Le Vent de la Chine Numéro 18 (2017)
-En mai 1987, un monstrueux incendie ravageait les monts Daxing’anling (Heilongjiang) à 1500km de Pékin, dans la forêt sibérienne partagée avec l’Union Soviétique. Le sinistre dû à l’imprudence d’un employé dura un mois, causant 221 morts, 266 blessés, et 51.000 sans abri. 15.000 pompiers ou soldats furent lancés au feu avec des moyens de fortune, y compris des seaux et des balais de sorgho pour battre les brandons. Trois villes (Xilinji, Mohe et Tuqiang), deux gares, et 650.000 hectares de forêts avaient été réduits en cendres. Ce combat fut héroïque, mais la victoire se fit attendre et fut cher payée, vu l’équipement précaire.
Le 2 mai 2017, vit un remake de ce désastre, sur la même montagne (côté Mongolie Intérieure, forêt de Bilahe Beidahe). Sous un vent vif et des hautes températures pour la saison, l’incendie se propagea sur deux fronts crépitants de 7 kilomètres chacun. Pourtant cette fois, le sinistre fut contenu à une vitesse exceptionnelle : 9000 pompiers furent acheminés par hélicoptères transport de troupe, camions et véhicules amphibies. Leurs équipements comportaient, outre 12 avions de type Canadair, des extincteurs pneumatiques et chimiques et des pompes à feu. Avec ces moyens de choc, il ne fallut que 48 heures pour venir à bout du sinistre. Seuls 10.000 hectares furent anéantis-pas une vie ne fut perdue. Sous cet angle du combat du feu, la Chine venait de démontrer de manière éblouissante, ses progrès réalisés en 30 ans.
-Le 5 mai, le premier avion gros porteur chinois, le C919 du groupe national Comac, faisait son vol inaugural depuis Pudong. Ce faisant, il entrait dans la course avec Boeing et Airbus, histoire de contester aux géants aéronautiques le partage du monde de l’air, et entamer la reconquête de son propre marché – avec 7000 appareils à commander sous 20 ans. Dans la structure du C919, l’équipement américain prend la part du lion, fournissant l’avionique (Rockwell Collins), des composantes de fuselage (Arconic), les roues, le générateur, l’enregistreur. Mais la France n’est pas en reste : Safran se partage avec General Electric le réacteur « Leap », Zodiac fournit certains sièges, toboggans et toilettes, Michelin les pneus et Ratier Figeac des instruments de vol. Sous l’angle des équipements, le C919 est à la pointe, permettant l’économie de 50% de bruits et de pollution, et de 15% de carburant. Sous l’angle de la nacelle toutefois, c’est un appareil obsolète avant même de voler, inspiré de l’A320 qui a 30 ans. Pour l’instant, Comac aligne 570 commandes fermes (marché captif des transporteurs et leaseurs chinois). Mais c’est un début : avec le ARJ21, encore plus dépassé, et le futur C929, très gros porteur en cours de design avec United Aircraft Corp. (UAC), compagnie russe, la Chine aéronautique apprend son métier et crée son catalogue. Après Stout, selon Si Jingzhe de Sinolink securities, Boeing a 100 ans d’expérience, et Airbus 40 – il faut laisser le temps au temps !
-Autre souvenir ancien : le 1er mai 1993, Pyongyang faisait fête à Li Peng, le 1er ministre chinois venu célébrer l’amitié indéfectible entre ces deux nations liées dans la défense du socialisme par la guerre de Corée. Pékin à l’époque, nourrissait et habillait le pays du Matin Calme, à concurrence d’un costume par an par habitant. Ces temps sont bien lointains ! Aujourd’hui, la Chine plus proche que jamais des Etats-Unis, a bloqué (sans le dire) ses livraisons de pétrole au régime de Kim Jong-un. Par réaction immédiate dans les stations services, les files s’allongent—le prix augmente de 83%. Par presse interposée, Kim rétorque, reprochant à la Chine d’oublier sa « protection » et de « danser au son du violon des Etats-Unis ». Il l’avertit aussi de « graves conséquences si elle devait continuer ». Jusqu’où ira la tension ? La Chine, furieuse de voir la Corée du Nord « mordre la main qui le nourrit », garde le silence. La rumeur prétend que Pékin aurait averti ses ressortissants de quitter le territoire. Un porte-parole chinois dément. Mais la situation se dégrade, de jour en jour.
