Le Vent de la Chine Numéro 32

du 2 au 15 octobre 2007

Editorial : Hu contre Zeng, Li contre Xi—le quadrille des empereurs et des dauphins

Déjà assuré d’un second mandat, Hu Jintao, le Président,  1er Secrétaire et chef de l’APL, attend deux choses du XVII. Congrès : y imposer son héritier, et écarter l’opposition implantée par son prédécesseur Jiang Zemin. au Comité permanent, l’organe suprême – afin de pouvoir enfin réaliser son programme.

Deng Xiaoping imposait ses 4 points cardinaux. Jiang Zemin, ses 3 représentativités. Hu Jintao reprend en ses 4 insistances, de vieux poncifs : «libérer la pensée», l’«ouverture économique», l’harmonie sociale », la «prospérité »: vague promesse de réforme politique, mais sur les détails, Hu champion de la survie prudente, garde le silence d’un Sphinx.

Des rumeurs ressortent, révélant que Hu, tout n°1 qu’il soit, n’a pas les coudées franches. Son dauphin Li Keqiang, 52 ans, ne convainc pas. Les 10 ans de Li aux rênes du Henan et du Liaoning s’achèvent sans lustre, voire sous la critique, notamment dans sa gestion de la crise du sang contaminé au Henan, surgie avant lui (fin des années ’90), mais qu’il a tentée d’étouffer plutôt que d’assainir. Et surtout, en désignant successeur,  Hu enfreint la règle de Deng, « l’empereur règne mais ne lègue pas ». Règle dont il avait lui-même bénéficié en 1993, ayant été sacré « leader de la 4ème génération », malgré Jiang Zemin qui voulait Zeng Qinghong, actuel vice Président!

Aujourd’hui, Zeng Qinghong réapparaît, avec un message fort : il veut bien aider Hu à obtenir ses pleins pouvoirs, il veut bien même se retirer pour entraîner Jia Qinglin et Li Changchun, les derniers hommes de Jiang. Faiseur de rois, il est coutumier de telle stratégie, ayant déjà dégagé en 2003 Li Ruihuan, dernier lieutenant de Deng, pour le compte de Jiang. Mais en échange, Zeng Qinghong exige que la relève, en 2012, ne soit pas l’homme de Hu Jintao, mais Xi Jinping, 54 ans, l’ex-boss du Zhejiang, catapulté en mars maître de Shanghai. Et si Hu refuse, Zeng reste !

Ces derniers mois pourtant, Hu Jintao a marqué des points, ayant placé ses hommes à 5 des 7 régions militaires, aux ministères-clés (Affaires étrangères, finances, santé) et organes qui comptent, tel He Ping, boss de Xinhua, Ma Wen, cheffe de la discipline du Parti, Wang Zhaoguo, futur patron du CPPCC (Conférence Consultative Politique du Peuple chinois). Mais cela ne suffit pas à asseoir son autorité, et pour cause : l’homme chargé des nominations du XVII. Congrès, est Zeng Qinghong – pas de hasard!

D’autre part, l’appareil, à ce tournant de son histoire,  en démocratie interne, s’apprête à arbitrer ce combat des chefs. C’est que le XVII. Congrès touche des défis capitaux : environnement, santé, alimentation (cf p.2), finance et paix sociale. Trop importante pour être laissée aux mains d’un homme, la question touche à la survie du Parti, et sa séparation d’avec l’Etat.

NB : Xi Jinping et Li Changchun, les prétendants sont jeunes, pâles, et clones de leurs parrains respectifs. Ce qui explique l’absence en cette course, d’un homme tel Bo Xilai, le populaire ministre du commerce. Par son âge (57 ans) et ses talents, Bo fait moins figure de disciple, que de rival. Faute rédhibitoire, en ce système clientéliste.

 

 

 

 


Temps fort : Pékin, pompier de l’incendie birman

La Birmanie s’embrase. C’est le pot de fer de l’armée kaki, contre celui de terre de l’armée safran, les AK47 contre les moines : le 28/09, on comptait 14 morts (dont un photographe japonais), des 100aines de blessés. A l’ONU, Chine et Russie opposaient leur bouclier diplomatique à la tentative de condamnation du régime, soumise par G.W. Bush — fidèles à leur logique, ils l’avaient déjà fait en février.

