Le Vent de la Chine Numéro 16

du 22 au 28 avril 2007

Editorial : La Chine par l’autre bout de la lorgnette

Chaque jour, l’actualité chinoise fourmille d’incidents et de happenings, par lesquels le pays s’exprime toujours plus – hormis bien sûr, en politique !

En annonçant une commande de TGV pour sa ligne Londres-Newcastle, Grand Central, opérateur britannique, marque une rupture : l’Angleterre, inventeur du chemin de fer, achète son TGV chinois ! Pour 40M², Grand Central recevra 3 rames diesel-électriques en 2010. Ici, la Chine a le triomphe discret:depuis Changchun ou Qingdao, ses pôles ferroviaires construisent selon des technologies transférées de France, Allemagne,Canada ou Japon (cf rubrique Argent). Or, très symboliquement, ce contrat apparaît le jour où la Chine inaugure son à grande vitesse : l’élève n’a pas perdu un jour pour rivaliser ses maîtres, sur le marché mondial !

En Chine même, le nouveau Grand Canal, ouvrage immense devant fournir à Pékin 1MMm3/an d’eau du Yangtzé et de ses affluents, prend du retard, faute de moyens, dit Wang Shusheng, le ministre de l’eau. Pékin ne trouve pas les 10ainesde MM² revendiqués par ces équipements et ces dépenses collatérales, les centrales de retraitement (pour éviter de faire du canal un cloaque), l’intéressement des riverains (pour éviter les vols), le relogement de 250.000 déplacés. Pour compenser, un « plan B » est prévu, 4 réservoirs du Hebei, pour assurer 0,3Mm3/an, en attendant…

Tentation de la société moderne : à Handan (Hebei, 14/04), deux caissiers à la Banque de  l’agriculture ont joué les filles de l’air avec un trou de caisse de 5M². Mal leur en a pris : classés ennemis publics n°1, ils ont vu leur photo affichée à des millions d’exemplaires, en tous quartiers, de chaque ville, avec 5.000² de prime sur chaque tête. L’un a été pris à Lianyungang, l’autre à Pékin. Sous les verrous, ils ont expliqué avoir volé à trois reprises, dont les deux 1ères (4M²), pour jouer à la loterie—d’abord, pour tenter de faire fortune, puis pour tenter de rembourser leur caisse, la dernière pour la route. Désormais, leur vie ne tient plus qu’à un fil !

A Milan (14/04), le parking désinvolte d’une femme d’affaires chinoise et l’amende de 40² qui suivit, provoquèrent un affrontement entre des 100aines de marchands de la Chinatown et la police. Entretemps, à l’autre bout du monde, à Bogota (Colombie), 101 clandestins chinois sont détenus, en instance de rappatriement forcé. Tels incidents expriment un début de tension dans le monde, face à l’effort intense d’émigration chinoise, déjà 30M d’expatriés discrets, organisés, « pauvres et riches » à la fois, qui vivent à moitié prix et rachètent tout sur leur passage…

Enfin, en l’absence de lien direct avec Taiwan (qui vient d’ailleurs de refuser toute participation au portage de la torche Olympique), Pékin inaugure (16/04) une Chambre de commerce taiwanaise, pour protéger les intérêts des 3M d’expatriés insulaires et leurs 100MM$  d’invest. Un Mr Chang Hanwen la préside, vu en sauveur par certains expatriés, en transfuge par le pouvoir à Taipei. Dans cette Chambre, on ne fait pas de politique- les membres s’en gardent comme de la peste. Mais c’est un incontestable besoin qu’elle comble, et un signe historique irréversible !

 

 

 


A la loupe : Campagnes : plus de paix pour les plus riches

Pékin  maintient son cap prioritaire, d’assurer la stabilité en milieu rural. Les 16-17/04, un sommet consacré à la sécurité, se tenait à Xi’An (Shaanxi), retransmis sur Internet  !

