Le Vent de la Chine Numéro 24

du 26 juin au 2 juillet 2011

Editorial : Une fois de plus, le PCC cherche son âme

Dans la légende dorée de la révolution, les historiens fixent au 1/07/1921, à Shanghai, la naissance du Parti communiste chinois (PCC), en son 1er Congrès (clandestin). Aujourd’hui, son 90. anniversaire fait des remous. Accompagnant l’introspection du régime et sa quête d’avenir, un «tsunami rouge» déferle sur le pays.

De façon inattendue, c’est un outsider, «ermite» exilé à 2000km de Pékin qui profite du retour de la nostalgia maoïste. En cinq ans de mandat, BoXilai, secrétaire du Parti à Chongqing, a su se forger l’image d’un gardien inflexible de l’âme chinoise, auprès de qui 8 des 9 membres du Comité Permanent se sont rendus en pèlerinage. Depuis 2009, Bo Xilai fait campagne et rassemble dans les parcs des choeurs géants pour entonner inlassablement le répertoire complet de la révolution de 50 ans avant.

Et ça marche : le «modèle de Chongqing» fait école. Le 16/06, 90 ministres ou vice-ministres chantent ensemble à la TV l’hymne « mei you gongchandang ». Les plus puissants patrons de l’internet partent plusieurs jours se recueillir sur des sites sacrés, tel Jinggangshan, où Mao préparait en 1927 sa révolution-(ratée)-des-paysans.

Au cinéma, Début de la grande renaissance, navet de saison, règne en despote, profitant du carton rouge temporaire aux blockbusters hollywoodiens. Du Jiangxi au Sichuan, des armées de marcheurs refont la Longue Marche. Potentiellement, la mode gauchiste fait de Bo Xilai l’homme le plus influent (en plus d’être le plus affirmé) du Comité Permanent de 2012 (où sa place semble sure). Même Xi Jinping, futur n°1, fut forcé à surenchérir, devant l’École du Parti en mai, donnant aux étudiants l’instruction (peu plausible) d’approfondir leurs lectures de Mao et de Marx !

En fait, ce coup de barre à gauche n’ est pas apprécié de tous, tel Wen Jiabao, l’amer Premier ministre, craignant le blocage de la réforme sous les « vestiges de société féodale et l’influence pernicieuse de la Révolution Culturelle ». Parmi les 80millions de membres (dernier décompte, dont plus d’1 million de nouveaux – étudiants), une majorité murmure ou cache ses doutes, sous l’explosion des émeutes, de l’inflation, de la corruption.

Ils craignent que la frange dure au pouvoir ne prenne prétexte de la crise pour étouffer toute pensée divergente, prenant l’immobilisme pour la recette du pouvoir éternel. Comme ce Général Li Jinai, membre de la Commission Militaire Centrale (CMC) et commissaire politique de l’armée (APL) qui réaffirme le lien organique entre armée et Parti, et rejette l’idée d’une APL «prenant ses ordres de la nation». Ils craignent aussi la dérive d’un appareil de nantis, sourds aux soucis de la rue. Ils redoutent enfin le déchirement du Parti, que vient de révéler l’émergence de centaines de candidats indépendants aux assemblées populaires intermédiaires. Confrontée à des alternatives issues de la base, le principe même d’une pensée unique, prend un coup de vieux !

Sur le fond : dans la liste des 9 futurs leaders, 6 noms émergent : Xi Jinping, Li Keqiang, Li Yuanchao, Wang Yang, Wang Qishan et Bo Xilai. D’autres suivent, d’espoirs de relève, tel Hu Chunhua, Secrétaire de Mongolie Intérieure.

En définitive, les inflexions de l’avenir viendront d’alliances pas encore réalisées, qui prendront le pas sur les individualités. Le clivage «gauchiste/réformiste» va-t-il revenir, relayant les factions des «petits princes» (celle de Bo Xilai, et de Xi Jinping) et de la «Ligue de la jeunesse» (celle de Hu Jintao, et de Li Keqiang) ?

Quelle sera la pression des lobbies industriels (électricien, pétrolier), des provinces rurales populeuses (Henan, Sichuan) ?

