregent de Huang et la triche lui avait permis de réussir. 20 ans en arrière, elle avait dû céder sa JV de jus de carotte ruinée, avant de la voir redémarrer dans d’autres mains pour devenir un des fleurons du pays. De même, son projet de services digitaux pour PME avait périclité, forçant Kunming à payer des subventions géantes pour lui éviter la faillite. La rumeur et le scandale bruissaient toujours plus fort. C’est alors que débarqua chez elle la dizaine de comptables de la CCID, Commission nationale de discipline, nantis d’une mission rogatoire pour éplucher ses livres de comptes. Partout à travers la Chine, la mission inspecta les entreprises de Lai. Tout l’écheveau fut démêlé. Bien entendu, c’était moins après elle qu’après Huang que Pékin en avait : l’affaire du manteau impérial ne passait pas.
Dès février 2017, la CCID accusa Huang de n’avoir pas assez nettoyé les nids de mafieux de son prédécesseur. S’ensuivirent quatre mois fébriles où le couple désespéré tenta de sauver sa tête, elle bradant et fourguant son empire commercial, lui sacrifiant un à un ses meilleurs lieutenants. En vain : Lai fut arrêtée en mai, Huang 60 jours plus tard. Tous les trésors délicats de son palais furent alors chargés à bord de 5 camions kakis, y compris la fameuse robe impériale. Huang fut coup sur coup dépossédé de sa position de roitelet rouge du Yunnan, de sa carte du Parti et de sa position au Politbureau. Six mois plus tard, un juge promulguait son verdict de privation de liberté à perpétuité. Autant sa montée au firmament rouge s’était faite en étoile filante, autant sa chute fut celle d’une simple comète, rapide, brutale et irrémédiable. C’en était fini de leur rêve de pouvoir. Huang et Lai étaient pourtant passés à deux pas de la victoire, et leur parcours resterait pour longtemps gravé dans les mémoires : l’histoire d’un couple sans froid aux yeux, partis du plus bas, seul et sans piston, avec l’espoir d’un jour diriger la Chine !
17 – 21 septembre, Shanghai : CIIF – China International Industry Fair, Foire industrielle internationale autour de neuf thèmes :
- travail des métaux et des machines-outils à commande numérique
- automatisation industrielle
- technologies et équipements pour la protection de l’environnement
- technologies de l’information et de la communication
- énergie
- énergie nouvelle
- robotique
- innovation scientifique et technologique
- technologies aérospatiales et aéronautiques
- nouveaux matériaux
18 – 20 septembre, Shanghai : LED China, Salon mondial de l’industrie des LED (signalisation, éclairage, affichage, applications, composants et équipements…)
18 – 20 septembre, Shanghai: RubberTech China, Salon dédié aux machines et outils de traitement du caoutchouc, produits chimiques, additifs et matières premières liés à cette industrie
18 – 20 septembre, Pékin: China Aviation Expo/ Airport & Air Traffic Expo China, Salon international de l’aéronautique et de l’aviation
18 – 20 septembre, Shanghai : Clean Water China, Salon international des technologies de traitement de l’eau dans l’industrie pétrolière et chimique
18 – 20 septembre, Shanghai : China International Adhesives and Sealants Exhibition, Salon professionnel international des colles et adhésifs en Chine
19 – 21 septembre, Pékin: China Horse Fair, Salon international du cheval
19 – 21 septembre, Qingdao : Horti China, Salon international de l’horticulture
20 – 22 septembre, Shanghai : Expat Show Shanghai, Salon des services et produits à destination de la communauté d’expatriés à Shanghai
25 – 27 septembre, Shanghai : Medtec China, Salon et conférence des constructeurs chinois de matériel médical
25 – 27 septembre, Shanghai : China International Fashion Fair, Salon international de la mode
25 – 27 septembre, Shanghai : Texcare International Asia, Salon mondial du traitement des textiles modernes