Le Vent de la Chine Numéro 34

du 21 au 27 octobre 2007

Editorial : Congrès : le nouveau pouvoir

Suite au vote «primaire» des 2217 délégués,  la direction duParti communiste chinois (PCC) a fait élire (les 21 et 22/10) la prochaine équipe de leaders, pour un quinquennat jusqu’en 2012.

Vote sans surprise aucune, d’un Comité Central (CC) de 300 membres, lui-même nommant un Bureau politique (25 membres), lui-même créant le Comité Permanent (CP, 9 membres). Emerge ainsi une liste de 9 hommes, avec à leur tête Hu Jintao (1er Secrétaire, Président de la République, patron de l’armée -APL), Wen Jiabao (Président du Conseil d’Etat, 1er ministre), Wu Bangguo, Jia Qinglin, Li Changchun. Ainsi que Xi Jinping, Li Keqiang,  He Guoqiang et Zhou Yongkang.

Les cinq 1ers sont les anciens, qui se sont auto prorogés. Wu, Li et Jia avaient été imposés en 2002 par Jiang Zemin, contre Hu Jintao, à qui il léguait ce terrain miné. Et trois  des quatre  néophytes sont poussés par Zeng Qinghong vice-Président sortant, ex-bras droit de Jiang. Ayant ainsi placé son écurie, Zeng part de son plein gré : pour mieux jouer  depuis les coulisses, dans le rôle où il excelle : celui d’éminence grise.

Mais ce tableau montre aussi chez Hu Jintao, le chemin parcouru depuis 2003, et les difficultés immenses qu’il a dû affronter. A son entrée aux affaires, il sortait de 10 ans d’inaction forcée par Jiang Zemin, et n’avait pu imposer qu’un compagnon: Wen Jiabao. A présent, ayant su enrayer avec brio la crise du SRAS (Syndrome Respiratoire Aigu Sévère) et l’endettement en MM$ des entreprises d’Etat (cf p.3), Hu Jintao parvient à se reconduire dans ses fonctions, et dispose désormais de sa faction au sein du Comité Permanent, l’organe suprême.  Il a aussi su imposer ses mots d’ordre, qui sont en Chine la moitié du pouvoir : société harmonieuse (le terme revient 33 fois en son rapport d’exercice), développement scientifique (38 fois), réforme et ouverture (x21) et société de moyenne aisance (x14). Les slogans les plus forts restent ceux « oecuméniques », du nationalisme (socialisme aux couleurs de la Chine, ou sa variante, sinisation du marxisme) x52, et bien sûr de la démocratie (x60).

Par contre, Hu ne gagne pas tout, voyant son propre dauphin Li Keqiang, repoussé au profit de Xi Jinping, l’habile Secrétaire du parti de Shanghai, poussé par Zeng Qinghong, qu’il va remplacer comme Vice Président. Li n’obtient que le prix de consolation : vice 1er, puis1er ministre dans 5 ans.

On l’a deviné : ce nouveau pouvoir comporte non deux, mais trois groupes. Celui de Hu Jintao, le « gang de Shanghai », mouvance qui partage ses fidélités entre Jiang et Zeng (He Guoqiang, Zhou Yongkang). Les hommes restants pencheront tantôt pour l’un, tantôt pour l’autre : Wu Bangguo, Li Changchun, Jia Qinglin et Xi Jinping. A voilure variable, ce groupe-là tient la majorité, et joue l’arbitre : il exprime la majorité silencieuse au Comité Central, genre de directoire qui se méfie des hommes providentiels et ne veut plus d’autre Mao!

NB : sur le plan de la lutte de pouvoir, ce XVII. Congrès reste classique, avec son lot d’intrigues, de camarilla et de retournements opportunistes. La rupture de ce congrès, se trouve au niveau des influences et des politiques, avec l’apparition d’une influence imprévue : la globalisation  (cf article colonne de droite) !

 

 


Temps fort : Avenir : des politiques liées à une majorité

Dans son rapport d’exercice (15/10), faute de majorité, Hu Jintao a été obligé de composer. Il en résulte un discours reprenant les thèmes chers à tous les bords, gardant toutes les portes ouvertes, sans engagement… ni rupture ! 

