Le Vent de la Chine Numéro 10 – Spécial Parlement

du 9 au 15 mars 2014

Editorial : Discours de Li Keqiang à l’ANP – une réforme sélective

Tv AnpEn dépit du ciel bleu sur Pékin ( rare ces dernières semaines), l’ouverture du 2ème session de la 12ème Assemblée Nationale Populaire (ANP) le 5 mars, manqua de sa bonhomie habituelle. Les délégués se prenant en photo (voir notre blog) sur le perron du Grand Palais du Peuple, quelques uns en tenues ethniques, ne purent cacher la nervosité ambiante. Témoins, les policiers et leurs chiens, les pompiers et leurs extincteurs… Vers 11h sur la place Tian An Men, un début d’incendie était maîtrisé : la tentative d’immolation d’une femme d’environ 40 ans, évacuée sur le champ par les forces de l’ordre.

Impossible d’éviter le lien avec l’attentat ouïghour en gare de Kunming 3 jours plus tôt (cf article dans ce numéro). L’ANP avait d’ailleurs ouvert sa session par une minute de silence en mémoire des victimes…

On attendait beaucoup du discours de Li Keqiang, l’auteur du programme économique et social de l’équipe au pouvoir, champion de la réforme tous azimuts. Mais force est de constater un genre de tournant, dans ce «rapport sur l’état de l’Union ». Li Keqiang n’est pas dans une phase triomphante, ni fortement soutenu. Depuis 6 mois, notamment face à Liu Yunshan, il se serait trouvé si durement critiqué, qu’il aurait dû s’astreindre à des séances d’autocritique devant les instances du Parti. Tous ses amis de la Ligue de la Jeunesse (front réformiste) sont mis sur la touche de la même manière. Dans un climat si défavorable, Li Keqiang a dû mettre dans son discours, bien plus d‘idées de la majorité au Comité Permanent, que des siennes.

Le poids accordé à l’armée est impressionnant, confirmant la volonté d’affirmation, surtout face au voisin nippon. L’Armée populaire de libération (APL) reçut un budget de 132 milliards de $ (+12,2%), la plus forte hausse depuis 2011. L’effort ira à la marine, à l’aéronavale et à la recherche de systèmes d’armes high-tech. Mais les experts estiment les moyens offerts à « notre nouvelle Grande Muraille » bien plus élevés (proche des 200 milliards de $).  Li Keqiang précise que l’armée, en 2014, renforcera sa nature « révolutionnaire » et sa « force de frappe dissuasive… à l’ère cybernétique ». La Chine « défendra les fruits de la victoire de la Seconde Guerre mondiale, l’ordre international de l’après-guerre, et s’opposerait fermement à tout acte allant à rebours de l’histoire ». Autant d’avertissements qui font qu’aucune concession n’est à attendre dans le conflit qui l’oppose à Tokyo. 

Anp 2014 OuvertureAu reste, Li Keqiang confirme le cap de réforme économique. Par resserrement du crédit, il veut habituer provinces et consortia publics à un train de vie frugal. Le pouvoir garde un objectif de croissance voisin de celui de 2013 : PIB à 7,5%, inflation de 3,5% chômage urbain à 4,6%, moyennant 10 millions d’emplois créés. L’emprunt public serait de 1750 milliards de ¥, dont 400 milliards pour le compte des provinces. Les investissements publics feront 457,6 milliards de ¥, en projets hydrauliques, ferroviaires et en énergies nouvelles. 

Côté « démocratie », quasi rien, excepté cet espoir d’un « système à acteurs multiples et respectueux des lois ».Li Keqiang déclare la « guerre à la pollution », avec quelques moyens tels ce programme d’équipements en filtres des différents types de centrales thermiques et le remodelage des prix de l’énergie, désirant ainsi faire baisser l’intensité énergétique de 3,9% en 2014. 

Enfin, en diplomatie, grande incertitude : que faire de la tentative par V. Poutine d’annexer la Crimée ukrainienne, profitant de la faiblesse des voisins occidentaux ? Pékin hésite, entre un accord éphémère passé avec B. Obama (06/03) réclamant ensemble un « respect de l’intégrité du territoire », et (07/03), un « respect des droits et intérêts légitimes de tous les groupes ethniques ukrainiens », qui semble être la ligne prévalente désormais.  C’est dangereux : pour soutenir Moscou, Pékin renonce de facto à son principe de non-ingérence dans les affaires d’autres nations, au risque de voir se produire demain une crise du même type dans ses turbulentes provinces de l’Ouest, et l’Ukraine, la rayer de la liste de ses pays-amis. Mais sur ce dossier brûlant, Xi Jinping n’a pas encore dit le mot de la fin.


