Le Vent de la Chine Numéro 6

du 11 au 25 février 2002

Editorial : editorial_6_2002

40jours de Nouvel An ont débuté fin janvier, par le voyage. 1,7MM de gens transhument, jusqu’à 4M/jour, dont 130M par le train -lequel a saisi sa chance de taxer de 15 à 35%, le temps des fêtes, ce marché captif. Chargés de cadeaux, les jeunes rentrent chez leurs parents; la Chine urbaine, au village; celle de la côte, vers l’intérieur; celle de la richesse, vers la vie dure.

Retrouvailles d’une famille qui est la Chine entière.Les danwei (uni-tés de travail) ont donné aux employés, les jours d’avant, carpes, galettes fourrées, vin jaune. Bon esprit,interdépendance confucéenne, entraide atavique qui est peut-être le moteur secret de la croissance du pays.

A 100 km au nord de Pékin à Yunmengxia, Mme Chen a collé aux montants du portail les chunlian, papiers rouges découpés aux motifs et formules de bon augure (Gongxi facai, bonheur et richesse) et préparé son banquet – poisson, raviolis, pains-vapeur, pommes, mandarines…

La nuit fatidique, on ne se couche pas.A minuit, les pétards sont là pour écarter les esprits mauvais qui se repaissent volontiers des humains,surtout ceux dits  benmingnian, nés sous le signe: pour se protéger, ils n’ont plus qu’à porter, 365 jours durant, un fil rouge en ceinture à même la peau. De même, les 12 et 13 février, il est défendu de penser à la mort, parler d’argent, se laver les cheveux, laisser tomber ses baguettes, balayer, cuisiner… Innocent stratagème pour permettre à la femme de se reposer! A noter le défaut de naissance de cette année dite "aveugle" ou "de la veuve", privée de signe de début du printemps: les jeunes répugnent à y convoler, et multiplient les noces, juste avant elle!

Coincé entre l’eau et du feu, le signe du cheval est ambigu. En affaires, c’est l’année de l’éclatement, des risques qui gagnent, de la reprise, de la bourse, de la croissance par l’OMC. Mais en politique, le cheval parle plutôt de bouleversements et d’instabilité. Enfin, dans cette Chine en mutation rapide, rien n’est épargné par le changement. Le banquet n’est plus le seul bon repas de l’année. La jeunesse blasée s’ennuie des traditions. Le voyage se détourne des villages, guigne Hong Kong, Bangkok ou Paris. La semaine se consacre toujours plus au passe temps banal du shopping, raison n°1 pour l’Etat, d’octroyer 7 jours de congés : culturellement aussi, la Chine se globalise!


Editorial : Le serpent meurt, vive le cheval !

40jours de Nouvel An ont débuté fin janvier, par le voyage. 1,7MM de gens transhument, jusqu’à 4M/jour, dont 130M par le train -lequel a saisi sa chance de taxer de 15 à 35%, le temps des fêtes, ce marché captif. Chargés de cadeaux, les jeunes rentrent chez leurs parents; la Chine urbaine, au village; celle de la côte, vers l’intérieur; celle de la richesse, vers la vie dure.

Retrouvailles d’une famille qui est la Chine entière.Les danwei (uni-tés de travail) ont donné aux employés, les jours d’avant, carpes, galettes fourrées, vin jaune. Bon esprit,interdépendance confucéenne, entraide atavique qui est peut-être le moteur secret de la croissance du pays.

A 100 km au nord de Pékin à Yunmengxia, Mme Chen a collé aux montants du portail les chunlian, papiers rouges découpés aux motifs et formules de bon augure (Gongxi facai, bonheur et richesse) et préparé son banquet – poisson, raviolis, pains-vapeur, pommes, mandarines…

La nuit fatidique, on ne se couche pas.A minuit, les pétards sont là pour écarter les esprits mauvais qui se repaissent volontiers des humains,surtout ceux dits  benmingnian, nés sous le signe: pour se protéger, ils n’ont plus qu’à porter, 365 jours durant, un fil rouge en ceinture à même la peau. De même, les 12 et 13 février, il est défendu de penser à la mort, parler d’argent, se laver les cheveux, laisser tomber ses baguettes, balayer, cuisiner… Innocent stratagème pour permettre à la femme de se reposer! A noter le défaut de naissance de cette année dite « aveugle » ou « de la veuve« , privée de signe de début du printemps: les jeunes répugnent à y convoler, et multiplient les noces, juste avant elle!

