Le Vent de la Chine Numéro 6

du 18 au 24 février 2008

Editorial : 2008: l’année des destins croisés…

Pour ce Nouvel an chinois puni par un froid séculaire, le bilan émerge:100M de gens ont été privés d’électricité, 107 sont morts -sans compter les 59 décès sous les pétards du réveillon. 10% des forêts sont détruits (17M d’ha), 10% de l’agriculture (24 Mha) sont touchés, qui causeront dès février une inflation de 7%. Les dégâts font 11MM², dont 8% couverts par l’Etat en primes de reconstruction (nationales et locales), autant par les assurances. Ce qui n’empêche l’agence Xinhua d’aligner un bilan triomphant, +35% de ventes à Chongqing et Canton, +24% dans l’Anhui,+16% dans le pays (255MM², dont 2,9MM² dépensés par carte de crédit, +60%… Comme pour conjurer le destin, les citadins viennent de griller d’un coup leurs profits des 11,5% de croissance de 2007 !

Pour endiguer l’inflation, l’Etat vient de réimposer le vieux contrôle des prix: réflexe intenable, car bloquer la hausse des prix agricoles, revient à décourager le paysan de produire. Pékin ne s’y trompe pas, et revalorise discrètement (8/02) le riz de 80¥/t, (à1580¥/t), et le blé de 100¥ /t le blé, tout en prédisant, pour peu que nulle autre catastrophe climatique n’intervienne, une récolte stable de 500Mt…

Nos confrères du Financial Times (4/02) sont moins optimistes. L’inflation ne vient pas de la pénurie de porc mais de l’excès de devises (1,4MM $), causé par un Yuan trop bas, fruit d’une intervention permanente de l’Etat. Or, à mesure que se tarit l’exode rural, et la main d’oeuvre à bas prix, les instruments de contrôle macro-économique commencent à se bloquer. Le 3ème trimestre a vu les 5 grandes banques (ICBC – Banque de l’industrie et du commerce, BdC – Banque de Chine, CCB – Banque de la construction, BdA – Banque de l’agriculture, BoComm – Banque de la communication) repasser la barre des 8% de mauvaises dettes, même tendance au 4ème trimestre. En janvier 2008, la masse monétaire M2 a progressé de 19%, et les prêts, de 17,5%. Avec 803MM¥ prêtés, 22% du quota annuel a été utilisé, donnant dès le 1er mois la certitude qu’il sera dépassé. L’austérité décrétée en haut, n’est pas respectée! 

Outre l’arrêt brutal de la réforme économique déjà évoqué (gel des prix, nouvelle loi du travail, généreuse mais qui fait obstacle à l’embauche), deux autres dangers pointent :

– la crise des subprimes et la conjoncture mondiale défavorable vont exacerber les réflexes protectionnistes (cf p2), tout en réduisant les commandes en Chine et ses possibilités d’import alimentaire (les réserves mondiales en grain sont au plus bas niveau depuis 25 ans).

l’explosion de l’inégalité des fortunes, la Banque Mondiale annonce qu’en la matière, Pékin vient de dépasser la Russie et les USA.

Bilan selon le Financial Times: pour les années à venir, les chances d’une récession chinoise avec croissance à moins de 6%, sont à «50/50%»!

 

 

 

 


Temps fort : Crise de qualité alimentaire—la rechute

Le 10/02 à Tokyo, ce n’est pas de la santé de leurs monnaies que débattirent les ministres des finances chinois (Xie Xuren) et nippon (Fukushiro Nugaka), mais de celle du consommateur nippon.

