Le Vent de la Chine Numéro 21
La coopération politique sino-US, ne semble jamais fonctionner si bien, que confrontée à des obstacles. Le Congrès exige-t-il (affaire Loral, cf VdlC n°19) le report de la visite en Chine de Bill Clinton (25 juin-3 juillet)? Ce dernier non seulement, ne reporte rien, mais travaille avec son homologue Jiang Zemin « comme jamais avant », et change d’ordre du jour pour leur Sommet: à la « Une », non plus la coopération financière ou technique, mais la haute politique, la gestion de la crise déclenchée par la rafale de tests nucléaires indo-pakistanais.
Un tel virage à 90°, offre à la Chine et aux USA de forts avantages. Tactiquement, il impose le silence aux objecteurs à cette mission, qui va oeuvrer pour la Paix, tout en renforçant la puissance yankee. Stratégiquement, il ouvre un champ de coopération entre les deux pays, pour tenter d’imposer ensemble des règles à l’Asie puis au monde, sur le terrain nucléaire, comme sur celui de la lutte anti-terroriste. Une étape suivante pourrait être la mise en commun (préférentielle ou exclusive) de marchés et de technologies immenses, dans l’intérêt bilatéral (cf l’ambition de Westinghouse d’ « aider la Chine de devenir exportatrice de centrales nucléaires »).
En bref: pour Washington et Pékin, cette crise nucléaire, à peu de semaines du Sommet Clinton-Jiang, offre une chance unique de rapprochement entre une superpuissance établie, et une qui aspire à le devenir.
Cela dit, les obstacles à un tel projet sont nombreux :
[1] Concernant la crise indo-pakistanaise, l’Inde au moins, n’a pas l’intention de se laisser gérer par qui que ce soit;
[2] En cas de création d’un axe sino-yankee, quelle place accorder aux partenaires, Europe, Japon, Russie?
[3] Jalousies et suspicions mutuelles ne fondront pas en une nuit;
[4] La position immuable chinoise, est de promouvoir un ordre multipolaire mondial: depuis l’échec de l’alliance sino-soviétique, Pékin a horreur de mettre tous ses oeufs dans un même panier
HongKong dévoile son plan de relance: il était temps, avec 120 000 chômeurs (3,9%), une croissance négative depuis janvier, l’index Hang Sen le plus bas de l’année (8558 points) et 170MMUSD de pertes du secteur foncier.
Le grand argentier Donald Tsang pense créer plus de 100 000 jobs en 18 mois, par 12 mesures classiques: chantiers publics, formation, emplois sociaux, aides aux PME, baisses d’impôts (4MM USD) et des loyers sociaux, et resserrement des contrôles des emplois « au noir ».
L’accueil, sur place, est mitigé: ni parti, ni syndicat n’espèrent sortir de la crise avec de telles mesures. Un groupe G2000 calcule que pour redevenir rentable, HongKong devrait encore couper ses loyers de 40% et ses salaires de 30%. Ceci, au moment où l’administration offre la plus forte hausse de salaires du rocher: 6,7 à 7%.
Ce plan s’en tient à une médecine douce, conformément à sa foi en la bonne santé fondamentale de HongKong, et en son credo libéral (« laisser agir le marché ») qui jusqu’à présent lui a si bien réussi: il sera toujours temps, en cas d’échec dans 18 mois, de faire agir la garde républicaine: de puiser dans les coffres!
En terme d’export, l’objectif chinois pour 1998 est de reporter vers les marchés traditionnels, les pertes inévitables sur les marchés nouveaux d’Asie du Sud-Est.
À Canton, l’objectif vient d’être remonté de +10 à +15%, après une hausse des ventes de 36% aux USA, 59% au Japon et 22,6% en Europe, et une perte sur l’Asie du Sud-Est de 24,6%.
Au plan national, janvier – avril a vu une hausse de 11,6% (baisse relative, face aux 21% de 1997), avec un chiffre de 52,6MMUSD. Pour les matières premières, frappées par le fort niveau du RMB, Pékin renforce les primes à l’export: de 9 à 11% pour acier et ciment, de 3 à 9% pour le charbon (objectif = passer de 30 à 50Mt d’ici 2000).
Deux usines de polystyrène de 100000t/an, bientôt à Zhangjiagang (Jiangsu).
La 1ère, en 2000, propriété de Chevron (pour 90M USD), emploiera 100 locaux. La seconde suivra, Joint-venture US-Japon (Asahi chemical et Dow Chemical).
NB : En 1997, la Chine a consommé 1,25Mt de ce matériau d’emballage, dont 2/3 importés.
Tout en entamant sans plaisir le plus sévère dégraissage de leur histoire (réduire le personnel de 1,4M de jobs d’ici 2000, dont 300000 cheminots, et les pertes de 337MUSD en 1998), les chemins de fer préparent les travaux du TGV Pékin-Shanghai: quoique non-inscrits au 9. Plan (1996-2000), ils débuteront en 2000, sur une section (Shanghai-Nankin), ou bien deux (avec Pékin-Tianjin). 1300km, 24 gares, 300km de moyenne, pour un investissement de 12MM USD, contrat visé en Europe comme au Japon..
