Le Vent de la Chine Numéro 29

du 6 au 12 septembre 2014

Editorial : Élections à Hong Kong : le choix draconien

Tout l’été, Pékin et Hong Kong ont joué au chat et à la souris. Il fallait définir les modalités de l’élection au suffrage universel du Chef de l’exécutif en 2017, selon l’engagement pris par Deng Xiaoping et Margaret Thatcher en 1984. Tout était question d’interprétation. Depuis le retour de la Colonie en 1997, Pékin avait toujours bloqué un suffrage pouvant déboucher sur un déni de sa souveraineté. Mais les instances centrales étaient aussi anxieuses d’éviter le clash avec son joyau technologique et financier. D’où leur attitude louvoyante de l’été, soufflant alternativement le chaud et le froid. 

En juillet, Pékin publia un Livre Blanc au ton très dur : tout privilège dont pouvait se prévaloir le Rocher, émanait du seul bon vouloir de Pékin. Puis fin août, Li Fei, chef du groupe « loi fondamentale de HK » à l’ANP, vint rétablir un semblant de dialogue en rencontrant à Shenzhen 49 édiles hongkongais…

Finalement, le 31 août, le couperet tomba : feu vert au suffrage universel, « un homme/un vote », mais les 2 ou 3 candidats autorisés seront indirectement choisis par Pékin seul, parmi les seuls « patriotes ». Ainsi, l’opposition démocrate est exclue, inéligible. 

C’est le clash, car cette famille politique qui pèse 27 élus sur 80 au Legco n’a désormais d’autre choix que de rejeter cette règle, qui doit à présent être approuvée à la majorité des 2/3. Mais en cas de rejet, Pékin l’a déjà clairement dit, il n’y aura pas d’autre offre : le suffrage indirect restera. 

Dans la rue, une opinion active menaçait depuis des mois d’« Occuper Central » (le quartier d’affaires), la démocratie dût-elle lui être refusée. Aussi, une fois Pékin ayant notifié son choix, cette mouvance restait d’abord sous le choc. Mais après 48h, par la voix de son porte-parole Benny Tai, elle se releva et se lança dans une nouvelle vague de « désobéissance civile ». Dos au mur, elle se bat « pour ses enfants » et n’a plus rien à perdre. 

Le Chef de l’exécutif, C.Y. Leung, mène une campagne hyperactive pour défendre le « progrès » de l’offre chinoise. De même, un de ses prédécesseurs, C.H. Tung (qui avait dû démissionner en 2005, suite à une manifestation de 500.000 personnes contre une tentative de limitation des droits civiques) réapparaît pour prêcher la coopération. À Londres, la Chambre des Communes et Chris Patten, le dernier gouverneur de la colonie, prétendent vérifier si la Chine « a bien honoré sa part du Traité » – provoquant la fureur théâtrale de Pékin… 

Clairement, cette décision n’annonce pas des jours paisibles. Si l’on se place d’un point de vue du pouvoir pourtant, ce dernier n’avait guère d’alternative – sauf à se retrouver avec 1,3 milliard de mécontents réclamant à leur tour la démocratie. 

Cette raideur, évidemment validée par Xi Jinping, serait peut-être une tentative pour mettre en difficulté Zhang Dejiang, Président du Parlement et responsable du dossier Hong Kong, un conservateur hostile aux réformes…
Finalement, peut-être la grande question de l’avenir, sera de voir quel est le nombre de Hongkongais prêts à accepter ce deal – au nom des emplois, des investissements, de l’avenir.


Religion : Les chrétiens aux destins croisés

Il y a trois ans encore, le catholicisme en Chine était considéré par le régime comme puissance étrangère à surveiller – le protestantisme avait image plus rassurante. Cet été cependant, ces deux versions du christianisme ont vu les tendances s’inverser : embellie pour l’église romaine, persécution pour celle de Luther. Curieux retour de flamme, mais instructif sur l’évolution de cette société, tant au plan politique que spirituel.  

