Le Vent de la Chine Numéro 20

du 8 au 14 juin 2013

Editorial : Xi Jinping-Obama, la retraite au désert

La semaine de Xi Jinping en Amérique centrale et aux Etats-Unis (01-08/06) avait quelque chose d’une gageure. 

[1] Catholique, l’Amérique centrale est jusqu’à 5 ans en arrière anticommuniste et pro-Taiwan. C’est aussi un fief des USA : 8 jours avant, Obama et son N°2 J. Biden précédaient Xi sur place, histoire de resserrer les boulons. 

Autant de raisons pour Xi d’avancer prudemment et d’« éviter les erreurs faites en Afrique ». Au contraire, Xi joua du charme débonnaire, «oncle d’Amérique» distribuant les cadeaux et re-portant le « business » à plus tard. 

Au Costa Rica, seul pays caraïbe ayant une ambassade à Pékin (depuis 2007), Xi offrit quasi 2milliards de $ pour réhabiliter la raffinerie d’El Limon et une route. A Trinidad & Tobago, il promit un hôpital à 250 millions de $, l’envoi de 100 médecins, et offrit à six pays voisins 1milliard de $ pour divers projets de développement. En échange, A. Carmona, le Président de Trinidad & Tobago, promit d’ouvrir une ambassade dans l’année. 

A Mexico, la partie était encore moins gagnée, suite à la disparition de millions d’emplois de «maquilladoras», usines low cost pour les USA, tuées par les produits chinois à prix imbattables. De plus, les échanges sont déséquilibrés en faveur de la Chine, 36 milliards de$ en 2012 dont 5,7milliards de$ d’export mexicain… 
Xi Jinping offrit à Pemex, le monopole d’Etat, 1 milliard de $ en prêts pour l’achat de navires et d’équipements, pour l’exploration des réserves d’or noir du Golfe du Mexique. Il signa avec le Président Nieto un « partenariat stratégique intégral », pour aider le pays à décoller. L’« âge d’or, dit-il, se levait pour l’Amérique Latine ».
D’ici 2017, Pékin investirait 500milliards de $ hors frontières, et y lancerait 400 millions de touristes, y compris vers « les temples Maya, les plages d’Acapulco». Mais après tant de belles paroles, quand il proposa un accord de libre échange, la réponse fut courtoise, mais sans équivoque : « nous ne sommes pas prêts » !

[2] La seconde forte étape, aux USA, se tint dans un ranch californien sans veston ni cravate, ni même (pour Obama), de 1ère dame : du jamais vu.
Préparée depuis des mois (par les visites pékinoises de J. Kerry le 13/04 et T. Donilon le 28/05), cette étape était la pièce de résistance : ni Mao, ni Deng n’avaient été si loin dans la détente. Le seul précédent étant l’amitié entre Jiang Zemin et Jacques Chirac, qui a pu d’ailleurs servir de modèle : elle fut précieuse, mais moins décisive que celle visée ici, vu la puissance des pays respectifs.
Il s’agissait donc moins à Rancho mirage de produire des accords formidables, que de créer un « nouveau modèle de relation », pour régler des différends lourds et croissants entre Chine et USA, voire le monde. 

Ce cahier de charges explique la discrétion des deux Présidents, à l’issue de leurs huit heures d’entretiens. Très à l’aise, parfois en tête à tête sans interprètes, les 2 hommes ont tout mis sur la table.
Ils ont trouvé des accords sur la Corée du Nord (pour Pékin, faire passer la dénucléarisation de la péninsule avant les nostalgies socialistes), et sur le réchauffement global. Ils vont ouvrir des négociations sur l’éradication globale d’ici 2050, des réfrigérants et isolants thermiques HFC qui pèsent, en gaz à effet de serre, autant que 10 ans des émissions des USA. 

Sur les cyber-attaques chinoises contre l’internet américain, Xi fut moins flexible car c’est l’APL qui est désignée coupable, ce qui pour la Chine, est inacceptable. Xi aura besoin des voix de la caste militaire pour faire passer de lourdes réformes du régime, lors du 3ème plénum d’octobre. Mais même ici, le blocage est plus matière de forme : les deux hommes restent d’accord pour, selon Obama, «doter leurs espaces virtuels de protections et de règles, et de le faire ensemble et non l’un contre l’autre ».
Enfin bien sûr, on n’en est qu’au début : ce sommet, véritable percée, sera suivi de « communications étroites » à l’avenir, et d’une prochaine rencontre en bras de chemise—cette fois en Chine !