Aux libéraux, il murmure quelques réformettes, telles ces élections des assemblées de base (sans pouvoir nominatif ni budgétaire), ou celles des cadres par les enceintes de base du Parti : c’est la démocratie «de base», ou «interne».

A l’armée (APL), à ses protégés du monde rural, il promet des crédits. A tous, il annonce la « moyenne aisance » et la « démocratie complète » d’ici 2020, quand le PIB aura quadruplé depuis 2000. Cet âge d’or est donc accéléré de 30 ans, par rapport aux promesses tant de Deng Xiaoping dans les années ’80, que de Zhu Rongji en 2002, qui prophétisaient le rattrapage de l’Occident pour 2050.

Hu dévoile son grand message: le «pouvoir doux», thème présent dans ses discours depuis cinq mois. Le concept regroupe les bonnes manières face à l’étranger, plus de «gentillesse» des cadres, capables d’entendre les «émotions» des masses. Il doit aussi être une affirmation culturelle en Chine et dans le monde, par l’art et l’enseignement —les instituts Confucius par exemple. Hu veut changer l’image du pays, lui donner la conscience adulte d’une puissance mondiale, assumant sans complexe ses responsabilités.

Mais à ce beau programme que de freins et pesanteurs!

[1] le refus des lobbies industriels d’une limitation des rejets de CO²,  contre le réchauffement global (Kyoto2) ;

[2] les opposants à tout ce qui fait le dialogue social (liberté de presse, d’ONG etc),

[3] le maintien « pour 10.000 ans » des privilèges des cadres. Ici, le maintien au Comité Permanent d’un apparatchik compromis, porte un coup dans la rue, à la crédibilité de la campagne contre la corruption. Même si deux autres cadres un peu moins hauts, viennent d’être mis en examen – Chen Tonghai, ex-boss de Sinopec, et Kang Huijun, l’ex- «seigneur de Pudong »…                                              

NB : Au Congrès, s’exprime une sensibilité politique nouvelle avec l’apparition de l’étranger, que l’appareil regarde, tout en s’en sachant regardé, voire interpellé. Il apparaît via le thème dominant de l’écologie, et à travers ce désir de « soft power », volonté de prendre sa place dans le club des nations. Comme si la Chine prenait conscience d’un problème global grave, qui s’exprimait symboliquement à travers la température minimale moyenne à Pékin lors du Congrès : 11°, soit 5° de trop ! 

 

 


Pol : Congrès—rumeurs de salles et de couloirs…

Congrès—rumeurs de salles et de couloirs

Une semaine durant, le XVII. Congrès confronte les 2217 cadres, industriels, artistes et sportifs de tous les horizons, et 1100 journalistes locaux et étrangers, permettant la collecte de nouvelles d’ordinaire inaccessibles. Sous l’aspect bon enfant, on constate une information, en fait, triée et répétée – ce que le régime veut montrer comme ses succès : 

1.  Li Rongrong, patron de la SASAC (tutelle des grandes entreprises d’Etat – GEE) décrit la convalescence du secteur public, une des réussites du cabinet Wen Jiabao. Férocement dégraissées de 2003 à 2006, elles sont passées à 119.000 firmes (-31.000). Leur chiffre d’affaires a monté de 51% à 1600MM², et leurs profits de 147% à 120MM². Quand aux grandes entreprises d’Etat, elles ne sont plus que 155 (-41), mais ayant gagné 85% en chiffre d’affaires…

 2. Zhang Deqiang, l’apparatchik formé à Pyongyang, Secrétaire du Parti à Canton, affirme qu’entre 2006 et 2007, émeutes et manifs ont diminué de 25% par an—grâce à son intervention rapide sur ces conflits nés de la corruption ou le recul écologique. Canton est le labo social de la Chine, la société (100M hts) la plus avancée et prospère—où les crises d’avenir se déclarent en premier.

