Le Vent de la Chine Numéro 40

du 11 décembre 2000 au 8 janvier 2001

Editorial : 2000 – les fruits, 2001 – les promesses et les risques

La période janvier – octobre 2000, pour l’économie chinoise, a été grandiose, épaulée par la flambée du pétrole, et les exports (+32%, 205MM$). Avec +8,1%, le PNB  connaît une des plus fortes hausses. Les marges de 27 secteurs (sur 40) ont cru de plus de 30% : le pétrole  (11MM$, +264%), mais aussi l’industrie des télécoms (+69%, 4,1MM$).

Face à ces triomphes, demeurent bien des zones obscures. La production industrielle est montée à 231MM$, mais les ventes intérieures à 36,6MM seulement. Plus de 90% des secteurs font du surplus, et la hausse de 0,1% du CPI indique la menace de déflation aux portes. Autre ambiguïté : la croissance a été portée par les investissements fixes d’infrastructures (191MM$, +13%, dont 18 payés par l’Etat). Mais les banques publiques ne peuvent à la fois éviter de nouvelles mauvaises dettes, et s’engager dans ces projets à risques, imposés par l’Etat à l’Ouest du pays, avec toute la corruption que cela implique…!

Pour 2001, l’Etat s’attend à une croissance identique (8%), portée par les mêmes instruments : taxation (+39% aux douanes en 2000, avec 24MM$), emprunt de 18MM$ de bons.

La priorité d’investissements ira à plusieurs grands chantiers nouveaux (chemin de fer Qinghai- Lhassa, canal Yangtzé – Fleuve Jaune), à la reforestation (11MM$ d’investissements prévus sur 10 ans), aux HLM, aux équipements agricoles (irrigation, silos).

En Bourse, les secteurs favoris devraient être l’immobilier (+120% en 2000), et les ports maritimes (reprenant les capitaux hier encore investis dans les «dotcom»)!

Reste une série d’inconnues pour 2001.

[1]Les SDD, qui ont déjà repris 169 MM$ de dettes d’Entreprises d’Etat et s’apprêtent à emprunter (45MM$ pour la seule CINDA, en bons d’Etat), auront du mal à écouler ces actifs ruinés.

[2] L’Etat parviendra-t-il à assainir la Bourse, réduisant les fraudes et éliminant les titres canards boiteux? A cet égard est remarquable la volte-face des autorités, renonçant à vendre plus de la moitié de son patrimoine boursier – le marché est trop faible!

[3] La CASS, l’académie chinoise des sciences sociales, craint aussi une autre flambée du cours du brut, une chute de Wall Street, ou celle de l’Euro, enrayant les exports vers Les Etats-Unis et l’Union Européenne…

Toutes ces incertitudes éclairant les pronostics «sombres» de l’académie chinoise : avec la Chine à l’OMC, 2001 apporterait une chute des exports à +14%, des imports à +15,4%, tandis que le surplus commercial, stagnerait de 28 à 30MM$ !


A la loupe : La haute tension des ados chinois

Début décembre, une femme s’est présentée dans un hôpital de Shanghai, un oeil demi-crevé par sa fille de 16 ans. Elle avoua que celle ci la frappait au moindre prétexte – parce qu’elle lui demandait de rentrer plus tôt, de passer à table ou de faire ses devoirs.

Quelques mois avant, un autre ado shanghaien tuait sa mère, parce qu’elle l’avait privé de gameboy. Tel autre jetait une brique à la tête de son père, pour un différend futile … Et si son prof venait aux renseignements, il hurlait au père de «la fermer»…

Plus au sud, à Shenzhen, des enfants au crâne ras, oreilles décollées, passent des heures menottés aux grilles de la gare : ce sont les pick-pockets du Xinjiang, pris la main dans le sac, qu’on enchaîne le jour et relâche la nuit, faute de pouvoir les arrêter – trop jeunes !

En 1999, le meurtre est la 4ème cause de mortalité juvénile (20.000 morts). Pourquoi le déferlement d’une telle violence sans rien pour la contenir? En fait, un faisceau complexe de causes est à la base de cet échec. Parmi celles ci, le recul de la morale confucéenne, l’absence de dialogue entre les jeunes et leurs aînés – héritage de Révolution Culturelle. La redécouverte de l’égotisme est favorisée par la politique de l’enfant unique, les feuilletons violents à la télévision et l’illusion que pour le plaisir, tous les coups sont permis. La pression intense dans les lycées (la sélection) n’arrange rien. Pas plus que les incertitudes sur l’avenir.