En 2006, l’Etat chinois lançait son système d’assurances agricoles. S’inspirant de pays développés comme l’Amérique, la Chine subventionnait massivement le coût de la police d’assurance : entre le district, la province et le niveau central, 80% de la prime était, et reste à charge publique, contre 20% supporté par le bénéficiaire. Ces polices sont offertes par les assurances chinoises (PICC, Guoyuan, Ping An, China Pacific), mais aussi des étrangères, tel Groupama, en JV avec AVIC (groupe aéronautique), actif dans 6 provinces sur des denrées les plus diverses (céréales, yak).
La première année, la recette des assurances agricoles s’éleva à 500 millions de yuans. En 2016, ce montant s’est vu multiplié par 80, atteignant 35 milliards de yuans (plus de 5 milliards de $). Le taux de couverture est donc très élevé—supérieur, en fait, à celui de la France—et fait de la Chine numéro 2 mondial, avec 50% des emblavures de céréales, 70% de l’élevage porcin au Sichuan, et touchant tous types de produits—du Yak, au Sichuan, à la « pipa », genre de prune jaune.
Revers de la médaille : faute de moyens, le montant de la couverture reste très bas. En céréales par exemple, elle ne couvre que 300 yuans (au plus) par mou soit 4500 yuans à l’hectare, quand la récolte vaut 20.000 yuans à l’hectare. La prime ne compense donc que 25% du sinistre, couvrant les frais de semence et de plantation mais non le revenu. Par comparaison, en France, l’assurance agricole, imposant une franchise de 30%, garantit au bénéficiaire 70% de sa récolte perdue.
C’est pourquoi le 26 avril, le Conseil d’Etat passait à une nouvelle étape : 13 nouvelles zones pilotes sont créées dans les traditionnels « greniers à blé » du pays – Heilongjiang, Henan, Hebei, Anhui ou Hubei. L’objectif est de renforcer la couverture de l’assurance, surtout en y ajoutant, en sus des sinistres sur les récoltes et infrastructures, la charge des baux d’affermage des lopins – cause fréquente de faillites d’agriculteurs incapables de payer les propriétaires ou de rembourser les banques.
D’autres expériences se déroulent à travers le pays. Ainsi fin 2016, deux fonds-tests ont été lancés, à 350 millions de $ chacun, au Guangdong et au Heilongjiang. Dans cette dernière province, la police anti-crues, tempêtes, sécheresse et gel couvre 28 districts pauvres. Il s’agit d’un concept nouveau et expérimental dessiné et piloté par Swiss Re, groupe mondial de réassurance. Il change le management, par une gestion « paramétrique ». À peine la tornade ou la canicule engagée, l’équipe d’assureurs entame l’évaluation des dommages prévisionnels, sur la base des images satellites et d’indices de précipitations et de force de vent.
L’avantage est une économie en semaines passées en enquête de terrain : les paiements interviennent en accéléré, par « effet gâchette », renforçant la confiance des fermiers, leur faisant oublier l’échec d’un essai d’assurance raté dans les années ‘90. Permettant une meilleure collecte de primes, ce système ouvre aussi la perspective d’attirer le marché des capitaux, et affranchit les provinces du cauchemar d’obligation de paiement « substantiels et exceptionnels ».
Mais il y a un inconvénient : cette assurance de l’avenir est compliquée à mettre en place, en raison des facteurs locaux, tels la configuration des sols (du relief), du mode d’assolement. En pratique, cette philosophie d’assurance d’avenir, ne convient qu’à grande échelle, pour une police conclue par une maison telle Swiss Re et chaque district contractant, lequel, en cas de sinistre, se charge de compenser les fermes individuelles.