Le désordre a surgi en août suite à l’embrasement du cours du pétrole. Depuis, il réexplose de façon endémique, sous l’effet de la pénurie alimentaire mondiale. Le clergé bouddhiste, qui mendie son riz, trouve chaque jour moins dans sa sébile, et marche avec le peuple, donnant à la révolte une nouvelle dimension.

L’attitude de Pékin, ici, est complexe—mais le monde ne s’y est pas trompé, qui voit en lui le pays-clé, tenant en main le plus d’atouts. La Chine tient à bout de bras le régime des généraux, l’équipe, le finance, l’arme. En 2006, leurs échanges atteignaient 1,5MM$, soit +26%. Aussi la voix chinoise est la seule qu’écoute ce régime enclavé, le plus pauvre d’Asie. Le 13/09, Tang Jiaxuan, ex-ministre, conseilla à U Nyan Win, de la junte, d’aller à la démocratie «par les voies appropriées». Plus tôt, en juin, Pékin avait fait se rencontrer les généraux et le département d’Etat. En même temps, les Chinois exaspérés, reprochent aux généraux de refuser de négocier avec l’opposition, et de confondre réforme et chantiers de prestige – la junte construit Naypyidaw, nouvelle capitale en pleine jungle, grande dévoreuse de crédits, mais manquant de tout, de routes comme de réseau GSM.

La Chine a tout à craindre de la déstabilisation présente :

[1] la remise en cause de son projet stratégique d’oléoduc à 2MM$, qui permettrait à « son » pétrole importé, d’éviter le détroit de Malacca (infesté de pirates et blocable par la 6ème flotte US).

[2] Des retards d’ouverture de son gisement gazier birman. La propagation de l’instabilité vers son Yunnan, voisin.

[3] Et surtout, en cas de bain de sang, les critiques du monde, qui entacheraient leurs Jeux Olympiques!

Aussi à toutes fins utiles, depuis des mois, la Chine prépare l’après-junte : à New York, à Ruili (ville frontière), à Kunming (capitale du Yunnan), elle rencontre  l’opposition birmane. Que va-t-elle faire, à présent que le pire semble en route ? Il lui faudra de la créativité – bloquer les sanctions, ne suffira pas, et lui vaudra, assez vite, les effets négatifs du monde, qu’elle veut justement à  tout prix prévenir !

 


Pol : Barrage des Trois Gorges – une autre tonalité

Barrage des Trois Gorges – une autre tonalité

En 1992, le Parlement (ANP) approuvait le barrage des Trois Gorges avec 821 voix contre ou abstentions, près du tiers des votants : dans l’histoire du régime, c’était le vote ressemblant le plus à un refus. Le projet était celui de Li Peng, 1er Ministre, formé en URSS comme ingénieur hydraulicien. L’assemblée avait ses raisons, suivant les objections de détracteurs comme la journaliste Dai Qing, depuis en exil. Aujourd’hui pour la 1ère fois, en un retournement complet, l’Etat reprend ces mêmes inquiétudes à son compte. Après avoir coûté 25MM$ et 16Mt de béton, le barrage sera terminé fin 2008. Mais Wang Xiaofeng, chef du projet, explique que des chutes de falaise provoquent des vagues transversales potentiellement meurtrières. Des conflits sociaux surgissent, suite à la disparition des terres arables, et à leur utilisation «irrationnelle» par les promoteurs. 70 stations d’épuration n’ont pas empêché l’eau du réservoir d’atteindre un niveau grave de pollution, tandis que le réservoir s’envase beaucoup plus vite que prévu – démentant les affirmations péremptoires des experts officiels de l’époque.

Conclusion du chef de projet, et du Conseil d’Etat : « à moins d’un grand effort de prévention de notre part, les Trois Gorges pourraient être le cadre d’une catastrophe » ! 

