Le Vent de la Chine Numéro 14

du 20 au 26 avril 2008

Editorial : Un nouveau nationalisme

La réaction de la rue chinoise aux manifestations parisiennes contre  la torche olympique, a surpris plus d’un.

Depuis la France, des étudiants ont appelé à boycotter Carrefour et autres intérêts français : « pas la peine », disait l’un d’eux sur le site Chinaren («homme chinois»), d’enrichir les Français. Faisons leur plutôt découvrir la puissance de la Chine » ! Samedi 19, une manifestation visait l’ambassade de France à Pékin, « protégée » par la police : avec hymne national et calicots défendant le « Tibet chinois ».

Ainsi en moins d’un mois, la vision chinoise de la France s’inverse, d’un respect amical, à une volonté de revanche—contre la France, à travers Carrefour et ses 122 hypermarchés. L’appel a connu un fort succès. D’heure en heure, le nombre d’internautes sympathisants au boycott a gonflé en millions. De façon un peu inquiétante, par la voix d’un porte-parole officiel (15/4), le pouvoir a validé ce mouvement : « la France ferait bien de se demander pourquoi le peuple chinois appelle au boycott de firmes françaises ». Sur la toile, des masses d’inconnus diffusent des détails pour justifier cette attaque : 10,7% de Carrefour seraient aux mains de Blue Capital, et donc de Bernard Arnault, PDG de LVMH, qui aurait financé le Dalai Lama. Tout comme Body Shop, filiale de L’Oréal, aussi sur la liste.

Malgré les apparences, il faut admettre que cette action est « indépendante » : l’opinion nationaliste chauffée à blanc, est l’expression véridique de la rue—comme si le régime l’avait invoquée, mais ne la contrôlait plus. Ainsi en Australie, des milliers d’étudiants chinois sont montés à Canberra «défendre» la flamme contre les « séparatistes », la « lie » et les «chiens courants » étrangers, à 10 heures d’avion de chez eux !

Cela dit, on note que l’Allemagne, les USA, le Royaume-Uni sont aussi visés par la presse chinoise. 

Mais depuis le 18/04, l’Etat inverse la vapeur, et fait appel aux citoyens pour qu’ils «canalisent» leur patriotisme vers le «développement». Traduisez: pour éviter que les choses n’aillent trop loin. Pékin veut satisfaire son aile cocardière, mais sans faire de «casse ». Carrefour, comme toutes les chaînes de grande distribution, est en Chine l’outil n°1 pour étaler dans le temps l’insupportable hausse des prix alimentaires (+25,5% en mars) : depuis janvier, leur fréquentation a augmenté de 40%. Autant pour ménager Paris (l’Union Européenne et le monde!) que pour nourrir son peuple, Pékin a effectivement tout intérêt à enrayer le dérapage. Par contre l’avertissement est net : la Chine en reste à sa ligne dure : ne permet à quiconque de lui donner des leçons, et n’est prête aujourd’hui à aucune concession.

 

 


Temps fort : Shanghai, un pont, un tunnel, records du monde

Sortant de la brume, sur les marécages de roseaux, s’étire le futur 5ème plus long pont du monde, entre les îles de Changxing et de Chongming, au large de Shanghai. 25,3 km sur mer (delta du Yangtzé), 32m de largeur, 2×4 voies, dont celle du métro, et 730m d’écart entre les deux piles centrales : un bel ouvrage!

Sur le tablier, on détaille les engins de levage permettant de placer les derniers segments manquants. Après trois ans de travaux, la fin est proche : encore deux mois pour le gros oeuvre, 18 mois pour les équipements. Vitesse maxi autorisée : 100km/h, et au-delà d’une certaine force de vent (exacerbé par les 58m d’altitude), seuls les poids lourds en charge seront admis, et même le métro sera arrêté, car trop léger ! Changement de dernière minute, suite à un accident naval à Canton dernièrement, les moules d’acier du bétonnage ont été maintenus autour des piles, en renfort. Le budget est lourd, 1,81MM$ : tel est le prix à payer pour désenclaver Shanghai vers la façade maritime nord du delta !  