Autre question forte, quelle sera la légitimité de l’appareil, aujourd’hui fortement entamée par la récession et les raideurs idéologiques ? Une relance de la réforme est à des années lumières. Mais en attendant, qu’offrir aux couches néo-bourgeoises pour les faire patienter et leur rendre confiance en la capacité gestionnaire de l’appareil, surtout en cas de baisse de la croissance ? La stabilité future dépend probablement de ces paramètres-là !

 

 


A la loupe : Le luxe en Chine : un malentendu à la base

En éclairage d’un article sur le luxe en Chine à paraître la semaine prochaine, voici cet éclairage linguistique du sujet par Renaud de Spens, expliquant que sur le terme de luxe aussi, entre Chine et Occident, il y a maldonne.

NB : les opinions qui suivent, sont celles de l’auteur !

Les traductions en chinois de concepts occidentaux, fin du XIXe siècle et XXe siècle, sont souvent fausses et continuent à alimenter aujourd’hui les malentendus culturels.

C’est le cas de la notion de luxe. “Luxe”, en français (racine de l’anglais luxury”), possède une valeur ambiguë, empruntée au latin “luxus”, “splendeur, excès”, mais qui vient simplement de “lux”, “lumière”.

C’est pourquoi le mot peut à la fois être péjoratif, synonyme de “débauche” (sens qui a survécu dans son dérivé “luxure”) et mélioratif, synonyme de raffinement.

Mais quand, occidentalisation aidant, il a fallu traduire la locution “produit de luxe” en mandarin, c’est un terme ancien mais toujours perçu comme immoral en culture chinoise qui a été choisi, 奢侈 (shēchǐ).

Le 1er caractère 奢 désigne littéralement “ceux qui aiment paraître grands”, et le 2d 侈 décrit un homme submergé de biens, riche ou arrogant au-delà de toute bienséance. Si on voulait retraduire dans l’autre sens 奢侈品, cela donnerait un genre de “produit ostentatoire pour nouveaux riches” : bien loin du “luxe, calme et volupté” de Baudelaire, mais peut-être plus proche de la réalité du marché.

Dans un sens positif “Luxe” se traduirait plutôt par 奢华 (shēhuá),  华丽 (huálì) 华美 (huáměi), voire 精彩 (jīngcǎi)。 Le caractère 精 (jīng) est intéressant, car il représente l’essence, et par extension le raffinement, et figure dans la locution idiomatique 精品 (jīngpǐn), “produit de bonne qualité”. Le label “produit de bonne qualité”, utilisé par toutes les bonnes marques, a-t-il quelque chose à voir avec le luxe ?

La différence essentielle est qu’un “produit de bonne qualité”, dans l’acception chinoise, est “toujours bon, mais pas toujours cher”, quand un “produit ostentatoire pour nouveaux riches” est “toujours cher, mais pas toujours bon”. Le sac Louis Vuitton porté en bandoulière, ne gagnera toute sa valeur sociale qu’après que son possesseur ait affirmé “c’est un vrai” à ses relations, révélant plus le prix payé que la qualité. Il faut cependant nuancer : nombre de riches consommateurs chinois se tournent aussi vers le luxe, notamment étranger, parce qu’ils se sentent incapables de distinguer la qualité ou le goût des produits, et qu’ils comptent sur le label “luxe” pour pallier leur ignorance.

Dans le passé, la production de luxe était en Chine, comme en France, étroitement liée à la Cour. Les meilleurs plats culinaires, les plus belles porcelaines et soieries, étaient conçus dans les ateliers impériaux et influençaient peu à peu l’industrie bourgeoise. Les destructions culturelles de la révolution de 1911, puis du maoïsme, ont réduit le luxe et l’élégance chinoise à néant.

Une fois rétabli, à partir des années ’80, le droit à consommer des produits inégalitaires et discriminants, nouveaux riches et “héritiers rouges” n’ont pu restaurer l’ostentation de leur classe qu’en se tournant vers des marques de luxe étrangères. Mais depuis, l’industrie et l’artisanat chinois de haut vol reprennent leurs marques et font leurs gammes.

