Le Vent de la Chine Numéro 12 (2016)

du 27 mars au 16 avril 2016

Editorial : 13ème Plan – Une première pierre de l’écologie chinoise

Fin 2015, le maire de Hefei (7 millions d’habitants) dans la province de l’Anhui eut à prendre une décision difficile : faute de pouvoir atteindre autrement les objectifs environnementaux annuels fixés par Pékin, il dut faire fermer une grosse centrale thermique du périmètre urbain, quitte à recaser 5000 employés. C’est ainsi que, la propreté de l’air, de l’eau et du sol, est devenue la priorité.

Le 13ème Plan reflète ce nouvel impératif. D’ici 2020, Li Keqiang, le Premier ministre, veut avoir rétabli dans 338 villes une qualité d’air satisfaisante, au moins 80% du temps. Les émissions industrielles de particules fines dans l’air (jusqu’à 2,5µ) auront dû baisser de 25% – c’est la 1ère fois que ce critère entre dans un plan quinquennal. Pour 2020, en « intensité par point de PIB », la consommation d’eau devra avoir baissé de 23%, celle de charbon de 18%, celle d’énergie de 15% (et de 50% par rapport à 2005). Pour atteindre ces objectifs, des moyens colossaux seront mis en œuvre : démantèlement de vieilles unités, révision des prix et taxes de ces « commodities », marché carbone, irrigation économe… L’énergie solaire doit tripler à 150 GW. Elle fait aujourd’hui 43 GW, 70% de la planète. Le parc éolien doit atteindre 250 GW en 2020, le nucléaire, 58 GW.

C’est surtout l’esprit de gouvernance qui change : les objectifs chiffrés aux cadres disparaissent (trop contournables), remplacés par des plans par type de pollution (« air », « eau » et « sol ») combinant tous les outils, à commencer par la responsabilisation de tous les cadres. Fort de sa loi environnementale révisée, le ministère frappe plus dur les usines fraudeuses, ou les cadres qui les couvrent : il lance une enquête pour une amende trop légère (603¥) contre une usine de Gaoyou (Jiangsu) ayant déversé des effluents non retraités. 

D’ici 2020, les forêts auront reconquis 23% du territoire—la tendance est déjà engagée, avec 160.000 km² de frondaisons regagnées depuis 2006. Chaque province prépare un centre de recyclage de déchets dangereux pour éradiquer l’épandage sauvage. Des millions de foyers ruraux passeront à des moyens de chauffage (plus) propres, écartant le charbon azoté et soufré : d’ici 2017, le Hebei remplacera 90% des vieux poêles. Il lui en coûtera de lourdes subventions en combustibles au paysan pour éviter qu’il ne revienne rapidement au charbon polluant. Toujours d’ici 2020, le Hebei veut aussi avoir fermé 240 aciéries sur 400 (un million d’emplois). 

Concernant le carburant automobile, après des décennies de complaisance envers ses compagnies pétrolières, la Chine s’apprête à opter pour les standards californiens, les plus stricts. Le scandale des moteurs trafiqués de VW l’ont convaincu d’abandonner les normes européennes, dites trop permissives. En 5 ans, en outre, après déploiement d’un réseau de recharge et d’une nouvelle génération de véhicules hybrides, l’automobile électrique doit conquérir des parts de marché. 

Déjà 1er mondial avec 19.000 km de voies, le TGV chinois passera en 2020 à 30.000 km, et le chemin de fer classique à 120.000 km, pour un transport moins polluant que celui par route. 

De tous ces efforts, quelle conclusion tirer ? L’environnement en Chine, cesse d’être un concept philosophique pour entrer dans les mœurs, et l’ère de la réalisation. Devenu 1a priorité, il n’a plus qu’un rival : l’ emploi. Pouvoirs centraux et locaux doivent désormais les faire coexister en bonne intelligence, pour réparer un cadre de vie profondément dégradé, où tout est à réinventer. Mais la Chine semble n’être jamais si à l’aise qu’en se confrontant à ce genre de défi urgent.