Sur l’autre rive de l’île de Changxing, l’axe autoroutier et ferroviaire refranchit le delta vers Pudong. Ici, encouragé par la plus courte distance (7,5km), Shanghai a fait le choix du tunnel : notamment afin de laisser une liberté illimitée de passage des plus gros navires, profitant du tirant d’eau de 20 à 30m.

N°1 national du tunnel, la SETC (Shanghai engineering tunnel corp.) a obtenu le contrat, à charge pour elle de s’associer à un étranger permettant d’assurer sécurité et qualité, tout en tenant les délais de cette 1ère mondiale. Le diamètre, à 15,4m, constitue un record : le Français Bouygues a été retenu. Moyennant 860M$ d’investissement, la chambre souterraine loge sur 2 étages, les 3 pistes routières et le métro. Ici aussi, le chantier touche à sa fin. Au fond de leur fosse, les 2 tunneliers (gigantesques foreuses co-dessinées avec le constructeur allemand HK) grignotent les 400m restants, et les 200 anneaux de béton encore à poser. A 16m/jour, la jonction sera faite au 5/05, avec 13 mois d’avance : exploit surtout dû à 4h de maintenance quotidienne des machines. Une autre innovation consiste en la possibilité de récupérer les «taupes» une fois démontées, afin de les engager ailleurs dans le monde. 

C’est donc un succès retentissant – mais pour le constructeur français, l’avenir n’est pas assuré. Pour la SETC, Bouygues demeure un concurrent sur un marché «chasse gardée». La SETC s’est arrangée pour ne jamais conclure la JV promise, ni partager le profit commercial de cette année gagnée. Car dans le BTP, l’avance technologique occidentale ne suffit plus pour justifier l’écart des coûts. Mais ceci est une autre histoire, inquiétante, dont les pages restent à écrire !

 

 


Pol : Doha, Kyoto : la patience de l’Ouest s’use

D’Athènes : un problème en boomerang

Le 4/04, parut à Athènes le bilan d’un contrôle anti-dopage: 11 haltérophiles furent annoncés positifs, risquant l’exclusion des JO -presque toute l’équipe grecque!

Provisoirement suspendu et inculpé, l’entraîneur Chr. Iakovou se retourna contre le fournisseur de compléments diététiques shanghaïen Auspure. Pour la Chine à 4 mois des Jeux olympiques, c’était un coup dur, tant sur le plan de la qualité des produits que sur celui de la lutte anti-dopage. Elle venait de mener une campagne qui avait permis l’arrestation de 32 fabricants/distributeurs de substances anabolisantes, et se croyait ainsi à l’abri des critiques… Selon le Bureau des aliments & médicaments (15/04), Iakovou a commandé les produits par internet (se soustrayant ainsi à tout contrôle). Auspure – depuis lors interdit – opérait sans licence. Un ancien athlète de l’écurie de Iakovou accuse son ex-coach de l’avoir forcé à «charger la mule».

Sous le choc, la Chine émet (14/04) une directive d’étiquetage des aliments diététiques. Elle s’apprête à loger à demeure, au 1er mai, des inspecteurs dans les 100 usines agréées, pour vérifier la conformité des pratiques. Manifestement l’administration, inquiète, est prête à tout, pour tuer tout dérapage dans l’oeuf !

NB: Après le scandale de l’anti-coagulant héparine (62morts aux US /en Allemagne), Washington ne veut plus attendre : plutôt que tester sa marée d’imports de Chine (340MM$ en 2007), il change de stratégie pour introduire la sécurité à la source, en traitant avec l’industriel. 8 hommes de la FDA, 5 locaux, attendent le feu vert pour rejoindre leurs postes, entre Pékin, Shanghai et Canton.

Visas : politique de fermeture ?