On y apprend que trois ans de politique en faveur des paysans portent leurs fruits. Après 260MM² de prêts (+20%) en 2006, 40MM² cette année en investissement sociaux, les campagnes se désendettent et viennent de voir leur niveau de vie réel augmenter de 12,1% (à 126² en moyenne) au 1er trimestre. Mais du coup, un peu comme dans les villes 10 ans plus tôt, ce modeste enrichissement attirent les voleurs vers leur bétail, leurs tracteurs, tandis que d’autres les kidnappent, ou les appauvrissent par toutes sortes de marché de dupe – drogue, prostitution, tontines, trafics pyramidaux.

Une vaste (nième) campagne traque ces délits.

Liu Jinguo vice-ministre, rapporte en 2006 un recul (1eren 10 ans) de 16,5% des «incidents de masse». Surtout dans les provinces riches telles Zhejiang et Jiangsu, qui dépensèrent ensemble 1,6MM² en recrutement et équipement, faisant reculer le crime de 30 et 50%. 300.000 indics furent recrutés au Shandong (portant à 1,5M le nombre de ses agents!), et 300.000 cadres dans le Shaanxi… Les caméras prolifèrent partout, balayant par ex. 69% des « espaces urbains » du Shaanxi… A quelques mois du XVIIème Congrès, les provinces rivalisent d’invests pour gommer leurs statistiques criminelles.

Depuis Pékin, Luo Gan, responsable de la police au Comité Permanent, veut arracher 85% des policiers ronds de cuir à leurs commissariats, pour les lancer dans les bourgades comme ilotiers, traquer le mal à la racine. Dès 2006, le ministère de la sécurité publique (MSP) testait le système en dépêchant 80.000 de ses limiers aux champs. Surprise, de la part de ce protégé de Li Peng, réputé dur : Luo Gan privilégie désormais la médiation sur la force, en cas de conflits sociaux. C’est sur sa consigne que Chongqing a négocié la résolution pacifique de la crise de la maison-clou (cf VdlC n°14). Sa nouvelle ligne rappelle la tolérance nouvel-le constatée dans les villes (cf col. de gauche).            Le Zhejiang a fait savoir qu’il a en 2006, dépensé 30M¥  à lire les pétitions des paysans pour satisfaire « 90% » des doléances!

NB : Ne soyons pas dupes : ce sommet sécuritaire comporte sa dose de propagande. Mais pas seulement.  Entre les lignes, on lit une tendance vertueuse : moins d’émeutes, et plus de stabilité certaines provinces côtières, désormais assez riches pour  acheter la paix -contrôler les poches de désespoir !

 

 


Joint-venture : E-business : Goliath-eBay terrassé par David-Taobao

Finance : double intégration

Suite à l’ouverture par l’OMC au 1/01/07 du marché financier, les concentrations prolifèrent, étrangers/locaux et banque/ assurance/bourse pour accélérer l’émergence de groupes puissants nécessaires à la poursuite de l’expansion chinoise.

Une tendance favorisée par l’Etat, pour mieux contrôler ces étrangers et plus vite apprendre. Cette semaine tient deux fers au feu :

[1] Everbright Bank va reprendre à sa maison-mère 35% d’Everbright Pramerica, JV avec l’assureur Prudential Financial (USA), pesant 220M² entre ses 4 fonds mutuels.

[2] La Banque de l’Amérique (BofA Californie) prépare une JV de cartes de crédit avec la Banque chinoise de la construction (CCB), maître de 20% du marché avec 6,34M de cartes, dont la moitié émises l’an passé (le n°1 est China Merchants,10M de cartes; le marché atteignait 4MM² en 2006). La BofA détiendra 37% de la JV qui démarrera sous le seul nom de CCB, en attendant le feu vert. Pour la BofA, c’est que la 20ème action avec CCB, dont il acquit 8,52% des parts dès 2005, moyennant 3MM$ (belle affaire !), avec option pour monter à 19.9%.

