Le Vent de la Chine Numéro 26 (XX)

du 4 au 10 juillet 2015

Editorial : Conférence Climatique – Li Keqiang, après l’orage, l’embellie

L’offre de contribution chinoise à la lutte anti-réchauffement climatique (partie du plan de l’ONU, qui doit être débattu et avec un peu de chance, adopté en décembre à la conférence « COP21 ») fut présentée par le 1er ministre Li Keqiang, lors de sa visite d’Etat en France (29 juin-2 juillet). Par cette annonce hors frontières, la Chine apportait son soutien au pays-hôte de la COP21, au point de mettre son poids au service d’un « lobbying » pour une cause commune – indice d’une relation franco-chinoise au beau fixe. 
Autre tournant : la Chine renonçait à faire obstruction aux tentatives de l’ONU de réglementer les émissions de gaz à effets de serre - une méthodologie qui heurtait la sensibilité chinoise et son idéologie. A vrai dire, sa position héritée de l’histoire (qui imputait aux Etats « bourgeois » la responsabilité historique de nettoyer la pollution planétaire), était devenue intenable, une fois devenue émettrice de presque 30% du CO2 mondial. À présent, elle est prête à agir, et vite, assumant sa part avec des pays alliés tels l’Union Européenne (France en tête) ou les Etats-Unis. Voici son offre à la COP21. D’ici 2030, elle veut : - réduire son intensité carbone de 60-65% par rapport au niveau de 2005, avec un pic d’émissions de CO2 de 12,7 milliards de tonnes (9,8 milliards en 2014), au plus tôt en 2027. Suivra un plateau de plusieurs années, avant une lente redescente ;- augmenter à 20% sa part d’énergies « propres » à bas carbone. Elles monteront en capacité à 800-1000GW, dont 200GW en éolien (doublés depuis 2014) et 100GW en solaire (qui atteignaient 28GW en 2014);- élargir de 20% ses surfaces boisées, façon d’absorber 2,2 milliards de tonnes de CO2 de plus par an d’ici 2030.Pour l’ONG Réseau Action Climat, l’offre de la Chine aurait pu être plus ambitieuse, celle-ci ayant dès 2014 parcouru la moitié du chemin (-33,8% d’émissions sur 2005). D’autant qu’à ce stade, les offres nationales ne pourront assurer l’objectif commun de limiter le réchauffement global à 2°C d’ici 2100. Mais il faut dire que ces derniers temps, Pékin habitue le monde à réaliser plus qu’elle ne promet : en 2014, elle a grillé 3% de charbon en moins, et moins 8% entre janvier et avril par rapport à la même période il y a un an. Dans son nouveau schéma, la Chine intègre l’idée d’une décarbonisation de son économie, en collaboration internationale pragmatique, pour abaisser les coûts des technologies nouvelles à bas carbone. Ainsi symboliquement le 29 juin, la Chine s’engageait avec les Etats-Unis sur deux projets de séquestration de CO2 (émis par des centrales thermiques, et stocké dans des formations rocheuses sous-terraines). Le même jour à Bruxelles, Li Keqiang réaffirmait que son pays était prêt à investir dans le fonds Européen d’Investissements Stratégiques (EFSI), appelé à gérer 315 milliards d’euros. Ici, le projet chinois des « Routes de la soie » n’est pas loin… Ultime signe de conversion à cette coopération multinationale, la Chine veut bien contribuer « dans la mesure de ses moyens » à un fonds de soutien technologique à la décarbonisation des pays en développement de 100 milliards de $ par an, à verser par les pays du Nord à ceux du Sud. Le coût du plan pour la Chine d’ici 2030 est estimé par Xie Zhenhua (l’ex-négociateur chinois à la COP-21, chargé du changement climatique) à 6600 milliards de dollars. Mais les retombées pour la Chine seront à l’avenant : elles lui assureront sa place au soleil sur le marché technologique des industries à bas carbone de demain, notamment à l’export dans le tiers-monde.