Temps fort : Qualité du riz : la Chine dans l’oeil du typhon

À l’approche de la récolte, le marché chinois du riz offre une curieuse contradiction, avec à la fois des signes de pénurie et de surproduction. Depuis 2012, la récolte ne suffit plus : selon des données américaines, l’importation s’est élevée à 2,34 millions de tonnes et dépassera 3 millions de tonnes en 2013 (690.000 tonnes sont rentrées au 1er trimestre, + 190%). Par contre, regardant les épis qui jaunissent sur sa rizière, Fu Huoshan, paysan du Hubei s’inquiète : les ventes ne suivent pas, « la concurrence vietnamienne, pakistanaise et thaïe est trop bon marché face au riz local à 4¥ par kg ». 

Mais l’explication occulte une autre raison : avec l’ouverture au monde, la ménagère chinoise découvre le riz importé et le trouve plus à son goût. Poussée depuis 20 ans par un régime pour qui l’autosuffisance alimentaire est un dogme, la recherche céréalière chinoise a mis toute priorité sur la quantité au détriment de la qualité. Et puis l’environnement aussi se rappelle au bon souvenir du pays. 70% des terres agricoles de Chine seraient polluées et 60% des pesticides (de types souvent interdits en Europe) sont mal employés. 

Le paysan chinois déploie aussi en moyenne le quadruple d’engrais de son homologue européen. Et très souvent, l’irrigation vient de cours d’eau déjà impropres à cet usage. 

Tout ceci explique le dernier cas d’angoisse alimentaire. Dans le Hunan, premier grenier à riz assurant 30 millions de tonnes par an (15% de la récolte), des traces de cadmium à 0,4µgm par kg, le double du plafond autorisé, ont été détectées. Huit exploitations ont échoué au test sur 18 contrôlées et trois minoteries ont été fermées. 

Les experts imputent à trois sources cette présence de métal lourd dans le grain : l’irrigation à l’eau des fonderies à zinc, la proximité des usines de batteries (utilisant le cadmium), et des traces de ce métal dans les engrais phosphatés. Quoiqu’il en soit, le résultat a été catastrophique : les ventes du riz de la province ont chuté de moitié, les détaillants n’osent plus même le commander, et les experts ne savent plus quoi conseiller. Leur recommandation de varier les marques de riz pour répartir les risques, en disent long sur leur désarroi. Clairement, si la récolte imminente retrouve les mêmes concentrations, les importations vont se raffermir. 

L’Etat, en tout cas, vient de prendre de nouvelles mesures pour rétablir la confiance… dans le lait et la viande chinoise, récemment affectés par d’autres scandales. En mai, 900 trafiquants de fausse viande ont été arrêtés, et Li Keqiang émettait début juin de nouvelles mesures pour accélérer la traçabilité du lait, comme l’obligation du code-barres. 

L’OCDE pour sa part prévoit (05/06) qu’en 2022, les importations de soja et d’aliment fourrager augmenteront de 40% (ces derniers, à 13,2 millions de tonnes) tandis que celles de bœuf doubleront – son élevage en Chine s’est réduit depuis 2008, alors que la demande explose. A cette échéance, la Chine importera 2,8 millions de tonnes de blé et 1,5 millions de tonnes de riz. Mais la nouvelle est en fait moins inquiétante qu’elle n’y parait, car ces chiffres sont bien moindres qu’en 2012-2013, où un pic a été franchi. 

Discrètement, la Chine investit lourdement dans sa filière semences et dans son irrigation. En 2012, pour la 9ème année consécutive, sa récolte augmentait, à 589,6 millions de tonnes. Ce qui lui permet, conclut l’OCDE, de maintenir pour 10 ans son taux d’autonomie alimentaire à 98% : la Chine semble gagner son pari.


Hong Kong : Hong Kong – un fantôme peut en cacher un autre !