NB : A Xiangtang (Canton) on conteste les propos de Zhang. Depuis 14 semaines, les villageois occupent la mairie, accusant le maire (non élu) de malversation, et prétendant élire le prochain !

 3. On parle fort de programme spatial, investissement idéologique et technologique lourd. Chang-E/1 Orbiter décollera le 24/10 de Xichang (Sichuan), destiné à effectuer des travaux de cartographie holographique de la Lune et étudier la teneur en éléments tel l’hélium-3, dit Zhang Qingwei, commodore de la COSTIND (Commission of Science, technology and Industry for National Defense). Quinze ans plus tard, la Chine veut avoir sa station permanente habitée sur sol sélène. Yang Liwei, 1er astronaute chinois, a signalé son ambition de fonder la 1ère base politique spatiale : une cellule du Parti, soit trois membres minimum, afin d’étudier et commenter les décisions prises au niveau central. Toutefois, Yang ne pense pas que les trois membres de la prochaine mission Shenzhou-VII (destinée à s’initier aux techniques de sortie dans l’espace) doivent eux aussi fonder une cellule dans le grand néant…            

NB : la Lune est un objectif prioritaire à toutes les nations spatiales émergentes. Le Japon vient de placer (4/10) son satellite Selene sur orbite, l’Inde prépare le sien «pour 2008». L’enjeu est entre autres, d’entrer au club spatial mondial. Li Xueyong, vice-ministre des sciences, a confirmé aux journalistes la candidature chinoise, comme 17ème nation membre de la station spatiale internationale.

 

 


Argent : Dans la Foire de Canton, tout est bon

Dans la Foire de Canton, tout est bon

      Du 15 au 30/10, la 102ème foire de Canton se fait toujours plus grande, 15.000m² (+50%) et 840 stands (+25%). 480 exposants de 57 pays/provinces s’y disputent la faveur de 100aines de milliers d’acheteurs venus des 5 continents.

Les Taiwanais sont en masse (107 exposants), suivis des Malais (56), des Coréens (52) et des Hongkongais (49). Ensemble, ils représentent 15.000 groupes industriels et des millions de gadgets en 9 secteurs, sauf le jouet, qui suivra sous quelques jours, sans état d’âme. Depuis le XVII. Congrès à Pékin, ses patrons manifestent une confiance sans ride, impavides aux nouvelles des 10ainesde M de rappels pour cause de qualité : leurs carnets de commandes sont en hausse de 27%. Or, ce son de cloche semble s’être fait l’antienne de toute la foire : « rappels, connaît pas, chez les autres peut-être, mais pas chez nous!» En effet, les faiblesses de qualité ne font pas oublier, chez l’acheteur, sa motivation première : la garantie du meilleur prix mondial, afin de permettre au Kenya d’acheter ses GSM, à l’Inde ses ordinateurs, à l’Argentine ses perceuses, à l’Afrique du Sud, ses boites en plastique… « Les chameaux aboient, la caravane passe! ».

Les banques chinoises se ruent sur l’Amérique

Dans les couloirs du Grand Palais du Peuple (16/10), Jiang Dingzhi, n°2 à la tutelle CBRC (China Banking Regulatory Commission), dévoilait que la banque Citic allait racheter 20% de Bear Searns, le n°5 du courtage US, en difficulté suite à la crise des subprimes -valeurs basées sur des créances hypothécaires douteuses.

Comme toutes les banques chinoises, Citic croule sous le cash, celui dû à son entrée en bourse d’avril dernier (6MM$), et surtout celui des clients investissant en bourse via ses fonds mutuels. Le lendemain depuis le même lieu, Citic émettait un demi-démenti («pas avant 3 mois»). Entre-temps, toutes les banques chinoises y vont de leurs projets d’assaut outre-Pacifique: la banque du commerce et de l’industrie (ICBC) (vers une filiale US), la banque de la construction (Bear Stearns aussi), Minsheng (10% de l’UCBH de San Francisco)…

Tandis que 60% des venture capitalists prédisent qu’en 2008, la Chine sera le 1er acheteur de firmes aux Etats-Unis et en Europe. Elle s’y est préparée depuis des années, en stockant du cash, et en se faisant les dents sur les mines, gisements et forêts, d’Afrique et d’Amérique Latine.

