Le Vent de la Chine Numéro 30

du 16 au 22 septembre 2007

Editorial : Avant le XVII. Congrès

Si elle n’avait pas été attendue, l’avancée de l’inflation en août aurait fait l’effet d’un coup de tonnerre : +6,5%, record des 11 dernières années ! La raison principale, selon des économistes, tels Zhao Xijun, Professeur à l’université Renda ou J. Anderson, de l’UBS, est la pénurie en produits alimentaires dont les prix ont monté de 18% (49% pour la viande), contre 0,9% aux autres secteurs. Le problème ne viendrait donc pas d’un excès de masse monétaire, et ne traduirait pas une surchauffe !

En même temps, l’excédent commercial a fusé de 33%, à 25MM$, dont 15MM$ aux seuls USA. Pour autant, le Conseil d’Etat ne semble pas trop s’inquiéter, sauf sous l’angle des retombées pour les franges les plus vulnérables de la société. Pour pallier la pénurie du secteur porcin (qui produit cette année  10% de moins, frappé par la « maladie des oreilles bleues » et par le coût excessif du fourrage), la Chine a commandé 160.000t de cette viande, livraisons étalées sur 12 mois. C’est le sextuple des imports de 2006… Puis le 14/09, la Banque centrale réajustait—pour la 5ème fois depuis janvier- son taux d’intérêt, de 7,02 à 7,29%, histoire de combattre la fièvre inflationniste.

Le même jour, les USA imposaient des droits compensatoires de 23 à 99% sur le papier glacé chinois, provoquant une contre-attaque indignée auprès de l’OMC (lorganisation mondiale du commerce). Une rumeur pourtant, aurait pu rasséréner Washington : celle d’une remontée accélérée du yuan face au dollar, à 5% dans l’année au lieu de 4% : sous 30 jours, les experts le voient passer sous le seuil des 7,5¥/1US$.

La Chine est plus nerveuse à propos de Taiwan: d’ici les Jeux Olympiques, et la fin de son mandat, l’imprédictible Président indépendantiste Chen Shui-bian pourrait vouloir tenter l’impossible, voire l’irréparable. Il préparait déjà un referendum pour janvier, sur un ravalement de la Constitution. Il en annonce un autre en mars, pour une entrée de l’île à l’ONU sous le nom de Taiwan… cultivant ainsi l’art de mettre Pékin sur le grill. Mais chaque rivage a à perdre dans cette affaire: si Chen saute le pas, la Chine ne pourra que réagir militairement, avec des conséquences économiques et politiques inimaginables, et qui en tout cas, feraient perdre à Pékin le fruit de ses années d’efforts pour changer d’image à Taiwan… Pour l’heure, la Chine choisit de garder profil bas et de tenter de faire contenir l’île par ses alliés, US en tête. Ces derniers maintiennent le statu quo : ils découragent officiellement Taiwan (discours de Th. Christensen, vice Secrétaire d’Etat à la défense, 11/9) d’aller à l’indépendance, mais relancent le vieux projet de vente à l’île de 2,2MM$ d’armes de 2de main, et tiennent avec les officiels taiwanais une conférence de défense (Arlington, 9-11/9)…

Enfin, d’intenses palabres ont eu lieu entre instances chinoises de la santé/qualité des produits (ministre Li Changjiang), de l’Union Européenne (commissaire M. Kiprianou) et des USA (CPSC) : Pékin s’engage à bannir la peinture au plomb sur les jouets destinés aux US (et sans doute aux autres pays riches), et à réviser sa procédure complète de contrôle alimentaire. Mais Bruxelles, qui en a vu d’autres, entend juger Pékin; avant tout,  sur ses actes !

 

 

 

 


Temps fort : Canton, Pékin — la nouvelle donne

Jusqu’aux années ’90, le Guangdong (Province de Canton) avait mauvaise presse : trop adepte du proverbe « le ciel est haut et l’empereur est loin » (tian gao, huangdi yuan, 天高皇帝远), la province était soupçonnée d’individualisme. Ce qui motivait, depuis Pékin, l’envoi de leaders à poigne et d’une fidélité d’acier —le dernier, Zhang Dejiang, Secrétaire du Parti, formé à Pyongyang, ne fait pas exception.

