Le Vent de la Chine Numéro 40 (XX)
Le traité climatique de la COP21 a été adopté samedi 12 décembre à Paris par 195 pays : à faire ratifier d’ici 2020, il sera applicable en 2025. On s’y attendait, vu le ralliement de la Chine et des Etats Unis -les puissances jusqu’à hier hostiles- et l’infatigable travail préparatoire de la France, hôte du meeting. Une page nouvelle d’histoire s’ouvre, avec cet engagement des pays à démanteler avant 2050 ces énergies fossiles (charbon/pétrole) qui nous faisaient vivre depuis deux siècles.
La Chine contribua au succès, en aidant à marginaliser d’irréductibles partisans du charbon ou du pétrole, tels l’ Inde et l’ Arabie Saoudite. A l’issue de la COP 21, le négociateur Xie Zhenhua promettait que son pays assumerait « des obligations internationales conformes à son développement et à ses moyens ». C’est un virage à 90°, par rapport à la COP15 de Copenhague en 2009, où ce même Xie, rejetait toute demande de l’Ouest de partage de l’effort, au nom de la responsabilité historique des pays « riches ». Cela dit, gardons la tête froide pour éplucher le traité.
Les limites ne tardent pas à apparaître, et la Chine, tout du long, se trouve conserver la position avantageuse qu’elle avait depuis le début de ces palabres il y a 30 ans :- Les pays riches « doivent » payer, en aide aux actions climatiques, aux pays en développement, 100 milliards de $ par an d’ici 2020, davantage d’ici 2025. Mais les autres (Chine en tête) « peuvent » contribuer – s’ils le veulent.
– Par des efforts nationaux de coupe des émissions de CO2, on veut contenir le réchauffement planétaire à +1,5°C en 2100, mais le traité évite toute mention de quotas nationaux, de dates, ou d’objectif de « neutralité-carbone ». Il ne fait que réclamer l’arrivée au plus tôt au « pic des émissions ». Et pour bien maintenir le principe de « responsabilités différenciées », les pays riches « doivent se fixer des objectifs absolus de coupe d’émissions », mais les autres sont invités à « poursuivre leurs efforts selon leur situation nationale ».
– La révision obligatoire des efforts des nations sera quinquennale, mais débutera en 2025 et non 2020. La plupart de ces dispositions ont été introduites pour éviter le véto de pays tel l’Inde—au profit de la Chine.
– Enfin, un chapitre exclut la possibilité d’action en justice, de pays lésés par le dérèglement climatique, contre d’autres Etats gros émetteurs de C02 – ceci pour prévenir un à veto à l’avenir du Congrès américain, ce qui convient bien à Pékin… Fait notable, tout au long de la COP21, la Chine se maintint hors de la coalition de 99 pays en demande d’un accord plus « pointu ». Car à ce jour, les promesses de coupe de CO2 des pays d’ici 2030, reviennent à une réduction 55 gigatonnes de gaz à effet de serre, ce qui se traduira, d’ici 2100, par un réchauffement de +3°C. Pour parvenir à l’objectif d’un réchauffement limité à 1,5°C, il faudrait encore poursuivre les coupes d’émission à 40 gigatonnes supplémentaires. Si la Chine s’est maintenue hors de ce club « de tête », c’est du à des oppositions internes, celles de ses provinces moins avancées du centre et du nord. C’est aussi au nom d’un principe qui lui est cher, celui de gradualité dans sa transition énergétique.
Enfin, rien de tout ceci n’a empêché le résultat final, véritable « cadeau de Noël » de la planète à elle-même. Xie Zhenhua salua cet accord « à nous tous, équitable, équilibré, ambitieux et durable ». Suite à quoi Miguel Cañete, Commissaire européen lui donna l’accolade (cf photo), décrivant la Chine comme un « partenaire dur, mais loyal ». Là encore, c’est une relation inédite qui se profile, marquée par un ingrédient qu’on croyait à jamais absent jusqu’alors : la confiance.