Un arrivage massif de raviolis au metha-midophos (pesticide interdit en Chine depuis janvier), venait de ranimer la méfiance envers la qualité des aliments exportés de Chine… 15 jours d’enquête n’ont rien donné : ni chez l’importateur JT Foods, ni chez Tianyang, de Pékin. La faille pourrait provenir, croit Tokyo, d’un sabotage. Ce dont la Chine, sans l’exclure entièrement, doute ouvertement. Au moins, on constate des 2 bords, une volonté sans ambiguïté de coopérer en profondeur pour éviter ce dérapage. Pour donner une idée de l’ampleur du scandale, 606 lycées japonais ont cessé de servir au réfectoire les jiaozi Tianyang, et les chaînes Bamyian et Gusto ont rayé des menus de leurs 4145 restaurants tous les plats « made in China »…

Un malheur ne vient jamais seul: le 11/02, aux Etats-Unis, la chaîne d’aliments biologiques Trader Joe annonce qu’au 01/04, tout produit de Chine aura quitté ses 285 succursales, « jusqu’à ce que les clients aient repris confiance ». C’est aussi le moment choisi par le Comité olympique américain pour révéler qu’il a confié à Kellogg’s et Tyson la tâche d’exporter vers Pékin 25.000 livres de protéines maigres (boeuf, poulet, porc, fruits de mer, céréales, fruits) pour nourrir ses 600 athlètes, sans encourir le risque de contrôle positif aux stéroïdes. Loin du green olympique, sur leur propre campus de l’Université Normale (Shifan daxue), les équipiers de la bannière étoilée se sustenteront à partir de 1500 recettes olympiques, spécialement reformulées depuis 18 mois. Et  ne pourront tâter de la cuisine locale qu’après la fin de leurs épreuves. Pour le Bocog, le Comité olympique chinois, qui prépare depuis des ans ses maîtres-queues à ravir les palais de 10aines de milliers d’athlètes de tous les coins de l’univers, c’est un revers…

Enfin, Interpol, OMS (l’organisation mondiale de la santé), police chinoise et fondation Wellcome (université d’Oxford) viennent de briser au Yunnan une filière de faux cachets d’artesunate, le meilleur anti-malarien (d’origine chinoise). Le dealer avait eu le temps de vendre 240.000 boites, traitement (bidon) pour autant de malades. Or, seules 10% ont été saisies, le reste a été écoulé entre Chine et Birmanie, auprès des populations les plus pauvres. La méthode d’enquête est remarquable, ayant permis d’identifier la source, uniquement par procédé pharmacologique, en analysant le pollen décelé dans ces faux remèdes, pollen spécifique au Yunnan. Ceci donne espoir de traquer toujours plus, à l’avenir, les mafias de la santé, en Chine et ailleurs…

 

 

 

 

 


Pol : Nouvel anneau d’améthyste de Rome pour la Chine

Hohhot —solde de comptes

Le 5/02, Guan Liuru, ex-chef de la police de la zone économique de Hohhot (Mongolie Intérieure) entre dans bureau de Wang Zhiping, 54 ans, n°2 de la ville, et l’abat d’un coup de revolver ainsi que Wang Ying, contrôleuse des impôts qui s’y trouvait présente – sans doute pas par hasard. L’assassinat met un terme à quatre tumultueuses années de rancoeur et d’intrigues.

En 2004, suite à une affaire louche dans la police, le vice -secrétaire avait approuvé un «blâme sérieux» au commissaire, entravant sa carrière. Guan avait tenté d’enterrer l’histoire en faisant pleuvoir sur la ville, la province et Pékin des «enveloppes rouges» de bakchichs. Il avait obtenu en septembre un « 2d prix » pour sa contribution à la sécurité de la ville, mais avait été limogé un mois plus tard. De notoriété publique, Guan voulait être réintégré, ou se venger… Ancien soldat, Wang n’a pas cédé au chantage -il passait pour incorruptible, ex-procureur général, ex-boss de la CCID (Commission centrale d’inspection de la discipline) à Hohhot.                                        

NB : A 6 mois des JO, l’affaire embarrasse Pékin, renforçant l’ambiance d’indiscipline au Parti. Le ministère de la sécurité publique a détaché des limiers  pour élucider l’affaire. Voire, pour neutraliser la liste laissée par Guan, des cadres (dont certains nationaux) qu’il aurait arrosés.

Nouvel anneau d’améthyste romain pour la Chine

Depuis fin janvier, Hong Kong a un nouveau coadjuteur, bras droit du cardinal Joseph Zen, Jean Tong Hon, qui est donc son successeur désigné, l’homme du Vatican en Chine.