Défense : Mer de Chine du Sud, lourd climat tropical

Ile AchevéeEn mer de Chine du Sud, sur un point au moins, Etats-Unis et Chine semblent d’accord : le renflouage chinois d ’îles artificielles au moyen de puissantes pompes, de dragage, touche à sa fin. Sept îles ont émergé (600 hectares, rien qu’en 2015), et le 1er juillet, Hua Chunying, porte-parole chinoise, annonçait le début de la phase de «  construction d’installations qui fourniront divers services civils, pour permettre à la Chine de mieux remplir ses obligations internationales de sauvetage en mer, observation scientifique-météorologique… Auxquels s’ajoutent les équipements de défense nécessaires »… 

Aux Etats-Unis, le CSIS (Centre for Strategic and International Studies) donne plus de détails : sur l’ex-atoll de Fiery Cross Reef (Yongshu Jiao) s’étire désormais une piste d’aviation de 3000m, permettant tous types d’appareils de l’APL. Il inclut deux héliports, 10 antennes de communication par satellites et une probable tour de radars. L’ex-atoll Johnson South Reef (Chigua Jiao—cf photo) comporte une caserne à étages, deux héliports et trois antennes de communication. 

Plus au Nord, la Chine vient d’envoyer une nouvelle fois sa plate-forme d’exploration pétrolière à un milliard de $, à 167 km à l’Est de la côte vietnamienne, jusqu’au 20 juillet. Mais la mission se déroulant à la frontière des ZEE (zones économiques exclusives), une réaction « chaude » comme celle vécue au Vietnam en été 2014 (destructions d’usines chinoises, une vingtaine de morts, centaines de blessés, des dizaines de millions de dollars de dégâts) est improbable. 

L’APL déploie dans sa flotte-Nord une série d’appareils quadrimoteurs de détection de sous-marins. Tandis que Philippines et Japon font ensemble des patrouilles aériennes – ce dernier se dit prêt à en assurer conjointement avec l’US-Navy. 

En sus des actes, les piques abondent entre militaires et diplomates. Côté américain, on compare la pénétration chinoise en mer de Chine du Sud à « celle de la Russie en Crimée ». Côté chinois, on fait feu de tous bois contre tous. Wang Yi, son MAE, affirme le 27 juin que «  si la Chine abandonnait ses revendications, elle déshonorerait ses ancêtres. (..) Et en fermant les yeux sur les provocations sur sa souveraineté, elle déshonorerait sa jeunesse ». 

En ce concert de cris, le Cambodge (allié de Pékin, qui lui maintient la tête hors de l’eau) suggère en chuchotant aux Japonais et Américains de laisser l’ASEAN régler l’affaire seule avec la Chine…


Politique : Une loi sécuritaire, mailles fines

Le 1er juillet, par 154 voix pour et une abstention, le Bureau de l’ANP adopta la loi de Sécurité nationale, signée du Président Xi Jinping –tambour battant, 40 jours après la clôture de l’appel à commentaires. Les remarques, même celle des observateurs étrangers, semblent donc n’avoir guère eu de temps d’être prises en compte. Le problème tient à la définition de ce concept, qui couvre dans la loi un éventail démesurément large. Au-delà des frontières, il étend «  les zones de souveraineté » jusqu’aux «  actifs disponibles dans l’espace, au fond des mers et en régions polaires », qu’il entend «  explorer et exploiter ». La sécurité nationale touche à tout : finance, politique, idéologie et religion, et même dans un discours publié du Président, environnement et culture. Cohérent avec le passé révolutionnaire, le but de la loi voulue par Xi Jinping, est de raffermir le leadership du PCC, défendre la dictature du prolétariat, le socialisme aux caractéristiques chinoises ; et créer un système centralisé, efficace et incontesté. 