Aujourd’hui, pour ces 91M d’habitants entassés sur 134.000km², le ciel s’est nettement dégagé : la confiance règne, à commencer par celle en soi-même. Une durable embellie s’est instaurée dans les rapports avec Pékin, car la capitale méridionale a fait ses preuves. Les temps sont loin, où Pékin devait renflouer la GITIC (Guangdong Int’l Trust and Investment Corp), bras financier du gouvernement provincial en faillite, et punir les cadres véreux. Aujourd’hui, les scandales sont ailleurs — cf page 3…

Au contraire, la province a donné la preuve éclatante des vertus de son « hypercapitalisme ». Le Guangdong aligne 15% du PIB national, 31% des exportations (238MM$), et 20% des Investissements directs étrangers (IDE) (12,3MM$). Shenzhen et Canton sont les deux plus riches villes du pays, avec en 2005, un PIB par habitant de 7000$/an.

D’ici deux ans, à elles deux, elles totaliseront 14 lignes de métro (450 km); des ports et aéroports parmi les meilleurs du pays. A force d’infrastructures en MM$, de projets grandioses signés Paul  Andreu ou le Cabinet Arup, elles s’apprêtent à se métamorphoser d’ici 2010, pour les Jeux Asiatiques, en références mondiales, pour leur qualité d’urbanisme combinant confort et esthétique. Il suffit, pour s’en convaincre, d’observer à Canton la future tour de la TV intégrant dans son mât cinéma et  boutiques de luxe (620m de haut – record d’Asie), ou le plan du CBDCentral business district – articulé sur un axe nord-sud, de part et d’autre de la rivière des Perles.

Surtout, Canton se profile désormais comme une société patriote, en soutien clair et net au régime et à la nation, qu’elle a su concilier avec son fort particularisme culturel. Canton vit une modernité technocrate sans états d’âme, au nom de son pragmatisme. Elle donne toute priorité à la compétence gestionnaire, aux décisions rapides, secret de sa réussite. Le reste, l’idéologie ne l’intéresse pas.

Dans cette mutation, un ressort caché a joué : Hong Kong, avec ses capitaux, son savoir-faire, les liens du sang. Un Cantonais sur deux regarde « Pearl-TV» ou « Phoenix-TV », et chaque week-end, sinon chaque jour, des centaines de milliers de gens passent la frontière dans les deux sens : aucune presse muselée, aucune censure n’ont pu freiner telle synergie. Mais en définitive, le génie de Canton -et de Hong Kong derrière- a été de prouver à Pékin qu’elle lui était bénéfique !

 

 


Pol : Corruption : trois affaires, un bureau

Corruption : trois « affaires », un bureau

     A l’aube du XVII. Congrès, la corruption est vue comme une menace à la légitimité du Parti par le Président Hu jintao, qui semble vouloir en faire son mandat n°1 pour l’avenir.

Trois affaires impressionnantes défraient la chronique cette semaine —comme si l’hydre dardait ses mille langues, indifférente aux sermons dans le désert.

 Pang Jiayu, dit le «maire-braguette», ex-édile de Baoji (Shaanxi) est en examen, dénoncé par 11 ex-maîtresses qui l’accusent d’avoir abusé d’elles depuis 13 ans. Celles-ci se sont unies pour venger trois de leurs maris, condamnés l’un à mort, les autres à de lourdes peines de prison, suite à un crash financier dont Pang, le responsable, leur avait fait porter le chapeau. Par ailleurs, deux autres cadres viennent d’être passés par les armes.

‚ Wen Mengjie, 50 ans, directeur à la Banque de l’Agriculture à Pékin, exécuté pour détournement d’1,5M² en cinq ans (en 2006, un audit sur cette banque agricole révélait des fraudes portant sur 5MM² !).