Mardi 4 juin 2013, 24ème anniversaire du printemps de Pékin, la Chine était sous censure, le régime s’efforçant d’effacer tout indice de la répression de ce qu’il nomme un soulèvement contre-révolutionnaire. Xi Jinping, le nouveau n°1 ne donne nul signe de vouloir revenir sur ce verdict. Mais le régime y pense : parmi les 25 membres du Politburo, six participaient à l’époque aux débats idéalistes de l’hôtel Pékin (avril 1989), dont trois membres de l’organe suprême du Comité permanent (Li Keqiang, Yu Zhengsheng et Wang Qishan) ainsi que Li Yuanchao, le vice-Président. Discipline de Parti oblige, ils pensent à la révision de Tiananmen, mais n’en parlent pas. Il faudra attendre le décès des acteurs conservateurs de l’époque comme Li Peng. Mais celui de Chen Xitong, l’ex-maire de Pékin, impliqué dans la reprise en main, décédé à 84 ans (des suites d’un cancer), intervenait fort symboliquement ce jour anniversaire.

Un seul lieu de Chine échappe à cette fausse amnésie : Hong Kong, protégé pour encore 33 ans par le Traité de rétrocession, sous le slogan « un pays, deux systèmes ». La nuit du 04/06, 150.000 personnes veillaient au Parc Victoria, munis de chandelles, non découragés par une averse drue. 
Cette année, un curieux incident vint émailler la tradition. Les organisateurs de l’événement, plateforme de divers groupuscules, avaient placé la veillée sous le mot d’ordre de « aimer le pays, aimer le peuple ». Ce choix fut fustigé par Ding Zilin (une des dissidentes pékinoises historiques) comme « stupide et à contre-sens de l’opinion ». De fait, selon un sondage de la HK University (04/06), 62,8% des insulaires souhaitent une révision du verdict de Tiananmen. C’est le taux le plus élevé depuis 1997, année du retour de HK à la Chine. 

Les organisateurs semblent donc avoir été manipulés, tandis qu’au même instant, la rue hongkongaise se radicalise. Pas une semaine ne se passe sans une manifestation, qui, ignorant le siège du pouvoir local, se rend directement à celui du représentant de la RPC, ressenti comme le maître.
Sans gratitude envers les 27 millions de touristes chinois pour leurs dépenses, les Hongkongais vivent mal leur manque de discrétion, leurs razzia dans leurs supermarchés et sur leurs logements (30% des ventes en neuf). 

Le contentieux n°1 tient au non-respect de la promesse de suffrage universel : au plus tard pour 2017 selon les accords, mais désormais reportée à 2022, « sous réserve du patriotisme » des candidats, dont le brevet serait décerné par Pékin. « Dès lors, dit cet observateur local, aucun des deux bords ne peut transiger : on va droit au mur ». 

NB : La Chine fait un lourd effort pour assurer la prospérité des Hongkongais, malgré la récession. Mais il y a malentendu : Hong Kong ne réclame pas tant des chèques mais l’autodétermination. En 1984, avec M. Thatcher, Deng Xiaoping avait opté pour laisser la solution définitive de Hong Kong « aux générations futures ». Mais le « Chief Executive », sans pouvoirs et déconsidéré, n’arrive plus à se faire entendre. 
Pour assurer son avenir, cette société éduquée et sophistiquée, a besoin de tenir ses leviers en main. C’est ce que Pékin a ignoré, dans la sauvegarde inquiète de son monopole du pouvoir…Et c’est à présent ce qu’elle va falloir gérer.


Temps fort : La ruée chinoise vers l’or du Ghana

En 2005, commença la ruée vers l’ or au Ghana, aujourd’hui 2ème producteur d’Afrique (derrière l’Afrique du Sud). L’or vient de la région d’Ashanti et les 12.000 mineurs, de Shanglin (Guangxi). En 2010 ces aventuriers exploitaient 10 mines, puis 2000 en 2013, extrayant 24 tonnes par an, selon Su Zhenyu, Secrétaire général de leur association locale. Les jeunes Chinois apportaient du matériel, un peu d’argent, des techniques et s’associaient en JV avec les locaux – ou pour la plupart, travaillaient sans licence. Un travail très dur mais très lucratif, à plus de 10.000¥ par mois et par mineur (10 fois le revenu moyen à Shanglin). En juin 2011, le 21st Century Business Herald révélait que sur deux semaines, 1 milliard de ¥ avait été envoyé à Shanglin par les mineurs.