L’armée reçoit la mission de protéger les intérêts nationaux outre-mer (dont la mer de Chine du Sud promue au rang « intérêt primordial ») par la force si nécessaire : de garantir ressources stratégiques, réserves d’énergie, axes routiers et maritimes. Elle participe aussi aux actions internationales de gardien de la paix, aux opérations de sauvetage humanitaire et convois protégés des pirates.
La loi appelle aussi bien sûr à un contrôle plus serré de l’internet, des flux financiers, des technologies de l’information. 

Le professeur de droit à l’université des sciences politiques et légale, Xiao Fengcheng, commente : « cette loi était nécessaire et arrive à temps » – allusion aux révélations du transfuge E. Snowden en 2013, sur la capacité des Etats-Unis à espionner la Terre entière, alliés et leaders inclus. Contre-commentaire de Joerg Wuetke, Président de la Chambre de Commerce Européenne : « par son extrême extension, en vocabulaire comme en champs d’activité, cette loi va droit à la surprotection massive de la sécurité de l’Etat ». 

Seuls éléments rassurants : en avril, un autre règlement sur les technologies bancaires, envisageait d’obliger les fabricants de systèmes de télécommunication de données financières encryptées, à remettre à l’Etat leurs codes-sources, a été retiré suite à la levée de boucliers de l’étranger. La confidentialité du client cessant dès lors d’être assurée. Enfin, cette loi de sécurité nationale, si ferme en principe, est des plus floues quant à ses modalités d’application. Un précieux indice que le législateur, tout en obéissant en apparence, peut s’appliquer à désamorcer en cas de conflit à l’avenir, notamment sur la scène internationale.


Agroalimentaire : La ferme aux 100 000 vaches – un effet bœuf !

Le secteur laitier en Chine poursuit sa course au gigantisme, aidé par l’Etat qui vise à rétablir la confiance en le « made in China » par des hyper-fermes investissant dans l’hygiène et la technologie. Cet élevage sous halle rencontre toutefois un obstacle technique : où trouver le fourrage ? Réponse, à l’étranger, en grande partie (hémisphère Sud). Autre souci : où trouver le marché, alors que les importations démentielles des années passées ont fait s’effondrer les cours l’an dernier en Chine ? Ici, la Chine a une chance, provisoire : les sanctions occidentales contre la Russie depuis un an, pour cause d’annexion de la Crimée, viennent d’être reconduites pour six mois par Bruxelles. Pour compenser, la Russie aspire chez elle tous produits agricoles, y compris laitiers. 

Jusqu’à présent, la plus grande ferme de Chine se situait dans le Dongbei, avec 40.000 têtes. Aujourd’hui, c’est le groupe Zhongding qui monte une ferme près de Mudanjiang (Heilongjiang), en JV avec la région sibérienne de Severny Bur : pas moins de 100.000 vaches, dont le fourrage proviendra de 100.000 hectares cultivés de part et d’autre de la frontière. Jusqu’alors, le lait allait aux grands groupes du Dongbei (Mengniu, Yili) ou shanghaïen (Bright). A l’avenir, une grosse partie s’en ira pour le Nord, direction la Russie. 

Zhongding est un groupe du Hebei, fondé en 2013 par d’anciens cadres de Mengniu (n°1 national). Début 2015, il avait concentré 32 fermes petites et moyennes et 25.000 laitières. En mars, son Président Sun Guoqiang, obtint d’investisseurs 400 millions de yuans dont 140 de CDH (un des plus grands fonds d’investissement du pays) visant le quadruplement du cheptel, par rachat de 100 fermes « d’ici fin 2015 ».
Une chose frappe toutefois : les 25.000 vaches initiales, ne produisent que 260 tonnes de lait par jour, soit 10 litres par animal et le tiers de la productivité d’Europe ou de Nouvelle-Zélande, indice d’une pauvre nutrition. Mais la ferme a pour l’investisseur russe un atout d’une attractivité imbattable : elle reste hors de l’embargo occidental, et peut faire venir du Brésil ou d’ailleurs les protéines et tourteaux d’oléagineux manquants. 