Deux séries de prêts de la Banque Mondiale, pour un total de 900MUSD, viennent d’être attribués.
– 200M en reforestation (Centre et Ouest), pour ancrer la terre et les hommes sur 315000ha, et créer bambouseraies et vergers (fruitiers et plantes médicinales) sur 230000 autres;
– 250MUSD iront à 2 projets routiers (Hebei-Canton), 123M à la réfection de canaux (Canton-Jiangsu), et 28 pour la reconstruction des environs de Zhangjiakou (Hebei), après le tremblement de terre du début 1998.
½ MMY: c’est ce que coûtera le télescope solaire que lanceront ensemble Chine et RFA en 2003: le plus grand (1m de diamètre, contre 12 cm généralement), et le plus avancé au monde. Budget à 80% à charge de Pékin. D’une durée de vie de 3 ans, il nourrira la recherche sur le champ magnétique solaire.
Divorce: FedEx et le Chinois EAS ont mis fin à 13 ans de coopération sur le marché de la messagerie postale.
EAS refusait de se faire racheter par FedEx, anxieux de remonter son retard par rapport à DHL, et qui devra trouver autre chose. EAS, aujourd’hui implanté dans toute la Chine (72 agences, 200 camions) et dans 12 pays, s’est dans la foulée remarié avec l’américain Air borne Express.
Sans préjuger des résultats, on ne peut qu’admirer la maîtrise de Toyota dans son implantation sur le marché chinois, douze ans après le premier venu, Volkswagen. Depuis cinq ans, Toyota tisse sa toile, à Tianjin, par une association originale avec Tianjin Automotive Industry. Les étapes:
[1] Via Daihatsu, Toyota vend à TAI la licence Charade, rebaptisée (Xiali).
[2] Protégé par l’Etat (seul constructeur 100% chinois), TAI franchit en 1997, pour ce modèle bas de gamme (moins de 60 000Y neuf) la barre des 90 000 véhicules /an, occupe 40% du marché national des taxis, mais semble mal parti pour son objectif de 300 000 véhicules d’ici 2000.
[3] Ceci, malgré un coup de pouce par Toyota (1997), avec une Joint-venture de moteurs.
[4] 1er à le faire en Chine, Tianjin Automotive Industries (TAI) se présente (22 juin) en bourse de Tokyo. Toyota serait le principal acquéreur des 150M USD en vente (411 M de parts « T »).
[5] Dernière étape, la mairie de Tianjin croit que Pékin va approuver une Joint-venture (50% /50%) Toyota-TAI, pour produire 30 000, puis 150 000 « Corolla ».
En fait, avec les investissements déjà réalisés, l’usine d’assemblage ne coûtera « que » 100M USD. Toyota « aidera » Tai à remplir son quota de 300 000: pour la moitié en Xiali (sous licence, mais Toyota aura jusqu’à 25% des actions), l’autre en Corolla. Résultat d’une coopération volontairement discrète, associant patience et long terme, pour un accouchement sans douleur.
Le colossal programme de ventes d’appartements publics va bon train. A 1 mois de la dead line (repoussée pour Pékin à la fin de l’année), à laquelle prix d’achat et loyers devraient fort monter, le Liaoning a déjà vendu 50% de son capital immobilier. Tarif à Pékin: 175USD/m², au lieu des 1000USD du prix courant. D’autres ristournes se rajoutent, suivant âge, états de service et carte du Parti.
Résultat : des appartements de 150m² se cèdent à 2500USD (1/10 du prix), et les acheteurs sont des vétérans, attirés par l’offre irrésistible et la perspective de léguer à leurs enfants.
Enquête nationale anti-fraude fiscale, du 1er juin à fin sept. Visées: ces firmes écrans échappant aux taxes en profitant de statuts caritatifs, usine pour handicapés, scolaires (sic) etc. Délai de grâce jusqu’au 30 juin, après, promesse d’une amende lourde.
Unicom, concurrence de China Télécoms, enfin autorisé à exploiter son réseau tel câblé à Tianjin. Unicom avait payé 500MY pour 100 000 lignes, et perdu depuis juillet 1997, 200000Y/jour, faute du feu vert du ministre des PTT –arbitre du marché ET maison mère de CT. Le déblocage est intervenu en mars:
[1] Le ministre des PTT a fusionné avec celui de l’électronique (1 des 3 actionnaires d’Unicom);
[2] Un programme de CCTV à large audience a attaqué les PTT de Tianjin pour leur refus de connecter Unicom au réseau, forçant plusieurs ministres à réagir.