ƒ Duan Yihe, 61 ans, Président du Parlement de Jinan (Shandong), pour avoir liquidé sa maîtresse à la voiture piégée. L’exécutant, un policier local, subit la même peine. Duan était aussi convaincu d’avoir empoché 170.000².                                               

Pour remonter la pente, Ma Wen, la nouvelle ministre anti-corruption, présente son nouveau « Bureau national de prévention de la corruption ». Sa tâche consistera à « surveiller les flux de fonds suspects et les activités susceptibles de corruption (…) en établissant une base de données entre le procureur public, le tribunal, la police et les banques ». De manière assez compréhensible, l’annonce ne convainc pas: ce bureau va s’ajouter à une brochette déjà fournie d’organes de lutte contre ce fléau; et qui y échouent. Tels le ministère de la supervision, la CCID, et tous les procureurs publics… Le blocage intervient toujours au même endroit : l’absence d’indépendance de la justice et de la presse, donnant aux cadres le sentiment d’être au-dessus des lois.

Un journaliste revoit le jour

      Zhao Yan, journaliste chinois, recouvre sa liberté le 15/09, après 3 ans de prison, cas d’école du conflit d’intérêt latent entre presse et pouvoir.

Ex-policier de Harbin converti au journalisme, Zhao, homme courageux et croyant en son métier, est un fils de cette presse moderne chinoise au service d’un public jeune et avide d’information honnête. Une presse sans complexe, décidée à exploiter sa marge de liberté, tant par idéal que par intérêt commercial – car la palme publicitaire revient au plus lu.

En 2004, Zhao Yan s’était fait mal voir de cadres corrompus du Hebei, qu’il dénonçait. Il s’était replié dans un poste de recherchiste au bureau pékinois du New York Times. Mais peu après, le NYT annonça le départ de Jiang Zemin de son dernier mandat de patron de l’armée : d’emblée, Zhao fut inculpé pour « fuite de secret d’Etat » -charge qu’il a toujours niée. Les pressions américaines et étrangères pour le faire libérer, permirent probablement de modifier le chef d’accusation afin d’alléger le verdict. Mais Zhao Yan, contrairement à une pratique fréquente, ne bénéficia pas d’un seul jour de remise de peine : simple rappel qu’irriter des grands de ce monde, demeure dans ces contrées un délit inacceptable.

 

 


Argent : Commandes navales—la Chine dépasse la Corée

Le gel aléatoire des maisons de courtage 

De plus de 150 en 2005, les maisons de courtage sont passées à 107 cette année —par faillites et fusions.

L’an dernier, la CSRC (China Securities Regulatory Commission) voulait les ramener à moins de quarante, « chiffre idéal », quand la bourse s’est envolée, +97% sur 12 mois à Shanghai et +167% à Shenzhen. Pour les courtiers, cela signifie 35.000 nouveaux comptes-clients/jour, et 100M d’actionnaires : manne qui a coupé court, un temps, au programme de restructurations.

Cet état de chose divise les responsables, entre ceux prêts à rouvrir les créations (grasses prébendes à offrir aux apparatchiks), et ceux estimant inéluctable le dégraissage. D’où le moyen terme imaginé, cote mal taillée : trois des quatre « structures de défaisance» nationales, Cinda, Huarong et Oriental Asset Management, viennent de recevoir leur licence, ce qui leur permettra de compenser par des profits boursiers, leurs pertes sur les actifs faillis dont elles ont la charge. Après cette dernière série de feux verts, afin de ne pas rajouter de l’huile sur le feu de la bourse, aucune autre licence ne serait plus octroyée «avant des années». Jusqu’ à nouvel ordre, ou contre-ordre, pensent les professionnels!

Commandes navales — la Chine passe la Corée

Au 1er semestre, la Chine vient de passer 1er constructeur naval, avec 42M TJB commandés, 42% du carnet mondial.

La Corée du Sud  n’en obtient que 34%, et le Japon 6%. Par rapport à 2006, la performance chinoise traduit un progrès de 165%. La Corée gardera encore trois ans son leadership, en terme de livraisons. En 2005, la Chine ne détenait encore que 18% du marché global derrière les chantiers coréens et nippons, dont la part combinée dépassait 60%. Sa « force de frappe » va encore s’accroître avec l’expansion des chantiers du Yangtzé, entre Shanghai et Nankin, dont la capacité passera de 4M TJB aujourd’hui, à 14 en 2015.