A 100 jours des Jeux, la Chine limite les visas. Le 27/03, elle resserrait les visas « F » (business) et « L » (touristiques). Le 15/04, elle n’octroie plus les visas « L » qu’un mois à l’avance (30 jours, 1 à 2 entrées) qu’avec réservation d’avion et preuve de logis. Ce, jusqu’au 17/10. Pour ceux qui prenaient ce visa en 1 jour ou 2 à HK, la facilité disparaît s’ils viennent de 33 pays tels Malaisie, Inde, Sri Lanka, Indonésie, Népal et Turquie. Raison invoquée: les menaces terroristes sur les JO- il s’agit d’écarter les visiteurs inconnus ou à statut discutable. Mais la dégradation des relations avec l’Ouest joue aussi : c’est la tentation du pire, aussi perceptible dans les opinions des 2 bords. En Europe, les agences constatent de fortes baisses des commandes de voyages en Chine.  

NB: Exemple d’escalade, le mot injurieux sur CNN, du commentateur J. Cafferty, qui qualifia la Chine de «bande de cinglés et de voyous». Pékin exige des excuses et rejette (17/04) une 1ère tentative de justification de la chaîne (Caherty n’aurait parlé «que des leaders»). L’opinion chinoise ne peut que soutenir le régime, et sauf à donner satisfaction, une fermeture du bureau, plus une censure totale ne sont pas à exclure.

Doha, Kyoto : la patience de l’Ouest s’use

«Plus nécessaires que jamais» selon P. Lamy, Directeur général de l’OMC, les palabres de Doha, poursuivis depuis 2001 pour un cadre commercial planétaire, sont au point mort.

L’OMC (OMC: Organisation Mondiale du Commerce) propose à Pékin d’amincir à moins de 23% ses taxes d’import industriel: le 14/04, elle refuse, arguant de son statut de «membre récent» et de «PVD».

Démarche jugée inacceptable : en 2007, son excédent commercial a embelli de 48%, à 262MM$, 2d exportateur mondial devant les USA. Certes, Pékin anticipe une baisse de sa croissance à l’exportation (-11% d’excédent dès le 1ertrimestre), mais l’OMC prédit la même tendance en 2008 pour le monde entier, avec une croissance des échanges de 4,5%, 1% de moins qu’en 2007. Pékin espère être sauvée de toute concession par la revalorisation de son yuan—et  de toute manière, admet préférer, à un accord de Doha, les accords de Libre Echange qui lui assurent une position dominante sur le partenaire…                               

Même dialogue de sourds dans le multilogue  environnemental. En deux jours, les 17-18/04 à Paris, au sommet des MEM (puissances industrielles auteurs de 80% des émissions de gaz à effet de serre), la Chine s’est réfugiée derrière les USA de G.W. Bush qui pour la 1ère fois, présentait une (médiocre) offre de réduction… d’ici 2025 ! Mais là aussi, l’argument passe mal : Pékin ne peut plus nier être passé premier producteur de CO², s’apprêtant dès 2010 à rejeter 600Mt de plus qu’en 2000: de quoi neutraliser les efforts de réduction des 37 signataires du protocole de Kyoto.

Autrement dit, en négociations commerciales comme en environnementales, la stratégie chinoise arrive à son terme !

 

 


Argent : La Chine vaccinée contre les subprimes

La Chine, vaccinée contre les subprimes ?

La belle santé des banques chinoise face aux subprimes interpelle jusqu’à Zhou Xiaochuan, gouverneur de la Banque centrale. Il l’expli-que

[1] par 10 ans de restructuration, ayant permis de « contrôler et digérer» cette crise. Cette semaine par exemple, le yuan a franchi la barre des 7.00¥ pour 1$, et la CCB (China Construction Bank) alignait en 2007, 49% de profits en plus – à 9,86MM$.

[2] A l’étranger, on soulève une autre raison : le report des flux d’investissements, des USA vers la région Asie. Ainsi les 60 fonds de placement faisaient une année en or, recevant 4MM$, quadruple de l’an 2006 : épargne de Chinois s’évadant d’une bourse qui a perdu 43% depuis 2007, mais aussi d’étrangers cherchant sanctuaire, tel le DIC, fonds de Dubai qui prévoit d’investir d’ici octobre 1MM$ en Chine, dans des domaines comme l’énergie ou la santé.

