Le Vent de la Chine Cahiers d’été (2021)

du 18 juillet au 28 août 2021

Art : Tintin, de retour à Shanghai !
Tintin, de retour à Shanghai !

À Shanghai, grâce aux efforts conjoints du Musée Hergé et du Power Station of Art, l’exposition Tintin et Hergé offre du 6 août au 31 octobre l’occasion unique de partir en voyage sur les traces d’un dessinateur de génie et de son personnage fétiche, mondialement connu et apprécié.

Voyage intérieur dans le monde d’Hergé d’abord, dessinateur d’affiches publicitaires, amateur de peinture, homme d’image qui découvre avec la bande dessinée un mode d’expression à sa convenance.

Voyage dans les studios d’Hergé ensuite, à la découverte du « travail d’horloger », selon ses propres mots, nécessaire à la création d’une bande dessinée. Chaque planche originale exposée révèle le grand talent d’Hergé, à la fois romancier de l’image et virtuose du crayon.

©️ Hergé – Moulinsart 2021

Voyage enfin dans l’univers de Tintin (丁丁, Dīngdīng) : l’appartement bruxellois du fameux reporter, le château de Moulinsart, le dragon du Lotus Bleu. Une salle entière est d’ailleurs consacrée à cet album, et les nombreux documents exposés témoignent de son importance dans l’œuvre d’Hergé. Il s’y cache deux rencontres précieuses, celle bien réelle d’Hergé avec un artiste chinois de son âge, venu parfaire ses études d’art à Bruxelles, un certain Tchang Tchong-jen ; et celle présente dans l’album, rendant hommage à la première, entre Tintin et un petit orphelin sauvé de la noyade, appelé Tchang Tchong-jen par clin d’œil à son homonyme réel.

En 1934, à raison d’une fois par semaine pendant un an, Tchang accepte d’aider Hergé à parfaire sa connaissance de la Chine en vue des prochaines aventures de Tintin dans ce pays. Leurs rencontres préparent Le Lotus Bleu. Le jeune Chinois va profondément influencer l’art graphique d’Hergé et enrichir sa perception de l’Autre. « Je lui dois aussi d’avoir mieux compris le sens de l’amitié, le sens de la poésie, le sens de la nature (…) Je mesure à quel point Tchang a eu son importance dans l’évolution de mon travail. Et dans mon évolution tout court », confiera Hergé dans ses entretiens avec Numa Sadoul en 1971.

©️ Hergé – Moulinsart 2021

Tchang repartira pour Shanghai en 1935 et attendra un demi-siècle avant de revoir son ami belge et de découvrir le chef-d’œuvre auquel il a tant contribué.

Cette exposition, la plus grande jamais encore réalisée dans le monde sur Hergé et Tintin, ne pouvait avoir lieu qu’à Shanghai, la ville du Lotus Bleu, la ville natale de Tchang Tchong-jen, la ville où s’est ouverte en 2019, la première boutique chinoise Tintin.

Philippe Wang, représentant de la société Moulinsart en Chine, a beaucoup œuvré à l’installation de cette boutique et s’enthousiasme des plus de 30 000 visiteurs chinois, venus de 47 villes différentes pour parler de Dingding, leur héros préféré. À chaque visite, des souvenirs émouvants s’échangent autour de la table installée au fond de la boutique, et témoignent de l’engouement pour un univers qui symbolise, en Chine comme ailleurs, le paradis perdu de l’enfance.

Les albums de Tintin ont ainsi offert au jeune Philippe Wang une échappée vers l’étranger à une époque où l’on ne sortait pas si facilement de Chine. Le plus gros client de la boutique, originaire de Chengdu, évoque quant à lui les raclées de son père, furieux de découvrir le soir venu un petit livre de plus sur l’étagère familiale, acheté par son fils en lieu et place de son repas du jour.

En effet, dans les années 1980, les albums Tintin ne sont officiellement pas autorisés en Chine. Ses aventures circulent sous forme de xiaorenshu, des tout petits formats de poche, souvent une vignette redessinée par page, au texte traduit de l’anglais ou du français, selon les copies.

Il faut attendre 2001 pour voir arriver officiellement les 22 albums de Tintin. Mais la traduction issue de la version anglaise ne fait pas l’unanimité. Fin 2009, la réédition des albums dans une traduction issue de la version originale française rencontre un vif succès et les ventes décollent. Une mine d’or pour la maison d’édition China Children’s Press & Publication Group, partenaire des éditions Casterman et distributeur exclusif des albums en Chine, qui a fait le choix de laisser les albums accessibles au plus grand nombre. Avec une couverture souple et un prix très abordable autour de 15 yuans, plus de 15 millions d’albums ont été vendus en Chine depuis 20 ans. L’album préféré des lecteurs chinois ? Le Lotus Bleu bien sûr.