« Au mégaphone », vers Pékin, Tong annonce la couleur : plutôt que jouer l’intransigeant héraut de la liberté de conscience, comme le faisait Zen, il veut servir de « pont », pour arriver à une normalisation et réunifier les branches rivales du catholicisme chinois -la rouge et la clandestine. Le fait est que la Commission spéciale Chine fonctionnant dan la Curie depuis 2006, et la lettre pastorale émise en 2007 par Benoît XVI aux fidèles du pays, ne semblent pas avoir été à la hauteur des espoirs : le concordat reste fuyant, faute de besoin côté Pékin, et faute d’avoir trouvé une solution à la question de l’avenir de l’administration catholique officielle, rivale de celle du Pape. Rien ne prouve que le rameau d’olivier tendu, soit suffisant à résoudre ces deux obstacles…

Défense—le Quad devient tricycle?

En mai 2007, en marge d’un sommet de l’ASEAN (Association des Nations d’Asie du Sud-Est), Tokyo, Canberra, Delhi et Washington jetaient les bases du « Quad », une possible future alliance militaire, ressemblant furieusement, en projet, à celle de la SCO, association de défense entre Russie, Chine et 4 pays d’Asie Centrale.

L’idée rappelait aussi le vieux rêve américain de « contenir » la Chine dans ses frontières, entre les océans Indien et Pacifique. Mais neuf mois plus tard, l’alliance est mort-née. Kevin Ruud, patron du «labour» australien et nouveau 1er ministre lui a porté le coup de grâce, par souci de meilleurs rapports avec la Chine —un de ses meilleurs clients en pétrole, minerai de fer, uranium ou laine. Ruud veut aussi faire reprendre à son pays un rôle d’entremetteur entre Asie et USA, notamment en matière de lutte contre le réchauffement global…

Sa décision était prévisible, après la protestation formelle de Pékin contre une initiative qui ne ferait que « diviser, déstabiliser l’Asie », et la faire « replonger dans la guerre froide ». Aussi son choix a-t-il inspiré à tout le monde un soupir de soulagement. A la Chine, mais aussi aux trois autres acteurs potentiels du quad, dont seul le Japon était ardent défenseur, à l’époque de Koizumi et de Abe. Aujourd’hui, avec Fukuda, les temps belliqueux sont révolus !

 


Argent : Les carbo-cargo de Ningbo

Les carbo-cargos de Ningbo…

Les coupures d’électricité du début du mois n’ont pas été perdues pour tout le monde.

Le grand froid hivernal s’est révélé un risque majeur d’avenir, bloquant en gares jusqu’à 6000 trains de houille. D’où l’urgence d’ouvrir une nouvelle route vers les centrales du sud: celle maritime, de Ningbo vers Guangdong, Jiangsu et Zhejiang.

Aussi Shenhua, premier groupe charbonnier du pays vient d’affréter cinq minéraliers, d’une capacité de 240.000TJB. L’armateur est Ningbo Marine, flotte moyenne, mais en croissance vertigineuse. De janvier à septembre 2007, ses profits avaient doublé à 12M², quoique que son volume d’affaires n’augmente que de 27%, à 80M². Cette année, il devrait tirer de Shenhua pour 50M² de chiffre, soit le double de l’an dernier. Comme pour l’an passé, la source principale de cette prospérité tiendra moins aux volumes, qu’à l’enchérissement du tarif, +62%. Ceci, pour tenir compte des récentes augmentations du prix du gasoil et surtout, de l’engorgement des liaisons ferroviaires et routières : alors que le pays pleure pour plus d’énergie, la voie maritime est la seule alternative – mais la porte est étroite !

Shanghai, aussi, fait peau neuve !

Comme Pékin, Shanghai la tête du Dragon mise lourdement sur son heure de gloire, en 2010. 400M² seront engloutis le long du fleuve Pu, en un projet somptuaire de remodelage du front fluvial du Bund, patrimoine unique de l’ex-concession britannique.