Présidé par Xi Jinping, le 2ème Sommet Sino-Africain (FOCAC) à Johannesburg (4-5 décembre), permit de constater l’ importance stratégique de l’Afrique pour la Chine. Avec l’Europe, l’Afrique est le seul continent avec lequel elle a noué des relations « de bloc à bloc », invitant dès 2006 à Pékin, au Sommet fondateur, tous les Etats africains—sauf ceux ayant installé leur ambassade « chinoise » à Taiwan.
Signe de respect, Xi Jinping s’est rendu à Johannesburg deux journées, sans compter l’escale au Zimbabwe, chez le vieil allié totalitaire R. Mugabe. Un autre indice fut le montant du chèque alloué à l’Union Africaine : 60 milliards de $, le triple de la dot de 2012, assorti de la levée des prêts sans intérêts, échéant en 2015. Xi offrit la formation de 200.000 techniciens en Afrique et 40.000 en Chine, dans le cadre d’un plan de zones industrielles à l’échelle continentale.
Cette liste de cadeaux illustre bien la continuité dans l’aide chinoise au développement africain : en 2013, elle versait 13 milliards de $, soit 44% du budget chinois d’aide au développement dans le monde.
L’effort arrive sous une conjoncture pourtant peu favorable : pour l’Afrique sub-saharienne, le FMI prévoit 3,8% de PIB en 2015, et 4,3% en 2016, en recul par rapport aux 5% de 2014. Les échanges sino-africains sont impactés par la récession mi-programmée («nouveau normal»), mi-subie par l’économie chinoise. Au 1er semestre 2015, les importations chinoises reculèrent de 43%, et les investissements chinois (IDE), de 40% (1,19 milliard de $) par rapport au 1er semestre 2014.
Depuis 2000, les échanges avaient fusé de 10 milliards $ à 220 milliards de $, mais depuis 2013, ils ne progressèrent plus que de 2 milliards de $ en tout et pour tout. La chute de l’import chinois de pétrole et minerais africains (fer, cuivre, titane) ont entaillé les revenus de ces Etats, jusqu’à 60% en Zambie, et 50% au Nigeria, Tout ceci fait craindre à Martyn Davies, du cabinet Deloitte, que des projets investis aujourd’hui en Afrique, le soient à fonds perdus : le capital offert par Xi Jinping, serait « investi quasi à contre cycle ».
C’est probable, mais c’est voulu –choix politique de long terme. La brutale coupure des importations chinoises, cassant au passage les cours mondiaux de ces « commodities », a mis en lumière la vulnérabilité d’une économie africaine trop axée sur les ressources minières et fossiles, face à un exploitant chinois qui recourt aussi peu que possible à l’emploi local et emporte « sa » marchandise en faisant venir le personnel nécessaire.
Très inquiets lors du Sommet FOCAC, les dirigeants africains espéraient donc la confirmation de l’effort chinois à long terme, et surtout un réexamen des priorités de cette politique : une aide à la diversification des investissements, pour une baisse de leur dépendance envers la Chine. Ils ont obtenu, sinon des réponses, du moins des signaux favorables.
Cela dit, en préparant son paquet d’investissements en Afrique, la Chine garde les yeux grands ouverts. Comme toute puissance émergente avant elle, elle prépare sa zone d’influence et son marché de demain. Selon McKinsey, le continent noir comptera 20% de l’humanité dès 2025 – autant que la Chine – et deux-tiers des 303 millions de foyers modérément prospères seront alors clients des biens et services chinois. Si la Chine arrive à doter l’Afrique d’un réseau intégral et efficace d’équipements (eau, énergie, transports, communication), la Banque Mondiale prédit au continent une productivité accrue de 40% et 2% de PIB annuel supplémentaire, dont le 1er bénéficiaire étranger sera la Chine.