Politique : Sessions de la CCPPC et de l’ANP : Nouvelles grandes et petites

Comme lors de chaque session des deux Assemblées, CCPPC et ANP, nous réservons une page aux « bruits de couloirs ». La rencontre de ces milliers de représentants du peuple permet de voir plus clairement les soucis présents de cette société – passés à travers le filtre inévitable des mots d’ordre du moment. 

Villa De Zhou YongkangCorruption

Pour une affaire d’achats massifs de voix, le Hunan est interpellé dans une rencontre avec la presse. 18 millions de $ avaient été distribués à 518 des 529 membres du Parlement de Hengyang, en échange de leurs voix. Tous ont perdu leur poste.
De son côté, le Sichuan tente de restaurer son image ternie par de multiples scandales. La province ne compte pas plus de « pommes blettes » (sic) que d’autres, mais a été arbitrairement ciblée comme ex-fief de Zhou Yongkang. Accusé de corruption grave, ce dernier justement, attend sa chute imminente. Sur internet, un clip-vidéo dévoile la résidence familiale dans le Jiangsu (cf photo), et la presse ose même une chose que personne n’aurait pu faire sans lourd châtiment 12 mois plus tôt : révéler son véritable nom, « Zhou Yuengen ».
Confession insolite, la terreur des corrompus, chef de la police du Parti, Wang Qishan dévoile à 65 ans, son faible, à ses moments perdus, pour les « soap operas » de Corée du Sud et la série « House of Cards », dévoilant les coulisses du pouvoir américain.

Ccppc 2014 Li XiaolinAustérité et frugalité

Campagne politique oblige, austérité et frugalité sont les deux maîtres-mots. Le thé au jasmin est servi dans des humbles gobelets en carton jetables, et Li Xiaolin (cf photo), la fille de Li Peng, Présidente du groupe China Power, a troqué son tailleur Emilio Pucci et son sautoir Chanel pour des toilettes plus sobres. Même les cantines des hôtels des délégués ont revêtu cette simplicité révolutionnaire : plus que 3 plats chauds, 3 entrées froides, 2 fruits. L’eau est distribuée « au compte-gouttes » en bouteilles nominatives pour s’assurer que tel élu a fini la sienne avant d’avoir droit à la prochaine. Bien des députés sont venus en train et non en avion. D’autres ont apporté serviettes, pantoufles et brosses à dents afin d’épargner le denier public.
Dans un nouveau souci de transparence, la CCPPC (mais pas l’ANP) dévoile les dépenses de sa session, incluant les hôtels des délégués : 66 millions ¥ en 2011 , 69 millions en 2012, et un budget de 75 millions était prévu en 2013. 

Yuan LongpingL’agriculture

L’agriculture, l’autosuffisance céréalière est un débat incontournable. Ren Zhengxiao, patron de l’administration des grains estime les pertes à 8% de la récolte, 50 millions de tonnes : 2/3 en transport et stockage, et 1/3 en gaspillage de table. Lancé en 2013, le plan pour améliorer les silos ne permettra pas de gagner grand-chose : 750.000 tonnes par an… En même temps, le ministre Han Changfu poursuit la campagne de promotion des OGM. Suite aux décennies de recherche de l’agronome Yuan Longping (père du riz hybride chinois, ayant aussi fait passer le rendement de 4,5 à 13 quintaux/ha – cf photo), le riz OGM chinois est prêt. Problème : l’opposition a grandi avant que l’habitude ne soit prise et 91% du public y est plus ou moins hostile. Remonter cette pente ne sera pas aisé. Une partie de la solution, préconisée par le ministre, consisterait à un étiquetage permettant à la ménagère de faire son choix, en attendant que la méfiance ne disparaisse…

Environnement

Drone Anti Pollution SmogDes industriels indélicats ayant été pris à émettre des substances ou concentrations interdites dans l’atmosphère, Zhou Shengxian, le ministre de l’Environnement prie la presse (05/03) d’encourager la délation de tels actes, en vue de sanctions exemplaires. Lors d’un remaniement annoncé, son ministère reprendrait une partie des compétences de celui du sol et des mines, qui disparaîtrait. Dès lors, le ministère pourrait émettre de lourdes peines et amendes pour fraudes environnementales, et déployer un corps respectable d’inspecteurs écologiques à travers les provinces. Enfin l’administration météo brandit fièrement son dernier gadget, ce drone économique (cf photo) capable de pulvériser 700kg de réactifs chimiques pour précipiter le smog sur 5 km à la ronde. 90% moins cher qu’un aéronef classique, ils permettront par exemple de prévenir la fermeture d’un aéroport. 