C’est le projet du professeur Alex Krieger (Harvard) qui a été retenu dans l’appel d’offre international. Afin d’alléger la hideuse voie sur berge, Six des dix voies passent en tunnel à deux étages, accompagnées de 6000km de câbles électriques et télécom). Elles laisseront place à un lacis de jardins, ponts, miradors ainsi qu’une barge. L’axe enterré de 3,3km de long (Yan’an lu/Hongkou) est un défi technique, en sous-sol instable (meuble), louvoyant sous les fondations de 30 hôtels de maîtres des années ’20 à ’40, Astor, Peace ou Shanghai Mansions. La lourde rampe-sud sera démantelée. Le pont de fer centenaire de Waibaidu, sur la crique de Suzhou, sera restauré dans un chantier naval, puis remonté. Pour ce plan « trait-d’union entre passé et futur », Krieger affirme s’être inspiré d’un daguerréotype d’époque, montant le front fluvial, dans un écrin de gazon et de pierre parsemé de passerelles transversales. Seul hic, dit le professeur : achever cela d’ici mars 2010, pour l’Expo universelle, est pour le moins « ambitieux »!

 

 

 


A la loupe : OMC—le premier verdict

[1] De toutes les plaintes contre la Chine à l’OMC (l’Organisation mondiale du commerce), le 1er verdict vient de tomber (14/02) : la Chine est condamnée. En 2006, après des années de dialogue stérile sur un litige d’automobile, USA, Union Européenne et Canada avaient attaqué Pékin : la Chine taxait de 25% tout véhicule étranger, même monté sur son sol, si plus de 60% des pièces avaient été importées.

Pour les plaignants, c’était une mesure protectionniste. Pékin se défendait en alléguant le besoin de se protéger d’imports camouflés en production locale. Or, Genève, en un verdict intérimaire, a tranché : « dans tous les aspects majeurs, la Chine a failli à ses obligations »! Pékin fera sans doute appel, gagnant ainsi un ou deux ans -mais de toute manière, disent les professionnels, « le mal est fait »: l’impact du jugement sera quasi-nul. Durant sept ans, les équipementiers mondiaux, pour ne pas perdre leur marché, ont du suivre leurs clients en Chine, où désormais, la qualité locale atteint souvent le niveau international.

NB : mais ce verdict n’est que le 1er d’une longue série : l’impunité pour la Chine, comme membre nouveau et émergent, est révolue !

[2] Contre la Chine, l’Union Européenne multiplie les actions. Le commissaire aux échanges, Peter Mandelson lance un ultimatum pour qu’elle rouvre son marché de l’information financière.

Depuis le 25/01, la procédure de plainte est prête, suite à la Grande muraille érigée depuis septembre 2006 contre les agences étrangères : Xinhua, l’agence locale, a le monopole de leur distribution à travers son réseau. Il s’agit donc d’une plainte pour distorsion de concurrence, car AFP, AP ou Reuters se voient forcées par Xinhua, à la fois leur tutelle et leur rival, de rectifier ou annuler leur papier…  

NB : ainsi, quoique ce sujet relève typiquement de la souveraineté nationale, l’Union Européenne veut enfoncer un coin dans la forteresse de la liberté d’informer en Chine -et n’exclut pas d’agir avec les USA et le Canada. La course en meute semblant leur réussir.

Autre action : Bruxelles exige de tout produit rizicole chinois, la preuve qu’il ne contient pas d’OGM, tel l’élément Bt163, sous peine d’être refoulé aux frontières, au 15/04. L’administration chinoise avait déjà fourni des garanties, mais depuis, des traces d’OGM avaient été décelées dans des lots à travers les 27 pays membres.

NB : côté USA, pas de plaintes nouvelles, mais par contre, le FBI dévoile 2 affaires d’espionnage chinois (11/02).

Gregg Bergersen, fonctionnaire, aurait vendu des documents secrets-défense à Kuo Taishen (Taiwanais) et Kang Yuxin (Chinois).

– Chung Dongfang, ancien de Rockwell puis de Boeing, aurait passé des plans aéronautiques et spatiaux à la Chine… Pékin dément, et prie l’Amérique de cesser ses jeux de « guerre froide ». Affaire en lien avec celle de Chi Mak et de sa famille en 2007, autre réseau de transfert de technologies militaires vers la Chine.