Mais arriva ce qui arrive à chaque activité non régulée. Des galeries s’effondrèrent—des centaines furent ensevelis. Le raffinage du minerai pollua gravement les cours d’eau. Surtout, ces fortunes gagnées par les étrangers excitèrent la jalousie des Ghanéens : les Chinois furent braqués, tentèrent de résister en recrutant des milices et en s’armant. Dernièrement, la situation dégénéra en émeutes meurtrières…

A Accra, tardivement, les autorités ghanéennes réagirent en faisant arrêter 169 illégaux, pour calmer les esprits. Avec 10 diplomates sur place, l’ambassade chinoise ravitaille les prisonniers en vivres et remèdes tout en préparant leur rapatriement (à frais de l’Etat) pour cette semaine…Ils auraient d’ailleurs été relachés le 10/06. Mis à part les expulsés qui perdent tout, une victime est l’image de la Chine en Afrique, qui n’en avait nul besoin.


Agroalimentaire : Porc : le n°1 chinois avale le n°1 mondial

Un groupe chinois vient de réaliser la plus importante reprise d’un intérêt américain. Shuanghui, n°1 national du porc, passe un accord avec les actionnaires de Smithfield (Goldman Sachs, Kerry, Temasek) pour son rachat : 4,7 milliards de $. Shuanghui, c’est 460 fermes en 13 provinces, 16 millions de porcs par an, 2,7 millions de tonnes de viande, 100 millions de saucisses par jour. Smithfields, c’est le n°1 mondial en élevage et abattage, capable d’équarrir 110.000 bêtes par jour (28 millions en 2012), dont la charcuterie est présente dans 12 pays. 

L’intérêt, pour Shuanghui, soutenu par le Conseil d’Etat, est surtout le savoir-faire sécuritaire du groupe, tel ce programme « Pork quality assurance + » de l’interprofession, sur l’alimentation et les soins. La Chine va devoir piloter la concentration d’un élevage de 696 millions de têtes, atomisé entre des millions de micro-élevages et 14.720 abattoirs – structure ne permettant ni la recherche ni l’investissement sanitaire. Les 30 millions de départs de l’exode rural attendus d’ici 20 ans permettent de prévoir des remembrements agricoles. 

Pour Smithfields, c’est plutôt une aubaine. Le groupe perdait de l’argent depuis des années, et Shuanghui (son PDG, Wan Long) paie cher pour s’assurer cette perle. La tutelle américaine pourrait dire « oui » sous six semaines. 

Il y a quelques années, Smithfield avait acquis Aoste, firme espagnole de cochonnaille qui, plus tôt, avait repris Bridoux/Cochonou, groupe français de saucisson. C’est ainsi que par la bande, un des orgueils de la salaison hexagonale passe sous la bannière écarlate de la RPC !


Diplomatie : L’Union Européenne dégaine sur le solaire, la Chine sur le vin !

Guerre du panneau solaire contre guerre du vin : entre Europe et Chine, les gestes agressifs s’accumulent ces temps derniers. En réalité, ce qui se passe résulte de décisions vieilles de 10 ans. 

Constatant son incapacité à battre les puissances de l’Ouest sur le terrain des industries matures, Pékin avait décidé d’investir dans celles de demain, à bas carbone – à très grande échelle pour le marché intérieur puis les marchés traditionnels des pays occidentaux. Avec ses bas salaires, l’absence de R&D, l’économie d’échelle et des subventions illimitées, la Chine allait conquérir tous les marchés. Rien que dans le solaire, Pékin aurait distribué 18 milliards de $ à une centaine de groupes tels Suntech ou Yingli. A 50% moins cher que toute concurrence, elle a conquis 80% du marché européen. 

Réaction : dès 2012, les USA ferment leur marché solaire, par une taxe de 250%.
De son côté, Bruxelles (04/06) frappe la Chine de 11,8%

Un appel de Li Keqiang à JM. Barroso, Président de la Commission, a permis in extremis de réduire la taxe des trois-quart, sous réserve d’accord d’ici août 2013. Bruxelles veut obtenir une autodiscipline, prix minima et contingents permettant coopération industrielle et partage du marché. Mais sa contre-attaque ne fait pas l’unanimité, tant en Union Européenne qu’aux USA – l’Allemagne y voit une « lourde erreur », choquant sa philosophie libérale.