Par ailleurs, la principale cause du frein à la croissance chinoise, c’est désormais clair, est la surcapacité de tous ses secteurs industriels (des aciéries aux usines automobiles, cimenteries et panneaux solaires). On connait la stratégie de relance adoptée mais pas encore mise en œuvre : exporter massivement ses surplus à crédit et à prix cassés pour équiper divers pays à travers le monde. C’est son plan « Une route, Une ceinture ». A cet effet, des instruments financiers spécifiques s’installent tels le Fonds « Silk Road », les banques AIIB ou BRICS. Le groupe suisse UBS s’attend à voir ce programme drainer 2000 milliards de $ chinois sous 3 ans : les 60 milliards juste alloués à l’Afrique en sont probablement une partie.
Dans quels projets iront-ils ? Au Kenya débute le chantier de la ligne ferroviaire Mombasa (port) – Nairobi, avec 3,6 milliards de $ de l’Exim Bank : montant titanesque, égal à l’aide chinoise à l’Afrique en 2014. A Johannesburg, Mme K.D. Zuma, Présidente de l’Union Africaine, a évoqué une ligne ferroviaire « à grande vitesse » avec l’aide de la Chine, qui relierait les pays tout au long de l’axe Nord-Sud du continent. Le projet a été jugé irréaliste car anticipant trop sur le degré actuel d’intégration et sur la capacité locale à rentabiliser et maintenir un tel outil. Avant de bâtir les gares et construire les rames, il faudrait d’abord déployer le réseau d’eau, d’électricité et d’hygiène publique…
Notons que le Zimbabwe reçoit de Pékin 4 milliards de $ pour 12 projets majeurs, dont 25% pour renforcer la capacité de la centrale thermique de 600MW à Hwange. L’Afrique du Sud reçoit 6 milliards, au titre de 26 contrats d’énergie, de transports, une usine automobile (pour exporter autour d’elle), une centrale nucléaire.
De tout cela, ressort l’image d’un engagement ferme chinois en Afrique. Cité par Le Point, Zhao Changhui, de l’Exim Bank, affirmait en 2013 que « pour les 20 prochaines années, l’Afrique serait la seule destination d’affaires pour la plupart des consortia chinois » – une petite phrase à ne pas oublier.
L’Armée Populaire de Libération (APL) s’apprête à subir la plus profonde mutation depuis sa fondation en 1927—bouleversement qui fait grincer des dents, au point de forcer Pékin à interdire, par un article du 30 novembre au Quotidien de l’Armée, toute critique du gouvernement depuis les rangs.
Présidé par Xi Jinping, un sommet militaire a permis de balayer (23-25 novembre) les derniers obstacles et de publier l’agenda : la nouvelle structure doit être opérationnelle au 20 décembre, et les premiers résultats doivent apparaître en 2020 – deux ans avant la fin du mandat de Xi. Cette réforme a été minutieusement préparée : 700 régiments ou agences du gouvernement, 900 officiers ont été inspectés ou sondés, et plus de 700 colloques ont été tenus en consultation d’experts de tous bords.
Essentiellement, la réforme vise à réduire des entités coûteuses et redondantes ou sans utilité tactique. Elle doit unifier le commandement des 4 armes (terre, air, mer, balistique) à la mode des forces occidentales. 3 des 4 départements généraux disparaissent (« politique », « logistique », et « armement »), dont les fonctions sont reprises par 3 commissions et 6 départements créés par la Commission Militaire Centrale (CMC). Le commandement se partagera entre ministère de la Défense (pour les fonctions non combattantes tels recrutement ou formation) et l’état-major (seul département général préservé) pour l’action. Tous deux prendront leurs ordres de la CMC, à savoir Xi Jinping.
De même, les sept régions militaires sont ramenées à cinq. Le plan n’envisageait que 4 zones (Nord-Ouest et Nord–Est, Sud-Ouest et Sud-Est), mais depuis septembre, une région supplémentaire a été rajoutée: le Centre. Détail notoire : le champ d’action de ces nouvelles régions dépassera les frontières chinoises d’au moins 1000km, selon Andrei Chang, de la revue spécialisée canadienne Kanwa Asia Defence.
L’APL congédiera aussi 300.000 hommes, sur les 2,3 millions de ses effectifs présents. Au final, elle sera rééquilibrée en deux entités d’un million chacune, l’APL et la police armée, rebaptisée Garde Nationale.