Santé

Concernant la santé, une campagne notamment dirigée par Wang Longde et Huang Jiefu, ex-vice ministres de la Santé, est en cours pour bannir la cigarette au sein des deux Assemblées. Il doit faire face au lobbying invisible mais très efficace du monopole public du tabac, mais marque des points cette année : « pour l’instant, dit Wang, très peu de gens fument dans les enceintes, et des affichettes sont apposées partout ». Enjeu : si la Chine applique les actions préconisées par l’OMS (taxe du tabac, interdiction de marketing, lois anti-tabac), d’ici 2050, 13 millions de décès prématurés seront épargnés. 

Un autre aspect préoccupant est la violence grandissante dans les hôpitaux, contre les personnels soignants, humiliés, agressés ou même tués, par des patients (ou leurs proches) mécontents. Pour l’instant, Li Bin, la ministre, n’a comme remède que la dissuasion – la perspective de tribunaux sévères contre les auteurs de violence à l’hôpital. La solution bien sûr, serait un meilleur service hospitalier, davantage de moyens déployés pour les malades. Mais pour l’instant, on en est loin.

Réformes financières

Vu depuis l’ ANP, le problème n°1 est la dette provinciale. Elle atteignait 18 000 milliards de ¥ en juin 2013 et 70% de plus qu’en 2010. Pour éviter des faillites de provinces, il faut avant tout les sevrer du crédit «gratuit à volonté» qu’elles ont connu depuis 2008 avec le stimulus de 600 milliards de $. Il faut aussi que les provinces ayant remis en ordre leurs affaires y accèdent, ainsi qu’à d’autres financements, les obligations – cela vient d’être annoncé par Li Keqiang. 

Discrètement, l’Etat signale que l’ère des sauvetages systématiques est révolue. Le groupe shanghaïen Chaori Solar (panneaux solaires) déclare forfait des intérêts qu’il devait verser (07/03) dans le cadre de son obligation d’1 milliard ¥, émise en 2012. L’occasion est idéale : la dette n’est pas énorme, non susceptible de provoquer un effet boule de neige, et c’est pourquoi le Conseil d’Etat ose enfin sauter ce pas. 

Censure au cinéma

Feng Xiaogang CcppcEnfin la star Jackie Chan et le réalisateur Feng Xiaogang (cf photo – « Aftershock » 2010 ) dénoncent à la CCPPC la censure au cinéma. Ils reprochent au programme de dérégulation de Li Keqiang de se limiter au monde des affaires. « D’ici 6 ans, plaide avec passion Feng, la Chine sera le 1er marché mondial des salles obscures. Mais sans liberté de créer, elle n’a aucune chance de concurrencer Hollywood » ! 

La TVA pour les télécoms

Parmi d’autres projets que le pouvoir peaufine, figure le passage des groupes de télécoms à la TVA (remplaçant pour eux la taxe d’affaires), et l’encouragement aux entreprises à investir hors frontières, pour un total attendu de 99 milliards de $ cette année, 10% de plus que l’an dernier. Une nouvelle qui convient bien aux édiles, dont bon nombres, richissimes, ont un pied dans le monde des affaires, et le bon !


Banque : L’arrivée de la banque en ligne
L’arrivée de la banque en ligne

Banquiers et financiers avouent ( 28/02) ne pas savoir pourquoi la Banque Populaire de Chine ( BPdC) a acheté du dollar, faisant chuter le yuan de 0,9% en 8 jours, la plus forte fluctuation depuis 2007. Depuis le 17/02, le yuan est descendu à 6,15¥ pour un dollar, soit -2%, inversant 9 ans de hausse (+34% depuis 2005). 

En même temps, la BPdC, par son gouverneur Zhou Xiaochuan, (cf photo) relâchait son emprise sur le marché interbanques, baissant le coût du crédit à court terme.
Elle surprit les traders qui pariaient sur la poursuite de l’action de l’Etat, du gel permanent dans les banques des liquidités, afin de maintenir un taux d’intérêt élevé. Il faut le dire, la tâche de la BPdC est complexe, devant à la fois combattre la banque grise et les entrées incontrôlées d’argent chaud, et juguler la bulle du crédit, désendetter l’économie, tout en évitant panique et banqueroutes en cascade.