Ces ventes s’inscrivent dans un marché des livres jeunesse en croissance constante depuis dix ans, et sur l’essor du e-commerce (en 2018, 86% des ventes de livres pour enfants se sont faites en ligne).

Aujourd’hui, la société Moulinsart, responsable de la création, production et commercialisation des produits Tintin, peut compter sur des réseaux de distribution chinois variés : la boutique physique, mais aussi deux boutiques virtuelles sur Tmall et JD.com, et des distributeurs locaux. Avec l’enthousiasme de la Chine ces dernières années pour le 9e art, le succès de Tintin et de la BD en général n’en est qu’à ses débuts !

À une époque où peur de l’étranger et repli nationaliste s’observent à travers le monde, les valeurs d’ouverture, de tolérance, de curiosité, véhiculées par Tintin, ne connaissent ni les frontières ni les virus. Quel bonheur de voir enfin Hergé poser ses valises et ses planches à Shanghai, lui qui n’a jamais pu le faire de son vivant !

Par Marie-Astrid Prache


Art : Liu Xiaodong, artiste ethnologue
Liu Xiaodong, artiste ethnologue

Témoin de la vie moderne, Liu Xiaodong  (刘小东) peint les bouleversements que connaît la société contemporaine : les crises environnementales et économiques, leurs conséquences sur les populations. Capture méticuleuse des communautés qu’il observe en explorant le monde, chacun de ses tableaux est une profonde réflexion mêlant processus documentaire et artistique. Liu Xiaodong est considéré comme une figure centrale de la nouvelle génération du réalisme chinois.

Chacune de ses séries aborde une problématique sociétale. Déplacements de populations, dérèglement climatique, bouleversements économiques sont étudiés à travers des compositions à grande échelle, orchestrées avec soin.

Figure de proue parmi les peintres néo-réalistes chinois à émerger dans les années 1990, Liu Xiaodong choisit la peinture figurative dans un contexte artistique où les médias photographiques prédominent. Une prise de position conceptuelle qui correspond à son engagement à « voir les gens tels qu’ils sont vraiment ».

Mixant réalisme socialiste chinois et néo-réalisme, Liu Xiaodong travaille souvent sur place, peignant ses sujets en plein air. Il (dé)peint à l’huile et à l’acrylique, des « gens ordinaires », des modèles dont la dimension humaine fait résonner les situations de crise. « J’aime trouver des scènes qui font partie de la vie, de l’existence quotidienne de quelqu’un et je choisis des lieux qui m’intéressent », a-t-il déclaré. « Quand je peins quelqu’un, je veux capturer son environnement, sa vie. Je veux montrer l’histoire personnelle derrière l’image de la personne ». Liu Xiaodong suggère, fait allusion. Des coups de pinceau libres et des couleurs riches, pour la vie parfois rugueuse et improvisée de ses sujets…

L’exploration de Liu Xiaodong s’est déroulée parallèlement à une nouvelle esthétique documentaire dans les œuvres de cinéastes de la « sixième génération » tels que Wang Xiaoshuai et Zhang Yuan, avec lesquels il a souvent collaboré. Depuis le début des années 2000, Liu travaille fréquemment in situ, dans des lieux de renommée mondiale, souvent difficiles d’accès, comme le barrage des Trois Gorges en Chine (2003) ou la frontière américano-mexicaine (2020).

Pour son exposition « Hometown Boy » (2010) à l’UCCA de Pékin, l’artiste a posé son regard sur ses amis d’enfance, dans la ville de Jincheng – connue pour son industrie papetière – à travers une longue méditation sur la transformation personnelle et la mobilité sociale.

Dans ses séries les plus récentes, « Borders » (2021), actuellement au Dallas Contemporary, l’artiste s’est intégré aux communautés de la région du Texas, « documentant les individus, les lieux et les sociétés contemporaines. Il décrit un monde varié, animé et enrichi par la diversité, où les valeurs familiales et collectives s’imposent comme des vecteurs communautaires primordiaux de paix et de fraternité ».