Et une fois les sanctions russes levées, la ferme de Zhongding garde un avenir prometteur : d’après la Banque mondiale, l’autosuffisance laitière de la Chine, en 2012 de 86%, doit baisser à 76% d’ici 2030 – ce qui signifie que le besoin local demeurera fort. 


Diplomatie : La Chine investit…dans la Chine en France

Pendant sa visite en France, le 1er ministre Li Keqiang signa 53 accords – rare moisson, en volume et en orientation. En plus de l’annonce d’un achat de 45, voire 75 A330 (18 milliards d’€), une chaîne de finition des cabines de ces modèles à Tianjin, permettra à la Chine de prendre pied sur ce segment gourmand en main d’œuvre à faible niveau de formation. Ainsi, Airbus réduira ses coûts, mais d’un autre côté, la Chine s’approchera du moment de vendre en Asie « ses » Airbus made in Tianjin, concurrençant la maison-mère. Elle verra aussi venir le temps de participer au développement d’avions futurs, à commencer par l’A350. Plus Airbus élargit son empreinte sur le monde, moins il pourra se financer seul.

L’armateur CMA-CGM reçoit 850 millions € de la banque CEXIM, et étudie avec China Merchants des occasions de reprise de terminaux à travers les mers du globe. Ce 3ème transporteur mondial se mue en outil des « Routes de la soie » chinoises, au même titre que Cosco ou CSCL. 

Pékin et Paris ont également signé des accords nucléaires intégraux, et un code de conduite pour exporter ensemble vers les marchés tiers « en Afrique et en Asie ». Une démarche demandée depuis 20 ans par Areva, EDF pour tenter de convaincre CNNC, CGNPC de produire et exporter ensemble des centrales nucléaires. De même, Alstom négocia longtemps avec CNR et CSR pour vendre des TGV associant low-cost chinois et high-tech français. En 2015, la Chine serait-elle enfin prête à se rallier à un tel « partage du monde », cette fois au nom de ses « Routes de la soie » ? C’est possible, mais ne soyons pas naïfs – seul l’avenir le dira. 

Citons encore parmi ces accords, un fonds Franco-chinois d’Innovation à 250 millions d’€ (à terme), pour financer 12 à 18 PME des deux pays « et un peu d’Amérique ». Engie (ex-GDF Suez) en JV avec NWS de Hong Kong, s’allie à Chongqing Water pour créer un géant du recyclage des eaux et déchets, et va livrer du GNL à Beijing Gas Group. STMicroelectronics, franco-italien des microconducteurs, s’engage sur 5 ans avec Huawei et en espère un volume d’affaires de 450 millions d’€. Bien d’autres noms signent des liens : Schneider Electric, Alcatel-Lucent, Sanofi, L’Oréal… 

On a du mal à dire si ce sont les besoins des économies nationales qui font le beau temps en politique, ou vice versa !


Finance : Sauver le soldat Bourse des griffes de l’« Ours »

Une tempête s’est abattue sur la bourse de Shanghai, grillant 20% de sa valorisation en 15 jours, au 18 juin. La chute était à vrai dire inévitable, après une « chevauchée fantastique » partant de 2000 points début 2014, à 5000 points début juin. 

Pourquoi ces groupes publics, constituant l’essentiel des titres cotés en bourse chinoise, ont-ils tant monté, quoique si mal gérés ? Au Centre de Recherche au Développement, Zhang Chenghui estime à 6,5 trillions de ¥ en 2015 les profits industriels et les intérêts de leur dette (égale à 1,25 PIB) à 8 trillions. Avec un tel bilan, loin d’attirer les actionnaires, ce listing d’actions boursières serait de longue date en faillite en Occident…
La raison à l’engouement a été le choix du gouvernement de gérer sa dette publique par ponction sur l’épargne et par refinancement, plutôt que par la méthode plus radicale des faillites et de la défaisance. 