A ce stade, les experts évoquent six motivations – qui ne s’excluent pas forcément mutuellement : - faire baisser le yuan, c’est dégonfler la bulle en douceur et s’acheminer vers une économie plus durable ;- c’est aussi encourager l’export, même si peu de secteurs en profiteront dans un premier temps, les commandes étant déjà passées ;- c’est enchérir le dollar, et gêner les Etats-Unis – donc « punir » Obama, après sa rencontre récente avec le Dalai Lama ;- à la veille de la session de l’ANP, c’est favoriser un débat de fond sur une croissance durable, qui aurait été inutile en cas de surchauffe ;- cette mesure selon certains, préparerait l’élargissement de la bande de fluctuation quotidienne de 1 à 2% ;- enfin, en baissant le yuan, on baisse le taux interbanques – on coupe la source où s’alimentait la banque internet, qui est le dernier avatar de la finance chinoise. Or, nous semble t-il, si cette raison n’est pas la plus importante, c’est la plus actuelle.

Historiquement en effet, la première de ces facilités financières online est Yu’E Bao, filiale d’Alibaba.
Elle est née de la fusion d’Alipay (son outil de paiement en ligne) et de Tianhong, Compagnie d’investissement rachetée en octobre 2013. En trois mois, Yu’E Bao a attiré 81 millions d’épargnants, soit un dizième des 800 millions de clients de ce n°1 mondial de la vente en ligne. Il a aussi drainé 40 milliards de $, avec une hausse de 50% en 30 jours. Ses atouts sont irrésistibles : on place ce qu’on veut, on sort sans pénalité, et on gagne du 7% par an, contre 3,3% offerts par les banques.
Le fait est qu’avec la stérilisation par la BPdC de leurs crédits flottants, les banques n’ont plus les fonds indispensables aux consortia et aux provinces, qui doivent se fournir, à taux plus élevé, sur le marché interbanques (29 banques partenaires) – lequel se finance sur le crédit gris et … des outils émergents tel Yu’E Bao, qui y place 90% des fonds de ses clients.
En somme, sans avoir achevé la dérégulation du crédit (empêché de le faire par les banques et les gros clients), le Conseil d’Etat l’a simplement bloqué, et ce faisant, a forcé les épargnants à aller voir ailleurs. Le mérite d’Alibaba, avec Yu’E Bao, est d’avoir inventé un des nouveaux circuits. Aussi, Tencent et Baidu, autres géants de la toile, se ruent à leur tour dans la brèche. 

Entretemps, Alibaba devrait recevoir la première licence bancaire privée et la CSRC (China Securities Regulatory Commission) annonce qu’elle prépare un cadre réglementaire de la finance sur internet : clairement, cette banque mutante de la toile est là pour durer !


Xinjiang : Attentat de Kunming – ce qui a changé

Lors de l’attentat ouïghour du 02/03 en gare de Kunming (Yunnan), la police a réagi vite: présente sur les lieux en 10 minutes, elle abattait 4 agresseurs, en blessant une autre (car le commando comptait deux femmes). Les trois derniers, en fuite, était arrêté sous 24 heures. Mais 29 voyageurs avaient été tués à l’arme blanche, et 143 blessés : traumatisme extraordinaire. 

Commentant le drame dans l’enceinte de l’ANP, Qin Guangrong, Secrétaire du Parti du Yunnan, révèle le nom du chef, un inconnu, Abdurehim Kurban. Selon lui, l’opération résulterait d’un malheureux concours de circonstances. 

Le commando aurait d’abord cherché à s’engager dans le djihad à l’étranger, et à passer au Vietnam via le Yunnan. Il aurait ensuite essayé à Canton, avec le même insuccès. C’est alors qu’il aurait décidé de retourner à Kunming pour son opération suicide. 

L’explication contredit les scénarios avancés par des experts chinois et étrangers. Ceux-ci voyaient une action préparée et calibrée. Le centre urbain, Kunming, était assez grand pour que l’attentat soit spectaculaire, mais moins protégé que les métropoles de la côte. La date, veille de l’ouverture de la CCPPC contenait un message: la Chine ne pourrait rester en paix, tant que subsisteraient ses contrôles sur la région du Xinjiang.