Parmi les limogés figurent 170.000 officiers. Un nombre de commissaires politiques devra aussi quitter l’uniforme : du fait de leur monopole sur l’idéologie, ils ont droit de regard « discrétionnaire » sur les dépenses militaires, au risque de devenir une source majeure de la corruption en kaki. Pour enrayer l’hémorragie de gabegie, une Commission de Discipline Militaire naît, avec pouvoirs d’enquêtes et accès aux livres de comptes.
Se réclamant de la pensée de Xi, les derniers articles officiels sur la réforme militaire décrivent un objectif instructif: « réduire l’influence politique des départements généraux et régions militaires ». Intéressant, car en septembre 2012, Xi Jinping, alors vice-Président, disparaissait 15 jours. Puis en janvier 2013, Bo Xilai, en luttant pour le pouvoir suprême, faisait une visite remarquée à Kunming (Yunnan), au 14ème corps d’armée créé 50 ans plus tôt par son père Bo Yibo. Il se murmurait alors que Bo Xilaipréparait un coup d’Etat, en cheville avec Zhou Yongkang son allié, patron de la Police armée (1,2 million d’hommes). Bo était arrêté deux mois plus tard, Zhou assigné à résidence, puis les deux écopaient de la perpétuité sous un autre prétexte, la « corruption ». Membres de la même clique, Xu Caihou et Guo Boxiong, ex-patrons de l’APL, plongeaient à leur tour sous le même chef d’accusation.
Il n’est donc pas interdit de penser qu’une des raisons à la hâte de Xi pour lancer cette réforme militaire, ait été le redressement d’une armée aux loyautés suspectes. Citée par l’expert naval Ni Lexiong, une autre motivation peut avoir été le souci du chef de l’Etat de disposer d’une armée opérationnelle, alors que l’US-Navy fait mine de patrouiller autour d’îles investies par la Chine en mer de Chine du Sud. Ces deux motifs n’étant par ailleurs pas exclusifs l’un de l’autre !
Ce qu’il faut retenir de cette réforme, est l’objectif d’une défense dégraissée, mieux entraînée et mieux dirigée, avec commandement unifié, tentant d’égaler celle des Etats-Unis, le modèle unique. Mais les experts militaires occidentaux ont mis le doigt sur plusieurs faiblesses:
1) Le lien entre Parti Communiste et APL demeure, ainsi que le rôle central des commissaires politiques. 15 sur 46 des généraux/amiraux resteront rivés aux fonctions non combattantes, et exerceront donc une inertie dans la chaîne décisionnelle. Ici, la contradiction est insoluble, liée à son rôle historique d’instrument du Parti et non de la nation. Si l’armée perd ses contrôleurs politiques, elle gagnera en performance, mais deviendra plus à risque sous l’angle de la loyauté au Parti et de la corruption. Et vice-versa.
2) Le rôle n°1 de la « Garde nationale » demeure le contrôle de la population, fonction mal-aimée, et pouvant amener des résistances internes.
3) Le commandement d’opérations revient à la CMC, à Pékin, ce qui peut nuire à la flexibilité et l’initiative du commandant de terrain.
4) Un dernier point, délicat, est ce délai très court de 5 ans pour limoger 170.000 officiers – c’est peu, comparé aux 30 ans prévus par les USA et la Russie pour la même tâche. En Russie, rappelle l’expert A. Chang, Gorbatchev perdait dans les années ’80 la confiance de son armée en tentant de réduire trop vite ses effectifs, faisant perdre leurs privilèges et leurs revenus à des centaines de milliers d’hommes de carrière. « Durant cette phase de restructuration, conclut Ni Lexiong, Xi aura intérêt à être très prudent, et équitable, sous peine de risquer de sérieuses difficultés ».