Au fait, sur ce marché stratégique des assurances rurales (celles du secteur qui doit nourrir le pays), quel est le rôle dévolu aux groupes étrangers, par une Chine traditionnellement hyper-frileuse sur tout dossier financier ? La réponse varie suivant le statut et le type de ces entreprises étrangères. Concernant les réassureurs, sauf exception justifiée par la qualité et créativité d’un projet spécifique comme l’assurance paramétrique, des maisons telles Swiss Re, Lloyd’s, ou Munich Re se voient restreindre l’activité. Depuis 2015, elles ont l’obligation de partager à 50% leur marché avec leurs homologues chinois, essentiellement China Re ou PICC.
Il en va tout autrement, concernant les assurances agricoles directes. Tenues à l’écart en 2001 lors de l’entrée de la Chine à l’OMC (ces maisons étrangères étaient considérées à l’époque comme une concurrence insupportable), elles sont désormais vues localement avec plus de placidité, vu leur présence très faible sur le marché général : 5% de l’assurance « vie » et 2% du « non-vie ». Aujourd’hui la Chine est en demande de plus de présence étrangère, en raison de leur expertise, créativité (comme dans la gestion des fraudes)… et de la facilité en ce secteur, à copier les innovations des autres !
Un but recherché par cette généralisation des assurances, est l’éradication de la pauvreté—Xi Jinping veut sortir 10 millions de personnes de la pauvreté par an. Un autre est d’enrayer l’exode rural.
Une ombre toutefois demeure, au niveau de son financement : une subvention de 80% de la prime d’assurance par l’Etat est-elle viable à long terme ? Sans doute que non. Mais l’intervention de l’Etat doit être considérée comme l’amorçage d’une pompe. Si le système réussit, on peut espérer à l’avenir que le paysan aura les moyens financiers et sera convaincu de l’utilité d’assumer seul le coût de son assurance. Enfin, comme conclut le professeur Zhou Li de l’Université Renmin, une telle entreprise, avec le changement de mentalité qu’elle implique, ne peut être que de long terme : « le chemin vers une protection complète, se compte en décennies ».
Depuis le tournant du siècle, la Chine a commencé à investir lourdement et à réformer le cadre réglementaire pour se doter d’un système de santé aux normes internationales et accessible au plus grand nombre.
La démarche est difficile : le pays paie 50 ans de laisser-aller environnemental et nutritionnel, aggravés par deux décennies sous Deng Xiaoping où l’Etat forçait les hôpitaux à se débrouiller seuls, dans une démarche de « rentabilité ».
Mais les choses changent depuis le Président Hu Jintao. En 2009, grâce à Chen Zhu son ministre de la Santé, l’Etat affectait 125 milliards de $ pour réformer la santé.
Le fer de lance de la réforme, passe inévitablement par la réduction des coûts des médicaments tout en améliorant leur qualité.
En 2015, le marché pharmaceutique chinois s’élevait à 108 milliards de $, montant qui passera à 167 milliards de $ en 2020. La Chine est déjà le second marché mondial, et passera en 2020 au 1er rang, devant les Etats-Unis. Actuellement, les laboratoires produisent 107.000 types de médicaments dont 95% de génériques – hélas souvent de qualité incertaine.
Menée par la CFDA (China Food & Drugs Admin.) et la Commission de la Santé et du Planning, la réforme s’opérera sur les trois tableaux : les hôpitaux, les laboratoires et la distribution.