Or, le récit de Qin dit tout le contraire : l’action arrive presque par hasard, lancée par des désespérés, cherchant à mourir tout en faisant couler le sang… Il faut malgré tout se poser des questions sur la capacité de la Chine à détecter ces groupes à risque. 

Car ce commando de 8 Ouighours – ethnie a priori plus surveillée que d’autres – a pu se rendre à la frontière vietnamienne armé de grands coutelas, puis à Canton, chercher des passeurs, et retourner à Kunming, et enfin se ruer pour tuer sans avoir attiré l’attention. Décidément, la fameuse Commission de Sécurité créée par Xi Jinping, a du pain sur la planche. 

Quelle qu’en soit l’explication, le choc de cet attentat est historique, comparable uniquement aux soulèvements sanglants de Lhassa en mars 2008 ou d’Urumqi en 2009, loin de la côte, du cœur de la Chine moderne. La Chine doit accepter désormais l’idée qu’elle compte un terrorisme en son sein, contredisant sa vision d’elle-même comme société harmonieuse. 

Les jours suivant le crime, le pays a vu des réactions hostiles aux Ouighours, houspillés par la police ou des particuliers. Mais le 06/03, Zhu Weiqun, vice-Président à la CCPPC, avertissait l’opinion de ne pas confondre la poignée de desperados avec le peuple Ouighour, et de ne pas voir cette affaire comme un problème ethnique. 

Au même moment, Rebiya Kadeer, la Présidente en exil du Congrès Ouighour Mondial, condamnait « sans équivoque » l’acte du commando, présentait ses condoléances aux familles des victimes, et priait le gouvernement de « réagir rationnellement… sans diaboliser » son peuple. C’est précisément ce qui vient d’être fait.

Espérons ce drame a pu inspirer, aux deux bords, un sentiment d’urgence, le besoin de reprendre le dialogue pour éviter une suite encore plus grave !

Hélas à l’ANP, Nur Bekri, Président du gouvernement du Xinjiang, déclare que les preuves contre l’intellectuel Illham Tohti, arrêté pour séparatisme, « sont irréfutables ». Tohti risque la peine de mort. Bekri n’a toujours pas nommé ces preuves. Un choix de fermeté, qui ne peut favoriser la reprise du dialogue !


Petit Peuple : Los Angeles – Les caprices de Mme la Chef (partie 1)

Chaque année, les touristes de l’Empire du Milieu débarquant à Los Angeles, se font plus nombreux—surtout depuis l’accord passé en 2008, entre les Etats-Unis et la Chine pour faciliter les démarches de groupes de visiteurs.

Née chinoise, Jane (son prénom anglais, depuis sa naturalisation) s’était lancée à « L.A. » comme guide touristique spécialiste des tuhao (土豪), ces nouveaux riches chinois qui descendent en « 5 étoiles » et passent leur séjour entre restaurants primés, visites d’ Hollywood Bd, dégustation de vin de Malibu, studios d’Hollywood ou nuit au théâtre chinois Grauman (cf photo)…

En 2013, Jane reçut l’appel à l’aide de Ben, un collègue américain : 7 clients chinois, apparemment très fortunés, qui réclamaient une équipe d’accueil au grand complet -chauffeurs disponibles 24h/24, véhicules du plus grand confort, 4 guides touristiques… 

Après en avoir rêvé tant d’années, c’était enfin le service « Diamond » pour milliardaires, avec budget illimité, qui se présentait à Jane. Il y avait de quoi exulter ! Seul détail qui clochait : Ben, un rien anxieux, suggérait qu’ une des participantes serait à bichonner plus que les autres. Mais vu le cachet offert, Jane n’y pensa pas davantage… 

A la descente du vol CA987, Jane, Ben, et les autres guides reçurent le groupe. Mais dès les 1erspas des arrivants sur le tapis rouge, sous la banderole de bienvenue, Jane sentit que quelque chose ne tournait pas rond. Six personnes, en tenues austères, se comportaient de façon glaciale, entourant un petit bout de femme en capeline de soie grège et lunettes sombres, élégante mais impénétrable. Les soucis surgirent dès que la quinquagénaire ouvrit la bouche. 

Ce fut pour se plaindre de la Benz E-350 réservée par Ben. L’auto ne convenait nullement : trop ringarde, trop exiguë aussi… La dame, auxquels ses suivants ne s’adressaient que sous le titre de « Chef », exigeait un 4X4. Aussitôt, Jane et Ben appelèrent 6 agences, et virent sous 10 minutes autant de modèles haut de gamme freiner en un nuage de fumée bleutée, avant que la « Chef » ne jette en grommelant son dévolu sur une Porsche Cayenne... 