Comme solution de repli à ces personnels, les autorités militaires envisagent de multiplier les passages au civil de services entiers, suivant le modèle adopté depuis parfois un siècle par les armées européennes : hôpitaux, cantines, corps de ballet, chœurs et chanteurs aux armées, ainsi que 170 des 200 écoles et universités de la défense, permettant à ces cohortes de professionnels de conserver leur place, ancienneté et une partie au moins de leurs avantages acquis…
Après Tokyo et Moscou, c’est à Pékin que le marché de Noël de Strasbourg est venu installer ses décors pour un mois (5 décembre-4 janvier) au centre commercial Solana : 100 chalets aux guirlandes et boules de verre miroir, aux comptoirs animés par des Alsaciens en tenues traditionnelles, ployant sous les friandises, le long d’allées prises d’assaut par une foule dense et enthousiastes de parents et enfants.
C’est le fruit d’une alliance quasi-fortuite et improbable entre la mairie de Strasbourg et Yihui International Culture, compagnie d’affaires pékinoise. Tout débuta fin 2014, quand Wang Bing, la CEO de Yihui, visita le marché de Noël à Strasbourg et tomba sous le charme. Puis réalisant la puissance magique des 500 chalets, le public de toute l’Europe et les 250 millions d’€ de chiffre d’affaires par saison, elle décida de « greffer » ce marché typique en Chine, terre francophile et dont la classe moyenne est prête à payer cher des produits authentiques d’artisanat européen.
Wang Bing reçut alors le soutien de Zhang Guobing, le consul de Chine à Strasbourg, et de la mairie – du Président de l’Office du Tourisme J.J. Gsell. Le montage financier fut vite bouclé : Yihui déboursa 4 millions d’euros, invita 13 artisans, frais de transport et d’hébergement inclus, et leur racheta leurs stocks. Parmi les produits proposés, on retrouve les confitures de Nicole (cf photo), les maisons de pain d’épices de Hansi, le Pinot gris Cuvée du Millénaire de la Cathédrale, de la faïence Elchinger, et des lutins vêtus de laine.
Pour cette première édition-test, il y eut évidemment des imprévus, tels les 40 jours de blocage en douane à Shanghai, causant un manque à gagner de 500.000€.
Malgré cela, Yihui table sur l’engouement du public local pour sa formule haute en couleur—et elle semble avoir gagné son pari, avec
90.000 visiteurs le premier jour. De plus, les prix pratiqués étaient très profitables, de l’ordre du triple de ceux du marché français (tel ce pot de confiture vendu 3€ en France, et 10€ à Pékin). Surtout, son profit futur tient à l’organisation de ce marché de Noël dans d’autres villes chinoises : Shanghai, Shenzhen, Chengdu sont déjà sur les rangs. Quant à l’équipe alsacienne de passage, vu l’intérêt vif constaté auprès du public pékinois, elle est plus que rassurée : enthousiaste. « Cette année, nous confie un organisateur, nous nous étions limités à 6 chalets, pour voir. Mais pour l’édition 2016, cette fois, les
100 chalets seront entièrement alsaciens ».
A quelques jours de la fin d’année, la politique religieuse chinoise est secouée de spasmes, dont l’épicentre se trouve dans le lamaïsme tibétain.
La presse dénonce avec vigueur les faux « Bouddhas vivants ». Selon son décompte, n’existeraient que 358 authentiques « Rinpoche » (ou « Tulkous »), les autres, en grands nombres, étant des imposteurs autoproclamés ou ayant acheté leur titre. L’administration compte certifier les vrais et publier leur liste – pour mieux pouvoir demander des comptes aux autres.
La critique émanant de la Commission Nationale Consultative (CCPPC), est sans doute fondée. Toutefois Xiaba, lui-même Bouddha vivant et vice-directeur de l’Association bouddhiste d’Aba (Sichuan), attribue cette prolifération de faux-Bouddhas au fait que « la population en grande demande de ces maîtres, n’a pas accès aux vrais ».