NB : Lloyd’s, Rolls de la réassurance (un des 5 grands mondiaux), ouvre à Shanghai (15/04) avec 16 syndicats bancaires derrière lui. Par ce parachutage, il espère le contrat des Jeux Olympiques de Pékin, et doubler à 20% la part asiatique de la réassurance mondiale.

 

E-business : Goliath-eBay terrassé par David-Taobao

eBay, l’enchérisseur virtuel est une affaire qui gagne…  sauf en Chine.

Au 1er trimestre, ses profits mondiaux atteignaient 377M$ (+52%). Mais en Chine,le dernier sondage ne lui accorde que15% du marché contre 79% en 2003, l’année de naissance de Taobao qui depuis lors, en a conquis 82% ! Incroyable succès, qui a trois sources.

[1] cette PME devint inexpugnable, après le rachat par le géant chinois du e-commerce Alibaba, filiale à 40% de Yahoo. Ainsi couvert, il a pu mitrailler le Goliath US,

[2] en offrant gratuitement ses transactions ( eBay insistait pour se faire payer) et en se rémunérant sur la publicité internet, dont le marché l’an passé, valait 500M$, dit Reuters!

[3]  eBay a peut-être péché par orgueil en s’installant sous son nom, au lieu de maintenir celui du portail chinois EachNet qu’il avait racheté.

Pour le public, aucun doute, Taobao reste une affaire « bien de chez nous », et vu sa domination, 25% des commerçants encore chez eBay s’apprêtent à passer chez lui, selon l’étude d’un consultant.  Mais eBay prépare la revanche : après avoir cédé en décembre 51% de sa branche chinoise à Tom Online (du milliardaire Li Kashing, allié à Time Warner), ils mettent la dernière main à une nouvelle plate-forme, aux services « plus localisés » et « plus riches ».

NB : dernièrement, les deux groupes prétendent avoir « fait la paix », notamment pour éradiquer le trafic florissant, des milliers de comptes pillés par effraction, puis revendus chez « ceux d’en face » !

 

 


A la loupe : Dissidence – giboulées d’avril

Un des tribuns de la place Tian An Men en 1989, Chen Ziming avait fait six ans de prison avant d’être élargi pour raison de santé en 1996, puis de purger le reste de sa peine à domicile jusqu’en 2003. Dans ce contexte, voir Chen recevoir un visa de 2 semaines à Hong Kong, signale un geste d’appaisement du régime, d’autant plus remarquable que Chen rédige un livre délicat, sur le Printemps de Pékin.  

Une hirondelle ne faisant pas le printemps, Ren Wanding, autre dissident historique, vient de bénéficier d’un permis pour Hong Kong, pour bilan de santé. Et dans le sens inverse, des ténors du Parti Démocratique (d’ ordinaire mal-aimé de Pékin) empochent un rare visa pour Shanghai . Chen croit l’embellie programmée jusqu’aux Jeux Olympiques, et qu’elle pourrait durer après, si l’expérience est concluante.

Mais qu’on ne s’y méprenne, la garde conservatrice ne s’abaisse pas partout. Le Ministère de la culture vient de dévoiler un projet primesautier, qui suscite chez les intéressés une levée de boucliers : une imminente licence obligatoire, pour 30 catégories d’artistes, dont les chanteurs, cinéastes, danseurs. Le ministère espère que les artistes ainsi cartés deviendront moins bouillonnants, plus obédients…

Le 13/04,  l’écologiste Wu Lihong est arrêté par 50 hommes en kaki, chez lui à Yixing (Jiangsu) : trop d’activisme dans la défense du lac Taihu, le joyau du Yangtzé aujourd’hui phosphaté à mort. A pourfendre le népotisme, Wu s’est fait beaucoup d’ennemis. A en croire ses amis, il préparait une ultime grande révélation, à la veille de son arrestation.