Diplomatie : Chine-Asie – palabres et étincelles

En Chine du 20 au 26 mars, le Premier Ministre du Népal KP. Sharma Oli arrivait avec de grands espoirs pour son pays, vu la myriade d’offres préparée par son hôte. Le Népal est pour la Chine une nouvelle frontière. Ce petit Etat himalayen, parmi les plus pauvres du monde, totalement enclavé, est jusqu’ici dépendant de l’Inde. Mais la Chine pourrait, tout en développant le Népal, se servir du pays comme base arrière et tremplin pour le marché indien. 

Li Keqiang proposa jusqu’à 1,8 million de tonnes de pétrole (33% des besoins), un terminal pétrolier sur sol népalais et une coopération en exploration d’hydrocarbures. Il offrit aussi deux lignes ferrées (Est-Ouest, et Nord-Sud vers la Chine), et le port Canton pour délester celui de Calcutta, engorgé. Le tout serait couronné par un traité de libre-échange. Toutes ces offres font hausser les sourcils, vu le relief montagneux et les 3000 km de routes souvent mauvaises jusqu’à Canton. Mais la technologie et l’investissement chinois peuvent « déplacer les montagnes »… 

Autres négociations régionales : le 23 mars, se tenait à Hainan le 1er sommet du Mékong, entre Chine et autres pays riverains (Birmanie, Laos, Thaïlande, Cambodge, Vietnam).
Il s’agissait de relancer des liens abîmés par divers contentieux.
Sur ce fleuve issu du Tibet, la Chine a lancé des barrages sans l’accord des voisins en aval, qui souffrent à présent de sécheresse…
La Birmanie a gelé le chantier chinois du barrage de Myitsone (3,6 milliards de $), essentiellement par rejet des populations locales…
Le Vietnam s’irrite de la percée chinoise en mer de Chine du Sud…
Le Laos voit sur sa route Chine-Thaïlande, des agressions contre le trafic chinois en transit…

Cependant pour amadouer ses hôtes, la Chine avait libéré le flux du Mékong pour 25 jours, et apportait 10 milliards d’€ en prêts et dons pour projets industriels ou sociaux. Parmi ceux-ci figuraient deux lignes ferroviaires via Laos et Thaïlande, devant à l’avenir relier Singapour.
Surtout, comme pour le Népal, la Chine cherchait à lier ses voisins en une plateforme de coopération, via le concept mi-commercial, mi-diplomatique de « Une ceinture, une route ».
Un paramètre vital était bien présent, clé de toutes les relations dans la région—le contrôle de l’eau : le sommet convint de créer un centre de la ressource aquatique, afin de réguler la planification et la gestion des barrages, contre les crues, et les sécheresses du fleuve commun. 

Cependant, pour bonifier et positiver les relations régionales, la Chine devra faire bien plus : reste le toujours plus lourd contentieux en mer de Chine du Sud. L’incident survenu au large des îles Natuna (Indonésie) marque peut-être un tournant dans ce conflit international (cf carte).
Détectant un chalutier chinois dans sa Zone Exclusive Economique (à moins de 200 milles de ses côtes, selon la Charte de l’ONU du droit de la mer), un garde-côte indonésien l’arraisonnait le 20 mars, emprisonnant à son bord 8 des 32 marins et le tractant vers un port de la côte. Mais en route, dans ses eaux, il était attaqué par un aviso chinois qui libérait le chalutier, au mépris de sa souveraineté. Ensuite, Pékin l’accuserait d’avoir « molesté » son chalutier dans une « zone de pêche traditionnelle ».
Jusqu’alors J. Widodo le Président indonésien cherchait à éviter tout conflit avec Pékin, à « ramer entre les deux récifs » chinois et américain, à équidistance entre eux.
Mais cette fois, il a dû changer de position, forcé par son opinion. Susi Pudjiastuti, la ministre de la Pêche, a convoqué un chargé d’affaires de Chine, l’accusant d’avoir « saboté » l’effort de son pays, d’accommodement avec les six parties en litige : Vietnam, Malaisie, Indonésie, Philippines, Taiwan et Brunei.
Cette explosion de colère, selon les sources, était aussi due à une vision plus claire, depuis Jakarta, des intentions chinoises : l’occupation d’atolls dans les Spratley, l’installation de missiles dans les Paracels, le blocus de pêcheurs philippins en route vers l’atoll Scarborough, et cette non reconnaissance des eaux territoriales indonésiennes…
On voit donc ici l’Indonésie, ce pays de 250 millions d’âmes, (le plus grand pays de l’ASEAN, et du monde islamique) s’arracher à sa passivité habituelle pour dénoncer Pékin. Fait inouï : quelques heures après l’incident, un haut cadre chinois appela Jakarta pour « supplier » de taire le clash, entre « régimes amis ». Ce fut refusé, car l’Indonésie, ici, a trop à perdre, à savoir le rêve de Widodo : faire de son pays une puissance « pivot » maritime, en faisant respecter sa loi sur son immense territoire marin autour de ses 17.000 îles. 