Sur un front voisin, Chen Quanguo, le Secrétaire du Parti au Toit du Monde, exhorte le Panchen Lama (second plus haut prélat du clergé lamaïste) de rejeter l’autorité du Dalai Lama, en fuite et haï par le régime. Or cette mise en demeure apparaît compliquée. Gyaltsen Norbu, ce jeune Panchen de 26 ans, est mis face à un choix impossible. Son ordination comme onzième Panchen en 1995 s’est déroulée dans un contexte tout sauf harmonieux, en renversant sur ordre du Président Jiang Zemin, Gehdun Choekyi Nyima (en résidence secrète surveillée avec ses parents jusqu’à ce jour), qui venait d’être reconnu Panchen par le Dalai Lama. Ces circonstances font que Gyaltsen n’est pas unanimement reconnu dans la communauté lamaïste. Ainsi, s’il acceptait la demande du Secrétaire Chen, de dénoncer l’autorité du Dalai Lama, il perdrait illico le peu de crédit dont il jouit dans son église, et passerait d’autant plus pour une marionnette.
Le Dalai Lama, il faut l’admettre, vient de se mettre en position vulnérable en priant le monde (le 5/12) de « dialoguer » avec Daesh.
Trois jours après, le groupe terroriste postait sur internet une chanson appelant des Chinois à rejoindre ses troupes. Ainsi l’appel au dialogue du Dalai ne pouvait tomber plus mal et offrait à la Chine l’argument lui permettant d’affirmer qu’il soutient l’Etat Islamique.
Dans la série des incidents se déroulant en Chine autour du lamaïsme, le suivant donne peut-être la clé de tout ce malaise.
Par media interposés, Pékin accuse ses cadres ethniques au Xinjiang et au Tibet de déloyauté, de pratique religieuse secrète, et même de soutenir le terrorisme. Très dure, la dénonciation trahit le désarroi du Parti face à une situation ressentie comme un échec. De longue date, le régime recrute très jeune ses futurs cadres Tibétains ou Ouighours, parmi les écoliers les plus doués. Il les forme en écoles spéciales et une fois adultes, les intègre au Parti tout en leur octroyant des postes de confiance dans leur région. Il s’agit donc d’une élite de seconde génération, bilingue. Mais voici qu’aujourd’hui, il constate qu’après tous ses efforts, ses cadres se montrent parfois sympathisants de la cause qu’ils sont censés combattre. Au Xinjiang, 355 de ces cadres ethniques auraient été sanctionnés l’an passé, pour avoir violé la « discipline de Parti ».
Ceci s’explique par l’écartèlement (classique chez des groupes minoritaires) du cadre ainsi formé, entre la fidélité à la patrie et celle envers son peuple. Ce conflit personnel se voit alors exacerbé par le durcissement du régime depuis 2014, et sa dure campagne anti-séparatiste, terroriste et extrémiste.
C’est dans ce climat tendu que le gouvernement prépare un « Sommet Politique sur les Religions » avant la fin de l’année. Signe de l’importance que ce sujet revêt auprès du chef de l’Etat, ce « synode communiste » sera le premier de ce type en Chine, depuis 11 ans. Son but : « siniser » toutes les fois mondiales pratiquées sur son sol, et « former » tous les clergés (chrétiens, lamaïstes, ouighours)… Autrement dit, le rapport difficile entre le Parti et ses religions, est là pour durer – très longtemps.
Résumé de la première partie : En 2005, à Dongyang (Zhejiang), suite à une dispute avec ses parents, Xiaoyun, 14 ans, fugue de chez elle… Elle va désormais devoir apprendre à se débrouiller seule, tout en évoluant dans un monde aux franges de l’humanité, mi-social, mi-virtuel, celui des cafés-internet…
Alors, pour Xiaoyun, commença une vie sans feu ni lieu. Avant sa fuite du domicile familial, ses vadrouilles buissonnières lui avaient fait connaître les cybercafés (网吧, wǎngbā). Pour quelques sous, elle y trouverait un refuge discret. Des mois auparavant, l’adolescente s’était constitué un trésor de guerre, petits sous chapardés à la maison.
Une fois claquée la porte, après l’ultime dispute avec son père, elle s’en alla droit à la gare routière et prit le premier bus en partance, vers Jinhua où elle passa la nuit sur une banquette d’une maison de bains publics.