Quasi instantanée, la réaction du Conseil d’Etat au dérapage de Shanghai a été dans la droite ligne de ce principe : rétablir la confiance, et lâcher du lest en forme de « prix d’appel » aux agioteurs. Les 24-26 juin, la Banque Centrale rabotait l’obligation de réserves des banques, et leur taux d’intérêt. Elle n’avait plus recouru aux deux techniques ensemble depuis 2008. Désormais, les taux d’intérêts sont à 4,85%, voire 2% pour le taux à un an. Mais surtout, les banques sont affranchies de l’obligation de geler 25% de leur capital. Selon Morgan Stanley, cela libérera 490 milliards de ¥ de crédit. 

D’autres mesures sont venues enrayer le départ en vrille de la bourse : au 1er août, la taxe boursière sera réduite de 30% (à 0,00487%), comme celle de « transfert » (0,002%). 

Et le 30 juin, le fonds public des retraites était autorisé à y placer 33% de ses 4,2 trillions de ¥ d’actifs. Vu le risque, cette mesure laisse dubitatifs bien des administrateurs. Mais ce fonds n’a pas vraiment le choix, vu l’urgence des besoins : par sa gestion prudente, il ne gagne que 2% par an – un taux négatif, moindre que l’inflation. Sous peu, il sera en rupture de paiement, vision préoccupante alors qu’approche le « tsunami des cheveux gris », où les 200 millions de sexagénaires actuels seront 500 millions en 2050. Or, les caisses de retraite de quatre provinces, telles Guangdong ou Jiangsu, depuis trois ans, gagnent en bourse 6% de revenu par an… 

Face à la tourmente boursière, on remarque la sérénité royale du Conseil d’Etat, due à l’excellente santé des banques, telle l’ICBC qui réalise en 2014, 59 milliards de $ de profit, n°1 mondial. À Bruxelles comme à Paris, Li Keqiang répète ses mantras : « la Chine va atteindre sa croissance de 7% cette année… rejeter toute tentation de stimulus fort, mais s’en tenir à la macro régulation…pour tenir l’équilibre entre croissance et ajustement » ! 

Ça marche plus ou moins : Shanghai (30 juin) regagne 5,5%, mais retombe au 3 juillet, perdant 30% depuis le 19 juin, rechutant sous les 4000 points. La tutelle CBRC reprend son épuisante chasse aux délits d’initiés –des joueurs ayant misé à court terme sur des fonds ne leur appartenant pas, et qui revendent coûte que coûte pour cacher leur délit, accélérant ainsi la débandade… 

Des observateurs (optimistes) de cette course boursière en dents de scie croient voir un Etat sûr de ce qu’il fait, qui « laisse faire la nature » pour « vacciner » ses boursicoteurs sur les risques de ce jeu —un Etat plus que jamais convaincu de les inciter à sortir leur épargne de la banque pour le placer dans la corbeille. C’est la logique du « nouveau normal » et de son outil n°1, le financement privé-public, qui doit relayer la planche à billets pour réaliser des milliers de chantiers concessionnaires en « BOT » (Build, Operate, Transfer). 

Prenons le cas de Sinohydro, auteur de nombreux barrages en Afrique comme en Asie. Désormais, ce groupe cesse de financer ses projets par les banques politiques (telle l’EximBank), avançant 85% des fonds pour se rembourser en ressources minières. L’Etat central n’a plus les ressources nécessaires. Ces barrages de conception ancienne coûtent souvent plus cher à bâtir, à entretenir que ceux de la concurrence, et peuvent s’avérer moins productifs en électricité. De leur côté, les pays-clients sont toujours plus réticents à accepter ce troc, préférant livrer leurs bois ou minerais au cours mondial (plus élevé). Aussi pour garder ses marchés, Sinohydro doit de plus en plus recourir au financement privé-public, l’outil financier des « Routes de la soie » et de leurs parcs industriels hors frontières.