Confrontés à ce problème qui monte en flèche, les psychologues s’inquiètent : 90% des jeunes violents deviendront des criminels, et il n’existe pas, en Chine, de traitement effectif!


Joint-venture : Auto – la taxe unique fait son apparition

· Au 1er janvier une taxe nationale de 10% sur la vente automobile remplacera la masse des taxes municipales ou régionales, variant de 10% (Pékin/Shanghai) à 17% (Suzhou) voire 20% (Changchun). Le produit de la taxe sera affecté au programme routier dans l’ouest du pays. Les constructeurs applaudissent cette mesure longtemps attendue, permettant de réduire le prix au consommateur, tout en accroissant «leur» parc routier.

De fait, décembre voit la sortie de nombreux nouveaux modèles  «made in China», tels la " Xiali 2000 " (basée sur la "Platz" de Toyota), un modèle de Jinbei (100% chi-nois), et la «Blazer» de General Motors (à Shenyang, Liaoning).

Par ailleurs, Ford vient d’obtenir l’accord de principe pour produire une berline familiale avec Changan à Chongqing. De la part de Pékin, c’est un choix stratégique significatif : General Motors ambitionnait de signer avec le constructeur sichuanais et, ainsi, de repousser à la mer son rival compatriote. La Chine multiplie ses partenariats, pour augmenter les sources d’investissements et réduire leur marge de pression sur elle.

· Potentiellement la plus grande Joint venture sidérurgique en Chine, Shanghai Krupp Stainless Steel vient d’achever (30/11) l’installation de sa 1ère ligne de laminage à froid, d’une capacité de 72.000t/an. Lancement prévu : début 2002.

Krupp assumera 60% de l’investissement global d’1,43MM$ : à pleine capacité en 2006, cette aciérie de 1300 métallos produira (en coulée continue) 440.000 t/an d’acier inoxydable laminé, dont la demande chinoise a doublé depuis 1997 à 1,5Mt/an, dont 80% sont importés.

NB : en octobre 1999, l’octroi à Shanghai Krupp, pour ce projet de 100M$ par l’IFC (International Finance Corporation, branche financière de la Banque Mondiale), avait causé une levée des boucliers de la sidérurgie américaine, criant à la subvention déloyale : ce secteur connaissant une surproduction chronique planétaire, l’investissement ne faisait, alléguait-elle, qu’aggraver la situation.


A la loupe : Europe de l’Est – une mission ‘nostalgique’

2000 aura été pour les dirigeants chinois une année très dense, passée à arpenter les tapis rouges des cinq continents. Les fruits sont palpables : le quasi-retour à l’OMC, le renforcement de la Chine aux Nations-Unies, et une forte candidature de Pékin, pour les Jeux Olympiques de 2008. 

La Chine boucle son année par une double mission «nostalgique» : l’ex-Europe socialiste. A commencer par la visite du vice 1er Li Lanqing en Russie (3-12décembre). C’est la 6ème rencontre bilatérale sino-russe depuis janvier (une tous les deux mois), construisant l’alliance stratégique des géants voisins, afin de contrebalancer l’écrasante supériorité commerciale et militaire des Etats-Unis (et empêcher le projet de déploiement de leur dispositif de défense TMD c’est à dire Theater Missile Defence).

En 2000, Pékin a négocié avec Moscou la livraison, voire la cession de licence, de différents outils de défense aérienne (cf VdlC n°37/V). A Moscou, Li Lanqing a présidé une 1ère Commission de Coopération pour l’Education, le Sport, la Culture et la Santé, volet social d’un «tandem» qui se veut «tous azimuts».

Pendant ce temps, Tang Jiaxuan, Ministre des Affaires Etrangères, traversait Albanie, Hongrie et Pologne, et avant tout Yougoslavie. Il s’agissait de faire connaissance avec le régime «post – Milocevic», de Vojislav Kostunica, après l’avoir reconnu en un délai record – deux jours après sa prise du pouvoir (5/10). Il s’agissait aussi de maintenir avec ce pays aux marges de l’Europe, les relations privilégiées d’hier.

Tang a offert 2M$ d’aide humanitaire, un prêt de 200M$ tout en rééchelonnant les dettes déjà contractées par Belgrade envers Pékin. Ajoutons à cela les 40000 immigrés chinois en Yougoslavie et la commémoration ostensible du « lien du sang » – du bombardement de l’ambassade chinoise en mai 1999 par l’OTAN… Tout ceci contribuant à faire de la République Fédérale de Yougoslavie , pour la Chine, un pays d’Europe « plus proche que d’autres » !