Si l’on parle de capacité totale chinoise (incluant Canton, Dalian et d’autres), dès 2010, elle aura doublé par rapport à 2005, à 25M TJB. Mais la Corée voit cette évolution sans crainte : ses carnets de commandes demeurent complets, dans le haut de gamme, en vraquiers, pétroliers et méthaniers, laissant à sa voisine sudiste le volume, et les petits profits !

 

 


A la loupe : Guangdong, trois PME à succès

Avec son réseau dense d’autoroutes, de zones industrielles, et de services sophistiqués, le Guangdong joue un rôle d’écloserie de PME étrangères. En voici trois :

ª Dans le sillage de son client Nortel, Axon (France) s’est posée en 2000 à Shunde, et a rapidement volé de ses propres ailes. Sa niche: le câble électronique, nécessaire à une large gamme d’utilisateurs. Aux PC portables Dell, HP, IBM, Axon fournit les câbles Wifi. Aux Jetta et Buick-GM, ceux de leur airbag. A l’armée chinoise, l’APL, il fournit 100% des câbles pour hélicoptères, satellites, fusées «Longue-Marche», et missiles. La plupart des 200 ouvriers vont en formation en France auprès de la maison-mère, «jusqu’à 10 fois», précise Larry Lim, le directeur singapourien. Seule la R&D est réalisée dans l’Hexagone. Axon-Chine assure ainsi 8M² de chiffre, 9% du chiffre du groupe, et +20%/an.

ª Avec 35 employés dont cinq expatriés; en neuf bureaux en Chine, Sogreah (1ère société d’ingénierie indépendante en France) produit des audits et bilans environnementaux. Avec l’aide de 10 consultants associés, elle prépare 100% des projets de la Banque mondiale dans les villes, vérifie l’état des canaux et centrales de retraitement des eaux, diagnostique les pollutions d’usines (eau, air, sol), la faisabilité des projets de réhabilitation. Ailleurs, elle offre ses avis techniques aux villes et aux firmes. Un métier d’avenir, quand on sait qu’un jour prochain, une loi imposera la dépollution des sites lors des fermetures d’usine… Sogreah-Chine assure ainsi 5% des 85M² de chiffre de son groupe, en 2006.

ª A Canton depuis 2003, Tokheim (France), leader de l’équipement de stations services, réalise plusieurs exploits : n°1 en Chine, il livre 10.000 pompes /an (à trois becs verseurs), ainsi que l’électronique de cabine et la distribution par carte de crédit : 31% du marché, et environ 40M²/an de chiffre d’affaires. Fournisseur exclusif de Cnooc la compagnie nationale off shore et Total (Chine), il livre aussi BP, Sinopec, CNPC la compagnie nationale pétrolière. Son usine toute neuve, à 6M², compte 640 employés—tous chinois. La formation est dispensée en France, et les produits, reformulés sur place pour les besoins chinois.

NB : pompe et moteur, sont produits à Dundee (Ecosse), gardant ainsi à Tokheim la maîtrise de sa technologie

 


A la loupe : ZWMQ — un paradis spiritueux

Au bord d’une grande artère de Canton, avec 5600m², ZWMQ, Zhong wai ming qiu, le magasin d’alcools inauguré ce 19/09, se veut le plus grand du pays. Il ressemble plus à un salon professionnel, avec ses stands « Argentine », « Allemagne », « Italie » ou « France » et ses étalages de cognac et alcools mondiaux. C’est en tout cas un outil technique, à la pointe du métier, fruit de vingt ans de transition de l’économie d’Etat à celle de marché !

En 1991, Wang Huidong, à la tête de la firme d’Etat, répond à l’appel de Deng Xiaoping, de privatiser : il obtient la propriété du groupe, sans bourse délier, d’une mairie soulagée de se défaire de ses firmes, toutes déficitaires (ou cachant leurs profits).