La distribution se caractérise par une situation ubuesque, reflet de l’organisation sociale du moment. Avec 3 millions de démarcheurs, représentants et vendeurs, 13.500 distributeurs font le lien entre les 28.500 hôpitaux, et les milliers d’usines. Ce système inefficace et très cher, est basé sur la corruption. Sous-payés, les médecins n’ont de choix que d’étoffer leurs bas salaires par des bakchichs. Les mairies défendent ce réseau afin de protéger leurs emplois et laboratoires locaux. Et les hôpitaux eux, en ont besoin afin de pouvoir surtaxer les remèdes et ainsi suppléer aux prix bas de leurs prestations. L’Etat veut donc éclaircir en profondeur cette forêt d’intermédiaires. Testée entre 11 provinces, la réforme consiste à limiter à 2 le nombre de factures autorisées entre hôpital et distributeur. Ainsi le ministère compte écarter plus de 10.000 distributeurs (80%) sous 3 ans. Mais il y a loin de la coupe aux lèvres. Même les laboratoires étrangers, avec leurs 20.000 vendeurs, arrosent les hôpitaux pour s’assurer leur part des prescriptions. En 2014, GSK écopait de 385.000$ d’amende pour ce fait. Les 1ères victimes de ces pratiques sont évidemment les patients, dont les prescriptions sont redondantes, superflues, et toujours surfacturées.
De ce fait, en 2015, dans l’addition de santé nationale, le poste radios+ analyses+médicaments pesait 66%, le double des opérations, consultations et diagnostics (34%). Mais cette inflation des coûts imposait un coup d’arrêt à l’achat de médicaments, dont la courbe faiblissait à la longue, passant de +20% en 2013 à +5% en 2015.
Pour faire face, l’administration multiplie les initiatives, à commencer par les laboratoires étrangers. Dès 2015, ils perdaient leur liberté de facturation et se trouvaient contraints à négocier. GSK et Astra Zeneca (AZ) du Royaume-Uni coupaient leurs prix jusqu’à 54%. Ce faisant, ils assuraient l’avenir. En produisant sur place, ils épargnaient au moins 20% des coûts par rapport à l’importation (les provinces les aidaient à s’installer en leur offrant terrain, énergie, fiscalité). Et surtout, ils entraient par la grande porte dans la liste des médicaments publics, composée paritairement de remèdes locaux (1238) et étrangers (1297). Créée en 2009 avec 300 titres, la liste vient d’être élargie de 15%, passant à 2535 articles. GSK fait rentrer son Viread (Hépatite B) ; AZ et Eli Lilly (USA) placent 4 molécules contre cancer et diabète ; Pfizer fait entrer son Caduet contre la tension artérielle. En « récompense » de leur remise, ces nouveaux entrants se voient assurer une hausse statistique de leurs ventes de 50% dans les années à venir. D’autres labos étrangers vont importer leurs produits phares : Sanofi (France) placera d’ici 2025, cinq de ses traitements anti-diabète, antiarthrite et antiasthmatique.
Convaincus de l’urgence d’être en position de force sur ce dernier marché au monde encore en croissance, une demi-douzaine de groupes (Bayer AG, Merck, Roche…) montent des usines à plus de 100 millions de $ pièce – le pays compte déjà 49 usines opérées par 38 multinationales, et 30 centres R&D. Le suisse Novartis est en tête, avec son centre de R&D en construction à un milliard de $, qui développera des versions spécialement adaptées à la société chinoise de ses remèdes anticancéreux et anti-hépatiques. Afin de réduire le temps de latence pour l’introduction de molécules étrangères, l’Etat prépare aussi une reconnaissance de certification européenne ou américaine, évitant 5 à 8 ans de tests redondants sur sol chinois.
Côté laboratoires locaux aussi, l’heure est au réveil, au décollage, pour les plus grands. Sous l’action de la CFDA et de la NDRC (le super ministère de l’économie), un plan national prétend obtenir d’ici 2020 la certification en Occident de 3 à 5 molécules purement chinoises et de 200 génériques – 50 sont déjà en phase de tests hors frontières. Une telle démarche vise à fournir en Occident une pharmacopée conventionnelle de qualité à prix cassés. Le pari est risqué, selon Chen Baiping, directeur général au Boston Consulting Group : tout dépendra du prix (qui doit rester rémunérateur) et du degré d’acceptation d’un médicament « made in China » par le patient européen.