Un gazoduc dans le pipeline

Arrivée  d’une nouvelle source d’énergie en Chine :  entre Duanshi (Shanxi) et Bo’ai (Henan), sur 120km, la Chine s’apprête à lancer un gazoduc à méthane de charbon (le « grisou » des mines), d’une capacité d’1MMm3/an. Un projet qui coûtera 50M², piloté par CUCBM, l’ex-monopole de cette technologie. D’ici 2010, dix autres de telles infrastructures auront été montées, transportant 6,5MMm3 sur 1440km, pour 300M² d’investissement.

 

 


A la loupe : Le Dalai Lama, peau de banane…

« Extrême colère… Rejet total »: c’est en ce langage fort qu’accueillit (16/10) le ministre Yang Jiechi, l’annonce par G. W. Bush qu’il recevrait le Dalai Lama le lendemain, et que le Congrès le décorerait le surlendemain. Expression qui n’empêcha pas ces rendez-vous d’avoir lieu, lançant la Chine sur la pente des rétorsions indolores : depuis, toute recherche internet sur Microsoft, Google, et autres Yahoo! en mandarin, est réacheminée vers Baidu, le site national.

Puis pour «motifs techniques», Pékin annula sa participation au sommet sur l’Iran des 5 membres permanents du Conseil de Sécurité à Berlin (18/10). C’était l’Amérique et l’Allemagne qu’elle punissait: la chancelière Angela Merkel avait rencontré le pontife lamaïste fin septembre. Cette annulation n’était qu’une parmi bien d’autres rencontres sino-allemandes, tels le symposium prévu à Munich, le Hearing droits de l’homme prévu pour décembre.

Pourquoi cette colère si vive et durable ? Depuis l’entrée en jeu de Mme Merkel en 2006, la diplomatie allemande a pris une inflexion humanitaire qui prend de court la Chine, peu habituée à telles audaces des pays occidentaux depuis 15 ans.

Après l’appel de Deng Xiaoping (1992) à l’éveil économique, les nations industrielles, pour conserver pour leurs fleurons, leurs chances sur ce marché, ont dû éteindre leurs critiques démocratiques, afin de bâtir des partenariats stratégiques. Pour tenter de composer avec leur opinion et leur conscience, les pays riches présentaient régulièrement à la Chine des listes de prisonniers d’opinion, et finançaient des programmes de coopération juridique et judiciaire. Mais après le tournant du siècle, profitant du changement de parti au pouvoir, certaines capitales comme Berlin ou Ottawa recommencèrent à aborder avec Pékin le sujet depuis 15 ans proscrit, tandis qu’au même moment réapparaissaient au Japon les choquantes visites du 1er ministre au sanctuaire négationniste de Yasukuni.

L’accueil du Dalai n’est donc qu’une des facettes d’un malaise plus large. Et l’exemple fait boule de neige. Depuis juin, le prélat  fut reçu au Portugal, en Autriche (par le chancelier Gusenbauer), en Australie (1er ministre J. Howard), et le Canadien St. Harper s’apprête à le rencontrer fin du mois. Aussi la Chine tente-t-elle d’enrayer l’hémorragie par la fermeté, qui lui a réussi jusqu’alors.

Mais cet outil, aujourd’hui, atteint ses limites.

[1] Face l’Australie, son fournisseur de gaz et de minerai, pas question de faire pression. Face aux US, de même, des rétorsions sont impensables, vu l’interdépendance.

[2] L’impatience est incompatible avec la prétention de Hu au «soft power ».

[3] Avec les JO qui s’approchent, Pékin doit améliorer les relations.

En somme: les temps changent – même sur le front diplomatique.

 

 


A la loupe : Danone — deux rebondissements

Une péripétie vient ranimer le conflit couvant depuis juin entre Danone-Chine, et Wahaha, la JV aux 39 filiales.