A présent, Widodo doit choisir :
– porter plainte, comme Mme Pudjiastuti l’a menacé, auprès de la cour de la Haye (les Philippines l’ont déjà fait, et le Japon l’envisage),
– renforcer sa défense maritime avec l’aide de l’Inde, l’Australie, le Japon,
– ou enterrer l’incident, au risque d’une forte baisse de popularité, et sans garantie que la Chine respecte davantage son patrimoine maritime.

On en est là : le fléau de la balance peut retomber en les deux sens. Les diplomaties de toute la région travaillent jour et nuit, chauffées à blanc.
Enfin, si l’Indonésie insiste dans la défense de ses droits, la marine de l’APL pourra peut-être avoir l’impression d’avoir reproduit sans le vouloir, le remake du célèbre scénario de l’US-Army en l’Allemagne de 1944 : d’avoir franchi « un pont trop loin ».


Politique : La garde rapprochée de Xi Jinping

Depuis son arrivée au pouvoir fin 2012, un effort constant de Xi Jinping a consisté à s’entourer d’une garde rapprochée de cadres loyaux à tous les postes-clé. Ils sont placés à l’Assemblée Nationale et au Comité Central, mais aussi dans les 22 « groupes directeurs » omnicompétents, grignotant les attributions des organes civils et du Parti. Xi crée ainsi un régime de type inédit, moins collégial que présidentiel. Le but est d’écarter ses adversaires, et faire passer ses réformes rapidement. 

Nous présentons ici quelques uns de ces fidèles, pour la plupart repérés par Xi au long de sa carrière, depuis 1980, à l’université Tsinghua, puis entre ses postes dans le Zhejiang, au Fujian et à Shanghai. Ils sont souvent jeunes (de 52 à 65 ans), publiquement déférents envers leur patron, et volontiers ombrageux (comme lui-même) envers l’Occident et sa démocratie, « le système à ne pas suivre ». 

Dans cette structure de pouvoir créée par Xi Jinping, le sommet de la pyramide, est la Sécurité publique. 
À 65 ans, Li Zhanshu est chef du personnel de Xi, membre du Politburo, patron du Bureau général du Comité Central et du groupe directeur des affaires de sécurité. Il est très ami avec Xi depuis les années ‘80 quand il dirigeait le comté de Wuji à Shijiazhuang (Hebei) tandis que Xi gérait celui de Zhengding. Li se substitue parfois en visite officielle, au ministre des Affaires étrangères, comme en Russie pour rencontrer Poutine. 

D’autres hommes à suivre dans la sécurité publique sont Wang Xiaohong, 57 ans, qui servit au Fujian sous Xi. Il est aujourd’hui vice-ministre de la Sécurité publique. Baptisé sur internet « commandeur des 9 portes » (qiu men tidu 九门提督, titre de l’époque Ming), il est aussi chef de la police de Pékin.
Fu Zhenghua, 61 ans, est un autre superflic. Devant sans doute son poste à son rôle dans le déboulonnage de Zhou Yongkang, il rapporte directement à Xi.

Meng Qingfeng, 58 ans, l’ex-chef de police de Xi au Zhejiang, est un autre n°2 à la Sécurité publique, en charge du nettoyage de la bourse.
Fang Xinghai, 51 ans, est nommé n°2 à la CSRC, tutelle de la bourse. Ancien de Stanford, il fut rappelé en Chine en 1998 par Zhou Xiaochuan, gouverneur de la Banque Centrale. 