En tout cas, en Chine, les expatriés semblent avoir déjà fait leur choix. Nombre d’entre eux quittent leurs groupes euro-américains, débauchés par des compagnies chinoises aux dents longues, telles Fosun (Shanghai), NBP (Shijiazhuang) ou Yibai (Guizhou) – confiants dans les perspectives de succès de ces nouveaux employeurs.
La Chine ne manque pas de clones de Wikipedia, l’encyclopédie gratuite en ligne, où auteurs et lecteurs ne font qu’un. Outre la version chinoise du collectif (980.000 entrées), coexistent Baidu Baike (14 millions), Qihoo 360 (30 millions) et Baike.com (16 millions, lequel accepte de fréquents publipostages, contre rémunération).
Sous l’égide de l’Académie des Sciences (CAS) doit paraître d’ici 2018 un nouvel avatar, annoncé par son rédacteur en chef Yang Muzhi comme une « Grande Muraille de la culture ». Le choix du qualificatif est reflet d’un concept sous cloche et centripète – en culture mandarine, il évoque la protection d’un univers chinois bien ordonné, contre un monde extérieur barbare.
Il s’agit en fait d’une 3ème édition, cette fois-ci digitale, de l’Encyclopedia Sinica. Affichant une haute ambition, Yang compte bien la voir dépasser le « rival » Wikipedia, à qui il reproche de « laisser n’importe qui toucher au contenu », ce qu’il trouve « plutôt dérangeant ».
Pour créer cet outil d’élite, la CAS rémunère 20.000 universitaires, qui devront respecter ses règles : refléter le monde au travers le prisme du régime. 300.000 articles de 1000 signes sont commandés. Le produit de masse dans lequel la Chine investit, sera donc l’antithèse de Wikipedia : émanation du système et non du monde, dirigée et non libre, nationale et non-universelle.
L’entreprise coûtera des centaines de millions de $ – tirés du budget en milliards de $ du « soft power », dans le même esprit que les Instituts Confucius et les chaînes de TV chinoises multilingues à travers le monde.
Mais y-a-t-il un marché pour un tel ouvrage qui vise (dixit M. Yang) à « guider et diriger le public et la société » ? Les Chinois, jeunes en particulier, auront-ils envie de se laisser « guider et diriger », quand ils chercheront des données pour s’instruire ? Un compendium censuré est-il bien la meilleure chance pour la recherche chinoise à long terme, face à une recherche mondiale qui elle, aura accès à un savoir-libre et sans œillères ?
Paradoxalement, cette Encyclopedia Sinica était née dans les camps des années ‘70 : les savants emprisonnés avaient voulu y ancrer le souvenir de la Révolution Culturelle et en empêcher le retour. La première édition était parue en 1993, 74 volumes—mais bridée.
Enfin, pour réserver un marché à ce pesant ouvrage, la Chine devra t-elle censurer les autres encyclopédies ? L’avenir le dira.
Chaque année depuis 9 ans, le Bureau National des Statistiques s’astreint à suivre 237.000 travailleurs migrants (民工, míngōng), dans leur périple à travers Chine. Or, ce travail de bénédictin finit par valoir de l’or, en permettant de tracer un portrait affiné des destins de ces centaines de millions d’âmes déracinées.
Première découverte : cet exode rural touche à sa fin. En 2016, les 282 millions de migrants n’ont augmenté que de 1,5% au total.
Dans cette transhumance du travail, l’homme représente 65,5%. Mais la femme s’émancipe : elles sont 0,9% plus nombreuses qu’en 2015.
Vers les villes côtières, le contingent décroît de 0,3%, (-500.000 migrants) – 5ème baisse annuelle successive. C’est la conséquence nette des efforts des métropoles pour tenir les migrants au loin. C’est un signe sans appel de fin de cycle. Le migrant préfère un emploi plus proche de chez lui en raison de la possibilité offerte : les usines commencent à délocaliser dans les provinces du Centre et de l’Ouest, et attiraient ainsi 7,9% migrants de plus en 2016.