Protéger les juges, et leurs informateurs

60% des délits en Chine, 120.000 cas ont pour origine une dénonciation.

Mais après passage au tribunal, les témoins risquent la vengeance : en 10 ans, les meurtres pour tel mobile ont plus que doublé, de 500 à 1200. D’autres informateurs se retrouvent battus, mutilés, placés en camp sans jugement par les corrompus, membres de la nomenklatura locale.

C’est pourquoi avant décembre 2007, d’autres dispositions seront annoncées, avec collecte de l’information par téléphone et internet, pour concilier anonymat et recevabilité légale. La délation étant plus que jamais nécessaire, pour traquer pollution, corruption et abus de pouvoir.       

NB: dans le cadre d’une autre initiative, la justice tente de se protéger elle-même, et la police, contre émeutes, incendies de voitures et de bureaux, vols et dégradation, qui empêchent d’appliquer ses verdicts. En 2006, 2M jugements ont été ainsi retardés par la peur des émeutes, et la moitié sont restés lettre morte !

 

 


Argent : Chevauchée fantastique des fonds mutuels

Méthane/charbon : on efface tout et on recommence

 En 1996, afin d’exploiter le grisou du charbon, la China United Coalbed Methane Corp (CBM) naissait, dotée du monopole des JV en ce secteur : on en espérait d’énormes invests étrangers et l’import de savoir-faire.

En 12 ans, la CBM n’a pas démérité, forant 1400 puits et signant 28 JV avec 17 groupes, tels Texaco (2000), Virgin Oil (2001), Far East Energy (2002) ou Longmen (HK, 2007), pour 200M$. Cette année, elle espère produire 10MMm3, et 40MMm3 en 2020: « loin de suffire », tranche le Conseil d’Etat, anxieux de puiser dans 37.000MMm3 de réserve, les 3èmes mondiales derrière Russie et Canada, et d’accélérer sa longue marche vers les énergies propres.

Aussi le secteur subit un ravalement de façade, en deux réformes, dont pour CBM, une bonne et une mauvaise.

[1] Un centre de recherche à 7,6M² vient d’être créé avec 6 partenaires : la CBM, la compagnie nationale pétrolière (CNPC, son propriétaire à 50%), Sinopec, le minéralier Huaibei, l’université pékinoise des géosciences et Orion. Objectif, en 3 ans : réduire la dépendance dans les brevets étrangers.

[2]  Pourtant en même temps, la CBM est privée de son monopole des JV : d’autres firmes chinoises sur le marché du charbon et des hydrocarbures, recevront la licence, apportant beaucoup plus de capitaux.

 

Chevauchée fantastique des fonds mutuels

Jusqu’à hier en Chine, la bourse se confondait avec le simple échange des valeurs cotées, au risque du client. Plus maintenant: les épargnants peu branchés, préfèrent laisser le choix des invests aux fonds mutuels, portefeuille d’actions réemballées en valeurs secondaires.

Au 21/09, le nombre de telles parts a multiplié de 2,6 fois depuis janvier, à 1900MM. En valeur, ces portefeuilles ont plus que triplé, à 3000MM¥ – le seul 3ème trimestre a u une croissance de plus de 50%. Les fonds sont 341, gérés par 59 firmes dont 28 étrangères. Les comptes d’actionnaires sont 90M, et ont quadruplé depuis janvier. L’essentiel de la valeur est généré par les fonds à large capitalisation, comme la Banque de la Construction (CCB), qui vient de se placer en bourse de Shanghai (25/09), et après avoir levé 5,4MM², devient la 2ème banque mondiale en actifs.

 Parmi ces fonds mutuels, croît la section dernière née, lancée en avril : le QDII, (Qualified Domestic Institutional Investors), fonds mutuel d’actions étrangères pour le marché domestique. La CSRC (China Securities Regulatory Commission) a déjà alloué pour 15MM$ de quotas à 20 banques, pour 5,2MM$ à 5 assurances, et 0,5MM au groupe Hua’an. China Southern Fund vient de tirer la 1ère salve : pour 4MM$ de parts du marché mondial, que les acheteurs se sont arrachés.