Secrétaire du Parti au Guizhou, Chen Min’er (cf photo), un des plus jeunes fidèles de Xi (55 ans). De 2002 à 2007, il était chef de la propagande au Zhejiang sous Xi, et a publié au journal local 200 articles de son patron, qui sont aujourd’hui devenus le petit livre de la pensée du chef de l’Etat. Il semble être bien placé pour devenir son candidat à sa succession en 2022.
Il sera rival de deux autres étoiles montantes : Hu Chunhua, Secrétaire du Parti à Canton, soutenu par Hu Jintao ; et Sun Zhengcai (cf portrait), Secrétaire à Chongqing, défendu par Jia Qinglin, de l’écurie Jiang Zemin. 

Liu He, 64 ans (cf portrait), est le 1er conseiller économique de Xi, patron du groupe directeur des Affaires économiques et financières. Auteur du plan des réformes d’ici 10 ans, il fait figure d’exception parmi tous les hommes de Xi : cet homme brillant, un « Jacques Attali » chinois, conseille les Présidents depuis 20 ans, dont Jiang Zemin et Hu Jintao.
Il se trouve secondé par Shu Guozeng, ancien secrétaire de Xi, nommé depuis 2014.

Pourquoi le général Liu Yuan, à 65 ans, est-il nommé en mars n°2 du groupe finances à l’Assemblée Nationale ? Militaire, il n’a pas de compétences en ce domaine, ayant servi dans l’APL comme commissaire politique. Mais ce fils de Liu Shaoqi (successeur de Mao) a montré sa fidélité au n°1 en abattant pour corruption, les grands adversaires de Xi : les généraux Gu Junshan, Xu Caihou et Guo Boxiong, nommés par Hu Jintao. Pressenti prochain vice-président de l’ANP, Liu arriverait à ce poste aux finances pour surveiller Zhang Dejiang (cf portrait), le conservateur président de l’ANP, opposé à Xi, et pour réduire le pouvoir d’obstruction aux réformes des « petits princes » repliés dans l’enceinte parlementaire. 

Deux hommes reçoivent la charge de briser la liberté de l’internet. Futurs n°1 et n°2 du groupe directeur de la sécurité de l’internet, Xu Lin, 52 ans, et Cai Qi, 60 ans sont fidèles parmi les fidèles. Cai Qi n’appelle le n°1 du Parti que sous les vocables de « Secrétaire Général Xi Dada » (c’est-à-dire « oncle Xi »), ou « patron Xi ». 

Ex-chef de la taxation à Xiamen, He Lifeng, 61 ans, était en 1987 parmi les invités du mariage de Xi Jinping et de Peng Liyuan. Il passe vice-président de la NDRC, en charge du futur réseau intercontinental « une ceinture, une route ».

Enfin Wang Huning (cf portrait), 59 ans, autrefois professeur à Fudan (Shanghai), est l’inventeur de la théorie néoautoritaire inspirée de Singapour. Tout comme Liu He, il a aussi conseillé politiquement Jiang et Hu.

Il resterait bien des hommes à évoquer, à commencer par le plus célèbre, Wang Qishan patron de la police du Parti. Mais aussi Miao Wei, ministre des Industries de l’information, auteur du plan à 10 ans « Made in China 2025 » ; Ding Xuexiang, 53 ans, dernier entrant au cercle des fidèles, secrétaire particulier du chef de l’Etat. Chen Xi, 63 ans, est le n°2 au département de l’Organisation, à la tête de toutes promotions et nominations ; Huang Kunming est n°2 à la propagande, Chen Yixin, 56 ans, n°2 au groupe central à l’approfondissement des réformes… 

Ne nous y trompons pas, certains de ces hommes ont de bonnes chances de tenir la Chine, y compris au sommet, dans les dix prochaines années.


Société : Jericho en Chine, ou « casser les murailles »

Le 21 février, l’Etat publia une directive choc : à travers le pays, les « résidences murées » devraient « graduellement s’ouvrir, et les voies privées se raccorder au réseau public ». C’était la décision d’un meeting national d’urbanisme de décembre, premier du genre depuis 1970. L’annonce provoqua une levée de boucliers : le soir même, 85.000 internautes votaient sur sina.com, dont 75% « contre ». 