Le 10/10, des dizaines d’employés Wahaha faisaient à Shanghai un sit-in devant le siège de Danone, qui reproche à leur boss Zong Qinghou un détournement annuel en milliards de US$ du chiffre d’affaires commun, et exige le rachat pour 387M², de 51% des unités illégales. Des actions en justice sont lancées de part et d’autre.

Sur le litige, un éclairage sobre vient du professeur Wu Xiaobo, de Pékin, auteur d’un livre sur le sujet. Wu diagnostique l’absence d’une base solide de communication, et conclut aux torts partagés. Sans méfiance, Danone aurait laissé ce partenaire diriger hors contrôle. Mais Zong, dit Wu, personnalité explosive et introvertie», exerce un pouvoir solitaire sur son empire, sans collaborateur masculin -entouré de directrices qui ne peuvent lui faire entendre raison. Sur le fond, le professeur n’a aucun doute : la presse et l’Etat se gardent de suivre Zong dans sa dérive. Pékin imposera une médiation pour protéger ce qui lui importe : sa crédibilité, et des dizaines de millions d’emplois créés par l’étranger.

En attendant, le conflit coûte cher : la croissance de Danone  en Chine aura chuté de 30% au 3ème trimestre de 20% au 4ème, dit Frank Riboud le PDG, apparemment confiant : « la solution prendra un peu de temps »!

Entre temps, Danone cède (16 /10) à deux groupes publics ses 20% de parts dans Bright, laitier shanghaïen: 93M², moins 33M² de dédit. A ce geste, plusieurs raisons sont avancées :

[1] Bright perd pied sur le marché local du yoghourt, face à Mengniu et Yili (60% des ventes, triplées en 3 ans).

[2] Bright a piraté son partenaire.

[3] Cette revente pourrait satisfaire Zong, et être part d’un  deal futur.

[4] En 2006, la mairie a réorganisé le groupe en « bastion », afin de barrer la route à toute prise de contrôle par Danone -qui quitterait, n’ayant plus rien à y faire.

[5] Enfin, après son partenariat « yoghourt » conclu en décembre avec le n°1 Mengniu, Danone n’a plus besoin de Bright pour regagner le marché shanghaïen.

Ce dernier argument fait réfléchir.

Multiplier les participations, a été la stratégie de Danone depuis 20 ans en Chine, pour rassurer l’opinion sur sa volonté de coopérer et non de conquérir. Mais une telle stratégie, généreuse en soi, prend mal sur un terrain aux acteurs animés de rivalités féroces, incapables d’accepter que « son partenaire » fraie avec « son ennemi ». D’où le piratage sans scrupule de Danone par Bright et Wahaha, et la disparition de Robust, le groupe d’eau cantonais imprudemment « intégré » par Danone à Wahaha, qui l’a liquidé. Ce que signifie probablement la revente des parts de Bright, est donc le retour à la pratique d’un seul partenaire fort et fiable — la fin d’un modèle commercial.

 

 


Joint-venture : OMC : l’orage arrive d’Europe

OMC : l’orage arrive d’Europe

Depuis toujours, Peter Mandelson, Mr concurrence à Bruxelles, protégeait la Chine de toute attaque protectionniste des 27 Etats membres. Le 9/10 encore, il aidait à démanteler les quotas textiles après le 31/12, pour l’année prochaine (VdlC n°33).