Est-il absurde de croire le temps, plus si éloigné, où cette culture du luxe asiatique enfin réveillée, les géants européens auront à se battre et à faire preuve d’audace et d’inventivité pour rester sur leur piédestal ?

 

 


A la loupe : Intempéries et débat sur l’eau

L’année 2011 présente tous les signes d’une année charnière pour le dérèglement climatique en Chine.

Au Centre, la sécheresse a privé de nombreux cantons de toute récolte de riz précoce, et subsiste sur 4,81Mha de cultures. Tandis qu’ailleurs (centre, nord et sud), des trombes s’abattent sur des sols craquelés hors d’état de les absorber. Après deux semaines et cinq orages homériques, 35 millions d’habitants sont affectés, dont 1,64 millions évacués.

Au 20/06, on dénombre déjà 260 morts ou disparus, et on s’attend cette année à dépasser les 4300 pertes humaines de 2010. En aides de 1ère urgence, 175M¥ ont été débloqués.

Le Zhejiang est le plus touché : après rupture de digues, 241.000 ha d’emblavures, 20% de la récolte (maïs, maraîchers), sont perdus. A Hangzhou, le prix des légumes ont grimpé de 40%, tandis qu’au Hubei, le riz de mi-saison, juste repiqué, est noyé. Pékin évalue les pertes à 5MM$.

Sécheresse et crue, ces fléaux contradictoires ont soulevé ces dernières semaines une polémique sur le rôle des barrages, notamment celui des Trois Gorges, le plus grand du monde avec son réservoir de 600km de long et ses 18Gw de capacité hydroélectrique. L’Etat l’imposait en 1992, sans réel débat, invoquant comme atout principal sa fiabilité pour réguler les crues et le climat. Mais il admettait pour la 1ère fois, il y a deux semaines, les effets pervers de l’outil, auxquels il promettait d’apporter solution «en 10 ans».

Dans ce contexte, l’arrivée précoce du front de pluies sur le pays, le plus abondant depuis 1966, donne à la Corporation des Trois Gorges une chance inespérée de balayer les critiques. Sans sa capacité d’absorber 113.000m3/seconde, faisant remonter le 23/06 le réservoir de 2m à 147,28m, les pertes auraient été décuplées, y compris en vies humaines.

Quant à la sécheresse, la Corporation, bonne citoyenne, a fourni contre elle une « cuirasse » en déstockant pour l’irrigation et la navigation, une partie des 26MMm3 retenus l’année précédente. Et d’enfoncer le clou, confirmant la construction pour 62MM$ de quatre nouvelles unités sur la Jinsha, affluent du Haut-Yangtzé (Sichuan, Yunnan). Xiangjiaba et Xiluodu seront en eau en 2012 et 2013. Wudongde et Baihetan sont encore au stade du design. Ensemble, elles auront une capacité de 43Gw, le double de la grande soeur des Trois Gorges.

NB : Pour autant, ces arguments et manoeuvres n’éteignent pas les doutes. Peu après l’arrivée de ces ouvrages géants, des données nouvelles apparaissent. La montée en eau du réservoir amollit les berges multipliant les glissements de terrain et les lames de fond traversant le fleuve. De même, le risque sismique n’a pas été suffisamment pris en compte : posé sur une faille, le réservoir de Zipingpu a pu peser sur la croûte terrestre, une des causes envisagées pour le séisme du Sichuan en mai 2008, dont l’épicentre n’était qu’à 15 km de l’ouvrage.

Enfin et surtout, ce qui manque le plus, est la gouvernance sociale, le contrôle des fonds alloués aux cadres locaux pour gérer les ressources au titre du relogement des déplacés, du retraitement des eaux usées etc. Les riverains expriment de plus en plus leurs doléances, réclamant le respect de leurs droits antiques sur « leur » eau : avec la pénurie qui s’annonce, l’acheminement de 3% du Yangtzé vers Pékin, sans compensation aux populations locales, passera mal !