Pour sa première exposition personnelle à UCCA Edge (Shanghai), intitulée « Your Friends », l’artiste se tourne vers « les personnes qui lui ont été les plus proches, sur le plan personnel et artistique : sa famille immédiate et ses interlocuteurs les plus chers ». Elle rassemble de nouvelles œuvres, créées dans les mois qui ont suivi son retour de New York, pendant les premiers stades de la pandémie, mêlées à des œuvres antérieures, choisies pour leur résonance au contexte. Une œuvre qui nous rappelle notre humanité, et dans laquelle, à travers les joies et les luttes des sujets représentés, on se retrouve.

Par Caroline Boudehen

Né en 1963 à Jincheng, dans la province du Liaoning (Nord-Est), Liu Xiaodong a étudié à l’Académie Centrale des Beaux-Arts de Pékin avant de fréquenter l’Académie des Beaux-Arts de l’Université de Complutense à Madrid. Son travail a fait l’objet de nombreuses expositions personnelles dans des lieux tels que le Dallas Contemporary (2021), le Musée de la Louisiane (Danemark (2019)), NRW-Forum & Kunsthalle de Düsseldorf (Allemagne (2018)), le Palazzo Strozzi à Florence (Italie (2016)), la Fondazione Giorgio Cini à Venise (Italie (2015)), le Musée Minsheng à Shanghai (Chine (2014)), le Seattle Art Museum (États-Unis (2013)), la Kunsthaus de Graz (Autriche (2012)) et l’UCCA à Pékin (Chine (2010)). Son travail a également été inclus dans de nombreuses expositions collectives dont la Qatar Museums Gallery à Doha (2016), la Biennale de Gwangju (2014), la Biennale de Shanghai (2000, 2010), la 15e Biennale de Sydney en Australie (2006) et la Biennale de Venise en Italie (2013, 1997). Une sélection de ses œuvres est visible jusqu’au 10 octobre 2021 à l’UCCA Edge de Shanghai, à travers son exposition personnelle « Liu Xiaodong : Your Friends ».


Art : Liu Xi, une oeuvre incandescente
Liu Xi, une oeuvre incandescente

Son œuvre sculpturale est volcanique et fragile, et situe le dialogue entre genres au cœur de son travail. Souvent porteuse d’un message adressé aux femmes, sa pratique incarne l’épanouissement personnel que la jeune trentenaire a su préférer au poids des traditions, rappelant l’urgence et la nécessité de se dépasser, en faisant de la confiance en soi un cheval de bataille.

A travers des formes organiques d’un pastel crémeux, d’un rose alléchant, d’un vert éclatant, d’un noir de charbon à l’allure grave ou d’un doré lumineux, les sculptures en porcelaine de Liu Xi (柳溪) prennent vie entre puissance et délicatesse. Déclinées en plusieurs séries de formats variables, elles oscillent entre les forces et les faiblesses qui constituent tout être humain.

 

« La fragilité et la solidité sont en chacune et chacun d’entre nous. Peu importe la personne, le genre, le caractère. Ce sont des éléments universels, à travers lesquels les êtres sont connectés » affirme la jeune femme, originaire d’un village du Shandong, au Nord de la Chine.

Pour trouver cet épanouissement personnel et artistique, il a fallu à Liu Xi une volonté et une ténacité persistantes, qu’elle a su transformer en matière première, une source d’inspiration illimitée. « C’est l’art qui m’a vraiment permis de vivre une vie avec du sens, une vie « vivante ». Cela m’a permis de m’exprimer, exprimer les relations entre les personnes, explorer l’intimité.  Je me suis sentie libérée pour la première fois de ma vie. »

Depuis, ses œuvres explorent ses considérations intimes sur la vie, les relations interpersonnelles, l’intimité, l’amour et la compréhension des autres avec « le soi de la femme ». Céramique dorée de formes florales et vulvaires, sa nouvelle série « Our God is Great » répond à celle, plus ancienne, du même nom. Alors que la première évoquait, à travers la couleur noire, l’incapacité ou la difficulté à se révéler, s’exprimer, celle-ci est au contraire éclatante, « soulignant l’importance de la « lumière » – illuminant le pouvoir de la conscience des femmes par tout le spectre de leur féminité, ce qui leur permet de répondre à leurs besoins et leurs désirs ».

L’artiste se joue des formes rigides et traditionnelles, les formes géométriques basiques sont délibérément masquées par l’artiste. Liu Xi réfute la rigidité standardisée, incarnée par les lignes droites et angles vifs, « qui ont été privilégiés par des générations entières et qui causent douleur et inconfort aux autres ». Ainsi, draper ces figures devient une ode à la libre circulation de la vie et de l’intuition, accueillant les questions et les doutes des esprits curieux sur l’état actuel des choses.