Propriétaire, Wang commande Cognacs et Whiskies de marque, visant le haut de gamme. Fin des années ’90, il vend les vins chinois puis, en 2002, ceux importés (15% du marché). En décembre 2006, il contrôle au Guangdong, 31 magasins. En alcool importé, presque tout en Cognac, il a vendu l’an passé pour 1,5M².

C’est alors que tout explose: en juin 2007, ZWMQ est passé à 70 magasins, sans compter le nouveau « vaisseau amiral ». En trois missions d’achat en Europe, il a rentré 300.000 bouteilles (20 conteneurs), le triple de l’an passé. En 2008, il veut passer au rythme de croisière : commander ce volume chaque mois, et ouvrir à Shanghai-Pudong, et à Pékin, à temps pour les Jeux Olympiques de 2008…

Toute cette activité, bien sûr, cache des secrets. Peterson Wines, par exemple, groupe de Hong Kong qui entre-temps a repris en sous-main 55% de ZWMQ, doublant ou triplant les 2M² du capital enregistré. Avantage: échapper à l’impôt, mais aussi, probablement, permettre à un groupe local, le véritable investisseur,  de contourner les contrôles et interdictions locales.

Afin de fidéliser la clientèle, Wang a développé une subtile politique de prix. Le Puy, son produit-phare, un vin de pays bien présenté est facturé à haut prix -70². Mais sur tous les grands vins, il limite le profit à 30%, afin de maintenir des tarifs bas, en dépit des 40% de taxe. Il dispose aussi d’un club de gastronomie et tâte-vin, réservé aux bons acheteurs.

Un autre groupe partenaire émerge: United Spirits (Inde), n°3 mondial, qui dès 2008, écoulera à travers son réseau son catalogue de vins et alcools mondiaux et indiens, ce qui pourrait lui ouvrir des crédits pour accélérer son implantation nationale. Enfin, ZWMQ dispose d’un ultime atout : le laboratoire d’analyse de l’association nationale des professionnels de l’alcool, qui analyse les échantillons et détecte les contrefaçons. Ainsi, Wang appose son label d’authenticité aux produits en vente dans son réseau – garantissant ainsi leur qualité : service rare, en Chine !

 


Joint-venture : Pékin Terminal 3 – le grand chambardement

Pékin-Terminal 3, le grand chambardement

     Présenté à la presse le 12/9 à cinq mois de son ouverture, le Terminal 3 de l’aéroport de Pékin force l’admiration: les autorités se sont données les moyens d’un sans faute.

Ses 99ha, plus que les cinq terminaux de Heathrow réunis, porteront la capacité de Pékin à 43M de passagers/an, et 60M cinq ans plus tard. Son concept très fonctionnel, permettra de ranger jusqu’à 125 avions à l’heure, de part et d’autre d’un corps évoquant les lignes d’un dragon mythique. L’ouvrage signé Norman Foster (RU) aura coûté 2,1MM², et épargné jusqu’à la moitié du coût qu’il aurait causé dans un milieu européen. Moyennant l’injection de 50.000 manoeuvres sur les trois bâtiments, ce mammouth n’aura pris que 42 mois à bâtir, et installer 445 ascenseurs, convoyeurs, escalators, et un système pour traiter 20.000 valises à l’heure…

Il y aura donc beaucoup d’espace, sous des torrents de lumière naturelle et un toit splendide asymétrique, supporté par des colonnes rouges—rappel obligatoire à la Cité Interdite. Seul regret, à cette réalisation de prestige : les 10.000 habitants expropriés pour une bouchée de pain, sans avoir eu le temps de s’en apercevoir !

Alcoa et Buffett jettent l’éponge chinoise

     Atypiques, ces reventes d’actifs chinois par Alcoa, n°2 mondial de l’aluminium (US) et Warren Buffett. Le premier cède les 7% qu’il possédait de Chalco, son homologue chinois. Le second réalise ses 136M$ de parts CNPC, le 1er pétrolier du pays.