Une dernière question lourde d’impact est celle du temps à disposition de la Chine pour opérer cette mutation de sa finance : la Banque mondiale admoneste le Conseil d’Etat (2 juillet) et l’avertit d’accélérer le pas. Pour elle, la cause première de la fragilité de la bourse, de l’instabilité financière est l’intervention publique massive dans la redistribution des ressources, son action constante sur la bourse et les consortia, son contrôle réel sur 95% des actifs de ses banques. Pékin est priée de séparer ses rôles de propriétaire, régulateur et planificateur stratégique, et de construire un système acheminant les fonds vers les secteurs rentables et gérant mieux ses risques. À bon entendeur…


Petit Peuple : Kaihua (Zhejiang) – La saga du trésor caché (1ère partie)

L’aventure qui suit débute il y a 100 ans. Selon la tradition de nos « Petit Peuple », la seconde partie (à paraître au n°27-28) relate des faits avérés et connus. Toutefois cette 1ère partie, si ancienne, n’a pu éviter d’emprunter à la conjecture et à l’imaginaire.

En 1915, sous Yuan Shikai l’« empereur » autoproclamé, Wang Dali, fermier de 29 ans vivotait du sorgho de ses lopins, de pêche et cueillette, qu’il revendait au marché de Kaihua (Zhejiang). C’était une époque dure, sous la menace des brigands et des taxes des seigneurs de guerre.

Une nuit d’octobre étoilée, revenant de pêche sa besace pleine d’anguilles, traversant une clairière, Dali tomba sur les vestiges d’un guet-apens meurtrier. 8 corps gisaient exsangues : 3 en haillons, visages noircis de suie (les assaillants), 4 mieux habillés, qui entouraient une chaise à porteurs. Jusqu’au bout, l’escorte avait tenté de protéger son chef, un dignitaire richement vêtu en bonnet et tunique de brocart de soie. D’abord surpris par les tirs meurtriers des malfrats, les gardes du corps avaient chèrement défendu leurs vies, ripostant à coups de revolvers et de sabres. Mais nul n’avait survécu. 

Effrayé mais n’ayant rien perdu de sa jugeote, Wang avait pensé fouiller la chaise : sous le cuir du fauteuil, il avait trouvé un boitier de fer cylindrique, renfermant de brillantes pièces d’argent par dizaines, à l’effigie d’un homme au cou épais et profil adipeux. C’étaient les célèbres dollars « grosse tête » de Yuan Shikai. Wang avait mis la main sur un trésor !

Fiévreusement, il rangea les pièces dans l’étui, qu’il mit à l’abri parmi ses anguilles encore bien vives. Puis il rentra à sa ferme à deux jets de pierre du village. Sans perdre un instant, il se mit à l’œuvre pour cacher son butin : dans le linteau de sa porte Est, juché sur un escabeau, il creusa le ciment tendre, descellant les pierres une à une pour évider une niche, y déposant le boîtier. Il recimenta le mur en un joint indétectable, puis partit finir sa nuit dans son lit. Le lendemain à l’aube, il se leva et repartit d’un pas leste, comme si de rien n’était, au marché vendre sa pêche… 

Dali tirait des plans sur la comète : quand sa femme reviendrait de Ningbo (chez sa sœur, avec Xiaopeng et Xiaoli, leurs garçonnets de 5 et 3 ans), il lui dirait tout. Au bout d’un mois, l’émoi du massacre une fois retombé, ils fileraient en douce pour Ningbo, prendraient la mer pour Jiujinshan (旧金山 « la vieille montagne d’or », San Francisco), avec dans leurs balluchons assez d’argent pour refaire leur vie. 

C’était compter sans l’arrivée trois jours plus tard au bourg, d’une escouade de 40 hommes aux muscles noueux et aux yeux lançant des éclairs, dirigés par un homme maigre au regard rusé et sans pitié. Le chef de la mission décimée dans l’embuscade était lieutenant de la triade « Verte » de Shanghai, au service commandé de l’empereur. Sa mission était de se rendre à Fuzhou pour y tuer un démocrate, opposant politique. Les dollars dans la boite était sa paie, pour le contrat. Aussi la police secrète, à présent, était aux trousses du larron pour récupérer le magot. 