Sa série « 2020 » rend compte d’une année passée dans un état d’auto-isolement et d’incertitude dans le monde. Liu Xi a utilisé des bouteilles en porcelaine traditionnelles « pour couper, déformer et réorganiser… générer une nouvelle pour contenir et transporter les émotions actuelles, telles que l’anxiété, la folie, l’inconnu, la panique, le malaise et l’espoir ». L’utilisation d’un élément naturel, vivant – de la mousse – allié au minéral, vient connoter les nuances éclatantes d’un vert, porteur d’espoir, d’un temps qui passe.  

Lutte ou alliance, chacune de ses œuvres incarne un soulagement. « Il y a point douloureux, puis lorsqu’il est atteint, je me sens mieux, libérée. J’utilise l’argile, la porcelaine pour transformer mes informations, mes émotions… Pour dépasser ce point de douleur et atteindre cette sorte de libération. Et je pense que chaque sculpture résonne avec les peines, les interrogations de chacun-e. »

Par Caroline Boudehen

Liu Xi (1986) est diplômée du département de sculpture de l’Académie Centrale des Beaux-Arts de Pékin, et travaille entre Shanghai et Jingdezhen. Elle a participé à de nombreuses expositions en Chine et à l’étranger (Portugal, Norvège, Espagne, Corée, Royaume-Uni). Ses œuvres sont entrées dans les collections publiques du Musée de la Céramique de New Taipei City Yingge à Taïwan, de l’Ajuntament del Vendrell en Espagne, du Musée de la Céramique de L’Alcora à Valence (Espagne) et du Centre des Arts de la Céramique de Gaya à Bali (Indonésie). Une sélection de ses œuvres est exposée jusqu’au 22 août au Pearl Art Museum à Shanghai, au sein de l’exposition collective « From Clay to Words: Ceramics as Media ».


Art : Cai Guoqiang, l’alchimiste
Cai Guoqiang, l’alchimiste

Connu pour sa pratique pyrotechnique spectaculaire, l’artiste et scénographe Cai Guoqiang ne transforme pas le plomb en or, mais presque. Concevant ses œuvres à partir de poudre à canon et de feux d’artifice, il réalise performances, sculptures, peintures et vidéos. Un univers protéiforme détonnant.

Actuellement exposé dans le nouveau Museum of Art Pudong (MAP) à Shanghai, Cai Guoqiang confirme sa renommée internationale. Ouvert au public le 8 juillet dernier, le MAP, signé par Jean Nouvel, a été inauguré avec une sélection d’œuvres issues de collections prestigieuses – Tate Britain et Fondation Miro – et une exposition personnelle consacrée à Cai Guoqiang.

« Encounter with the Unknown », sa toute nouvelle installation monumentale (près de 30 mètres de haut), trône en majesté dans le hall d’entrée, et vient symboliser l’alliance de l’Histoire avec les histoires, des traditions avec l’innovation, le familier et l’étranger… Un arbre « cosmique », machinerie cinétique qui tisse cosmologie et mythes issus de différentes civilisations, et qui prend pour forme le castillo (armature depuis laquelle sont lancés les feux d’artifice au Mexique). Des thèmes qui incarnent en une œuvre unique les fils directeurs de toute une carrière – le voyage, l’intérêt pour l’histoire de l’art, les peuples et ses cultures – activés grâce à son matériau de prédilection : la poudre à canon.

Depuis l’adolescence, Cai Guoqiang est fasciné par les explosifs. Témoin des effets sociaux de la Révolution culturelle, il a grandi dans un environnement où les explosions étaient courantes (manifestations, défilés, célébrations…) Il a « vu la poudre à canon utilisée à la fois dans le bon et le mauvais sens, pour détruire et reconstruire ».

Il commence à expérimenter la poudre noire dans sa ville natale de Quanzhou, à travers dessins et sculptures éphémères, puis continue à explorer ses propriétés au Japon de 1986 à 1995, période où ses expériences deviennent des performances d’ampleur (« Projets pour les extraterrestres » (1990)). Il partira ensuite s’installer à New-York pour y vivre. S’appuyant sur la philosophie orientale et les problèmes sociaux contemporains, ses œuvres, souvent spécifiques à un site, répondent à la culture et à l’histoire.