 

 


A la loupe : Le retour du Comité des anciens

Dernière ligne droite vers les JO, Pékin installe un nouveau chef de file olympique: rien moins que Xi Jinping, bientôt n°2 à la CMC, la Commission militaire, donc de l’armée. Ces promotions se lisent sous 2 grilles de lecture.

[1] Par décision du XVII. Congrès, un comité des anciens (dont Jiang Zemin, Li Peng, Zhu Rongji) a obtenu droit de regard sur toute décision capitale. Ranimant ainsi une pratique des années ’80, qui avait pesé lourd sur la destinée du pays en juin ’89. Or, justement, Xi Jinping est leur candidat au poste suprême en 2012, face à Li Keqiang, le poulain du n°1 Hu Jintao.

[2] Mais Xi Jinping a aussi le profil d’un dénoueur de crises. Or, face aux Jeux Olympiques, le régime voit monter les difficultés. Le prince Charles réitère son boycott pour cause de Tibet. Stephan Spielberg, pour cause de Darfour, rend son tablier de co-directeur artistique des Jeux. 80 célébrités, 8 Prix Nobel de la Paix signent sa pétition. Seule la British Olympic Association veut interdire aux athlètes britanniques de critiquer la Chine, mais c’est pour se déjuger le lendemain, face au tollé mondial…        

NB: En fait, l’Occident (pas seulement ses artistes) ne peut admettre l’arrestation en décembre du dissident Hu Jia, brisant une promesse vieille d’un an, d’embellie démocratique.

Dans la tourmente, l’appareil fait valoir ses progrès en préparation des Jeux : ses citoyens crachent moins, resquillent moins dans les queues, jettent moins leurs ordures en rue, fument moins dans les gares et taxis. Ses marchés et restaurants sont mieux tenus, son air même serait plus propre. Il vient de libérer avant l’heure 3 journalistes (Yu Huafeng, Li Changqing et Ching Cheong, HKgais travaillant pour un media de Singapour). Et  il veut nommer un Tibétain de 18 ans comme le plus jeune de ses ministres : Gyaltsen Norbu, le Panchen Lama, 2d prélat du lamaïsme.

Mais face au contentieux avec le monde, ces gestes ne suffiront pas. D’autant moins que vient d’être condamné à 4 ans, Lu Gengsong, militant anti-corruption, et qu’un autre procès est imminent, celui de Yang Chunling, militant démocratique…

Conclusion Sous l’angle olympique, la Chine n’a jamais été si isolée. Elle avait pourtant rêvé, en échange de son immense investissement de modernisation et d’éducation aux bonnes manières, de changer d’image, solvant ainsi le malentendu culturel entre le monde et elle, et ainsi de se faire accepter du monde sans rien changer à ses pratiques. Tout cela par la seule magie des JO… Cette mauvaise image pourtant, a quelque chose de relatif : Sydney (2000), Athènes (2004) et même déjà Londres (2012) se font dauber et laminer l’une après l’autre par les jalousies et lobbies sectoriels de tous les coins du monde. Aussi, si Xi Jinping réussit en un semestre à inverser cette vapeur malveillante, il aura fait la preuve d’un génie politique -sinon, ce sera la chance pour son rival Li Keqiang !

 


Joint-venture : Danone surveille sa ligne

Danone surveille sa ligne

Le 5/02, sans grands détails, Danone et Weight Watchers annoncent une JV en Chine, contrôlée à 51% par ce dernier pour offrir dès 2009 des services d’aide à l’amaigrissement. Opération pertinente, car la Chine de 2005 à 2015, aura quadruplé le nombre de ses obèses masculins (à 9%), et triplé celui des femmes obèses (7%). Quant à la proportion de Chinois en surcharge pondérale (l’étape préliminaire à l’obésité), elle atteint déjà 22%. Avec cette JV, Weight Watchers bénéficiera de l’expertise de Danone sur les goûts du consommateur chinois, lui permettant de gagner du temps. Pour le groupe de Frank Riboud, l’enjeu d’un tel investissement est double.