Le lendemain, elle partit pour Taizhou, puis d’autres villes de la province ou du Jiangxi voisin. Elle ne prenait toujours ses bus au hasard, et limitait la durée de ses séjours, pour éviter de se faire repérer. Au bout de quelques mois, rassurée qu’elle n’était plus recherchée, elle put se diriger vers la ville dont elle rêvait, Hangzhou, le centre des lumières et des plaisirs, tel qu’elle se le représentait naïvement. Là-bas l’attendaient des dizaines de cybercafés, qu’elle choisissait un à un à l’aveugle. Elle y jouait des jours et nuits entiers, s’aveuglant les yeux et s’assommant les méninges.
La nuit, elle se réveillait sur le clavier, à la lueur bleutée de l’écran. Elle essuyait la sueur de son visage et détendait ses muscles engourdis, poursuivie par une bribe de rêve : sa mère lui tendait les bras, lui pardonnant et l’appelant. Dans ce rêve, elle-même, butée, ne voulait rien savoir. Ce qui n’empêchait sa mère de la caresser et la consoler, en silence. Et elle se laissait faire… Ces rêves l’aidaient à supporter la détresse, comme un petit havre de paix dans sa course épuisante à travers sa vie de fuite et de révolte.
D’autres fois, le cauchemar l’arrachait au sommeil : les dragons héraldiques, les T-Rex jurassiques, les soldats nippons ou bandits coréens, tous ces fantômes virtuels qu’elle avait tués, retournaient pour se venger, la happant d’un coup de crocs, de hallebarde ou de kalachnikov…
Par miracle, durant ces années, Xiaoyun n’avait pas souffert de violences, ni été tentée de vendre son corps, ne fût-ce que pour se nourrir. L’atmosphère des cybercafés, ludique mais calme, solitaire voire un peu autiste, très éloignée du monde réel, l’avait protégée.
Pour se nourrir, Xiaoyun se contentait d’un paquet de biscuits secs, d’un fruit, d’un verre d’eau bouillie. Presque chaque jour, elle aidait le tenancier à tenir la caisse ou servir les boissons. Il la nourrissait en échange, et lui offrait l’utilisation gratuite d’un ordinateur, sans poser trop de questions.
À force de jouer, elle était devenue une quasi-professionnelle. Autour d’elle, habitués et employés formaient un clan lié par une passion et un code de valeurs. Jamais nul ne la dénonça, et tous s’ingénièrent à la protéger, lui disant quand se cacher pour éviter une ronde de police.
Souvent un inconnu lui payait un Coca, un sandwich, ou lui tendait 2 billets roses de 100 yuans : c’était pour qu’elle joue à sa place, au « Crossfire » contre des joueurs du monde entier. En 3 heures, sous les bravos, elle le faisait avancer de centaines ou milliers de places au palmarès…
Tout cela finit ce jour du 20 novembre quand elle se fit pincer bêtement par le policier en ronde inopinée : 10 ans de cavale prenaient fin.
Prévenue par téléphone, sa mère manqua de s’évanouir, elle qui avait reçu le certificat de décès. Dans le secret de son cœur pourtant, elle n’avait jamais cessé de la croire en vie – depuis que Xiaoyun, par WeChat, lui avait envoyé signe de vie, sans pour autant lui laisser loisir de la localiser…
Dès le lendemain à l’aube, depuis Dongyang, sa mère se mit en chemin, ayant obtenu congé de son patron, qui avait même mis à sa disposition une voiture et un chauffeur de l’entreprise.
Depuis Huangshan (Anhui, à 200 km), son père, lui, prenait aussi la route. Ils arrivèrent en même temps, en fin de matinée.
Dans l’attente, Xiaoyun, au comble de l’inquiétude, avait fini par accepter d’être confrontée à ses parents -sans engagement. En cas de refus de les suivre, la policière lui avait promis qu’elle resterait libre.