Son actuelle exposition au MAP, « Odyssey and Homecoming », provient du récent voyage de l’artiste à travers l’histoire de l’art occidental. Via une série d’expositions dans de célèbres musées du monde entier, Cai Guoqiang converse avec les périodes de l’histoire de l’art représentées par les collections emblématiques de ces institutions.

Il a, entre autres, retracé les civilisations grecques et romaines antiques au Musée national d’archéologie de Naples et les ruines de Pompéi, dialogué avec la Renaissance italienne aux Galeries des Offices, l’Âge d’or espagnol et l’Art baroque au Musée du Prado, et le modernisme au musée Solomon R. Guggenheim.

Au cœur de son travail, une question rayonne : peut-on unifier l’histoire de l’art et des civilisations dans un monde replié sur lui-même, agité par le chauvinisme ?

Cai Guoqiang (né en 1957, Quanzhou, Chine) a été formé en scénographie à l’Académie de théâtre de Shanghai. Son œuvre est pluridisciplinaire (dessin, installation, vidéo, réalité virtuelle, performance). Il a reçu de nombreux prix, dont le Lion d’or à la Biennale de Venise en 1999, le Hiroshima Art Prize en 2007 et le Fukuoka Asian Culture Prize en 2009. En 2012, il a reçu la première Médaille des Arts du Département d’État des États-Unis pour son engagement exceptionnel en faveur des échanges culturels internationaux.

Ses récents honneurs incluent le Barnett and Annalee Newman Foundation Award (2015), le Bonn Prix ​​efanten pour l’art contemporain (BACA), les Japan Foundation Awards et l’Asia Arts Award Honoree en 2016, et le prix Isamu Noguchi 2020. L’artiste a également été directeur des effets visuels et spéciaux pour les cérémonies d’ouverture et de clôture des Jeux Olympiques d’été de 2008 à Pékin.

Ses nombreuses expositions personnelles et projets au cours des trois dernières décennies incluent « Cai Guoqiang on the Roof : Transparent Monument » au Metropolitan Museum of Art, New York en 2006 et sa rétrospective « I Want to Believe » au Solomon R. Guggenheim Museum, New York (2008). Son exposition personnelle Da Vincis do Povo a été présentée dans trois villes du Brésil en 2013. Ces dernières années, il s’est lancé dans « Individual’s Journey Through Western Art History », une série d’expositions personnelles dans des musées de renommée mondiale, en dialogue avec l’histoire de l’art occidental.

Par Caroline Boudehen

IG: @caromaligne


Art : Les utopies de Cao Fei
Les utopies de Cao Fei

Mixant commentaire social, esthétique populaire et références au surréalisme dans ses films et installations, Cao Fei génère des œuvres-documentaires aux notes fantastiques, reflétant les changements rapides et chaotiques qui se produisent aujourd’hui dans la société chinoise. Une pratique particulière et un monde inédit, qui lui valent d’être considérée comme l’une des jeunes artistes chinoises les plus innovantes à avoir émergé sur la scène internationale.

Née en 1978 à Canton, l’artiste multimédia vit et travaille à Pékin. Des vidéos à la performance, le travail de Cao Fei (曹斐) explore les médias digitaux afin de rendre compte de la vie quotidienne et actuelle des Chinois, notamment à travers le biais de la culture internet.

Toujours entre rêve et réalité, ses œuvres capturent la fulgurante transformation sociale et culturelle de la Chine depuis 1992, en soulignant l’impact des influences étrangères des États-Unis et du Japon. Cao Fei s’est ainsi immergée dans les flux de la pop mondiale – pop-cantonaise, animation japonaise et hip-hop américain – fascinée par les jeunes sub-cultures locales.

Dans ses premiers travaux photographiques et vidéo (« COSplayers » (2004)), elle a exploré l’aliénation et le désir d’évasion ressentis par certains jeunes, à travers des personnages de jeux fantastiques. L’interaction entre les mondes virtuel et réel, l’utopie et la dystopie, le corps et la technologie sont des thèmes majeurs pour l’artiste, sur lesquels elle affûte sa vision de la société.

« Whose Utopia », réalisé en 2006, est une œuvre majeure. Le film explore le contraste entre les expériences quotidiennes et les aspirations des travailleurs de la chaîne de montage d’une usine d’ampoules électriques située dans le Delta de la Rivière des Perles, sa région natale.

De ses conversations avec les ouvriers, Cao Fei réalise des performances, une mise en œuvre des rêves et fantasmes de chacun (une ballerine, un musicien, un maître de tai-chi), ce qui mène à la « création de leurs avatars », explique Cao Fei.