 

 


Argent : Salon du Bourget : débuts réussis pour la COMAC

Le salon du Bourget restera dans les annales de Boeing et surtout d’EADS (Airbus) comme jour de gloire, avec 700 commandes fermes pour son Neo-A320 à nouvelle motorisation, promettant jusqu’à 15% d’économie de carburant. Mais il a permis aussi, discrètement et efficacement, l’entrée de l’aéronautique chinoise dans le grand jeu mondial—ce que le Japon, par exemple, n’a jamais su faire.

D’abord, la COMAC, la corporation chinoise, a ouvert son bureau parisien c’est-à-dire européen, lui permettant de démarcher plus directement les flottes des 27 Etats- membres. C’est son second bureau, après celui aux Etats-Unis.

Ensuite, la COMAC présentait ses deux modèles, l’ARJ21, de 100 places, dont la certification est attendue fin 2011, et son C919, de 168 places, à sortir en 2016. Cet appareil à la ligne si proche de l’Airbus A320 bénéficie d’accords de coopération avec 17 groupes mondiaux, tel Safran-CFM (GE), dont le moteur « Leap », celui du Neo équipera le C919, lui assurant les mêmes performances en carburant. CFM met d’ailleurs la dernière main à une usine chinoise pour monter le Neo en Chine.

Prompt à saisir la balle au vol, fut le groupe Ryanair, dont le PDG M. O’Leary, signait une déclaration d’intention pour 200 commandes, sous réserve d’élargissement de l’habitacle à 178 places. Ryanair «négocie» en même temps, mais sans signer, avec Boeing et Airbus… jouant la concurrence, l’élargissement de l’offre, le bris du monopole des deux géants du transport aérien !

 

 


Pol : Ai Weiwei, l’enfant terrible pardonné

C’est par ses actions les moins prévisibles, que la Chine offre ses clés les plus précieuses. Comme la libération d’Ai Weiwei la nuit du 22/06, après plus de 80 jours de prison pékinoise.

Après ce signal d’exaspération du régime, on s’attendait à un traitement dur, comme pour Liu Xiaobo, le Nobel de la Paix, condamné à 11 ans. Ai WeiWei est élargi parce qu’il aurait reconnu ses « crimes » fiscaux, et promis de rembourser. Il aurait aussi eu une «bonne attitude». Mais cette « liberté » est assortie de conditions strictes, comme celle de réserve vis-à-vis de la presse, durant « au moins un an » – même sur Twitter, où il avait 80.000 fans, auxquels il confiait ses critiques du système socialiste…

Pékin semble avoir décidé que la leçon à son «enfant terrible», avait porté. Pour quelles raisons ?

Pour éviter un prochain prix Nobel en 2012 ? Pour que Wen Jiabao ait meilleur accueil à Berlin et à Londres (24-28/06) ? Plus plausiblement, car ce régime, tout en se donnant l’apparence d’un blindage conservateur, est en fait plus pragmatique et moins uni (cf Edito Vdlc 24)). En l’occurrence, sa libération a bénéficié d’une majorité au Comité Permanent—pour relâcher la pression et commencer à chercher à redorer son image, au risque de se déjuger.

NB : cet indice de clémence atypique par les temps qui courent, est confirmé par la libération (23/06) de Xu Zerong, politologue Hongkongais, condamné en 2001 pour divulgation de secrets d’État à 13 ans, dont trois graciés.

 

 


Temps fort : Conjoncture—la Chine au bas de la côte

Après un an d’efforts des autorités financières pour assainir les finances publiques et passer à une croissance «durable» basée sur le marché intérieur, des résultats apparaissent—mais sont évidemment insuffisants.

Certes, par ces quatre hausses des taux d’intérêts, et neuf hausses des réserves bancaires, 400MM² de crédit flottant ont été mis hors circuit—qui pourraient suffire à amortir les prêts irrécupérables des provinces (460MM$, dit Wang Tao de l’UBS).