On avait bien vu avant l’été, Aéroports de Paris – ADP revendre ses 10% de parts chez son partenaire l’aéroport de Pékin. Mais ces cas mis à part, la quasi-totalité des détenteurs de valeurs chinoises se les gardent. Les titres chinois, ces temps-ci, sont introuvables. Sans compter qu’Alcoa et Berkshire Hathaway (le célèbre fonds de Buffett) auront bien du mal à se faire accepter comme investisseurs de valeurs chinoises à l’avenir.

Ces ventes ont deux raisons. Les maisons américaines ont perçu une forte plus-value,  jusqu’à +50% : Alcoa a gagné 2MM$. D’autre part, Alcoa, qui vient de « rater » la reprise « hostile » du canadien Alcan, serait déçu du partenaire chinois, ayant vu s’effriter ses espoirs d’investir ensemble, ou de grignoter une part plus grande dans son capital.                                                                                                                                                                

NB: Pour les agioteurs, le signal de « vendre les parts chinoises » ne peut venir d’un étranger déçu. Tel signal serait bien plus suivi, s’il venait des grands capitalistes Hongkongais, très introduits et qui «connaissent la musique», comme Li Ka-shing !

Pékin renvoie l’ascenseur à Blackstone

      En juin 2007, en pleine gestation, la China Invest Co. faisait une entrée en fanfare dans le monde des affaires, déboursant 3MM$ pour 9,4% du capital du groupe Blackstone, Cie d’investissement new yorkaise. L’opération faisait par la suite lever les sourcils, car dans les mois suivants, ce placement perdait 750M$ au bas mot. L’investisseur public pourtant, ne bronchait pas — et pour cause !

Le 10/09, Blackstone annonce à son tour, son entrée pour environ 600M$ dans le groupe chimique pékinois Bluestar, dont il prend 20%. Filiale de la corporation chimique nationale, la CNCC,  Bluestar a été l’an passé parmi les plus actives à investir hors du pays, en Europe notamment, où elle a repris une filiale textile de Courtaulds à Grimsby (RU), en France où elle s’est adjugée Adisseo, firme d’additifs d’aliments du bétail, et la division silicones de Rhodia.

Sous l’angle réglementaire, cette entrée dans Bluestar frappe, alors que la Chine semble en train de restreindre les acquisitions étrangères – J.Wuttke, Président de la Chambre de commerce européenne sonne l’alarme cette semaine. Mais Blackstone a bien joué en s’assurant dans cette affaire, les services d’Anthony Leung, ex-Secrétaire Hongkongais aux finances, connu et apprécié à Pékin.

D’autre part, en entrant dans Blackstone, la Chine a initié une coopération à long terme et accepte logiquement cet investissement croisé «black & blue»  : désormais, lui reviennent 10% des profits de Blackstone, «partie de la famille» !

 

 


JO : On sort les gros billets…

On sort les gros billets

Pour la cérémonie d’ouverture des Jeux (l’événement le plus demandé), seule une demande sur 21 a été honorée par le BOCOG, par système de loterie. Ce qui explique en partie l’insolite offre par Air China aux Coréens: 43.600$ pour trois jours, incluant le voyage en 1ère classe, un ticket pour la cérémonie, un acheminement domestique, mais ni repas ni hôtel. En Corée-même, le package le plus cher, pour les mêmes services, coûte le quart…

La fin des pétitions

Le xinfang, système traditionnel de pétition, est chassé par les Jeux. Par ce mécanisme séculaire, des milliers de provinciaux montent chaque semaine à Pékin dénoncer les abus des cadres. Ils y restent coincés durant des mois, le temps de faire enregistrer leur grief, et logent dans des lieux publics à bas prix…

Or 1000 de ces plaignants, logés près de la Gare du Sud, viennent d’apprendre qu’ils seraient expulsés le 19/9, leur foyer devant laisser place à de nouvelles rampes d’accès à la gare – JO oblige. En fait, la mesure vise surtout à éviter toute déstabilisation et perte de face à des cadres de province, avant le XVII. Congrès, le 15/10/2007.