Mais soudain il change de ton: l’Europe doit se faire plus agressive envers la Chine, côte à côte avec USA et Japon, attaquer à l’OMC, l’organisation mondiale du commerce. «Depuis 2001», dit-il, « nous n’avons lancé qu’une seule action contre Pékin…» Cette volte-face fait l’objet d’une lettre au Président de la Commission, José Manuel Barroso, à la veille du sommet (19/10) de Lisbonne Nicolas Sarkosy et Angela Merkel, le Président français et la chancelière allemande, réclament la fermeté envers les «économies asiatiques »… La raison du tournant est sans objection : en 2007, l’excédent chinois a monté de 25% à 86MM², et poursuit à 15M² l’heure. Or, les palabres n’ont amené aucune concession de la Chine : les 470M d’Européens vendent moins à la Chine qu’ à la Suisse. Barrières non-tarifaires et discriminations commerciales leur coûtent, selon Mandelson, 20MM²/an. La cote d’amour de la Chine en Espagne et Royaume-Uni a baissé de 18% l’an dernier. Même exaspération des ministres des finances, face à l’incapacité chinoise à laisser remonter le Yuan vers sa vraie valeur. Tandis que le piratage de brevets par les Chinois prive les groupes européens du fruit de leur recherche, et de parts importantes de marché –cf les affaires Danone, pg 2, et Schneider, VdlC n°33. Aussi, c’est un peu une mise en demeure que prononce Bruxelles envers la Chine : ouvrir ses marchés désormais très rapidement, ou voir se multiplier dans les mois à venir les actions de rétorsion, dans le domaine de l’acier, notamment. L’état de grâce post-accession à l’OMC est terminé.  Tout ceci devant apporter du défi, de la substance et de la tension au sommet euro-chinois de Pékin le 21/11.

NB : à Genève devant l’OMC le 15/10, Union Européenne, USA et Japon font contre la Chine un tir groupé : les USA lui reprochent de manipuler les prix de l’énergie et autres matières premières ; le Japon, de restreindre l’export du coke, et l’Union Européenne, de dresser une grande muraille contre sa chimie. Autant d’infractions à la règle de l’OMC.

Yahoo!, pas sorti de l’auberge

  En 2005, Shi Tao, dissident, était condamné à 10 ans de prison pour émission d’articles subversifs sur internet.

Le monde réalisait que la pièce incriminante du procès avait été fournie par le fournisseur d’accès, Yahoo! depuis Hong Kong, sol non assujetti à la loi ou aux pressions continentales. Hasard ou non? Quelques mois plus tard, la multinationale US recevait le droit d’entrer pour 40% dans le groupe Tao Bao, pour administrer Alibaba, première galerie virtuelle du pays. Le Congrès se saisit alors de l’affaire. Tandis que la famille du dissident déposait une plainte devant un tribunal fédéral, une commission entendait les dirigeants de Yahoo! se justifier. Or, le panel législatif reconvoque ces responsables pour le 6/11, au fait suivant : Yahoo! aurait menti aux élus l’an passé, en affirmant n’avoir aucune idée des incidences de sa coopération avec la justice locale. Au moment des faits, il aurait détenu une pièce administrative chinoise ne laissant aucun doute sur l’utilisation que Pékin comptait faire de ses informations…

A l’évidence, le Congrès s’agite, encouragé par la campagne présidentielle en cours. L’affaire pourrait cependant aboutir à une lourde condamnation, et surtout à une législation fédérale nouvelle, pour doter la coopération des fournisseurs de services internet en régimes non démocratiques. Affaire à suivre.

 

 


JO : Yangyang, nouveau Jonas, chinois et olympique

Un nouveau Jonas, chinois et olympique

1. A l’aquarium arctique de Qingdao (Shandong), près du site des épreuves de voile, depuis trois ans, Yangyang et Xiao Qiang s’entraînent dur « même l’hiver », pour apparaître en marge des JO de 2008. Yangyang, 4 ans, est un garçon, et Xiao Qiang, une baleine beluga de cinq ans.

 2. « Sur demande des associations birmanes et chinoises du foot », la FIFA déplace en Malaisie le match-retour  Chine-Birmanie, comptant pour la qualification à la coupe du monde de foot initialement prévue à Rangoon le 28/10. Le match-aller reste inchangé, à Foshan (Canton) le 21/10. Sanction déguisée contre la junte, alors que le monde attend de la Chine une réprobation plus ferme…

3. Pour ses propres JO, L’administration générale des sports chinois envoie la plus grosse équipe jamais vue : 570 athlètes, dont 500 déjà qualifiés. A Athènes, elle en avait envoyé 397.

    4. A l’approche des Jeux, la visibilité de la Chine augmente dans le monde —et la critique aussi. A Londres, l’exposition de 19 soldats de terre cuite de Qingshihuang, a pré-vendu 200.000 billets. Sur une des statues, un écologiste a réussi à nouer, quelques secondes, un masque de gaze marqué du sigle « CO² » !