Les prêts ont atteint en mai leur niveau le plus bas en 8 mois, à 551,6MM¥ -dans l’espoir de limiter les invests « politiques » et sans marché. Pékin pourfend l’inflation sur tous les terrains, notamment l’alimentaire. Pour l’immobilier, le prix du neuf a monté en mai de 6%, mais a commencé à baisser sur le marché de l’occasion—il reste hors de portée pour 74% des acheteurs. Une chasse aux péages abusifs sur des tronçons déjà amortis, est lancée (aéroport de Pékin ou le pont de Zhengzhou-Henan).

Mais face à ces pâles embellies, cent chiffres se pressent pour démentir l’optimisme.

L’export a encore généré ce mois-ci un surplus de 13MM$, que l’État aimerait bien rééquilibrer, pour prouver que la croissance désormais, se fait sur le marché intérieur, et pour faire taire à l’étranger les demandes d’une réévaluation du yuan. Une coupe de 4 à 5% dans les restitutions de taxes à l’export, est d’ailleurs en étude avancée, pour parvenir à la tendance ouvertement souhaitée, le déficit commercial !

Autre mauvais chiffre : à +26% en mai, les investissements d’équipements restent très vifs : « comme ressort du PIB, l’exportation a été remplacée par l’infrastructure», commente P. Chovanec, professeur à Tsinghua, Mais ce type de croissance ne crée pas d’emplois ni de richesse pour la population, faute de faire travailler les PME – il n’y en a que pour les groupes publics.

Côté inflation, la courbe atteignait 5,5% en mai – 12% pour l’alimentaire— les crues au centre la Chine aggravent la tendance. Pour juin, l’inflation atteindrait 6%, nourrie par les matières 1ères (énergie, acier) et les grands groupes, qui parviennent toujours à accéder au crédit malgré l’austérité. Les micro-entreprises de même, peuvent se financer par épargne de proximité. En fait, le véritable poids du resserrement du crédit pèse sur les PME, qui ne trouvent plus de crédit hors des banques grises, (6 à 10% par mois), ce qui les conduit à la faillite.

La consommation marque donc le pas—la fin de la prime automobile n’arrange pas les choses: en mai, la consommation privée a augmenté de 16,9%, chiffre faible. Ceci est d’autant plus décevant, que les hausses moyennes de salaires de 40% en 2010, seront suivies de 20 à 30%/an durant le XII. Plan.

L’État promet aussi 25% de son budget à la Sécurité sociale (le 21/06, le fonds national de pension rachète 11% de l’assureur PICC, 1,55MM$). Mais chez les «petits», apparemment, la hausse des salaires est largement absorbée par l’inflation. Les riches eux se protègent en courant vers des placements spéculatifs : les 604 tonnes d’or achetés en 2010 en bourse de Shanghai (+ de 20% du monde), et l’actuelle ruée en milliards de $ sur l’immobilier haut de gamme entre Paris, Londres ou New York…

En 2010, se rappelle Michael Pettis, l’économiste de Beida, le consommateur chinois ne dépensait plus que 34% du PIB, la moitié du score américain. Pour faire remonter le chiffre à 40%, d’ici 2016, objectif du Plan, la consommation devait augmenter de 3% de plus que le PIB, ce qui aurait marqué un nouveau record historique mondial. Mais à ce jour, le mouvement n’a pas démarré : la colle met du temps à prendre….

 

 

 


Petit Peuple : Pékin – un moment d’égarement

En fait, ce qui arrache Shi Baikui à son destin terne, est la dramatique aventure de la nuit du 8/04, et l’étincelle de génie qui brilla quelques heures en lui, avant de se ré éteindre, le replongeant dans sa gangue de banalité.

Originaire de Shizhuang, pauvre hameau dickensien du Shandong, aux masures de guingois, les paysans vivaient là, hagards, aux poitrines creuses, tel Shi Xihua, son père, malade et endetté chronique. Les 3 enfants analphabètes-après avoir quitté l’école à 12 ans – malingres, aidaient le père sur les chantiers.

A 15 ans, en 1998, Baikui tomba d’un échafaudage et se rompit l’échine : il y resta bloqué à sa taille définitive, 1m60. Ce qui le força bientôt à partir pour la ville, trouver sa pitance en petits jobs précaires, dormant en dortoir. Il ne retournait qu’une fois l’an, au chunjie, histoire de prouver aux parents qu’il demeurait en vie. Il passa 10 ans à cette vie végétative, désespérant Li, sa mère, de le voir se marier – mais quelle fille aurait voulu du pauvre illettré ?