– Quoique Danone ne compte pas, «dans un 1er temps», intégrer ses produits dans l’offre de la JV, ce pas est inéluctable – yoghourts maigres et eau d’Evian par exemple, devraient trouver leur place dans la diète chinoise.

– Surtout, Danone demeure en plein dans une tempête juridique où son partenaire Wahaha lui a infligé un nombre d’accusations émotionnelles, dans l’espoir de casser son image. Or, en se préoccupant ouvertement de leur ligne et de leur forme, la multinationale alimentaire ne peut que dissiper les doutes des clients chinois : s’imposer comme digne de confiance, remontant ainsi sa cote d’amour au Céleste Empire.

La Chine à l’heure des fonds souverains

Après le coup de cymbales du 1er février, où Chinalco, avec Alcoa (US), reprit par surprise 12% des avoirs de Rio Tinto en bourse de Londres, des détails transpirent, permettant de percevoir l’ampleur de l’enjeu. Les alliés souhaitaient racheter jusqu’à 14,9%, et disposaient de 24MM$ -10MM$ de plus qu’ils ne dépensèrent. Aujourd’hui, la rumeur leur prête l’intention d’aller, s’ils peuvent, jusqu’à 20%. Un écran de fumée entoure l’origine des fonds : en plein effort de fusion-acquisition de fonderies d’aluminium à travers les provinces, Chinalco ne semble pas en mesure d’assurer le service de sa propre dette.

D’autre part, laisser BHP-Billiton racheter Rio Tinto, signifiait pour la Chine, que 80% du minerai du marché mondial passait aux mains de deux groupes (BHP, le brésilien Vale). Sans compter que Vale pour sa part, négociait la reprise d’un autre minéralier majeur, l’anglo-suisse Xstrata.

Or, il est en Chine un acteur muet mais tout puissant : l’armée, surtout la marine qui ne pouvait accepter les bras croisés cette fusion risquant, à l’avenir, de bloquer son propre effort d’équipement. L’armée est-elle derrière Chinalco (groupe d’Etat)? Il se trouve qu’une autre grande entreprise d’Etat, la CDB (la China Development Bank) demande à Glencore de lui racheter à tout prix ses 35% dans Xstrata (même stratégie de «barrière coupe-feu » que pour Rio), tandis que CIC (China Investment Corp), le fonds souverain chinois à peine sorti des fonts baptismaux, discute avec un financier américain pour acquérir 16% de Fortescue – 3ème minéralier austral.

Il y aurait bien plus à dire sur l’avancée chinoise sur les marchés mondiaux, tels ces 30MM$ que la CIC s’apprête à injecter dans des fonds d’investissement, dans l’espoir de contrôler indirectement (invisiblement) les plus grands groupes mondiaux… On y reviendra !

 

 


JO : Jour J-172

ª Au 8 juillet 2008, à un mois des JO, toute centrale à charbon, cimenterie et usine chimique autour de Pékin et dans les six provinces adjacentes, fermera jusqu’au 24/08, fin des Jeux. Shougang, l’aciérie aura coupé son débit de 4Mt. 15.000 vieux bus pékinois et tianjinois seront au rancard.

Au niveau national, les émissions de pluies acides auront baissé de 6%, et celles de COD (pollution de l’eau) de 5%, dit la SEPA (State Environmental Protection Administration). Tel est le plan annuel écologique le plus ambitieux de l’histoire du pays.

ª Dans son combat pour imposer le wushu (kungfu) à l’agenda olympique, la Chine n’a pas tout perdu. Le mois passé, Le VdlC évoquait la tenue d’un tournoi “de démonstration” à Pékin au moment des Jeux, à la manière d’un “festival off”. On apprend aujourd’hui (12/02) que ce dernier se déroulera sous l’égide du Comité Olympique int’l, qui l’a autorisé : antichambre de la reconnaissance !