Dans l’attente interminable, elle passait sans transition d’un éclat de rire aux sanglots terrifiés. Enfin arriva sa mère : elle se précipita et les deux femmes s’enlacèrent longuement, sous les applaudissements du commissariat. Avertie par une indiscrétion, la presse était là, tous flashes crépitants. Aux journalistes, la mère déclara que tout était de sa faute. Dans ces 10 ans de deuil, elle avait appris sa leçon : puisque sa fille lui retournait des morts, jamais plus elle ne la disputerait.
L’autre problème était celui de l’avenir de Xiaoyun, qui se retrouvait sans nul diplôme, ni éducation, à 24 ans. La voie royale des bons métiers s’était envolée. Mais à défaut d’en faire une enseignante ou une avocate, on saurait bien lui trouver une petite « niche » quelque part. Et puis, le bonheur restait à portée de main. Ce n’était pas pour rien que conseillait le proverbe : « si ton dessin de tigre est raté, fais-en un chien » (画虎不诚反類犬 huà hǔ bùchéng, fǎn lèi quǎn) !
En 2015, on recensait en Chine 17,3 millions cas d’incidents liés à l’agressivité au volant : couper la priorité, changements soudains de files, suivre de trop près, accélérations et/ou freinages soudains… Ils sont à 97% commis par des hommes et en hausse de 3% par rapport à l’an dernier (Xinhua). Une conduite agressive serait également la cause de plus de 82 000 accidents de la route en 2014. Les sociologues expliquent ce phénomène par le développement rapide du marché automobile, causant des routes bondées, créant ainsi frustration et colère au volant.
Par ailleurs, une conduite inattentive (conversation au téléphone, envoyer un message, regarder une vidéo, lire ou manger) est la cause de plus d’un tiers des accidents de la route mortels en 2014 (21 570 décès), selon le Ministère de la Sécurité Publique. Un chiffre quadruplé selon l’OMS qui estime que plus de 200 000 personnes ont trouvé la mort sur les routes chinoises en 2014.
En 6 ans, seulement 1306 étrangers vivant en Chine, leurs familles, ainsi que des « experts », ont reçu la carte de résident « permanente » (5 ou 10 ans), de 2008 à 2014. 15% sont basés à Shanghai (Xinhua).
600.000 entreprises et 10 millions d’employés en Chine utilisent WeChat comme moyen de communication interne, utilisant la fonction « Corporate » (à ne pas confondre avec le compte « Public » pour des fonctions marketing : source WeChat).
500 millions de Chinois n’ont jamais emprunté de l’argent à la banque, selon la Banque Centrale. Selon l’Université de Finance et Economie du Sud-Ouest à Chengdu, cette situation concernait 84% des foyers chinois en 2014, et côté business, 80% des micro-entreprises chinoises, soit 40 millions, car elles manquent de garanties nécessaires (source : China Guangfa Bank Co.). La même étude estime que le besoin en prêts à 22 000 milliards de yuans chaque année.
Plus de la moitié de la population « croyante » chinoise (toutes religions confondues) a moins de 60 ans. A l’inverse des Etats-Unis où les personnes croyantes sont majoritairement diplômées de l’université, ces personnes en Chine ne représentent que 5% des croyants. 43% seulement sont titulaires d’un diplôme d’éducation primaire, ou moins (source : Centre National d’Enquêtes de l’Université Renmin).
16-18 décembre : Wuzhen (Zhejiang) : WIC – World Internet Conference, organisée par l’administration chinoise de la cyberspace, et discours attendu du Président Xi Jinping
15-17 décembre, Canton : IFAIR, Salon des solutions audiovisuelles et multimedia
16 décembre, Shanghai : China Securities & Banking Forum
15-17 décembre, Canton : Digital Signage Show, Salon de la publicité et du panneau d’information numérique
18-20 décembre, Shanghai : WRE / WPT : Conférences sur le traitement de l’eau
20 décembre, entrée en vigueur de l’accord de libre échange Chine-Corée du Sud, ainsi que celui de Chine-Australie (chAFTA).
20 décembre, Canton : Foire internationale agricole
12-15 janvier 2016, Pékin : Fur Fair China – Salon de la fourrure et du cuir