[3] Une autre explication tient, selon Steven Green (StanChart), à une méthode Coué appliquée à la finance – un mensonge statistique : « avec une inflation de 8,3% en mars et une production industrielle déclinante, une croissance de 10,6% au 1er trimestre 2008 est inexplicable ».  

D’autre part, la Chine exporte désormais de l’inflation dans ses produits, et certains secteurs   sont en porte-à-faux, tel l’énergie où 70% des firmes publiques sont dans le rouge, selon la SASAC, leur tutelle (State-Owned Assets Supervision and Administration).

D’où ce rare conseil du Fonds monétaire international (FMI) aux pays d’Asie, de se ménager des « plans B », au cas où la lame financière globale finirait par les rattraper. Amasser des réserves, accélérer la concentration de la finance, surveiller les mouvements monétaires. Or, quand on observe l’action publique, miracle, c’est exactement ce que Pékin fait. Il vient de rehausser (à effet au 25/04) le taux de réserve des banques à 16% (+0,5%).Il médite d’autres hausses des taux d’intérêt, et assouplit les règlements bancaires d’achats d’assurances et de courtages. A un seul dossier, il se garde de toucher: la bourse en pleine tourmente. Afin de laisser faire la nature, enfin !

 

 


A la loupe : Crise alimentaire : la Chine se bat

La pénurie alimentaire planétaire et la flambée des prix  n’épargne pas la Chine, +21% au 1er trimestre.

Le riz par ex., a monté de 60% depuis janvier, à 22,73$ le quintal (16/04). L’IPC (Index des Prix à la Consommation) pulvérise ses records : 8,7% en février, 8,3% en mars. Merrill Lynch prévoit une hausse moyenne de 11,7% en  2008. Or la nourriture compte en Chine pour 30% du budget des ménages : cette pénurie pèse sur les pauvres, et cause des explosions de désespoir, sur laquelle la presse ne s’étend pas. Tels ces 3000 salariés de Huayun et Changsha, qui occupaient leurs usines de mécanique les 7-8/04 dans le Hunan, espérant obtenir leurs indemnités, pensions et assurances sociales.

Raisons de cette crise :

[1] le cycle mondial, où des prix déprimés depuis des ans ont découragé la production. La condition de paysan n’est pas à la mode (cf l’exode rural, 10M/an).

[2] La hausse des coûts de production n’arrange rien, tel l’engrais qui monte de 70%. Sur cette désaffection, un indice ne trompe pas : la perte en 2007 de 40.700 ha de terres arables. Même si c’est le recul « le plus faible depuis 2001 »: fruit d’une politique ferme de protection des sols cultivables. Il en restait 121,73Mha en 2007 sur les 127,6 Mha de 2001.  

[3] La sécheresse joue aussi son rôle : au 10/04, 14% des semailles sont frappées, soit 17,3Mha.

Avec l’inflation, le seuil de pauvreté reflétait de moins en moins  le nombre réel des déshérités. Avec le réajustement prochain de ce seuil, de 1067 à 1300¥, (+ 20%), leur cohorte doublera à 80M. D’autre part, la Chine rurale la plus pauvre (700M d’âmes), aurait accumulé 100MM² de dettes et donc, ne consommerait plus : constat explosif pour un régime dont la 1ère légitimité repose sur sa capacité à améliorer les conditions de vie des plus faibles.

Aussi Pékin fait feu de tout bois pour inverser la courbe, relancer la consommation, faire « halte à la vie chère ».

Heureusement, Pékin, en 2007,

–          a su convaincre l’agriculteur d’une pénurie, et donc d’une perspective de bons prix, et le paysan a planté plus: la prochaine récolte s’annonce faste.

–          Le déstockage des 150Mt de réserves de grain lui permettent de stabiliser les prix.

–      Des mesures ont été prises pour décourager l’export (-71% en janvier et février, à 673.000t).  

–      Pékin promet des hausses des aides aux faibles, tels les 20M d’étudiants les moins nantis, qui recevront 240¥/an, en plus de leurs 2000¥ actuels.