La Chine, qui crie au protectionnisme, était prête : sous 24h, elle ouvre sa propre enquête anti-dumping… contre le vin européen, menaçant surtout les producteurs français (71%, 140 millions litres, 788 millions de $ en 2012). 

C’est un message : Pékin veut forcer l’Europe à garder ses portes ouvertes, pour sauver son secteur solaire aux millions d’emplois et dizaines de milliards de $ d’investissements non amortis. Car derrière le solaire tremblent d’autres colosses aux pieds d’argile : les éoliennes, les télécom
Aussi, les deux bords le savent, dans la défense de l’Ouest contre l’entrée en force chinoise, le solaire n’est qu’une étape, un moment-clé des échanges entre Chine et Occident. Jusqu’à présent, on a échangé suivant le jeu de l’offre et de la demande. Mais quand le sort industriel des nations est en jeu, il faut passer à autre chose, et oublier la logique prédatrice. 

Tel est le véritable enjeu du bras de fer qui débute, suivi de près par Obama (sujet central dans sa rencontre avec Xi Jinping à l’Annenberg Estate, 08/06).
Côté chinois aussi, bon nombre souhaitent un nouveau code de tous les échanges. 
Mais ces libéraux ne sont pas majoritaires. Face aux rétorsions américaines, Pékin n’a rien fait, mais face à l’Union Européenne, elle frappe – sachant que l’Europe peut moins se défendre. 

Elle concentre d’abord sa frappe sur la France, peu impliquée sur ce marché (donc, pas responsable) mais qui peut apparaître aujourd’hui plus vulnérable. Avant de menacer à son tour l’Allemagne sur ses exportations vers la Chine de voitures de luxe : aucun doute, l’aile dure du socialisme chinois voit en Europe le maillon faible, et espère briser en divisant : aux Européens à présent, s’ils veulent se défendre, de faire front uni pour éviter le piège.


Temps fort : Série d’accidents mortels : Xiamen, Dehui

Catastrophe Dehui 119 MortsIncendie à Xiamen – criminel ?

Le 07/06 à Xiamen, sur un viaduc, un bus express climatisé est secoué par plusieurs explosions criminelles : 47 morts, 37 blessés. 

À l’origine du drame, Chen Shuizong, camelot de rue, réclamait depuis de nombreuses années le bénéfice d’une pension. Vu le refus de la mairie, il s‘est vengé en s’auto-immolant, en même temps que toutes ces autres victimes.

Le 04/06, à Dehui (Jilin), un abattoir de volailles prit feu à l’aube, avec 300 ouvriers à l’intérieur.
Bilan : 120 morts. Des responsables ont été arrêtés. 

Cet incendie en rappelle d’autres à Qingdao (Shandong) en 2003, et à Karamay (Xinjiang) en 1994, où des centaines mouraient pour la même raison : des issues partout bloquées


Petit Peuple : Wuhan – Luo Jingyu,  le collégien aux mains d’or

A Shiyuan (Hubei), rien ne prédisposait Luo Jingyu à la fulgurante destinée qu’il connaît à 19 ans – sinon le business dans le sang !

Dès les tendres années, sa mère maîtresse, son père boutiquier, lui rabâchaient leur petit rêve : pour réussir, il fallait bosser et ne pas faire de dettes ! En guise d’argent de poche, ils lui trouvaient des petits jobs, une voiture à laver, des ménages à faire. 
De la sorte, à l’âge où les copains scotchaient au mur la photo de Gong Li, Luo affichait celles de Jack Ma (créateur d’Alibaba, la 1ère galerie virtuelle du pays) ou de Yu Minhong (le créateur des cours privés New Oriental). Sur les traces de ses héros, c’est milliardaire qu’il voulait devenir et rien d’autre. C’était son but, et il savait qu’il y arriverait.

A 14 ans, il fut inspiré par la lanterne Kongming , l’invention du célèbre stratège Zhuge Liang de l’époque Han (206-219). Le tacticien avait gagné une bataille nocturne, ayant affolé l’adversaire en lançant en masse ces lanternes volantes.
Au marché de gros à Wuhan, Luo acheta à 2¥ ces lampions, qu’il revendit 8¥ le soir aux badauds. Mais huit jours après, faisant ses comptes, il devait bien admettre qu’il s’épuisait pour rien : au mieux, il écoulait 10 lanternes par soir…Ce n’était pas comme cela qu’il ferait fortune ! Après quelques semaines, il trouva sur internet un fournisseur à 0,5¥. Puis il mobilisa sa classe, 40 vendeurs à la sauvette, leur assurant 2¥ par vente. Et là le tableau se métamorphosa : en 48h, il avait 5000¥, plus que ne gagnait son père ou sa mère par mois. Il venait d’inventer un modèle commercial, fort rémunérateur !