Déjà en prison, Ablikim Abdiriyim est condamné à 9 ans pour séparatisme (17/04). En 2006, deux de ses frères et une soeur avaient été inquiétés sous divers prétextes. En fait, c’est leur mère qui est visée, Rebiya Kadeer, militante ouïgoure en exil, pour qu’elle gèle son action. Partie de rien, Kadeer s’était enrichie, avait été distinguée par Pékin, élue au sein de la CPPCC, comme un symbole de l’intégration réussie de cette minorité à la nation. Mais ayant poursuivi son combat pour les siens, elle avait été arrêtée en 1999,  pour envoi de coupures de presse à son mari aux USA. Après 6 ans, elle avait été échangée par Washington contre une concession politique, puis nominée l’an dernier pour le prix Nobel de la paix.

NB : entre ces attitudes contradictoires, on voit un lien logique : la détente provient du pouvoir central et bénéficie aux dissidents d’hier. L’intolérance vient des provinces et vise ceux d’aujourd’hui !  

 

 


Argent : Le CRH, TGV chinois fait sa vraie entrée

Le CRH, TGV chinois fait sa vraie entrée

En 1997, les trains chinois roulaient à 60km/h. Après la 6e hausse du plafond-vitesse, ils poussent à 250km/h, sur les 6000km de lignes spéciales. Le 18/04, 52 rames «CRH» sont entrées en service sur 18 routes (entre Shanghai, Harbin, Pékin, Canton…), abrégeant le voyage de 20 à 30%. Les trains sont de technologies Alstom, Bombardier, Siemens et Mitsubishi, transférées aux partenaires chinois. Courts pour commencer, les trajets seront étoffés, comme le nombre des rames, qui seront 257 d’ici décembre. Depuis 2003, ce programme a coûté 2,6MM². Le ministre Hu Yadong dit qu’il rapportera la même somme par an, en ouvrant 340.000 sièges/jour sur ces lignes vitales et saturées, soient +18% de la capacité de transport passagers. Le fret progressera de 12%.

NB: la panne d’une motrice entre Canton et Shenzhen, pertur-bant le trafic de 32 trains,sera vite oubliée. Par contre, la rallonge du prix de +50%, en cette période hors saison, n’est pas passée : le public a boudé, et le ministère envisage déjà une baisse. Mais un autre acteur s’apprête aussi à baisser plus encore: l’avion, qui est concurrencé, sur des distances moyennes! Pékin-Shenyang, 4h dans les 2 cas, coûte 22², par le train, mais 70² via l’avion, qui prépare de fortes coupes, pour affronter la concurrence !

 

La Chine en « mal de croissance »

Fièvre en bourse de Shanghai qui perd 4,5% le 20/04, et comme lors de la chute en février (9% le 27/02), les autres bourses s’enrhument sur les 5 continents. La cause, ici encore, est la peur de la surchauffe, suite à la parution du bilan conjoncturel du trimestre, le PNB trimestriel à +11,1%, l’inflation de +3,3% en mars.  Pékin pourtant, n’avait publié qu’après clôture des cotations. Mais les investisseurs avaient été alertés dès le 14/04 par l’annonce de réserves en devises en hausse de 37,3%, à 1202MM$.  

L’origine des +135,7MM$ du trimestre était mystérieuse,  bien plus élevés que les 46,4MM$ de l’excédent commercial… Mme Wu Xiaoling, n°2 de la Banque centrale (BPdC) était montée au créneau pour rassurer : en plus de l’excédent commercial, ces nouvelles réserves en devises comprenaient les 15,9MM$ de l’investissement direct étranger (IDE), les 10-20MM$ de profits de change et 60MM$ des banques, en investissements rapatriés, ou en recettes d’entrée en bourse. Ce retour massif vers la mère patrie, était motorisé par la hausse du ¥uan et l’allégement des contrôles sur les prêts… Belles paroles de Mme Wu, mais vu la chute de la bourse après coup, force est de dire qu’elle n’a pas rassuré! La BPdC répète sa volonté d’accélérer l’arrivée de son agence d’investissement en devises. Trop, c’est trop, dit-elle : la Chine ne peut simplement plus avaler davantage de crédit étranger !