ª  Le 3/02, en Fed Cup (tennis) à Pékin, l’équipe féminine chinoise avait battu la française, 3 victoires à 2. Mais Georges Goven, capitaine de la formation tricolore conteste auprès de la Fédération internationale de Tennis (FIT) : deuxième tenniswoman nationale, Peng Shuai avait quitté la compétition avant la fin, pour prendre l’avion pour l’Open de Paris – se soustrayant alors au contrôle anti-dopage.

 

 


Petit Peuple : Fuling—la brouette sitchuanaise

Fuling (Sichuan, 200.000 âmes) est une de ces antiques villes au bord du Yangtzé, sertie dans une mosaïque de rizières d’un romantisme saisissant, mais dure à vivre, promesse de misère pour ceux qui les cultive.

Fuling compte trop de garçons : la faute aux parents qui ont comme un seul homme opté pour n’avoir pas de fille, sans soupçonner qu’ils condamnaient leurs fils à une vie sans amour et dans le besoin, faute d’assez de bras pour abattre assez d’ouvrage.

Ce jour de mars 2004, Feng Fusheng, un de ces célibataires par force, ressassait des rêveries dans les ruelles, quand un léger jappement le fit se retourner: battant du toupet, un chiot malingre le suivait sans complexe, tentait d’entrer dans ses bonnes grâces. D’un jet de pierre, l’agriculteur tenta d’abord de le chasser. Mais arrivé à la ferme, le corniaud était toujours à ses basques, obstiné. Feng fut alors ému par cet être plus à plaindre que lui-même, qui prétendait lui confier sa destinée. Il lui servit donc le reste de sa soupe, et l’appela Heixiong (ours noir).

Comme pour lui prouver la justesse de son choix, Heixiong lui dévoila sans tarder ses talents insoupçonnés. Au marché voisin, Feng achetait un sac de charbon de bois, quand le chien aboya, d’un regard si éloquent qu’il comprit tout de suite : il lui posa la lourde poche sur le dos. A sa grande surprise, le roquet supporta la charge sans broncher, tout le long des 5 km jusqu’à la maison.

L’exploit poussa Feng à réfléchir. A partir d’une poussette fichue, il créa une carriole qu’il attela à Ours Noir, et le fit sortir faire ses emplettes en ville.

La réputation du cador magicien grandit alors à rythme exponentiel, et plus encore à l’automne, quand un Feng malade le laissa faire les courses à sa place: complices, boucher, épicier, pharmacien lurent la commande, la déposèrent  dans la nacelle, se payèrent et remirent la monnaie, avant de laisser le commis canin poursuivre…

Avant Ours Noir, le fermier avait déjà un chien – Ah Wang, énorme dogue tibétain, peu futé mais efficace pour garder les brebis… Rendu jaloux par son exemple, Ah Wang réclama sa part de travail, et reçut bientôt son propre pousse-pousse, tandis que leur maître encouragé par cette force tombée du ciel, se lançait dans un vieux rêve jusqu’alors irréalisable : bâtir un nouvel étage, pour y entreposer les balles du coton, germe de sa fortune future.

Inlassables du matin au soir, ses chiens font la navette entre la ferme et la briqueterie. Tandis que le corniaud fort comme un Turc ramène vingt briques, Ah Wang abat des charges de 50kg. Tout Fuling fait le détour pour le plaisir du spectacle des deux chiens attelés, et d’un bavardage avec Feng, entre deux coups de truelle…

Miracle, les belles voisines, émoustillées, se mettent à regarder Feng d’un autre oeil : il devient éligible -grâce à l’art d’un simple bâtard des rues. Tout cela, pour avoir accepté de prendre sa vie comme elle vient. Comme dit le proverbe, « si ton dessin de tigre est raté, fais-en un chien » (画虎不成反类犬hua hu bu cheng, fan lei quan) !

 

 


Rendez-vous : Pékin, Salon international des articles de sport

19-22 février, Beijing : ISH, Salon des sanitaires, chauffage, air conditionné, cuisine, salle de bain

22-24 fév. Shanghai : Salon de l’optique

23-26 fév. Shanghai : Pipe & Tube Exhibition              

24-26 fév., Beijing, IPSO, Salon int’l des articles de sport et de la mode sportive