Une occasion de s’évader et de se réinventer, dans le cadre conformiste de l’usine. La mise en scène de cette utopie « suggère une perpétuelle disparité entre l’enfermement d’un mode de vie industriel et l’utopie individuelle » poursuit Cao Fei.

Depuis, l’artiste continue de mêler réalité et virtualité, de façon de plus en plus pointue. « RMB City : A Second Life City Planning By China Tracy » (2007) imagine le futur des villes chinoises : les utilisateurs, via leurs avatars choisis, peuvent acheter et échanger des objets, construire des structures urbaines et interagir avec d’autres avatars dans une utopie artificielle… Qui n’a plus rien d’imaginaire en 2021.

En 2018, c’est son film et installation multimédia « Asia One » qui propose une vision hyper réelle du futur proche en examinant l’effet de la technologie sur les relations humaines.

Les œuvres de Cao Fei ont été exposées dans de nombreuses biennales et triennales internationales, dont les 50e, 52e et 56e Biennale de Venise (2003, 2007 et 2015). Des expositions et projections de son travail ont eu lieu dans de prestigieuses institutions telles que la Serpentine Gallery (2006 et 2008) et la Tate Modern de Londres (2002, 2013 et 2014), le Guggenheim Museum (2011 et 2018) et le MoMA à New York (2016 et 2015), la Fondation Louis Vuitton (2016), Palais de Tokyo (2005 et 2017) et Centre Pompidou à Paris (2003, 2014, 2019). Elle fut lauréate du Hugo Boss Prize en 2010. Elle a reçu le Chinese Contemporary Art Award (CCAA), le Best Young Artist Award en 2006 et le Best Artist Award en 2016. Une rétrospective lui a été consacrée à l’UCCA de Pékin entre mars et juin 2021.  

Par Caroline Boudehen

IG: @caromaligne


Podcast : 21ème épisode des «Chroniques d’Eric» – Bureau des objets perdus : blouson, enfants, et démocratie
21ème épisode des «Chroniques d’Eric» – Bureau des objets perdus : blouson, enfants, et démocratie
Venez écouter le 21ème épisode des « Chroniques d’Eric », journaliste en Chine de 1987 à 2019 et fondateur du Vent de la Chine.
 
Dans cet épisode, je vous mets en parallèle la gentillesse foncière des Chinois (un mélange subtil de compassion bouddhiste, de simplicité paysanne et de pragmatisme) et la dureté croissante du régime, sous la crise du Covid-19 mais aussi sous sa croyance que la pandémie représente sa chance de saisir plus vite le gouvernail de la planète.
 
Cette chronique propose un regard croisé entre mes souvenirs récents et lointains d’attitudes chinoises et françaises, et quelques petits faits tirés de l’actualité.
 
On pourrait en tirer l’impression d’un pays dont l’histoire n’est nullement faite, mais qui tâtonne et hésite, deux pas en avant, un pas en arrière, coquille ouverte et coquille fermée en fonction des marées – il n’y a ici aucune exception chinoise, le monde entier à vrai dire, est en régression, sidéré par les monstres qu’il vient d’engendrer, pandémie et réchauffement global ! 
 
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Podcast : 20ème épisode des «Chroniques d’Eric» : Chez Pu Yi, les débuts du monde
20ème épisode des «Chroniques d’Eric» : Chez Pu Yi, les débuts du monde
Venez écouter le 20ème épisode des « Chroniques d’Eric », journaliste en Chine de 1987 à 2019 et fondateur du Vent de la Chine.
 
« Imaginez une scène de votre vie, 30 ans en arrière, et qui vous revisite soudain. C’est ce qui nous arrive en des circonstances assez improbables, avec le baptême de notre fils Jérémie dans une ambassade latino-américaine, suivi d’une fête sur un site inconnu, interdit d’accès et qui s’est ouvert une fois seulement, pour quelques heures, à nous et à nos invités du monde entier. Cette scène vous montre comment vivaient début des années ’90 les expatriés à Pékin, leurs amis chinois, et plus encore : qu’est ce qui leur est arrivé en 30 ans, quels ont été leurs sorts respectifs. L’on apprendra ce que signifie en mandarin, l’expression « chevaucher sur le dos du tigre« . Je réfléchis aussi sur le sort de la nation chinoise, sa mentalité de l’époque, comparée à celle d’aujourd’hui. Il en résulte un regard fasciné et fascinant, instantané sur l’histoire chinoise en marche, et tout cela, à travers la simple scène du baptême d’un petit enfant. »
 
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