 

 


Pol : ONU, la bataille du réchauffement global débute

Uranium, la Chine assure l’avenir

Après avoir lancé son programme de réserves stratégiques de pétrole, la Chine prépare celles d’uranium, sous l’égide de la COSTIND, autorité industrielle de défense nationale.

Mesure prudente vu son ambition de construire 35 réacteurs d’ici 2020, soit trois par an, la moitié du nouveau parc mondial. Elle veut ainsi quintupler sa génération électrique atomique à 40GW (4% de son total), tout en satisfaisant ses besoins secrets en uranium militaire.

Mais les réserves mondiales, objet de convoitises, ont vu leur prix doubler en 6 mois et plus que décupler depuis 2002. Aussi, ce n’est que « prudemment » que Pékin compte prospecter au Xinjiang (bassin de Yili), en Mongolie Intérieure (bassin de l’Ordos).  Pour fonder ses réserves stratégiques, le fournisseur n°1 sera l’Australie (40% des réserves mondiales), suite au traité signé en avril 2006 (ratifié par Canberra en janvier). L’Australie pourrait céder 2500t/an à Pékin, soient 500M$ au tarif actuel de 113$/livre, et ce n’est pas fini !

 

ONU—la bataille du réchauffement global débute

Actuel Président du Conseil de Sécurité, le Royaume-Uni a convoqué ce dernier, pour la 1ère fois de son histoire, le 17/04, pour un débat d’urgence sur le réchauffement global, intitulé « Energie, sécurité et climat ».

La ministre Margaret Beckett voulait faire réagir le monde sur les risques sécuritaires liés au changement climatique, sous la forme de catastrophes, voire de guerres pour le contrôle des ressources en eau ou énergie. Mme Beckett était soutenue par les pays de l’Union Européenne, le Japon et Ban Ki-moon, le Secrétaire Général. C’était sans compter la longue liste des Etats hostiles à ce débat, avec comme fer de lance, la Chine.

Parlant au nom « des PVD », l’ambassadeur Liu Zhenmin eut tôt fait d’affirmer que cette instance n’était ni compétente, ni adéquate pour mener ce débat. L’obstruction chinoise pouvait en partie se lire comme l’expression d’une volonté de préserver l’Organisation, « outil qu’il faut maintenir pour l’avenir », et donc bloquer un débat « intempestif » et sans issue possible. Des pays moins développés comme l’Indonésie, l’Afrique du Sud et le Pakistan  (ce dernier, au nom du Groupe des 77, c’est-à-dire de 132 PVD) firent bloc contre un « empiètement croissant du Conseil sur les prérogatives de l’Assemblée Générale ». Querelle institutionnelle et aussi manoeuvre dilatoire de Pékin, Moscou et Washington, pour retarder tout engagement de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre. La véritable enceinte pour tel débat, étant le sommet de « Kyoto-II » en décembre 2007, à Bali.

 

Droits de l’homme : le boomerang nord-américain

Deux affaires chinoises de droit de l’homme entraînent une réaction le même jour (19/04) en Amérique du Nord.

 Au Canada, le ministre des affaires étrangères Peter McKay dénonce le verdict de perpétuité, infligé pour terrorisme au dissident ouigour Huseyin Celil, naturalisé canadien depuis 2005. Evadé des geôles chinoises en 2000, réfugié avec sa femme au pays à la feuille d’érable, Huseyin s’était fait réarrêter en mars 2006 en Ouzbékistan, qui l’avait extradé dans le cadre du traité de coopération de Shanghai.  Ottawa déplore de n’avoir pu rendre visite à son ressortissant, ni l’assister, ni assister à son procès, Pékin ne recon-naissant pas sa nouvelle citoyenneté.