<p>- Côté catholique, le changement a été induit par un lien personnel entre Xi Jinping et le Pape François 1er. Ces hommes ont reçu à trois jours d’intervalle, en mars 2013, la charge respective du PCC et du Vatican. Dans la force de l’âge, ils sont de longue date convaincus du profit à mettre fin à plus de 60 ans d’ostracisme mutuel… 

En août, Xi ouvrit—pour la première fois dans l’histoire – le survol de la Chine au Pape, en route pour Séoul. Ce dernier le remercia en étendant, sur la Chine et ses dirigeants, une « céleste » bénédiction : « nous sommes proches de la Chine. Ne nous craignez point. Nous ne cherchons que le dialogue ! » Pékin fit une réponse qui se voulait presque encourageante : « la Chine a toujours été sincère dans son effort d’améliorer les relations »…

Certes, il y a eu quelques fausses notes, tel le sec rappel de l’Association patriotique catholique, de l’interdiction aux « forces étrangères d’interférer » dans les affaires intérieures. Mais sur le fond, pas d’erreur possible : entre ces deux vieilles maisons, on a bien assisté à un début de dégel. 

– Avec les protestants, ce fut tout le contraire. Leur église subit de plein fouet une campagne débutée au printemps visant à démolir ceux de leurs temples jugés « illégaux ». Pour être objectifs, cette campagne ne se déroule qu’au Zhejiang, peut-être à titre de test pour évaluer les conséquences à petite échelle avant déploiement national. 

Dans les années ‘80 au Guangdong, une campagne de harcèlement s’était déroulée sur fond d’enregistrement administratif forcé des paroisses. De même les destructions visent aussi, dans une moindre mesure, les églises catholiques. Fin de l’été, au moins trois temples protestants, et 160 croix étaient déjà tombés. 

Ailleurs, au Henan, un pasteur est condamné à 12 ans de prison, et à Pékin Wang Zuo’an, Président du Bureau des affaires religieuses, prétend (6 août) réécrire la théologie du protestantisme, « en fonction des règles de la nation ». 

Le problème tient à la croissance exponentielle des vocations. À présent, le nombre des Calvinistes en Chine va de 40 millions (chiffres du régime) à 80 millions (sources protestantes). En y ajoutant les 10 à 15 millions de catholiques, les 87 millions de membres du Parti sont aisément dépassés, ce qui ne peut qu’alerter les autorités. 

Leur croissance est si fulgurante que plusieurs experts n’ hésitent plus à prédire d’ici 2030, une Chine passée 1ère nation chrétienne avec 350 millions de baptisés (qui représenteraient alors 20% de la population). Et ces « agneaux de Dieu », face au système, ne seraient pas des « moutons » : dès aujourd’hui, poussés par leur foi, les protestants osent toujours plus critiquer la politique religieuse du gouvernement. C’est donc l’épreuve de force. Mais n’est-ce pas justement ce moment de crise qui donne plus d’urgence et d’intérêt à la tentative de rapprochement initiée par Xi Jinping et le Pape François ?


Politique : Sur le front de l’anti-corruption…

Sous la poigne de son Président Wang Qishan, depuis 18 mois et toujours plus fort, la Commission Centrale Interne de Discipline – CCID (纪律检查, jilüjiancha) tire à feu nourri dans toutes les directions. Aussi ce mois-ci, chaque jour apporte son lot de nouvelles arrestations et initiatives surprises : 