Mais malheureusement, Dali ignorait que les enquêteurs suivaient sa trace chaude, suite à une bévue qu’il avait commise, bientôt fatale : mettant la boite parmi ses anguilles, il en avait laissé fuir une, partie mourir un peu plus loin. La retrouvant le lendemain, les limiers en avaient tiré les conclusions qui s’imposaient. « Qui avait vendu des anguilles au marché le lendemain ? », avaient-ils demandé à Kaihua de porte en porte. Suite à quoi les langues se déliant, Dali s’était retrouvé ligoté en moins de temps qu’il ne faut pour le dire. 

Sa seule chance eût été de rendre l’argent de suite. Mais trop déterminé à prendre ce risque au nom d’une vie nouvelle pour lui et les siens en Amérique, il était mort sans avouer, sot héroïque, après des heures sous la torture. Puis, les agents secrets avaient retourné sa ferme de fond en comble avant de repartir gros Jean comme devant !

Deux jours après, sa veuve, de retour, ne put que le pleurer, l’enterrer, et poursuivre sa vie avec les garçonnets, sans se douter de la fortune posthume que Dali lui laissait. Elle décéda en 1940. 

Homme simple, Xiaopeng son aîné passa sa vie à Kaihua, tandis que le cadet Xiaoli migrait sur Ningbo. Après le décès de la femme de Xiaopeng dans les années ‘90, le comité du village prit en charge le vieillard sans ressources, jusqu’à sa mort en 1999.

Etant resté sans enfants, sa maison fut redistribuée à Wang Shima, son neveu (fils de Xiaoli), et en 2008, Wang la céda à Zhan Xinlong, simple paysan, qui l’habitat. 

En janvier 2015, Zhan se mit en tête d’abattre la bicoque pour la rebâtir en plus confortable. C’est là que les maçons tombèrent, caché dans la niche du linteau-Est, sur l’étui de fer à peine rouillé, frais et clinquant après son siècle de sommeil. Devant leurs yeux médusés rutilaient 128 pièces de l’an III de la République, pouvant atteindre, selon les numismates, 30.000 euros au total, à 250 euros la pièce. 

Impossible à taire, cette découverte fit alors exploser la paix du village. Comment Zhan Xinlong allait-il pouvoir défendre sa « fortune tombée du ciel » (tiān jiàng hèngcái , 天降横财), alors que dès à présent, sortant de l’ombre, tant d’autres voix s’élèvent pour faire valoir leurs droits au trésor ? 

Vous le saurez en lisant la suite, la semaine prochaine !


Rendez-vous : Semaine du 6 au 12 juillet 2015
Semaine du 6 au 12 juillet 2015

8-9 /9-10 juillet, Ufa (Russie) : Le Président Xi Jinping au 7. Sommet des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) / et à la 15. Réunion de la SCO (Shanghai Cooperation Organisation)

3d Printing China Shanghai

7-9 juillet, Shanghai : 3D Printing, Salon international de l’impression 3D

8-10 juillet, Shanghai : ALUMINIUM China, Salon asiatique de l’aluminium

8-11 juillet, Canton : CBD, Salon international du bâtiment et de la décoration

9-11 juillet, Shenzhen, INTERTEXTILE Pavillon, Salon du textile

10-12 juillet, Pékin : DCE, Dongdu Cosmetic Expo, Salon international de chirurgie cosmétique et dentaire

15-17 juillet, Shanghai : China BEVTEK, Salon international des boissons, process, emballages et technologies

15-17 juillet, Shanghai : MWC, Mobile World Congress, Salon mondial du GSM

Cef China Electronic Fair Chengdu16-18 juillet, Chengdu : CEF West, China Electronics Fair West, Salon de l’électronique et des composants pour l’Ouest de la Chine