Cette décision partait d’un besoin, celui d’« épargner l’espace et réagencer le trafic (routier) ». D’autres arguments contre les « cités murées » n’étaient pas cités par le rapport public, comme le besoin de ranimer une vie de quartier (des marchés, des boutiques, des parcs), celui de relancer les échanges entre voisins, ou la nostalgie des passages et galeries qui font le charme de villes comme Paris ou Londres.

Si les habitants s’insurgent contre ce principe, c’est d’abord qu’ils n’ont pas été consultés. Appréciant la sécurité créée par leurs murs, ils ne veulent pas la perdre. Fin des années 2000, 10 résidences pékinoises, juste murées, ont vu reculer de 85% la délinquance, selon le ministère de la Sécurité publique. Une autre objection concerne la propriété : ayant payé pour la création de leurs parcs et voies privées, les résidents s’en considèrent propriétaires. 

De plus, le modèle est historique : le socialisme a introduit ce type de résidence en Chine : après 1949, il fallait offrir aux apparatchiks des « murs rouges », pour une vie meilleure, plus d’espace et d’intimité. 

Fin des années ‘80, on recensait 25.000 résidences murées à Pékin, et à Shanghai et Canton, elles représentent 80% du logement bâti depuis les années ’90. La classe moyenne plébiscite la formule, comme symbole d’ascension sociale et d’espace de liberté privée…Ainsi la remise en question de l’espace urbain chinois, s’accompagne d’une forte charge émotionnelle. 

Parmi les contre-propositions qui circulent, l’une est de scinder les résidences géantes du Nord du pays (qui dépassent souvent 50 hectares, contrairement à celles du Sud, Shanghai y compris) et de rendre leur voirie à la circulation. L’autre suggère d’attendre l’issue des 70 ans de durée de vie des titres de propriété, pour changer les règles, une fois révolu le droit d’utilisation du sol.


Santé : Le vaccin était mauvais

Vers 2008, Mme Pang, pharmacienne en hôpital à Heze (Shandong), tenait aussi une clinique de vaccination privée, mais sans licence. Une erreur qui lui valut en 2009, 3 ans de prison avec sursis. Pang récidiva : en 2014, elle fut ré-arrêtée après avoir réalisé 38 millions d’€ de ventes, par son réseau de 300 commerciaux à travers 24 provinces, vendant « au noir » 25 vaccins pour enfants et adultes. Elle était l’intermédiaire entre –au moins– 29 producteurs ou grossistes et 16 centres très officiels de vaccination… Des centaines de milliers d’injections ont pu avoir lieu : 20.000 doses ont été confisquées ces derniers jours.

Seulement, Pang reprenait les lots quasi-périmés de 13 grossistes, et leur transport aux soins de la firme Huaxia Dezhong (Pékin) se faisait à température ambiante. De ce fait, les vaccins perdaient leur efficacité, et les patients se croyaient à tort immunisés. Comment l’affaire fut-elle éventée ? On l’ignore…soit par dénonciation, soit suite à des plaintes de patients, infectés d’un virus contre lequel ils étaient vaccinés.

Une deuxième facette du scandale, tient aux autorités, qui tardèrent fortement à réagir. Pang avait été arrêtée en avril 2015, en même temps que sa fille médecin, complice. Puis la police de Jinan (Shandong) mit 10 mois à contacter 20 provinces, par courrier administratif, tandis que la FDA, Administration de la qualité des aliments et médicaments, restait coite. 

En février 2016, le scandale éclate enfin : les autorités multiplient alors actions et déclarations pour enrayer l’affaire. Depuis, trois laboratoires ont vu leur licence retirée, et 130 comparses arrêtés dans des dizaines d’agences ou entreprises, conformément à la promesse de Li Keqiang, le 22 mars, que « tous les coupables seraient punis, et la chaine de production et distribution, révisée ». 

Dès maintenant émerge une faille systémique, comme dans l’affaire du lait contaminé qui avait ébranlé le pays en 2008. Parmi les groupes épinglés figure Hebei Weifang, firme d’Etat liée au CDC (Centre de Prévention épidémiologique) de sa province. Mme Pang disposait à l’évidence de protections, ayant pu échapper à la prison en 2009, et son réseau ayant fonctionné jusqu’en janvier dernier. Quant à Huaxia Dezhong, il avait déjà trempé en 2010 dans un autre scandale : dans le Shanxi, 100 enfants décédaient ou restaient handicapés suite aux vaccinations. Mais la firme avait échappé à la fermeture -jusqu’à ce jour. Le fait que ses deux patrons aient été employés du CDC du Hebei – l’un d’eux étant aussi à la tête de Weifang– peut aider à expliquer la longévité du groupe, et la mansuétude dont Pang avait longuement bénéficié.