<p>- Pour prévenir les fuites de cadres « nus » (ceux dont les familles sont déjà à l’étranger) à l’étranger, la CCID commence à ratisser les passeports des plus suspects, et la justice tente de d’obtenir l’extradition de certains. Ainsi, la Colombie renvoie (02/09) Wu, 35 ans, homme d’affaires de Yiwu (Zhejiang) ayant quitté la Chine en 2012, en laissant derrière lui une dette d’un montant « presque modeste » de 4 millions de yuans.
– Chez Huaxin, la JV de courtage de Morgan Stanley, la CCID étudie les agissements de Zhang Dongsheng, cadre à la NDRC. De 2003 à 2006, il préparait des obligations qu’émettait ensuite son fils Zhang Nan, employé de Huaxin… Sur internet, un document circule, dénonçant d’autres 高干子弟 (gaoganzidi, fils de dignitaires) émargeant (ou ayant émargé) à la célèbre banque d’affaires américaine.
– On trouve aussi sur la sellette Zhao Baige, 62 ans, Secrétaire du Parti à la Croix Rouge chinoise. Celle-ci avait été chargée en septembre 2011 de redorer le blason de l’ONG discréditée, accusée de détournement suite au scandale Guo Meimei —en vain !
À présent, c’est au tour de Xu Ke, ex-vice ministre du planning familial, de tenter de rétablir le navire en forte gîte.
– Face à cette crise sans précédent, l’Etat doit trouver –vite- des cadres de remplacement, non compromis.
Il les mute de provinces lointaines – au risque d’avoir aux manettes des gens ignorants des dossiers, et pas connectés aux « barons » et autres gens influents de la région. China Times (30/08) cite « au moins » 20 hauts cadres parachutés depuis 2012 d’un coin à l’autre de Chine, tel Ren Xuefeng, vice-maire de Tianjin, passé Secrétaire du Parti à Canton (27/08—cf photo).
– Toutes les provinces sont ainsi décapitées, sauf une, le Jilin dont aucun haut dirigeant n’est à ce jour inquiété.
À l’autre bout du spectre, la province ayant le douteux honneur du plus grand nombre de dirigeants arrêtés est le Shanxi. Cette région de l’intérieur est riche en charbon (denrée vitale en Chine), et assez loin du pouvoir central, pour y avoir tramé de juteuses affaires pendant des décennies, avant la tempête. Aujourd’hui, le grand nettoyage élimine 6 membres du Comité Permanent, le Secrétaire du Parti Yuan Chunqing, les vice-gouverneurs Du Shanxue et Ren Runhou : il n’y a plus personne au gouvernail !


Agroalimentaire : Le riz à l’heure des comptes

(Retrouvez également cet article en anglais sur Forbes – blog d’Eric Meyer )

Vue l’importance du riz dans l’alimentation de la Chine (1ère productrice, 143 millions de tonnes en 2014), tout changement dans ce secteur, notamment en politique rizicole, ne peut qu’avoir des répercussions sur la Chine elle-même. Sous cette perspective, nous devons braquer notre projecteur sur deux projets-clés du riz chinois, qui viennent d’être abandonnés—étrange coïncidence : 

–  Après 5 ans de débats, la tutelle agronomique a refusé (26/08) de renouveler les licences de culture expérimentale de riz OGM. Ce recul est spectaculaire. En 20 ans, des dizaines d’universités ont reçu au moins 3 milliards de ¥ de fonds publics pour créer des espèces de riz plus performantes par manipulation génétique (OGM). 

En 2009, deux nouvelles souches de riz (+ une de maïs) étaient certifiées pour 5 ans (à la culture, non à la vente). Enrichie d’un gène spécifique, elles devaient permettre d’épargner 80% de pesticides, tout en grossissant l’épi. Sous 10 ans, les experts escomptaient 10% de récolte en plus. Or par la décision d’août dernier, tout ce programme national est gelé sine die.

Comme cause à ce revirement, la presse cite les progrès des semences hybrides et de l’agronomie, permettant au pays cet été, grâce à une politique basée sur le volume, d’engranger sa 11ème récolte-record consécutive, toutes céréales confondues. Les silos publics regorgent de grain (150 millions de tonnes), coûteux à stocker, et périssables. Or ce grain coûte 2 à 3 fois plus cher que sur le marché mondial, désordre inacceptable pour un pays en développement, aux ressources limitées. L’ensemble du système est donc à repenser, et l’OGM cesse d’être nécessaire, avant même d’avoir été lancé ! 

L’argument est valable, mais aux meilleures sources, d’autres voix en avancent un autre, moins brillant mais indiscutable : l’Etat retire son feu vert aux souches OGM, car elles sont entachées d’erreurs de manipulation. « Elles contenaient trop de risques, y compris pour l’image de la Chine. C’était du travail d’amateur ». Pékin, après tant de scandales alimen-taires, ne pouvait se permettre une nouvelle bombe à retardement. 

Une autre objection a joué, quoique de façon moins pressante (la tutelle chinoise aurait pu vivre avec elle) : cet OGM était trop visiblement « inspiré » de Monsanto et d’autres leaders de cette technologie agrobiologique de pointe. Plaintes et poursuites auraient immanquablement suivi.