La China Securities Regulatory Commission (CSRC) s’attaque au problème, hier obscur, des titres hors comptoirs, de bourses clandestines. Des centaines de firmes, sur tout au Nord-est sont impliquées, ayant vendu des titres sur des places fantaisistes, faute de pouvoir espérer un feu vert rapide pour Shanghai/Shenzhen. Il s’agit d’éteindre la bombe à retardement (échanges hors contrôle = délit d’initiés) avant la fin de l’année:
[1] En forçant les firmes coupables à rembourser,
[2] En prenant leur contrôle, ou,
[3] Pour les meilleures, en les inscrivant sur une des places officielles.
2,8 M de retraités regardent tous les jours dans leur boite aux lettres, dans l’attente de leur pension impayée par l’État. Montant dû : 4,7MMY, dont ½ depuis plus de 6 mois, et les ¾ dans le Nord-est et le Sichuan. Les entreprises chinoises, supposées financer le fonds de retraite, accusent un retard de paiement de 29MMY.
Depuis le 1er janvier, la police a saisi 206kg de drogues dont 157 d’héroïne (60% de plus que même période 12 mois plus tôt), de plus en plus convoyée par wagons de marchandises trafiqués. La contrebande, depuis janvier, s’est vu confisquer pour 100MUSD, voitures (50) cigarettes (5000 cartons), CD pirates (5,2M), huiles moteur, cachemire, aciers spéciaux, ordinateurs…
Par rapport à 1997, avec 1229 arraisonnements en haute mer, la contrebande hausse de 81%. Elle se situe surtout au Sud (triangle Hainan-Canton-Fujian), avec une belle exception au Nord: le port de Dalian.
Apathique 9ème Anniversaire des événements de la place Tian An Men. Bao Tong, l’ex-secrétaire de Zhao Ziyang, qui venait de récupérer ses « droits politiques » après 9 ans de privation, a appelé le pouvoir à libérer son ancien patron, et à se lancer dans une réforme politique. Au même moment, un des conseillers de Jiang Zemin suggérait un moyen nouveau de combattre un des plus graves dangers du pays, la corruption: en relâchant les contrôles sur la presse, voire en laissant l’étranger y investir minoritairement.
Hantée par l’impératif de croissance en énergie propre, la Chine envisage une filière de Gaz Naturel Liquéfié (GNL) importé par bateaux, sur Shanghai ou Canton, pour une chaîne de centrales électriques le long de la côte. A plus long terme, deux gazoducs Gaz naturel (GN) sont à l’étude, depuis le Kazakhstan et la Sibérie.
Le contrat peut être estimé entre 4 et 5 MMUSD, entre méthaniers, unité de décompression, réseau d’adduction et centrales électriques. Mais il s’agit surtout du dernier pays avec l’Inde, en croissance énergétique forte d’ici 2020, et les implications des choix à faire par la Chine, dépassent de loin le domaine du commercial.
5 groupes gaziers ont été approchés par Pékin (Mobil, Total, Shell, BP et Enron). Mobil peut compter sur le soutien politique de Washington, et l’effet « sommet Clinton »; Shell dispose de la technologie de son partenaire nippon, mais n’aurait pas encore fait le choix de la transférer (le Japon hésite!).
Total dispose cependant de bons atouts: des brevets de pointe (copropriété GDF), et surtout, sous l’angle géostratégique, une meilleure garantie de neutralité, pour éviter à Pékin de voir ses paiements gaziers suivre le même chemin que ceux de Tokyo ou Séoul depuis la guerre du Golfe: vers la recherche des industries d’armement américaines, en échange de fournitures militaires au Proche Orient!
Liés au réchauffement du Gulf Stream cet hiver (effet el niño), moult désastres affligent les campagnes. Autour de Golmud (Qinghai), 150 t de pesticides sont en cours de vaporisation par avion, durant 1 mois, sur un anneau de 200 km², afin d’exterminer une exceptionnel foyer de moustiques et permettre à cette ville garnison (très pauvre) de reprendre une vie normale. Dans tout le Sud, les pluies diluviennes attendues jusqu’au 20 juin (et qui depuis janvier ont augmenté de 35%, avec 830mm à HongKong, causant déjà inondations et quelques centaines de morts) vont endommager une partie des récoltes.
Et pour le reste, 800000 ha emblavés seront dévorés par les sauterelles, trois fois plus que l’an dernier. Passons sur les tremblements de terre, incendies de forêts, marées rouges, et autres récentes tempêtes de sables… Conséquence de l’inclémence météo: pour la 1ère fois en 11 ans, le paysan du Henan (province plutôt prospère) voit son revenu baisser, 1er trimestre, de 4% (à 357Y).
Shanghai (Pudong): ouverture, 1er juin, du plus moderne hôpital pédiatrique du pays: 40000m², 20 départements, 250 lits, pour une capacité d’accueil d’¼ M d’enfants malades. Coût total: 70MUSD, payés par la mairie, le projet « HOPE », et Helwett Packard.
1er juillet, HongKong: Jiang Zemin, pour le 1er anniversaire du retour de la SAR à la Chine, et l’inauguration de l’aéroport de Shek Lap Kok
2 juillet, HongKong : dernière étape du voyage de Bill Clinton (visites nettement séparées – « une RAS, deux visites »)