Mais à cette raison s’en ajoute une autre : les migrants vieillissent. Ils ont 39 ans en moyenne, 6 mois de plus que l’an passé. Ainsi, pour la première fois, les moins de 30 ans ne pèsent plus que la moitié de la cohorte (49,7%), et les quinquagénaires (et +) croissent rapidement, comptant pour 19% du total (contre 14% il y a cinq ans).
Le type d’emploi change aussi : 30,5% vont toujours en usine et 19,7% sur les chantiers, mais de plus en plus, quittent les chaînes de production pour les services—comme caissiers, manutentionnaires ou livreurs. Conséquence de la pénurie de bras, les salaires grimpent (3275¥ contre 3072¥ deux ans plus tôt), mais la hausse s’infléchit, +6,6% face aux +7,2% de 2015. Il y a moins d’impayés. La durée moyenne de travail est de 8,5 heures par jour.
Revers de la médaille, sous l’impact de la crise, les métiers des migrants se précarisent : en dépit de la loi du travail, le nombre de sans-con-trats est en augmentation, suggérant une explosion des jobs au noir, taillables et corvéables à merci.
Enfin, ce migrant trouve (trop) lentement les moyens de matérialiser son rêve de sédentarisation. En 2016, 18% (contre 17% en 2015) ont pu obtenir un prêt leur permettant d’accéder à la dignité de propriétaire—nouveau destin en perspective, et tremplin pour leurs enfants.
En novembre 2014 à l’aéroport de Wuhan, un douanier, sondant un colis en partance, repéra un kilo de « sels de bain » qui n’en avait pas l’air, avec sa couleur jaunâtre. Mélangé dans l’eau tiède, il ne se dissolvait, ni n’émanait l’arôme d’un bon et honnête sel de douche. Avec ses collègues, ils passèrent toute la moisson du jour au peigne fin, et découvrirent 8 autres colis, 12 kg de substances suspectes à destination du Canada, de l’Australie, de la Nouvelle Zélande. Les adresses d’envoyeurs étaient fantaisistes, tout comme celles de destinations – des boites postales anonymes. Les étiquettes d’envoi prétendaient contenir des « lessives», « sels industriels » ou « échantillons ». La couleur des poudres variait d’un blanc cassé à un jaune fané.
S’étant vu confier les colis, la police scientifique de Wuhan mit des mois à identifier les mystérieuses substances—en vain. Elles résistaient à tous leurs tests, et pour cause : c’étaient des molécules de synthèse, dernière génération, à laquelle ces policiers n’avaient pas été formés. Tout cela exacerbait le flair des limiers : ils dépêchèrent les lots suspects à Pékin, au meilleur centre de recherche narcotique du pays.
Alors, l’analyse put enfin avancer. En juin 2015, 13 mois après leur découverte, furent identifiés 5 psychotropes parmi les plus puissants, substances hallucinogènes bannies sur sol chinois, dont certaines pouvant causer péril mortel.
A Wuhan, l’identification de la filière par la brigade des stup’ avait été plus rapide. L’épluchage de l’historique des colis, la liste des destinataires anglo-saxons, le cercle des bureaux de poste utilisés, le filage des allées et venues, ainsi que la mise sur écoute, avaient permis de repérer un laboratoire du quartier de Jingxia. Dûment consultés, les indics avaient aussi fait leur part : selon leurs infos, une bande florissante, très technique et bien organisée, était installée depuis quelques années dans le quartier. De plus, des rivalités internes étaient en train d’émerger entre un certain Zhang, le « cerveau », et son cousin Yang, qui essayait de le doubler…
Avec tous ces indices, l’identité de Zhang fut vite dévoilée. Les policiers tombèrent des nues lorsqu’ils découvrirent qu’il n’était autre que l’honorable professeur Zhang de l’université de chimie de Wuhan.