 


Argent : Cinéma – un nouveau ‘scenario’

· Mi novembre, deux chaînes de cinéma de Chengdu (Sichuan) jetaient le pavé dans la mare du secteur de la distribution du film, en baissant leurs prix de 85%, à 5Y l’entrée. Ils entraînaient dans leur sillage une fraction des salles obscures de la Chine de l’intérieur. La «marée basse» étant atteinte à Zhengzhou (Henan), à 2Y la place.

Cette dérégulation sauvage a d’emblée été fustigée par la China Film Corporation, monopole de la distribution, qui craint une chute des profits, fatale pour l’industrie. Elle a par contre été applaudie par les médias, chambre d’écho du public. Les promoteurs défendent leur campagne : dans une ville comme Pékin, à 40Y, le ticket «pèse» 1/50e du salaire moyen, contre 1/400e en Inde. Beaucoup trop cher, tandis que le nouveau tarif maintient les salles pleines tout en éradiquant le piratage.

A condition que tout le pays suive la tendance, ce qui n’est pas le cas : captifs de leurs investissements et de leurs salles plus modernes, Pékin et la côte gardent pour l’instant leurs tarifs.

NB : le casse des prix du box-office ne s’attaque pas au mal principal du cinéma chinois : son style soporifique et compassé, résultat d’une censure tatillonne et d’une structure de production surannée.

· N°3 du pétrole en Chine, la CNOOC (China National Off-shore Oil Corporation) vient d’ouvrir à Hong Kong son propre pôle d’assurance interne, CNOOC Insurance, destiné à couvrir les risques de ses filiales, et bon nombre de plates-formes offshore d’exploitation de gisements pétroliers et gaziers sous-marins. CNOOC est la seconde corporation au monde à risquer la démarche à Hong Kong, après un groupe nippon en juin dernier. Ceci, en dépit d’un fort abaissement du « prix d’entrée » des assurances captives sur le sol de la Région Administrative Spéciale (un chiffre d’affaire minimum, ramené de 10 à 2MUS$). Le champion de la spécialité, dans la région, étant Singapour, qui frise les 50 clients. Après l’entrée à OMC, espère Hong Kong, d’autres groupes chinois devraient suivre la CNOOC pour se mettre à l’heure internationale. Cette mesure intervient deux mois avant le lancement (seconde tentative depuis octobre 1999) d’une souscription en bourse de New York, pour 1,1MM$. La CNOOC vendra 1,8MM de parts.

Ambition modeste donc, puisque le secteur s’était préparé à un objectif de 1,5 à 2MM$. Plusieurs groupes mondiaux comptent souscrire, parmi lesquels Texaco,  Shell (300M$), et BP Amoco (200M$), groupes déjà présents dans la souscription de Petrochina cet automne.

· Après l’envoi d’une horde d’inspecteurs de la CSRC (China Securities Regulatory Commission) à Zhengzhou auprès des grands magasins Baiwen, en quête de fraudes en bourse de Shanghai depuis 1996, on s’attendait à voir ce groupe insolvable mis en faillite et rayé de la liste des cotations (cf VdlC n°38/V). Cette mesure radicale, qui aurait constitué une première en Chine, n’aura pas lieu : un plan a été approuvé (30/11), permettant de «limiter les frais».

Sanlian (8e groupe du Shandong) reprendra 181M$ de dettes nominales, moyennant le paiement « cash » de 36M$ (soit une remise de 80%) à la Société De Défaisance (SDD) Cinda, principal créancier. Ce faisant, Sanlian acquiert un véhicule pour son entrée – indirecte – en bourse. La maison mère de Baiwen reprendra le passif restant (120M$), dû à Cinda, pour lequel la mairie de Zhengzhou se porte garant.

NB : en marge de cette affaire, la CSRC rappelle que selon la loi en vigueur, toute sortie de bourse doit être précédée d’une mise en faillite judiciaire. Un nouveau mécanisme est imminent, annulant cette contrainte légale.

 


Pol : La sauvegarde d’un genre menacé

· Protégé de Zhu Rongji, le vice gouverneur du Guangdong Wang Qishan prépare ses valises pour monter à Pékin, promu directeur du Bureau de Restructuration Economique, poste au rang de Ministre. Ancien gouverneur de la China Construction Bank, ce jeune technocrate (52 ans) a également été co-fondateur avec Morgan Stanley de la CICC (China International Capital Corporation), première banque en Joint venture, et est plus connu pour avoir supervisé la liquidation de la GITIC (Guangdong International Trust and Investment Corp Wang) bénéfice de son statut de gaoganzidi (fils de haut cadre), étant gendre de l’ancien 1er Ministre et économiste conservateur Yao Yilin.