Petit Peuple : Chengdu – Chen Gang, marieur blanc (2ème partie)

Résumé de la 1ère partie : Depuis son enfance à Chengdu, Chen Gang, sans en avoir la fortune, vit en dandy, passant chaque matin des heures à s’attifer et composer sa tenue selon son humeur. A 25 ans, chômeur, il n’est pas un acharné du travail. Une nuit de janvier 2010, dans un bar, il est approché par une jeune femme, Xiaohua, qui bavarde avec lui durant des heures. Se doutant d’une aventure, sans soupçonner laquelle, il se prête au jeu : à 3 heures du matin, à l’heure de la fermeture, elle va lui faire une demande extraordinaire…

Chen Gang ne voudrait-il pas la raccompagner, non pas chez elle, mais à son village natal, au fin fond du Yunnan pour les fêtes du Nouvel an chinois (Chunjie), en jouant le rôle de son fiancé ? Ce ne serait que pour une semaine et elle paierait tout, salaire (3000 ¥ au bas mot, belle somme pour l’époque), un costume et une paire de chaussures neuves ! Sans compter le train couchette molle et tous frais de route. Tout ceci, cela va sans dire, sans le moindre engagement de sa part, en tout bien tout honneur. Son rôle se limiterait à jouer le parfait futur gendre

Il la dévisagea incrédule, mais déjà un sourire de connivence aux lèvres… La proposition lui était sympathique, il y avait du jeu, de l’incorrect, mais aussi de l’entraide, et au fond rien d’illégal. En plus, notre jeune était ces derniers temps désargenté au point que plus personne n’acceptait de lui prêter de l’argent. C’était donc une bonne affaire sous tout rapport, qui lui était offerte !
Il accepta donc cette proposition insolite, sans y réfléchir à deux fois.

Les détails furent simples et hilarants : Xiaohua et lui inventèrent et répétèrent tous les détails de leur soi-disant romance. Son nom emprunté, l’histoire de leur rencontre (en vacances sur une plage, en Thaïlande), le nom du futur bébé. 

Arrivé chez les parents, près de Baoshan, fringant dans son costume cintré couleur perle et son foulard gris à chevrons, Chen était impeccable. Durant une semaine, il bavarda avec les parents, offrit de mettre la table, se proposa pour rouler la pâte des jiaozi (raviolis traditionnels). Il mit oncles et tantes à l’aise, leur contant les potins de Chengdu, et sachant se taire à temps pour écouter les récits des rhumatismes de ses interlocuteurs. Face à sa « promise », il maintint une attitude attentionnée, presque tendre, mais prenant soin de ne jamais s’oublier à un geste déplacé – un contrat est un contrat. 

Au moment du départ, ne se tenant plus de joie, les parents de Xiaohua firent une accolade émue à celui qu’ils voyaient comme imminent gendre. Ils s’illusionnaient que Xiaohua ne finirait pas vieille fille sans enfant, qu’un beau petit héritier potelé allait bientôt tomber du ciel, lumière douce de l’automne de leur vie. 

Chen et Xiaohua regagnèrent Chengdu par le train, puis se séparèrent bons amis, lui pour sa chambrette chez ses parents, elle pour son loft et son travail d’assistante de production cinématographique. L’aventure lui avait certes coûté « un bras », mais pour une année de gagnée face à ses parents et à leur exigence de noces et d’héritiers, c’était donné ! 

Pourtant, trois jours plus tard, elle le rappelait pour Dandan, une bonne amie dans le même besoin urgent de fiancé. En moins de temps qu’il ne fallut pour inventer une légende, Chen repartait, et rejouait le beau-fils face à un couple de parents aux anges. Il remarqua qu’il était de plus en plus à l’aise dans ce rôle. 