–      Enfin, le 17/04, Ding Xuedong, vice ministre des finances annonce une «accélération de l’ajustement du revenu» : plus de transferts aux régions pauvres, par le biais fiscal. Paroles qui ne sont pas chiffrées, mais pas pour autant en l’air : Wen Jiabao, Hu Jintao et leurs hommes savent que de ce défi (briser la croissance des écarts de richesse, des êtres et des régions) dépend la survie du régime.

 

 


A la loupe : Wahaha, les lentes meules de la justice chinoise

Engagé depuis 2006, le conflit entre Danone et sa filiale Wahaha rebondit.

A l’automne à Pékin, le Président français Nicolas Sarkozy avait négocié avec son homologue Hu Jintao une assistance aux deux groupes de yoghourt, eau et biscuits, devant geler les poursuites durant trois mois de trêve. Le géant européen accuse sa filiale locale à 51%, d’avoir créé jusqu’à 39 structures illégales, et de produire et écouler ses «vrais-faux produits», piratant ainsi la maison-mère.

Trois scénarios avaient été concoctés pour ces négociations :

[1] placer les actifs chinois des deux sociétés en une structure cotée en bourse,

[2] que Danone cède tout à Wahaha,

[3] ou l’inverse.

Danone favorisait la 1ère solution: chacun détiendrait 40% des 39 unités douteuses (Wahaha devait défrayer Danone de 7MM$), les 20% restants allant en bourse.

Or, la limite du 10/04 est passée sans accord : à peine l’échec prononcé, la revue financière privée Caijing dévoile (14-04) la mi-se en examen fiscal « depuis août » de Zong Qinghou, le PDG de Wahaha. A Hangzhou, siège de Wahaha, les impôts accusent ce 23ème milliardaire chinois d’évasion de 300M¥ d’impôts (43M$) depuis 1996. Avec l’aplomb qui fait sa « marque de fabrique », Zong déclare que la plupart du montant était un prêt sans intérêt de Danone, qu’il en a déjà remboursé l’essentiel, et qu’il «coopère activement» avec l’autorité fiscale. Il aurait déjà réglé dès octobre la majorité des arriérés (200M¥)…

Le sens de la démarche publique est sans ambiguïté: pour cet-te indélicatesse de + de 100.000¥, et + de 30% d’impôt évadé, selon la loi, Zong est passible de sept ans de prison et d’une amende égale à cinq fois la fraude. Autrement dit, l’Etat s’apprête à mettre sous les verrous son flamboyant capitaliste, à moins qu’il ne se soustraie à la justice—ce qui lui ferait probablement tout perdre.

D’où ces 2 questions :

[1] Pourquoi Pékin a-t-il attendu si longtemps? Réponse plausible : Zong, député et célébrité, jouissait de puissantes protections.

[2] Pourquoi lance t-il a présent la procédure? D’abord, car tous les moyens de discussion sont épuisés—le gouvernement est soucieux de son image de crédibilité, face aux investisseurs. Puis, Pékin se soucie de ne pas perdre sur son sol le service du n°1 mondial des produits laitiers, en pleine période de crise alimentaire, alors que l’objectif est de sortir de la pénurie. Enfin, un peu comme hier en Russie -Poutine avec le patron du groupe pétrolier Youkos – le rôle de l’Etat, n’est pas forcément de protéger ses nouveaux milliardaires dans leurs jeux financiers au-dessus des lois. Pour toutes ces raisons, le groupe d’Antoine Riboud voit le ciel se lever, et se dit « optimiste », quant à l’issue du conflit !

 

 


Joint-venture : Salon de l’auto: quand la voiture va…

L’hydre du piratage commence à souffrir

Le sourire doux-amer, Giovanni Ferrero rappelle que 86% des contrefaçons chinoises saisies en Europe, copient des produits italiens. Sa victoire ne peut donc lui être que plus agréable : après 3 ans et 1M$ de frais juridiques, la Cour suprême de Pékin vient d’enjoindre Montresor, de cesser d’inonder les marchés de fausses pralines «Rocher», et de lui payer 71.000$ symboliques. Comme un plaisir ne vient jamais seul, Gucci, autre Italien de luxe obtient (15/04) 26.000$ de Senda (Jiangsu), pirate de son logo.