NB : Ce verdict précède de 10 jours, sans grand hasard possible, la visite de McKay à Pékin : occasion pour le régime, qui n’a aucun intérêt à laisser envenimer les choses, d’offrir un deal…

‚ Aux Etats-Unis, Wang Xiaoning, en prison, condamné à 10 ans en 2003 pour dissidence sur internet, accuse Yahoo! devant la cour fédérale de San Francisco d’avoir fourni à la justice les données permettant de l’incriminer. Se plaçant sous la protection de la Loi de protection des victimes de torture de 1991, assisté de son épouse Yu Ling, il réclame redressement. La plainte est peu certaine d’aboutir. Mais elle ne donne rien de bon pour l’image de Yahoo!, aussi accusé d’avoir dénoncé trois autres dissidents, dont le journaliste Shi Tao en 2004.

 

Chine, centre mondial du «blanchiment» du bois?

Secteur vieux de 15 ans à peine, le meuble chinois remporte un immense succès, avec 30% de hausse/an, une production de 340M de pièces en 2005, dont 60% exportés (14MM$)- 50% vers les USA. Revers de la médaille : la Chine coupe à blanc les forêts de Russie, Papouasie, Indonésie, Malaisie. Ce qui vaut au secteur semaine passée, deux critiques sérieuses de l’étranger.

Le 17/04, Greenpeace accusait la Chine d’abriter un trafic de « blanchiment » des bois durs tropicaux comme le marbau, espèce qui aura entièrement disparu sous 35 ans, « et beaucoup plus vite, avec la contrebande », producteurs et exportateurs chinois étant incapables de certifier l’origine du bois. La Chine dément, défend le sérieux de ses règlements et son respect de ceux des pays originaires. Mais le même jour, la CCI -l’instance de défense de l’économie américaine entame une enquête sur ces accusations, sur demande des suite à plainte de ses producteurs forestiers, dénonçant l’illégalité de 30% de l’import de bois dur et la perte d’1MM$/an en export raflé par la concurrence déloyale… Cette procédure qui pourrait déboucher sur un verdict de tarif anti-dumping et/ou de quota, est la troisième action protectionniste de Washington contre la Chine, en 15 jours (voir VdlC numéros 14 et 15).


Temps fort : Compass, l’ambiguë constellation

Mise à feu le 14/04 au Centre Spatial de Xichang (Sichuan),  une fusée Longue Marche-3A a mis sur orbite géostationnaire (21.500km) un satellite très politique: le 5ème du réseau Compass, concurrent potentiel au GPS américain, au  Galileo européen et au Glonass russe.

Projet de la corporation militaire CASTC (Académie chinoise de Technologie spatiale), avec à terme 5 satellites géostationnaires et 30 sur orbite médiane, il offrirait (dès l’été 2008 sous forme limitée, à en croire ses promoteurs) des services de positionnement précis à 10m près, à 20cm/s pour la vitesse, et de 50ns en délai. Comme ses concurrents, il servirait toute navigation, la météo, l’agriculture, la prospection, les télécoms, la sécurité civile—et militaire…

Belle ambition, superbe projet, mais grave risque pour le consortium Galileo, dont les membres ont bien du mal à allonger les 3,7MM² nécessaires au déploiement des satellites, dans le cadre d’une consession à 20 ans. Or, la Chine est investisseur de Galileo depuis 2003, avec 5M², qui doivent devenir 200M² ! La suite du film est glauque, vu les intérêts stratégiques autant que commerciaux : les Etats-Unis auraient interdit à Galileo d’utiliser les mêmes fréquences que leur GPS, ce qui leur permet de le brouiller. Et la Chine serait bannie du conseil de direction de Galileo, et de l’usage du service encrypté (PRS), stratégique pour les gouvernements. Dans ces conditions, le projet Compass pourrait permettre à la Chine de forcer les européens à réviser leur copie, conformément à ses exigences.

Enjeu d’ici 2015 : 15MM² de services par an.

Blason technologique, Compass est une manière parmi d’autres d’afficher les hautes ambitions spatiales chinoises. Fin janvier, elle détruisait un satellite déclassé, démontrant une capacité de détruire les satellites à basse altitude des systèmes de navigation concurrents. En février, elle lançait son 4ème satellite du réseau Compass. Fin mars, elle présentait son futur robot explorateur lunaire, puis début avril, une mission conjointe avec la Russie vers Mars. Le 11/04, elle lançait « Haiyang-1B », 2e satellite d’observation des mers, y compris de prospection offshore.