Son premier vrai mariage blanc, Chen le passa en 2014, avec une fille de Qingdao (Shandong). Celle-là n’en était pas à son coup d’essai, et les parents, échaudés, exigeaient cette fois une union officielle, sous leurs yeux. Il faudrait donc d’abord se présenter à la famille pour s’en faire agréer. Désormais, le tarif de Chen était de 1000 yuans par jour, et en quinze jours chez les beaux-parents, à choisir restaurant, banquet et convives, cela représentait un joli petit pactole !

Après les noces, de retour à Chengdu, le divorce leur avait pris 10 minutes au bureau municipal, moyennant paiement d’une taxe de 10 yuans. Chen depuis longtemps, avait fait son gagne-pain de ses multiples fausses fiançailles, lui permettant de s’installer enfin dans un chez-lui. C’est au mur de son salon qu’il suspendit, encadré, son premier certificat matrimonial ! 

Pour Chen, la prochaine étape de consiste à créer une agence de mariages et fiançailles fictives. Le marché est énorme, laissant entrevoir une Chine de demain avec des mariages de plus en plus tard, où la femme aura pris en main son destin. Chen le constate, la demande culmine lors du Chunjie, de la part de jeunes trop occupés par leur vie professionnelle pour rechercher l’âme sœur, ou manquant de courage pour avouer aux parents leur homosexualité. 

Chen est sûr, avec ce métier, d’avoir fait le bon choix. La preuve : à son propre père, l’an dernier, il a ramené une fausse fiancée, et ce dernier qui ne lui adressait plus la parole, s’est depuis remis à lui parler ! 

Parfois, la nuit au fond de son lit, il se demande : que se passera-t-il, quand les parents finiront par deviner qu’ils ont été roulés ? Et en mettant cette fraude à portée de toute une génération, Chen n’est-il pas en train d’enterrer des millénaires de culture confucéenne, oppressante, mais glorieuse ? Mais bientôt, Chen se rassérène, se disant qu’il ne peut à lui seul porter sur ses épaules le destin de la Chine: en préservant la liberté de tant de jeunes, il « supporte à lui seul leur univers » (一柱擎天), face à des parents aux conceptions étriquées, ne comprenant rien à leurs attentes et rêves !


Rendez-vous : Semaine du 28 mars au 10 avril 2016
Semaine du 28 mars au 10 avril 2016

25-27 mars, Pékin China MED : Salon des équipements et instruments médicaux

29-31 mars, Pékin : China Maritime Beijing, Salon international des technologies et équipements offshore

29-31 mars, Pékin : CIPE, CIPPE, Salons des équipements pour pipeline, stockage et transport de pétrole et gaz, et des technologies pétrochimiques et équipements

29-31 mars, Pékin : CISSE, Salon international des services de l’industrie navale

29-31 mars, Pékin : CLEAN ENERGY Expo, Salon et Conférence sur les énergies renouvelables

Intersolarasia29-31 mars, Pékin : INTERSOLAR Asia, Salon international des technologies solaires

29 mars – 1er avril : Shanghai ECOBUILD, Salon de la construction écologique

29 mars – 1er avril : Shanghai, EXPO FINEFOOD Shanghai, Salon de l’agro-alimentaire destinéàs l’industrie hôtelière

29 mars – 1er avril : Shanghai, EXPO LIGHT, Salon de l’éclairage

29 mars – 1er avril : Shanghai, HOTELEX + DESIGN & DECO, Salon des équipements et fournitures pour hôtels

Hdeecobuildchina30 mars – 1er avril, Shanghai : POWER China, Salon des moteurs et générateurs électriques

30 mars – 1er avril, Pékin : AFE, ITE China, Salon des équipements d’agriculture, d’horticulture et des technologies d’irrigation

31 mars – 2 avril, Canton : China LAB, Salon international et Conférence sur les appareils d’analyse

7-10 avril, Shanghai : China International BOAT Show, Salon du nautisme et des yachts de luxe

7-10 avril, Shanghai : Expo LEISURE, Salon des sports, activités aquatiques et de plein air

9-11 avril, Qingdao : Qingdao RUBBER & TYRE Expo, Salon de l’industrie du caoutchouc et du pneu

11-14 avril, Pékin : CHINA GLASS, Salon international des techniques industrielles du verre

13-14 avril, Shanghai : LUXE PACK China, Salon du packaging des produits de luxe