Un mois plus tôt à Dongguan (Guangdong), LVMH avait gagné 14.000$ contre un hôtel 5 étoiles, qui avait loué une boutique à l’un de ses contrefacteurs : pour 20.000¥/ mois de loyer, le personnel vendait les faux-Vuitton, en uniformes de l’hôtel.

Tout ceci montre des progrès dans le domaine de la propriété intellectuelle, et des efforts qui paient grâce à la prise de conscience des industriels chinois, 1ères victimes du piratage: de 2004 à septembre 2007, les procès en contrefaçon ont doublé, à 18.000, comme les dépôts de brevets (850.000); ceux de marques ont monté de 60%. L’administration a créé 50 tribunaux spéciaux et intercepté à l’import-export 7467 lots piratés, d’une valeur de 62M$. Enfin, Wangzhihe, auteur depuis trois siècles d’une recette de tofou puant  (l’indispensable condiment de la fondue mongole) va récupérer en Allemagne sa marque, détournée par le groupe Okai. Preuve que -pourquoi le cacher-, le piratage marche dans les deux sens!

 

Salon de l’auto : quand la voiture va…

Le salon de Pékin (22-28/04) confirme l’envol chinois, avec 8,8M de ventes en 2007 (+20%), second marché de la planète.

Eldorado des constructeurs étrangers qui tiennent 75% du marché, tel Volskwagen (VW), le plus ancien en Chine. Après une percée impressionnante au 1er trimestre (+32,5%), il présente 31 modèles dont 2 mondiaux et 2 dessinés pour ce marché: VW prédit qu’il passera en 2008 la barre des 1M.

Sur les 2.100 exposants, 225 étrangers seront au RV—tous les ténors. Ford (+47% de ventes au 1er trimestre) exposera 55 modèles, General Motors, 31, y compris sa Buick invicta (luxe) ou sa Lacrosse eco-hybrid. Compétitives sur les entrées de gamme, les marques locales (31% du marché en 2006) ne sont pas en reste.

Avec sa Panda noire et blanche, Geely veut tailler des croupières à Chery, reine des villes avec sa QQ. A deux, elles font le meilleur de l’export (190.000 ventes l’an passé, dont 2/3 à Chery). Elles visent bien plus, par d’ambitieux programmes de chaînes de montage à l’étranger – 21 pour Chery en 2010. Chery prépare aussi une usine de blocs moteurs à 2,4M d’unités/an, et compte exporter 1,3M/an d’ici 2015 (y compris, pour Chrysler, en dégriffé).

Encouragées par l’Etat, les marques chinoises misent aussi sur la voiture écologique – hybride, électrique, à hydrogène ou au GNL. Chang’an (4èmeconstructeur) a les plus hautes ambitions, avec un programme de 50 000 Jiexun-HEV hybrides d’ici 2010, à  20.000$ pièce—moins chères que les nippones ou européennes—bien évidemment !

 

 


JO : Jour J—109

ª Trois opuscules font le tour des villes des JO, pour présenter aux écoles, collèges et lycées, l’esprit olympique : Coubertin, les olympiades, les épreuves. Donnie Pei, auteur du projet, forme aussi les maîtres (20 conférences/semaine), et tente de les prévenir contre le préjugé universel des “JO, machine à fric” !

ª Les 12-13, la coupe du monde de tir à Pékin, fut difficile pour l’équipe chinoise, favorite, mais soumise au fameux “stress du chez soi”, Ren Jie, recordwoman, succomba devant Stéphanie Tirode (France), et Lin Zhongzai peina à conserver son or, tout comme Zhu Qinan (rifle, 23 ans), le champion sortant.

ª Ces JO s’annoncent aussi comme le plus grand festival olympique d’art (23/06-17/09) : presque 300 concerts, films, ballets, concours ou expos entre les 7 villes-hôtes. Au menu : Jackie Chan, le ténor Andrea Bocelli, la soprano Sarah Brightman.