 

 


Petit Peuple : Xishuangbanna- un éléphant, ça trompe énormément

Pourquoi avoir publié dans la presse cette histoire d’éléphant? Réminiscence bouddhiste? Des grands Voyages à l’Ouest? L’éléphant  pèse lourd dans l’imaginaire du pays, qui s’y assimile volontiers. En 2006, le 1er ministre Wen Jiabao compara la Chine au pachyderme placide, à l’ombre duquel ses voisins de l’ASEAN, qu’il décrivait comme buffle, singe ou  héron, pouvaient cohabiter en paix!

Au Xishuangbanna (Yunnan),  l’éléphant d’Asie survit dans une vallée portant son nom, au coeur d’une jungle de palmiers, bananiers, passiflore et lianes. Dans son Eden éléphantesque, le malheur de « Grand-Frère », vint de la Birmanie voisine. En 2005, ce superbe étalon de trois ans faisait la convoitise des femelles de sa harde, mais aussi de braconniers séduits par sa valeur commerciale, en une région enclavée où tracteurs et camions sont rares.

Les malfrats avaient recouru au truc de la «balle enrobée de sucre» (糖衣炮弹, tang yi pao dan. Ayant suivi le mâle sur sa route, ils l’avaient nourri de bananes plombées à l’héroïne du triangle d’or. Un mois plus tard, à ce «régime», Grand-Frère était accro, tremblant de la trompe à la queue. Réduit à les suivre comme un caniche pour obtenir son héroïne, il conduisait docilement sa harde à cinq jours de marche, au marché de Dehong où -dit la presse- les bandits pensaient les revendre…

Le plan fut avorté par une –bizarre– délation. Les trafiquants furent jetés en prison. Mais quand les hommes en vert olive voulurent rendre les pachydermes à leur domaine, ils découvrirent leur problème : refusant la liberté, un Grand Frère, en manque revendiquait sa dose, et menaçait de rompre ses entraves, de tout briser sur son passage, à moins de retrouver  bien vite ses éléphants roses…

A en croire l’article bien pensant, le pouvoir prit alors (comme invariablement) la bonne décision : une action paternelle, énergique et généreuse. Replongé dans son trip par quelques seringues, Grand-Frère traversa la Chine en camion. 2000km plus à l’Est, il fut chargé sur un bac, jusqu’à l’île de Hainan, au Parc zoologique tropical.

Là, les vétérinaires se mirent en devoir de le sevrer à la méthadone, à 50mg matin et soir pour commencer – le quintuple de la dose humaine. Chaque jour, Grand-Frère fut baigné. A chaque crise, des régiments de gardes le massèrent pour le soulager. Il fallut un an pour l’affranchir de l’addiction : déclaré fin août bon pour le service, il s’apprête à entamer le grand retour vers son Xishuangbanna natal !

Le plus curieux dans cette histoire, réside dans ce qu’elle tait. Pourquoi, de la part des contrebandiers, avoir dirigé la harde vers un marché local très surveillé (proche de la frontière) et non vers la Birmanie, bien plus sure? Pourquoi ne pas l’avoir utilisée pour passer la drogue -filière immensément plus lucrative, insoupçonnable, et en tout cas très dure à arrêter?  Il faut savoir qu’aujourd’hui, la Chine a remplacé la Thaïlande, comme route n°1 de transit de la schnouffe birmane …

Cette bien jolie histoire n’est pas forcément à 100% véridique. Elle semble retouchée -comme ces photos maquillées par la propagande. Ce qu’on essaie de lui faire dire est en partie juste,  au demeurant : l’affection (très récente) du régime pour la nature ; et le fait que les ruses les plus fines ne tiennent pas toujours la route face à la police – même celle de la balle dragéifiée !

 

 


Rendez-vous : Pékin, le Salon de l’aéronautique

15-23 sept., Frankfurt : Salon de l’automobile

17-23 sept., Beijing : AEROMART Convention et AVIATION Expo China

19-22 sept., Pékin : Salon du sauvetage et Salon de la gestion des aéroports.

20-23 sept., ART Beijing 2007