Au moins 5 autres groupes financiers, vont lancer leur fonds QDII avant Noël, dont BEA (Bank of East Asia) et Fortis. Conclusion d’un professionnel étranger : « d’ici décembre, les fonds mutuels chinois seront n°2 en Asie, derrière le Japon ».

NB : Avec ce marché QDII, l’étranger reprend son avantage naturel, car les portefeuilles sont constitués d’avance, la formulation commerciale est déjà étudiée, les performances garanties ! 

 

 


A la loupe : Eglise catholique : la réconciliation cinglante

La réconciliation des deux branches du catholicisme chinois se poursuit à rythme vif, quoique avec accrocs.

Le 21/09, un évêque très jeune (41ans) était ordonné en l’église du Sud à Pékin, la cathédrale construite en 1605 par Mateo Ricci. 70 prêtres et 1000 fidèles suivaient cette messe rare : Joseph Li Shan, avait été élu évêque de Pékin, église de l’Etat chinois, mais également approuvé par le Vatican. Il présidera aux destinées de 19 églises, d’un séminaire, d’un couvent, et 50.000 brebis au bas mot. Décédé en avril, son prédécesseur Michel Fu Jieshan était lui, en guerre avec la Curie. L’ordination avait été précédée de celle de Jean Fang Xingyao, évêque de Linyi (Shandong). Le 8/09, au diocèse de Guizhou, c’avait été au tour de Paul Xiao Zejiang de passer coadjuteur, avec la bénédiction de Benoît XVI. D’autres nominations d’évêques à Guizhou, Canton, Yichang, Pékin, Hohhot et dans le Ningxia, interviendront fin octobre, après le XVII. Congrès.

D’autres signes de normalisation apparaissent. Ainsi, la lettre pastorale du Vatican, émise en juin, a été lue et commentée dans toutes les églises, officielles ou de l’ombre. Pourtant Liu Bainian, le Vice-Président de l’association patriotique catholique (la structure officielle) n’avait pas cachée ses réticences à utiliser les lieux de culte publics pour diffuser la parole du Pape – même si celle-ci constituait une main tendue, et un appui « technique » précieux à ce stade de relance de la religion chrétienne en Chine, en terme de formation et débat social.

De même la paroisse de Hengshui (Hebei) a rassemblé ses églises officielles et de l’ombre pour une messe réconciliatoire, proclamant la fin du schisme.

Pour autant, on ne peut passer sous silence d’autres sons, qui sont discordants: jusqu’à la veille de l’ordination de Joseph Li Shan, l’accord de Rome n’était pas acquis, et l’on ignore suite à quels compromis celui-ci a été accordé. Et depuis août, le clergé de l’ombre se voit aussi imposer des sessions de rééducation carcérale pour la durée du Congrès. Evêque de Yongnian (Hebei) Han Dingxiang est décédé le 9/09 en détention. Jia Zhiguo, prélat de 73 ans (Hebei), aussi détenu, verrait sa vie en danger, du fait d’une vieille maladie.

Tout cela traduit les hésitations et désaccords du régime, entre anticléricaux irréconciliables, et ceux s’étant résignés à une normalisation que plus rien ne peut arrêter.

 

 


A la loupe : Le fantôme de la pénurie

Une crise cyclique rare frappe la production alimentaire mondiale. La Chine cite une hausse des prix de la viande de 49% (18,2% pour les aliments), et une inflation de 6,5%. Chiffre très optimiste, disent les experts. A Pékin, le porc qui coûtait 9,5¥/livre en 2006, en vaut 18 ¥ ! Un sondage de 20.000 ménagères, indique que 47% trouvent les prix trop élevés.

Mais la crise est faite pour durer. Sous la sécheresse, l’Australie, un des greniers du monde, réduit sa prévision -déjà mauvaise- à moins de 50% de sa 1ère estimation: seulement 12Mt de blé. D’autre part, l’agriculture du nord chinois épuise sa table aquifère, déjà descendue à 200m à Shijiazhuang (Hebei).