Mais ce dynamisme, ces invests énormes et ce volontarisme inquiètent USA, Europe et Russie, peu sûrs des intentions réelles chinoises, au plan militaire : en fin de compte, Compass pourrait être le coup de bluff, et le « bélier » par lequel la Chine chercherait à enfoncer la porte du club spatial mondial : obtenir des puissances spatiales les coopérations et technologies qui  manquent, et sa part du marché !

 


Petit Peuple : A Jianhu, une cleptomane survivaliste

Tout avait pourtant bien démarré pour Nan Siyi, nouvelle bourgeoise de 38 ans. Après une enfance studieuse dans le Hubei, elle avait eu son bac, sa place en fac, un beau mariage et une nouvelle vie au Jiangsu, la province la plus glamour de cette terre de Chine.

A Jianhu (Jiangsu), sans se fatiguer, 10 ans leur avaient suffi pour créer leur station-service, leur maison de 3 étages et 3 rutilantes limousines dans la cour. En 2005, elle s’engageait sur la route de la vraie fortune : l’immobilier. Et pour réunir les fonds de son 1er chantier, Nan comptait sur Monsieur Su, Singapourien richissime. Lequel hélas, se laissait courtiser.

En mars  2006 enfin, elle réussit à l’inviter à dîner. Zhu son factotum suggéra un menu de terroir simple et de bon goût, escargots de rivière, soupe de poulet de ferme. Le succès fut total : le gros plein de soupe se dit prêt à payer – la prochaine fois, pourvu que le prochain rata soit encore meilleur…

Nan l’ignorait, mais elle mettait le doigt dans un engre-nage diabolique. Zhu allait lui suggérer que le meilleur des poulets, c’était celui que le fer-mier ne vendait pas : celui qu’il faudrait voler. Une fois dans le poulailler, l’acte de tordre le cou à la volaille, l’emporter en cou-rant, éveillerait en elle la joie sauvage, compulsive du cleptomane.

La patronne et trois employés partirent en expéditions multiples. Ils en revinrent pliés de rire, chargés de quatre poulets, puis deux autres, puis huit, plus un porcelet, une oie, un agneau, un canard, un chiot !

C’était du délire : ils auraient dû savoir que la roue de la justice meulait déjà (lentement) le grain de leur vie. Leur précaution de changer de berline à chaque virée,leur servirait d’autant moins, qu’ils retourneraient toujours au même endroit, pour se faire prendre « comme des bleus », qu’ils étaient…

Au tribunal deux mois plus tard, ils répondirent de 15 cambriolages, pour un butin de 4600¥.

Face au prétoire, Nan avoua s’être laissée aller à ces délits, moitié par obsession de séduire son bailleur de fonds, moitié par goût du danger. Choqué de ce délit de snob, sans l’excuse de la misère, le juge lui colla le tarif normal : un an ferme, et trois à six mois aux acolytes : adieu, chantier, canard, cochon, couvée !  

En cellule, la capitaliste naïve pleure sur sa fortune«détruite en une nuit » – 毁于一旦, hui yu yi dan. Elle réfléchit aussi sur le sens de ce trimestre d’égarement qui a ruiné sa vie. Elle devine qu’en son coeur, une autre femme, inconnue, a pris les commandes. Mais pourquoi? Pour la maintenir sur le qui-vive, en lutte pour exister, comme ses aïeux depuis l’aube des temps. Ou pour assurer l’avenir de la lignée et ne pas s’endormir au luxe fallacieux des temps présents.

A ce double de Nan, cette «mister Hyde» en jupons, importait moins le luxe, que la 活力huoli, l’énergie vitale. Depuis lors, quand elle ne séduit pas le geôlier, Nan endurcit ses muscles, lit, s’instruit, téléphone et se bat pour garder son mari, ses biens, pour rebondir : un an, c’est vite passé !