Wang est le 1er membre issu du cercle de Zhu Rongji, à accéder au «leadership de la 4e génération» en cours de mise en place – tous les autres provenant de l’orbite du Président Jiang Zemin.

D’autre part, avec l’autre étoile montante cantonaise, Li Changchun, il renforcera la présence au sommet, de la province du Sud, jusqu’alors sous représentée.

· Les régions oubliées de la reprise économique connaissent en ce début d’hiver des accès sporadiques de colère sociale incontrôlée. Le 30/11 1000 employés d’une usine textile de Chuzhou (Anhui) ont bloqué plus de vingt trains pendant huit heures, sur la ligne Pékin/Shanghai, accusant amèrement leurs dirigeants de les  man tian guo hai (« mener en bateau »).

Leur usine avait été vendue à un groupe privé du Jiangsu, à qui la rumeur prêtait l’intention de mettre à pied la moitié des 3600 couturiers. Le million de dollars qu’ils avaient collecté pour sauver leur outil, ne serait pas remboursé, et leur fonds de retraite de 3,6M$ s’était évaporé.

Le 4 décembre, c’était au tour de 2000 maçons du «Groupe de construction n°2» de Daqing (Heilongjiang) de bloquer la voie Qiqihaer – Harbin pendant une heure : ils n’avaient plus touché de salaire depuis deux ans. Dans les deux cas, la manifestation s’est conclue par la dispersion pacifique ET l’arrestation de meneurs.

 Par ailleurs, 17 incidents violents ont été dénombrés durant le mois de campagne contre le piratage. Ainsi à Kunming (Yunnan), plus de 30 personnes armées de haches, coutelas et bâtons ont fait irruption dans le bureau municipal de supervision de la qualité pour récupérer pour 20.000$ de papier hygiénique de leur production, qui leur avait été confisqué, comme contrefaçon.

· Quoique interdit dès octobre 1994 au plan national par l’Assemblée Nationale Populaire, la pratique de l’échographie pour déterminer le sexe d’un enfant, suivie (si l’enfant est une fillette) d’un avortement, est la cause n°1 du déséquilibre des naissances entre garçons et filles, évalué à 131 contre 100 au plan national.

Dans cette course, le bourg de Huangniwa (Liaoning) détient le triste record : entre 1992 et 1999, la population globale des 2e enfants (dernière chance légale, pour les familles, d’engendrer un fils), comptait 306 garçons pour 100 filles ! Confronté aux mêmes problèmes, l’Anhui vient d’adopter (1/12) son propre règlement pour tenter d’enrayer cet usage, catastrophique à long terme.

 Depuis 1996, cinq autres provinces l’avaient précédé dans cette démarche – sans grande efficacité. A 175Y, l’intervention est lucrative pour les centres de soins, et permet de supporter le coût de l’amende, quand on se fait prendre, de 3000Y à 30000Y selon la province. Le problème se situant moins dans les sexes des nourrissons, que dans les mentalités!

 

Dernière minute… Dernière minute… Dernière minute… Dernière minute… Dernière minute… Dernière mi

 

· Avec Sinopec, n°1 national de l’or noir, BASF, n°1 mondial de la chimie a signé (08/12) un accord pour établir une Joint venture de 2,6MM$ à Nankin, à 50/50%. Ce projet négocié depuis 10 ans, aboutira en 2004 à une capacité annuelle de production d’1,7Mt de produits transformés du pétrole, dont 700000t d’éthylène : ce sera le plus gros investissement allemand en Chine.

 

· Les négociations entre Chine (Ministre Long Yongtu) et OMC touchent à leur fin. Quoique non conclusive, la dernière session à Genève (05-08 décembre) s’est « très bien » déroulée, selon les deux parties. Le marathon (sans doute) final est pour les 10-17 janvier 2001, avec une « dead line » : la fin du mandat présidentiel de Bill Clinton, le 20!


Temps fort : Téléphonie – concurrence et concentration

Le Ministre des Industries de l’Information (MII) a octroyé à China Railways Telecom CRT, filiale, une licence de téléphonie fixes et de transmission de données. Jusqu’alors réseau interne des chemins de fers chinois entre 500 villes, avec 120.000 km de ligne dont 40.000 en fibre optique et 65.000 employés, ce «bébé géant» apparaît d’emblée comme la concurrence la plus sérieuse à China Telecom.

Evalué à 1,2 MM$, CRT prépare sa fusion d’ ici 2003, avec Unicom. En téléphonie fixe, outre CRT-Unicom et CT, les acteurs de demain seront Jitong (téléphone par Internet) et Netcom (Joint venture avec China Trust and Investment Corporation).Cette concentration permet d’exacerber la concurrence entre groupes publics, et de les renforcer avant l’entrée à l’OMC, qui garantit à l’étranger une part maximum de 49% de groupes de télécom, trois ans après l’adhésion.