D’autre part, aucune solution n’existe à court terme. Le paysan ne décidera de réinvestir, qu’une fois rassuré sur l’avenir. L’éleveur porcin par exemple, doit être certain que la maladie des oreilles bleues (qui a décimé des M de truies) a un remède fiable, que le fourrage ne va pas continuer à monter, que les banques lui octroieront le crédit, que le marché ne va pas s’effondrer sous 12 mois, sous le contrecoup d’une surproduction massive.

La Chine a déjà réagi sur le marché, avec ses moyens, qui sont minces. Elle a commandé 170.000t de porc étranger, et mis en perce ses réserves  stratégiques, qui apparaissent surtout symboliques, à 30.000t qui ne suffiront que pour 4 à 6 heures de la demande. Idem, elle va adjuger 200.000t d’huile, à prix cassé. Elle multiplie aussi les baisses de taxe à l’import (de 1 à 2% !), la gratuité de péage pour les camionneurs… mais de telles mesures n’influent que peu sur les volumes et les prix !

La raison de la crise porcine vient du virus déjà cité, mais aussi la hausse du prix du fourrage: une partie du maïs et du manioc, ne va plus au bétail, mais aux distilleries d’éthanol, pétrole « vert ». Indexant ainsi, de facto, le prix du porc à celui du pétrole : en se lançant dans cette filière, la Chine a pris des risques.

La crise en Chine, est aggravée par une donnée qui lui est propre : le dogme de l’autosuffisance alimentaire, qui se heurte  à la liberté croissante du paysan. Ce sont les régions céréalières qui soufflent la tempête en Chine, en exigeant de passer à des cultures spéculatives, là où l’Etat n’arrive plus à leur imposer celles vivrières. De 1999 à 2005, selon JP Morgan, les emblavures ont réduit en peau de chagrin, de 72 à 67% des cultures.

NB : la pénurie est très visible, à quelques jours des fêtes du 1er octobre, période de gros achats, puis du XVII. Congrès. Elle est aggravée par une autre crise de confiance en la qualité de ces mêmes produits : conjonction malheureuse, qui va accélérer une remise à plat de la politique agricole, au-delà de la simple lutte anti-inflation, où 8 ministères sont sur le pont.

 

 

 


Joint-venture : Automobile—Jean qui pleure et Jean qui rit

Le courtage s’internationalise

Après le 15/10, à l’issue du XVII. Congrès, les banques d’investissement étrangères pourront de nouveau déposer des dossiers de JV de courtage boursier : au terme de nouvelles règles en cours de peaufinage.

Mais qu’on ne se fasse pas d’illusion : elles n’auront droit qu’au marché de l’émission. Pas question de les laisser « batifoler » dans les platebandes du marché secondaire, vendre et racheter les parts. Ainsi, Pékin va-t-il tenir une promesse faite en mai 2007 aux USA —tout en gardant sa muraille autour d’un marché encore fragile.

A ce jour, trois étrangères sont déjà dans les murs : Morgan Stanley, Goldman Sachs (avec le succès mitigé vu la semaine passée) et le suisse UBS. JP Morgan, d’autre part, reçoit le 26/09 la licence pour ouvrir une JV de courtage sur le marché à terme de Shanghai. Avec Zhongshan Futures, son partenaire, il recyclera pour Canton des contrats à terme de cuivre, alu, zinc, caoutchouc (naturel), or et pétrole. Dans cette finance ésotérique, Morgan Stanley rejoint le hollandais ABN-AMRO, partenaire à 40% de Galaxy, dont la JV «tripode», est une des rares à offrir la gamme complète de services en bourse, assurances et marchés à terme.

NB : l’ouverture du courtage à l’étranger est accéléré par la consolidation du marché chinois. En 12 ans d’existence, CITIC Securities détient 40,7MM$, et profitant des difficultés des géants US, s’est hissée au 4ème rang mondial, devant Lehman Brothers .

 

Automobile—Jean qui pleure et Jean qui rit

Fin 2006, avec ses secteurs dérivés, le secteur auto occupait un emploi sur six. C’est dire son importance stratégique et son décollage, impavide à la dégradation qu’il impose à l’atmosphère, au trafic et à la balance des paiements (par la note de pétrole importé, 40% des besoins). Fin août, les ventes ont augmenté de 25% (sur 12 mois). Pour 2007, elles franchiront les 9M de véhicules, contre 7,22 l’an passé.