Aussi, en point d’orgue à cette saga, les autorités ont ordonné aux centres de recherches de réviser leur copie : un riz et un maïs OGM chinois seront bel et bien autorisés, une fois que des souches auront été mises au point, fiables et présentables ! 

– Fin août, Bangkok abandonne le programme « riz contre TGV », par lequel CSR et CNR, les géants ferroviaires chinois fournissaient les équipements que la Thaïlande paierait en riz (d’une qualité incomparable par rapport au chinois), voire en caoutchouc, au titre d’une déclaration d’intention passée en octobre 2013 avec le 1er ministre Li Keqiang en visite d’Etat. La liaison Kunming-Bangkok prévoyait deux dessertes, via Vientiane (Laos, petit allié de la Chine) et Chiangrai. 

Thailand Tgv CarteL’abandon a été décidé par les généraux thaï après leur coup d’Etat de février : un mois plus tard, sous la pression de l’armée, la Cour Constitutionnelle thaïe dénonçait cet accord passé avec Mme Y. Shinawatra, 1er ministre d’alors, qui tenait le pays pour le compte de son frère Thaksin, en exil. L’intérêt de Thaksin était de désenclaver le nord du pays (paysan, et rizicole), son vivier électoral, contrairement à Bangkok qui lui était hostile. 

Mais la junte n’avait pas un tel souci. Une autre raison à la réticence des militaires, était la spectaculaire percée chinoise sur leur sol national, qui s’accentuait au fil des années : le TGV créerait pourtant de la prospérité, mais aussi de la dépendance…

Les mois qui suivirent ont vu s’amplifier cette valse-hésitation. Début août, du bout des lèvres, la junte acceptait de poursuivre le projet TGV au coût de 23 milliards de $. Mais fin août, elle affirmait sa décision (que la Chine acceptait bon gré mal gré) de payer en argent, et d’octroyer les contrats par appel d’offres – une méthode plus transparente et équitable. Le chantier devrait débuter en 2015, pour une inauguration en 2021.

Dernier détail, qui compte dans cette histoire : la liaison ferroviaire complète ne s’arrête pas à Bangkok mais à Singapour (cf carte) à 1425 km plus au sud. Elle est naturellement appelée à devenir un formidable outil de développement pour toute l’Asie du Sud-Est.


Xinjiang : Xinjiang – subvention aux mariages mixtes…

« Les compatriotes de toute ethnie devraient se tolérer, s’apprécier, apprendre les uns des autres, et s’unir comme les grains de la grenade »…Par ces mots très forts prononcés en mai lors d’un sommet de crise sur le Xinjiang, le Président Xi Jinping voulait promouvoir la réconciliation entre ethnies, surtout entre Ouighours et Hans. 

Par ses élans poétiques, Xi annonçait une série de mesures concrètes pour rassembler des ethnies habituées depuis longtemps à mener des vies séparées. Parmi ces actions, figure une mesure inédite au Xinjiang, le mariage mixte subventionné.
Depuis le 21 août, toute noce entre un/une Han et un/une partenaire de toute ethnie, recevra 10.000¥ par an durant 5 ans. Au Xinjiang, c’est beaucoup d’argent, le revenu moyen étant 7400¥ par an. En y ajoutant le fruit de son travail, le jeune couple mixte peut s’enrichir très vite, d’autant qu’il reçoit aussi une assurance sociale, une prime de logement, et une sérieuse allocation scolaire -gratuité de la maternelle au lycée, une bourse de 3500¥ par an au collège, puis 5600¥ par an à l’université. 

Des conditions si rares et généreuses expriment au sein du pouvoir une tension proche du désespoir, pour une situation que l’expert Wang Lixiong appelle la « palestinisation » du Xinjiang, à savoir une radicalisation du conflit ethnique. Cet été, le Xinjiang a été émaillé d’incidents sanglants. Au Sud, notamment à Kuka (Aksu), des dizaines de milliers de soldats sont dépêchés, qui « bunkerisent » le terrain de miradors, zones sécurisées et contrôles routiers sans ramener la paix sociale.
Cette tentative est basée sur le constat que parmi tous les peuples de Chine, les Ouighours sont ceux qui se marient le moins hors de leur groupe (1,05%). Qiemo, au Sud du Xinjiang, 1er canton à appliquer le plan, ne compte que 54 couples mixtes pour plus de 100.000 habitants (jusqu’à 30.000 couples) – et aucun depuis le 21/08, date d’entrée en vigueur du plan. 