Cependant, le projet chinois de garder la haute main sur ce secteur stratégique, se heurte à sa croissance exponentielle. Depuis cet été n°2 mondial, le téléphone chinois compte 200M d’usagers (portable et ligne fixe), a doublé depuis 1998, et doublera d’ici 2005.Pour maintenir le rythme, des dizaines de MM$ devront être injectés dans les technologies les plus récentes de l’étranger – chose inconcevable sans l’octroi, en retour, d’une part du gâteau.

Justement, à Pudong, AT&T vient (5/12) de prendre 25% des parts de Symphony, Joint venture de télécom à large bande, avec Shanghai Telecom (60%) et Shanghai info invest (15%). CQFD!

Paradoxalement, le financement étranger peut s’avérer un frein à l’ouverture. Ainsi, l’annonce fin novembre, de la fin de la double facturation des communications en téléphonie mobile, avait fait chuter les cours de China Mobile et d’Unicom – les actionnaires étrangers voyant dans cette mesure une baisse de revenus : le ministre Wu Jichuan a dû  se rétracter : quoique prometteuse à plus long terme d’un marché bien plus grand, la « monofacture » ne sera que pour 2003 ! Ce pas de clerc étant révélateur de la contradiction, entre la volonté de protection du marché intérieur, et celle de maintenir la transparence, indispensable pour rassurer l’investisseur!

 


Petit Peuple : Un ‘sport’ national millénaire – le mah jong !

· De part et d’autre du portail lapidaire de ce  siheyuan (« cour carrée », maison traditionnelle pékinoise), deux inscriptions figuraient au mur gris clair. A gauche, une plaque annonçait le monument historique du XIXe siècle, résidence (de 1917 à 1919) de Cai Yuanpei, ancien recteur de  Beida, la 1ère Université du pays.

A droite, était torché à la chaux le caractère chai (démolir). Dernier îlot au milieu des gravats du pâté de maison (datant de la même époque), la demeure se résignait à son triste sort – le centre commercial et résidentiel attendait. Et puis le miracle s’est produit – pour la 1ère fois peut-être dans l’histoire moderne de la capitale, l’ordre de destruction a été retiré.

Cai était aussi une figure historique, héros pré-révolutionnaire. Pétitions et protestations n’ont pas manqué. L’arrêt salvateur n’est pas venu de la mairie de quartier, mais du promoteur, une femme hongkongaise, plus respectueuse de la culture et de l’histoire, qui a accepté de convertir la maison en musée, et de construire son lotissement autour d’elle.

Début octobre, un autre vénérable professeur d’université du nom de Zhou avait eu moins de chance : sa villa, quoique aussi ancienne et belle, n’a pas échappé aux bulldozers, après dix ans de lutte inégale, de campagne en procès (cf VdlC n°31/V).

· Après « regarder la télé », devinez quel est le second hobby favori des chinois : selon le sondage de l’institut «Horizon» auprès de 5584 personnes de 18 à 64 ans, il s’agit du mah-jong, ce jeu de dominos laiteux qui sévit depuis plus de 1000 ans (depuis les Song du Nord, 960-1127).

A Chengdu, 75% des gens s’y adonnent, et 55% l’ont désigné comme le symbole de la ville, loin devant le panda (25%), la marmite sichuanaise, ou le Temple de Zhuge Liang, héros mythique du roman « les trois royaumes ». En un joyeux fracas de pièces plaquées sur les tables, le mah-jong se joue (bravant l’interdiction légale) à l’argent, pour des montants parfois considérables, à tous les échelons de la société : dans les maisons de thé, les bureaux, les hôtels cinq étoiles ou sur les trottoirs.

Le mois dernier, à Tianjin, une école maternelle a causé le scandale en accueillant dans ses locaux un tripot de mah-jong, ouvert tous les jours de 13 h à minuit. Retrouvant leurs enfants plus experts en jurons qu’en rondes et en comptines, les parents ont exigé la fermeture du salon. Ce que le directeur a accepté de faire, provisoirement, et à contrecoeur, avançant un argument imparable : « avec le contrôle des naissances, vous ne faites plus d’enfants : nous sommes au bord de la faillite ! ». Un fonctionnaire municipal abonda dans son sens, déclarant que les jardins d’enfants, « entités économiques »,  devraient s’orienter à « la loi du marché » (sic): à bientôt, la réouverture !