Enhardi, à 16 ans (en classe de seconde) il passa à la deuxième étape. Faisant miroiter de gras profits, avec une aisance qui l’étonna lui-même, il emprunta aux camarades 120.000¥ pour lancer sa boutique de mode, payer le pas de porte dans la bonne rue piétonnière, constituer son stock de fringues. 
Chaque week-end après les cours, il prit le bus pour Canton, Yiwu ou Hanzhengjie, les Mecque chinoises de la fripe. De chaque virée il rapportait un ballot haut d’1 mètre, qu’il suait à traîner sur les quais, pour s’éviter le prix du porteur. Hélas pour lui, Luo cette fois avait présumé de son talent : ses goûts immatures lui avaient fait réunir une collection invendable : c’était la faillite !

Faute d’oser tout dire à ses parents, le désastre le força à la fugue. Depuis des lunes, Luo ne discutait plus avec ces vieux qui ne comprenaient rien à sa vie et qui l’agaçaient, l’adjurant bêtement de se concentrer sur ses études – comme si elles pouvaient lui offrir la brillante carrière qu’il avait déjà à portée de main. 
Cette nuit de naufrage, c’est sous un pont que Luo considéra l’avenir. Il voyait l’erreur à éviter, mais aussi le prochain pas qu’il allait tenter. Il avait perdu une bataille mais pas la guerre. La seule faute impardonnable serait d’abandonner. A l’aube, après cette nuit d’examen de conscience, il s’était reconstruit, prêt à repartir !

En 2011, espérant lui faire oublier sa maudite lubie des affaires, ses parents l’inscrivirent au bac, section « beaux-arts ». Mais à peine découvrit-il l’attirail de toiles, fusains, gouaches, pinceaux qu’une nouvelle idée germa dans ce cerveau fertile. Illico, entre deux cours, il créa sa boutique de fournitures (cf photo). Il trouva un partenaire pour y mettre 10 millions de ¥, un réseau de vendeurs qu’il lança à travers les galeries et écoles, pour démarcher artistes et potaches. Ils essuyèrent d’abord des milliers de refus mais insistèrent. Au 4ème passage, les achats se mirent à pleuvoir : à la fin de l’année, il encaissait 6 millions ¥ de ventes.

Dès lors, tout en poursuivant ses études, il n’arrêta plus de commercer. En mai, il présenta son bilan 2012 : il avait monté un catalogue de 1600 produits d’art et de musique, réalisant des millions de ¥ de profit. Il possédait 4 entreprises, 8 magasins, 3 galeries virtuelles, sans compter l’académie privée des beaux-arts « Rongyi 100 », dont il était vice-président.

Ses amis lui voient un seul défaut : l’avarice, qui lui fait porter des vêtements tout simples, de ses propres boutiques, tout en maniant un téléphone portable bas de gamme. Mais, se justifie-t-il, c’est pour arriver plus vite à son rêve : créer une fondation, aider d’autres jeunes à se construire comme lui l’a fait, à « quitter le foyer natal, les mains vides » (bái shǒu qǐ jiā, 白手起家) : suivre sa voie, partager sa passion, laisser sa trace !


Rendez-vous : Rendez-vous de la semaine du 10 au 16 juin 2013
Rendez-vous de la semaine du 10 au 16 juin 2013

9-12 juin, Canton : BCS, Building Solar China

<p>9-12 juin, Canton : Salon de l’éclairage

10-13 juin, Shanghai : Shanghaitex, Salon du textile

11-14 juin, Shanghai : CIEPEC, Salon et conférence sur l’environnement

13-15 juin, Chongqing : SUBCON China, sous-traitance industrielle & approvisionnement

13-15 juin, Chongqing : CIF, Salon de l’équipement industriel

17-19 juin, Shanghai : Conférence Asian Pulp & Paper