Appliqué aussi au Tibet depuis des années, avec des incitatifs comparables, ce système a permis de passer de 666 couples mixtes en 2008, à 4795 en 2013. Mais le nombre, faible au demeurant face à la population totale, aurait tendance à stagner.
Le dernier mot revient à Woeser, poétesse tibétaine : quoiqu’elle-même mariée à un Han (à Wang Lixiong, cité plus haut), elle se dit hostile aux mariages mixtes, s’ils sont subventionnés ! En effet, surmonter les défauts d’un mariage d’argent en plus de ceux des préjugés ethniques, tient de la mission impossible…


Petit Peuple : De’e – La seconde vie volée de Yang Liujin

Pour ses premiers jours à De’e (Guangxi) en 2000, Yang Liujin pouvait sourire, voyant autour de lui les visages de ses parents et grands-parents. Mais au-dessus du berceau, une sorcière était en train de lui jeter un mauvais sort !

Dès l’âge de 6 ans, le philtre maléfique se mit à agir : son père -rempart du clan, principale source de revenu – décéda. Puis en 2007, sa mère retrouvant un mari, se sauva abandonnant Liujin—telle avait été la condition draconienne de cet homme doté d’une pierre en place de cœur, pour daigner lui passer la bague au doigt.
Dès lors, le foyer commença à dépérir. Incapables de subvenir à leurs propres besoins, les grands-parents, s’éteignirent l’un après l’autre. À 10 ans, Liujin rejoignait les rangs des 712.000 orphelins du pays, sans aide de quiconque.

Seul Yang Qulin, cousin éloigné, lui dispensait une aide avare : 10 yuans par semaine, et c’était tout. Le reste du temps, l’enfant errant se nourrissait de baies cueillies, de fruits chapardés dans les vergers, ou de goujons pris à la nasse –pêche bien aléatoire. Souvent, il s’endormait ventre creux. Quand la faim le tenaillait au point de défaillir, une voisine lui portait –trop rarement- un bol de riz, histoire de se donner bonne conscience.

Quand il était rassasié – donc rarement- il allait à l’école. Comme il n’a-vait jamais d’argent pour payer le maître, ce dernier le laissait croupir au fond de la classe. Oublié, il vivait en pointillé, presque transparent.

Sa chance vint de la TV du Guangxi dont un reporter, ayant eu vent de sa misère, pressentit le scoop national, et la bonne action que ce sujet lui of-frait. Avec son cameraman et son perchiste, il suivit le môme dans ses gamberges nourricières, et lui fit raconter sa vie d’errance et misère. 

 Sur antenne le 23/05, l’émission dépassa les rêves d’audience les plus fous. Dans les heures qui suivirent, les dons affluèrent – 5 millions de ¥ au total. À Shenzhen, Cambridge International Institute, une école privée de haut vol lui offrit même une place gratuite. A 14 ans, c’était pour Liujin la chance d’un nouveau départ ! 

Mais ne s’avouant pas vaincue, la sorcière veillait : le cousin, l’école, les ronds de cuir de la protection de l’enfance du Guangxi, se réveillèrent, avides de palper leur part du magot. 15 jours après l’entrée de l’adolescent au pensionnat, la horde déboulait. 

Avec le principal du Cambridge International Institute et la police, ils discutèrent. Or, il fallut vite constater que ces rapaces avaient indéniablement le droit pour eux. Le cousin Qulin était tuteur légal. Pour « gérer la donation » à sa guise, il exigeait de ramener Liujin au Guangxi. Et ce n’était pas l’ancien maître de De’e qui allait le contredire : « Liujin, ergotaient-ils, n’a pas reçu son exeat de sortie : il nous appartient ! » A tel discours, hélas pour Liujin, le proviseur de Shenzhen n’eut rien à répondre… 