 

 


Petit Peuple : DALIAN : le chat magicien

Exactement comme l’homme de l’Ouest, le Chinois voit dans son chat un compagnon un peu sauvage, pétri d’énergies occultes : portrait qui aurait de quoi inquiéter, s’il n’était allégé d’une touche de fidélité naïve et primesautière.

Quoique proches en apparence, les deux visions viennent d’horizons situés aux antipodes. Avec ses vertus magiques, notre bon vieux greffier vient d’Egypte, du temps où il était Dieu parmi les Pharaons. Tandis que le chat chinois aux pouvoirs propitiatoires vient du Japon, mythe du招财猫 zhao cai mao, « chat portant fortune ». Et voici pourquoi:

 En des temps reculés, dans l’Empire du Soleil Levant vivait un ermite dans un temple ruiné, avec pour seule compagnie un matou, qu’il sustentait comme il pouvait. Mais un triste soir, le garde-manger fut irrémédiablement vide, et après avoir miaulé tout son saoul, Mistigri planta là son vieux maître – une trahison en apparence !

Mais voilà que le lendemain, dit le conte, un terrible orage se déclara, alors qu’un officiel en mission passait par là : Minou lui apparut et dressé sur ses pattes de derrière, agitant le « bras » en arrière, lui enjoignit d’entrer. Amusé et intrigué, le dignitaire obtempéra. A peine passé le seuil, un terrible éclair s’abattit au lieu précis qu’il occupait l’instant d’avant, creusant un cratère profond, à la pente taillée au rasoir: émerveillé et confondu, l’officiel s’empressa de faire restaurer le saint lieu et son vieux locataire, pour remercier son disciple félin d’avoir épargné sa vie.

Si nous relatons cette légende, c’est pour mieux éclairer le fait divers qui suit, banal, mais qui éclaire bien la mentalité chinoise. Joueur au loto impénitent, un certain Wang, de Dalian (Liaoning), se rendit le 7 octobre à son kiosque habituel, portant sur son épaule le chaton qu’il avait trouvé six semaines plus tôt dans la rue. Mais quand il se pencha sur l’ordinateur pour composer sa séquence de chiffres fétiches, l’animal bondit lestement sur le clavier, fit un pas de danse, pressa la touche d’entrée: un ticket émergea, qu’il dut payer. L’imprévu fut que le soir même, un buraliste médusé lui communiqua l’incroyable nouvelle : il avait gagné 3351¥ – c’était un «chat portant fortune» – cybernétique, par-dessus le marché!

En publiant l’incident, le journaliste chinois trahit le fait qu’il croit dur comme fer en ce pouvoir semi-divin du chat distributeur de chance, celui de Wang, comme celui de l’ermite. Question de fidélité en l’héritage. 

Même si l’expression populaire en contredit une autre,    瞎猫遇到死耗子 xia mao yu dao si hao zi, «  chat aveugle attrape souris morte » – suggérant que le chaton joueur, n’a été pour rien dans la bonne fortune de son maître.

Hostile à la superstition, le socialisme se garde de valider l’une ou l’autre des 2 conceptions du chat. Mais souhaitant peut-être laisser sa trace dans le trésor commun des proverbes, Deng Xiaoping a forgé celui-ci, inspiré par son credo matérialiste: « Qu’importe qu’ un chat soit blanc ou noir, pourvu qu’il attrape la souris ».

En cette époque postmoderne où la « société spirituelle » a cédé la place à l’argent-roi, on pourrait réactualiser la formule en la concluant ainsi : «…pourvu qu’il gagne au loto ! »

 

 


Rendez-vous : Pékin, Salon des énergies renouvelables et des télécom

22-24 oct. Pékin, Salon énergies renouvelables

23-27 oct. Pékin : PT/Expo Télécom China

25-26 oct, Pékin: Symposium de l’électronique médicale—MES China

28-31 oct., Nanning: 4ième China-Asean Expo