Elles cachent une féroce guerre des prix, et son corollaire, la course aux nouveaux modèles. Cette tendance gaspilleuse convient en fait à l’Etat, qui y voit -au moins- quatre avantages : elle accélère la sélection naturelle des firmes: le sauvetage des canards boiteux par les provinces, est toujours plus cher. Elle accélère donc la levée des frontières intérieures et l’émergence du marché unique. Elle avive aussi les vocations à l’export.

Déjà 3ème exportateur mondial (en nombre), la Chine va écouler 500.000 véhicules, +46%. De janv. à juillet, 294.000 voitures furent exportées (+70%), d’une valeur de 8,95MM$ (+32%). Il s’agit de modèles piratés, dangereux, non durables, dont le prix est l’unique attrait. D’où ce dernier avantage pour l’Etat : se frotter aux fiefs d’Europe et d’Amérique, tenter d’égaler leur qualité.

NB : GM va exporter (25/09) pour 0,8MM$ de pièces et voitures. En mai, il avait obtenu pour 0,7MM$ d’export chinois. Depuis, GM Shanghai a produit et vendu l’an dernier 877.000 voitures : en pleine tempête aux US, avec 73.000 métallos en grève, le groupe de Detroit voit en Chine son unique « success story » !

Dell – « sed perseverare diabolicum » !

Depuis 20 ans, Dell se faisait un titre de gloire d’éviter les commerçants, s’épargnant ainsi l’intermédiaire et son coût d’infrastructures. Dell vendait ses ordinateurs et portables par internet, et réinvestissait l’épargne en faisant moins cher. Mais c’était compter sans les zones, qui restent prédominantes, où la toile reste à la traîne. En Chine notamment. Voilà comment ce n°2 mondial en production, est aujourd’hui n°4 en Chine, avec 8% du marché, loin derrière Lenovo aux 36%, voire HP avec ses 13,4%.

Cette bonne idée qui n’en était pas, a forcé le groupe texan à débaucher 10% du personnel, et son Président-fondateur Michael Dell à reprendre du collier, comme chef du marketing : à signer des accords avec les marchands, partout au monde. En Chine, Dell s’entend avec Gome pour placer ses ordinateurs dans 50 surfaces, puis d’ici 2008, dans les 1000 du groupe. Dell est pressé : avant 2009, la Chine aura dépassé l’Amérique, comme 1er marché du monde, alors que 60% de ses ventes restent concentrées sur ce continent (Amériques du Nord et du Sud) qui cesse d’être leader!

 

 


JO : D’autres olympiades, de litiges et de fraudes

D’autres olympiades, de litiges et de fraudes

–  Les 12èmeJeux d’été pour handicapés mentaux ouvrent à Shanghai (2-11/10). En 21 disciplines, s’affronteront 10.000 athlètes au QI inférieur à 70 -dont 1.700 sportifs et entraîneurs chinois.

    – En coopération  avec 9 pays dont la Chine,  le DEA américain (Drug Enforcement Administration) fait un blitz sur les stéroïdes et autres anabolisants (24/09): entre 56 officines, il a arrêté 124 bandits, saisi 6,5M$, 25 voitures, 3 bateaux, et pour 13M$ de pilules et ampoules, produits à 99% made in China (37 fournisseurs) « Tous les usagers ne seront pas poursuivis, mais tous identifiés », promet J. Gilbride, du DEA.

   – Sohu, portail internet, est outré. Ayant payé 30M$ au BOCOG pour le sponsoring de Pékin 2008, il voit le rival Sina utiliser son logo aussi, et même oser le revendiquer. Or le BOCOG n’a pas encore affirmé l’exclusivité du sponsor… A travers leurs sites, en cinq langues (dont le français), les deux poids lourds de l’internet fourbissent leurs armes pour la lutte finale de l’olympisme!