Le lendemain sur la « Promenade des Célébrités », alors que Jane entonnait son laïus en mandarin soigneusement révisé, une jeune assistante, d’un ton hautain, lui chuchota : « Ne refaites jamais cela ! On ne vous a peut-être pas passé la consigne, mais seuls nous, l’entourage, adressons la parole à la Chef. Aussi, votre topo, faites-le à moi seule. Si la chef le demande, je transmettrai ». Interloquée mais disciplinée, Jane n’eut d’autre choix que d’obtempérer… 

Un autre calvaire quotidien s’avéra le choix du dîner. Tous les soirs, 2 heures à l’avance, les guides devaient proposer les tables les plus « sélectes » de la Cité des Anges. Puis, ils y accompagnaient un membre de la garde rapprochée. Ce dernier convoquait le patron du restaurant, lui faisant décrire ses spécialités – la « Chef » raffolant des authentiques plats « signature ». Puis on goûtait pour elle, tout en vérifiant le reste—salle, décoration, cuisines, la propreté de la cristallerie et des casseroles en cuivre étamé… 

De retour à la suite de l’hôtel, la Chef -toujours en maugréant- choisissait entre ces différentes adresses, sur base des menus et photos. Mais avec elle, tout était possible et il arriva qu’insatisfaite, elle rejette tout en bloc. Dans ce cas, tout était à recommencer. De la sorte chaque repas se transformait en affaire d’Etat.

De même, toute envie passagère virait vite au caprice. Un midi, le soleil au zénith, « on » avait soif. Jane et Ben furent dépêchés au supermarché le plus proche, acheter de quoi la désaltérer. Mais pour dénicher le produit idoine, pas moins de 4 aller-retour furent nécessaires. La limonade fut refusée : la Chef ne buvait que du «lime»; puis la bouteille fut rejetée car trop grande – elle ne pouvait souffrir de poser ses lèvres sur autre goulot que celui du petit modèle. La flasque en plastique fut dénoncée avec horreur - seul le verre, comme emballage, était admissible, tout le monde savait cela ! À chaque refus, le va-et-vient prenait 10 minutes : la Chef insistait pour que le produit soit retourné et remboursé… 

Sous cette douche écossaise de désagréments inattendus, Jane se demandait chaque soir avec angoisse, comment échapper à la tuile finale, dite « zài jiénàn táo » (在劫难逃 – « une calamité inévitable ») ! Pour connaître la suite du calvaire de Jane, rendez-vous au prochain numéro du Vent de la Chine !


Chiffres de la semaine : 4,2 milliards en circulation, 28% de la population, Shanghai 21ème…

4,2 milliards de cartes bancaires (débit et crédit) sont en circulation en Chine continentale – soit environ 3 par personne !

28% de la population chinoise sont des fumeurs, ce qui représente 300 millions de personnes. Le tabac en tue 1 million chaque année…

Shanghai 21ème et Pékin 47ème au classement des villes les plus chères. La première place est attribuée à Singapour (notamment à cause du prix de ses transports, de l’électricité, et des vêtements) et détrône ainsi la capitale japonaise, Tokyo.  Paris, arrive 2ème, suivie de Oslo, Zurich,  Sydney, Caracas, Genève, Melbourne, Tokyo et Copenhague. 

En bas du classement, on trouve New Delhi, Mumbai, Alger, Panana et Bucarest…(source : Worldwide Cost of Living survey).

1031 yuans ou 122 euros : c’est le montant moyen déboursé à l’étranger par un touriste chinois pour une chambre d’hôtel.


Rendez-vous : du 10 au 16 mars 2014
du 10 au 16 mars 2014

Rdv11-13 mars, Shanghai : Spinexpo – Salon des fibres, fils et tricots ; 

<p>12-14 mars, Canton : China LAB –Salon et Conférence sur les appareils d’analyse ; 

13-15 mars, Qingdao : Salon de la fonderie et industrie du métal ;

14-17 mars, Shanghai : Salon de l’ immobilier ; 

18-20 mars, Shanghai : Semicon China – Salon des équipements pour semi-conducteurs ;

18-20 mars, Shanghai : Solarcon – Salon de l’énergie photovoltaïque ;

18-20 mars, Shanghai : Laser World of Photonics.