Rien que de mars à novembre 2014, selon l’enquête, Zhang, ses cousins Yang et Feng, son doctorant Bao et quatre hommes de main, avaient produit et écoulé à l’étranger 193 kg de stupéfiants. Derrière ses béchers, serpentins et éprouvettes, Zhang, le professeur, tenait le rôle formel de conseiller technique. Yang, 38 ans, était le gérant des commandes et surtout des bénéfices ; Feng tenait la compta et s’approvisionnait à l’autre bout du pays pour les produits de base ; Bao renouvelait l’éventail des drogues, qu’il développait sans cesse afin de brouiller les pistes de leur commerce illicite à travers le monde : il avait recréé près de 50 molécules dérivées de la méthylone, substitut classique de la MDMA et de l’ecstasy.
Une fois ces échantillons identifiés, il n’y avait plus de raison de différer le coup de filet. Celui-ci eut lieu le 17 juin 2017, journée choisie parce que tous les malfrats, on le savait grâce à des « taupes », se réuniraient dans l’entrepôt. Ce mardi donc, les huit complices furent faits comme des rats, en possession d’une vingtaine de kilos de came et de neuf colis prêts à partir.
Le réseau était alors démantelé. Il n’y avait plus d’urgence à accélérer l’action judiciaire. Les deux procès n’advinrent respectivement que 30 et 34 mois plus tard, durant lesquels les truands moisirent au fond de leurs geôles, méditant sur leurs crimes.
Le 17 avril 2017, l’ex-professeur Zhang reçut la prison à vie. Yang, le cousin, écopa de la peine capitale—une peine théoriquement plus sévère(justifiée par son rôle à la tête de l’entreprise), mais assorti d’un sursis de 2 ans. S’il se tient bien, cela reviendra à la même perpétuité que Zhang. Feng et Bao eux, passeront 15 ans à l’ombre, assortis de la confiscation de leurs biens mal-acquis et d’une amende de 80.000 yuans chacun.
Aucune peine de mort donc, ce qui a de quoi surprendre ! En Chine, il est rare d’être épargné pour ce type de délit et son volume—suffisant en 12 ans, pour droguer des dizaines de millions de demandeurs de paradis artificiels. La mansuétude du tribunal, fut peut-être liée à la récupération par le fisc des dizaines de millions de yuans de profits, ainsi qu’au train de vie curieusement modeste mené durant toute la période par les hommes de la bande.
Quelle morale tirer de cette tentation maudite, de ces vies brisées ? A la question posée par un journaliste, au parloir de la prison, le professeur déchu fit cette réponse d’une logique toute cartésienne : « ayant perdu la liberté sans espoir de retour, je ne puis éprouver autre chose que du remords ». Il aurait pu ajouter le précepte bouddhiste : « au temps du banquet (du vice et de la luxure), suit celui du remède » (de la pénitence, de la purification), 吃后悔药 (chī hòu huǐ yào). Mais connaissant le personnage et son amoralité endurcie, on peut s’imaginer un autre état d’esprit – sans regret pour ses actes passés, et où la seule douleur est celle de s’être fait pincer ! Zhang vit sans doute dans le regret de ne pas avoir eu la lucidité de savoir s’arrêter lorsqu’il était encore temps—accro à ce jeu dangereux qui finit par le mener à sa perte !
7-10 mai, Shanghai : WOODMAC / WOODBUILD China : Salon international de l’industrie forestière et de l’industrie du bois
9-13 mai, Pékin : CHINA PRINT, Salon international des technologies de l’imprimerie
10-11 mai, Suzhou : CHINABIO PARTNERING FORUM, Forum et exposition des nouvelles technologies en Chine, des industries biotechnologiques et pharmaceutiques
10-12 mai, Shanghai : IF&GIS, Forum sur le thème « Fusion des informations et systèmes d’information géographique »
10-13 mai, Shanghai : BAKERY China, Salon international de la boulangerie et pâtisserie
12-14 mai, Canton : Asia Pool & Spa Expo, Salon international dédié aux saunas, spa et piscines
12-14 mai, Canton : STEEL BUILD, Salon international de la construction en acier et des matériaux de constructions métalliques
14-15 mai, Pékin : Conférence OBOR « One Belt, One Road », réunissant 28 chefs d’Etat ou de gouvernement