Octobre 2010 : n’y tenant plus, sa mère lui imposa ce qu’elle croyait être l’idée géniale, mais qui hélas, ferait son malheur. Elle l’inscrivit à un stage de soudure à l’arc, dont il sortit armé d’un CAP. Suite à quoi mi-février, avec son frère et son beau-frère, ils partirent pour Hohhot (Mongolie Intérieure), monter une centrale électrique.

Mais une fois là-bas, une vieille connaissance guettait Baikui. A 50m de hauteur dans un harnais, il lui fallait chaque jour souder des plaques de fonte sur la paroi de la chaudière. Le vertige le saisissait, éveillant le souvenir de sa chute d’adolescence… A ce régime, il tint 40 jours : fin mars il prit sa paie, complétée de 300¥ du frère, pour rentrer au village -auquel il n’arriva jamais…

En effet, cette peur dégradante et l’humiliation subie l’avaient fait disjoncter. Une mystérieuse alchimie de l’âme l’avait libéré, lui faisant sauter deux étapes initiatiques. Jamais il ne chercherait plus un emploi stable, et jamais plus, il ne mangerait de la soupe à la honte. Rebelle, il ne pensait plus qu’à vivre !

Pétries d’errances, les semaines qui suivirent demeurent mal documentées. Ce qui est sûr, est qu’il monta à Pékin pour s’offrir les excentricités que lui permettait son budget famélique. Quoique misérable, il était libre à présent, et vivait tous les rêves de sa vie.

Le 8/06, à la Cité Interdite, il visitait une expo inattendue d’accessoires en maroquinerie, ornés de pierres précieuses, venue de Hong Kong. Et c’est là que lui vint l’idée satanique de s’enrichir pour toujours, écraser du pied guigne et mal-être. S’écartant du groupe, Baikui se cacha dans une resserre à outils. Il en sortit vers 22h, et traversant l’espace désert, brisa à la masse un mur de placoplâtre pour «revisiter» l’expo, explosant les vitrines, empochant la joaillerie.

Dehors, il faillit se faire épingler par un vigile-heureusement distrait. Sauvé par la pénombre centenaire, Baikui prit la clé des champs sautant de toit en toit avant de se laisser glisser jusqu’à la rue, du haut des 10m du mur d’enceinte.

Le lendemain, les conservateurs consternés comptaient les dégâts : il y en avait pour plus d’1M² d’objets prêtés par le magnat Fung Yufai, du musée Liangyi, de HK, donc étranger: la perte de face était complète…

Ensuite, les choses se gâtèrent. Autant l’effraction avait été inspirée, autant le recel trahit l’amateur, accumulant les fautes. Avoir semé 2 pièces sur 9 dans sa fuite, avait mis la police sur sa piste. Il n’avait pas idée de la manière de convertir son butin en renminbi sonnants et trébuchants… Dans un café internet, le 11 au soir, il se fit prendre fourguant sa camelote pour quelques thunes : discrètement le loufiat donna l’alerte et l’amusa, laissant aux policiers le temps de le cueillir. En’87, le dernier monte-en-l’air à la Cité Interdite avait reçu la perpétuité. Pour son acte insensé, Baikui ne peut espérer mieux : c’est ce que l’on appelle en Chine «一失足成千古恨 yī shī zú chéng qiān gǔ hèn» (l’instant de folie qui grille toute une vie) !

 

 


Rendez-vous : Shanghai, Conférence sur la logistique du secteur auto

28-30 juin, Shanghai : Salon de l’approvisionnement pour l’électronique

28-30 juin, Shanghai : Automotive Logistics Asia Conférence sur la logistique dans l’industrie automobile

28-1er juillet, Shanghai : EASTPO, Salon de la machine-outil

30 juin -2 juillet, Canton : Hosfair, Salon des fournitures pour l’hôtellerie

30 juin-2 juillet, Canton : Salon des vins et spiritueux