ª Comme tous les habilleurs sportifs, Nike peaufine sa saison. Depuis 2002 sponsor de Liu Xiang le coureur de 110m-haie, il lui a créé sa tenue-miracle, et offert une équipe technique qui suit ses courses partout à travers le monde. Bon investissement : n°1 en Chine, Nike vient de dépasser le 1MM$ de ventes annuelles sur son sol !

 

 


Petit Peuple : Huangshi : une Madame Bovary chinoise

A 19 ans, en 1964, Xia Larong dût subir un mariage arrangé. Ayant passé sa vie avec son mari sur des chantiers de construction, sa mère avait cru bien faire en lui léguant une position «stable» en leur ville de Huangshi (Hebei), auprès d’un ingénieur des mines de 2 ans plus vieux.

Mais en fait de stabilité, Larong connut la solitude, avec ses 2 enfants, tandis que le mari volage vaquait à ses mines au bout du pays pour ne revoir les siens qu’au Chunjie : durant ces 12 jours, il n’accordait aux siens qu’une attention distraite.

Délaissée, Larong reporta toute son énergie sur les études et obtint en 1975 un diplôme d’enseignante, et un poste.

Ce succès ne suffit pas à re-conquérir son homme : quand en ’79, après 15 ans de ces missions, il put travailler au bercail, il s’empressa de prendre une amante, dite « 2de poitrine »  (保二乃 bao ernai).

Des années passèrent. En 1995, le mari déménagea chez une autre.  Prise en otage, Larong garda le silence : sans l’appoint du 2d salaire, elle ne pouvait joindre les 2 bouts. Faire un scandale n’aurait fait que dévaster l’univers mental de ses enfants, et dynamiter son honneur, dans cette bourgade aux valeurs étriquées : une divorcée, ça ne se remariait pas! Ce n’est qu’en juillet 2004, les oisillons envolés depuis belle lurette, qu’elle osa sauter le pas en proposant le divorce : soulagé, il lui laissa l’appartement.

C’était une révolution pour Larong, enfin libre. Elle voulait un partenaire, un amant de la tendresse et de la loyauté. Elle le cria au journal local, qui la publia gratuitement. Elle avait du être éloquente, car la grande presse se dépêcha de la reprendre, suivie des forums de la toile, et des 100aines d’hommes  affluèrent, de tous âges et conditions, apparatchiks, officiers, patrons ou profs. De la retraitée, ils ne pouvaient espérer fortune, ni charmes de la jeunesse. Ce qui les faisait courir, à l’aube du grand voyage, était l’espoir soudain d’une rupture d’avec leurs vies sèches – la beauté de l’âme. Face au déluge de courrier, Mme Xia fit appel à d’ex-collègues pour répondre. Dans l’oeil du typhon,elle s’enfuit en escapade avec sa fille, pour échapper à la tyrannie du téléphone…

Elle rencontra aussi certains de ses soupirants – trop tôt sans doute. L’affaire retomba, la solitude resta.

Un an après, contre toute attente, tomba dans sa boite la lettre de Zhang Xinhua,  soldat de 75 ans, vivotant à Wuhan sur sa demi-solde. Lui aussi, avait été mal marié, et de force. Sans style mais avec coeur, il témoignait son admiration pour elle, d’avoir su traverser une vie de désert affectif. Ils échangèrent. Il vint la voir à Huangshi. Avec ses enfants pour duègnes, elle lui rendit sa visite. Par bonheur, ils le jugèrent digne d’entrer dans la famille -faute de quoi, en Chine, point d’union.

En la cathédrale de Wuhan, le mariage fut célébré en 2007. Pour cette Bovary chinoise du XXI. Siècle, à 65 ans, c’était la fin de la longue marche vers l’âme-soeur : tel le Phoenix, Larong renaissait, mais cette fois, de ses propres forces (zi li geng sheng,自力更生) !

 

 


Rendez-vous : Shanghai, Salons de l’énergie, du chauffage et de l’air conditionné

22-28 avril, Pékin : AUTO China

22-24  avril, Shanghai : China Power, Salon de l’énergie

22-28 avril, Shanghai : China Cycle, vélo et moto

22-24 avril, Xian : Salon du chauffage et de l’air conditionné

26 avril, Pékin : Intertraffic, Salon des routes et des transports