Yang LiujinAussi Liujin en pleurs (cf photo) fut arraché aux bras de ses nouveaux camarades et de la direction du Cambridge Institute, navrée. Une lueur d’espoir revint, quand un avocat du nom de Lu Chenggang s’en vint plaider sur internet, où un vaste débat déferlait sur Liujin : mineur certes, l’enfant, en droit chinois, n’avait pas sa liberté de décision, et en l’absence de parents, le cousin Yang Qulin était bien le mieux placé pour exercer la tutelle. Mais au fait, la mère, où était-elle ? Et si elle se déclarait volontaire pour reprendre son fils avec sa fortune, alors toute l’arnaque tombait à l’eau ! Cousin, directeur d’école et apparatchiks pouvaient dire au revoir au magot du môme… 

Hélas, l’histoire s’arrête là… Qulin ramena le petit à De’e, pour profiter de ce bien mal acquis. 

Reste en contrepoint, un long filandreux débat sur le rôle de la pres-se : pouvait-il dépasser celui d’information pour entrer dans un rôle charitable ? Au moins doit-on espérer qu’avec tout cet argent, la destinée de Yang Liujin soit à présent assurée.

Pour positiver, le jeune Liujin pourrait bien avoir besoin du proverbe : 塞翁失马 (sàiwēngshīmǎ « le vieux de la montagne a perdu son cheval ») – « dans tout malheur, il y a du bon » ! Tout comme les milliers de donateurs, furieux de voir leur obole tomber dans la poche du cadre véreux, du cousin égoïste. Une fin bien peu morale, à un conte qui avait si bien commencé !


Chiffres de la semaine : 429,969 en libre-service, 1 naissance sur 2…

Maillot jaune pour le « vélib » en Chine

Hangzhou VelosLe classement des villes en fonction du nombre de vélos en libre service est largement squatté par la Chine : dans le top 10,  9 sont chinoises, la première étant Wuhan avec 90,000 vélos-partage, n°2 Hangzhou avec 78,000 vélos (175,000 de prévus d’ici 2020 – cf photo), Taiyuan n°3 avec 35,000 « vélibs » à disposition. Paris se classe 5ème avec 23,900 « vélibs ».  Pékin est 7ème, avec 22 000 et Shanghai 9ème, avec 19,910.

A l’échelle du pays, 429,969 vélos sont en libre-service en Chine, contre 45,570 en France. Si l’on rapporte le nombre de vélos à la population, la densité de vélos par habitant est plus grande en France, avec un « vélib » pour 1,450 Français, contre 1 pour 3,000 Chinois. 

Allez, encore un petit effort, car malgré la quantité, ces programmes sont encore peu populaires dans les villes chinoises : parfois plus cher que le bus ou le métro, avec peu de stations ou mal placées, et des vélos mal entretenus…

Boom dans les maternités

Comme chaque année, à l’approche du 1er septembre (et du Nouvel An Chinois), le nombre de naissances par césarienne explose dans les hôpitaux chinois.
Certaines maternités de Shenzhen reportaient, le 30 et 31 août, des taux d’accouchement sous césarienne, allant de 60% à 90% ! Car la règle stipule qu’au 1er septembre, un enfant n’ayant pas encore fêté ses 6 ans, devra attendre la rentrée suivante pour être admis à l’école primaire.

D’ordinaire, la Chine connaît déjà un des taux de césariennes les plus élevés du monde avec environ 1 naissance sur 2. Une intervention considérée par les futures mamans comme rapide, « moderne », plus sûre, moins violente pour la nature féminine et qui est largement promue par les médecins (qui reçoivent des bonus) et par les assurances, car plus coûteuse.


Rendez-vous : Les Rendez-vous du 8 au 14 septembre 2014
Les Rendez-vous du 8 au 14 septembre 2014

10-12 septembre, Tianjin : Summer Davos

10-11 septembre, Shanghai : Conférence et Salon du train à grande vitesse

10-12 septembre, Shanghai : FIBO, Salon des loisirs et du sport

10-14 septembre, Shanghai : FMC, Furniture China, Salon des industries du meuble

11-13 septembre, Tianjin : ICIF, Salon de l’industrie chimique

15-17 septembre, Shanghai : China Paper, China Forest, Salon des équipements pour les industries papetières et forestières

15-17 septembre, Pékin : Automotive Testing Expo, Salon du test et de la qualité dans les composants automobiles

16-18 septembre, Pékin : CIGE, Salon international de l’industrie du verre