   – Les filles du «Onze» de football chinois ont plié en Coupe du monde, faute d’une attaque percutante. Mais elles ont reçu ces ordres : « fini les pleurs, on prépare les JO ! » – avec Marika Domansky, la coach suédoise, reconduite dans ses fonctions.

 

 


Petit Peuple : Pékin – hors de l’enfer, par la porte arrière

De la petite enfance à l’âge adulte, Liang Zhengxiang souffrit toute sa vie du féroce sobriquet, «Cicatrice». A un an, il s’était renversé sur lui un wok de jiaozi  (raviolis) qui l’avait brûlé au 3ème degré. Comme séquelle, sur la moitié gauche du crâne, il lui était resté une carte de Chine, qu’il cachait tant bien que mal par la mèche de la moitié droite. Inspirant dans son dos les cruels lazzis des «camarades» d’école, du collège, puis des collègues, à la banque. Mais en un enchaînement bizarre de circonstances, son infirmité l’envoya d’abord en enfer, puis au paradis, comme on va voir!

Liang s’auto-apitoyait, estimant avoir droit à des compensations. Il s’était livré au démon du jeu et croyait dur comme fer qu’une fois millionnaire, il serait à l’abri de la gouaille.

La chance, pour sûr, ne fonctionne pas ainsi: quand il croula sous les dettes, au lieu d’arrêter, il ne trouva rien de mieux à faire que d’insister, et de couvrir ses pertes en chapardant dans sa caisse.

Dès lors, son sort était scellé: constatant le vol de 50.000 ¥ -la face visible de l’iceberg, car Liang avait détourné plus du décuple-, le patron lui donna 24h pour rembourser, ou bien c’était la plainte auprès de la police judiciaire! Liang se retrouva affolé, telles «les fourmis sur le couvercle de la marmite brûlante » (re guo shang de mayi, 热锅上的蚂蚁), courant dans tous les sens. Coup sur coup, il fit une ultime et sotte tentative pour gagner au casino, une fuite à son village, puis 2 essais de suicide sur la tombe de ses parents, avec des poisons contrefaits, qui lui causèrent de bien belles diarrhées. Appréhendé, il fut condamné à mort -peine commuée en perpétuité – il avait 33 ans, c’était en ’95.

Puis contre toute attente, vint le temps de quitter l’enfer,  par la porte de derrière. Sous les sarcasmes, Cicatrice s’était toujours interrogé sur le sens de la vie, et des mots. A ce jeu, il était devenu lettré: il s’était imposé comme champion de xiangsheng (相 声), l’art des bouts rimés, ces joutes verbales en vers improvisés qui font les délices des Chinois.

Une fois en taule, il reconnut sa folie : plutôt que de pleurer sur son sort, il décida d’améliorer celui des autres, en les amusant. Ainsi, il offrit des soirées de rigolade aux taulards, aux matons, qui en avaient bien besoin, et qui par reconnaissance, firent de lui leur héros.

Vite, sa réputation se propagea jusqu’au bout du pays. Plus souvent qu’à son tour, il fut invité à des soirées, à des tournées, pour lesquelles les permissions étaient toujours signées. Il a déjà obtenu 3 (rarissimes) réductions de peine, et l’heure de la sortie est fixée : pour 2011, pour ses 49 ans. 

Perspective formidable, mais un autre résultat frappe plus encore : nul ne pense plus à présent, à lui lancer les piques vénéneuses d’hier. Et celles-ci, en tout état de cause, ne l’atteignent plus depuis longtemps. Conscient qu’il est, désormais, de son génie pour faire oublier à ses frères leur misère, et les rendre à leur humaine condition, « pour ce que le rire est le propre de l’homme » !

 

 


Rendez-vous : La Chine en sursis pendant la Fête Nationale

10-13 octobre, à Shanghai : Salons de l’automatisation (Interkama et Factory automation), du transport et logistique (Cemat), des énergies renouvelables (Energy), de la transmission et du contrôle de puissance (PTC), des télécommunications (Cebit).

15-30 oct, Foire de Canton

Semaine du 1er octobre : Fête nationale