Coincé entre l’eau et du feu, le signe du cheval est ambigu. En affaires, c’est l’année de l’éclatement, des risques qui gagnent, de la reprise, de la bourse, de la croissance par l’OMC. Mais en politique, le cheval parle plutôt de bouleversements et d’instabilité. Enfin, dans cette Chine en mutation rapide, rien n’est épargné par le changement. Le banquet n’est plus le seul bon repas de l’année. La jeunesse blasée s’ennuie des traditions. Le voyage se détourne des villages, guigne Hong Kong, Bangkok ou Paris. La semaine se consacre toujours plus au passe temps banal du shopping, raison n°1 pour l’Etat, d’octroyer 7 jours de congés : culturellement aussi, la Chine se globalise!


A la loupe : En 2002, le plus grand défi – la pauvreté !

Lors du meeting (4/2) du Comité permanent du Politbureau, la lutte contre la pauvreté a été décrétée 1ère priorité nationale, à tous niveaux de gouvernement. Urgence moins due à l’esprit du Nouvel An, qu’à la paupérisation rurale, accusée par les récentes attaques à la seringue (Pékin, Tianjin) ou au vitriol (Xi’an, Shaanxi). Selon ses chiffres, la Chine aurait 30M de pauvres (contre 200M en ’80). La banque ADB en rajoute 60M. Les migrants eux, sont passés en 12 mois à 78M, +5%!

Cette misère rurale sera exacerbée en 2002 par l’entrée à l’OMC, avec les import agricoles accrus: le quota céréalier est fixé à 18,3Mt, mais comme la Chine vit sa 3èmerécolte médiocre en 3 ans (-1,9%, pour cause de sécheresse, de structures obsolètes, et de prix non rémunérateurs), il pourrait être rallongé. Autre facteur aggravant: l’hiver trop doux, qui fait attendre, pour l’été, des calamités exceptionnelles, crues, incendies et sauterelles.

Face à ces maux, à court terme, l’ordre est de passer partout de masure en masure, pour y livrer gratuitement riz, mais aussi (pour les semailles de printemps) grain, engrais et araires. A plus long terme, les leaders préconisent solidarité, application stricte des programmes (ni détournements, ni taxes illégales), et éducation des cadres (moins de corruption). Donc, ni idées, ni moyens neufs!

Seule lueur positive: en 2001, le revenu rural a re-monté de 4%, contre 2,1% en 2000. Ce résultat est atteint par le passage à des produits plus rémunérateurs tel le lait en Mongolie, mais surtout vers des métiers non agricoles qui paient désormais 52% de la vie d’une Chine décidément contrainte par l’histoire à se détourner de sa vocation agricole!


Pol : avant visite Bush, un chaud-et-froid

· A Shenyang (Liaoning), au Congrès municipal annuel, 119 élus ont réclamé l’abandon d’un projet de mini centrale nucléaire (2 x 200Mw pour 168M$) par peur d’impéritie. Durant 5 mois d’hiver, la capitale nordique chauffe ses 6,7M d’hts au charbon, entraînant une forte pollution. Déjà approuvé par l’Etat, soutenu techniquement par l’université Qinghua (Pékin), le projet est en phase préparatoire avancée -10 groupes locaux se partagent les contrats. A ce stade, le plan n’est pas remis en cause – la motion des édiles n’a pas de force contraignante. Mais la face compte, et l’apparence de respect du verdict populaire. On attend les suites.

· 30 ans jour pour jour après celle, historique, de Richard Nixon, la visite de G.W. Bush, (21-22 /02) permettra de prendre la température réelle, en dents de scie, des rapports sino-US. Avant sept. 2001, le désaccord était complet. Après, l’on se découvrit une solidarité, sur fond de lutte contre le terrorisme intégriste. Tout récemment, l’on vit le directeur de la CIA George Tenet rappeler au Congrès US que "les objectifs de la Chine n’ont pas changé, notamment celui de s’imposer en Asie, par la création d’une armée moderne". La Chine, elle, dénonce les prétentions US à épingler "l’axe diabolique" à travers le monde. Pourtant, un premier différend a été réglé au profit de Bush, lui permettant de voir sa future conférence de presse diffusée en direct

NB : Jiang veut, et est invité à se rendre à Washington en "visite de travail" avant la fin de son mandat – donnant-donnant!


Argent : nouveau look pour Shanghai – Titanic

· Condamnés comme insalubres et peu fonctionnels,les quartiers urbains disparaissent l’un après l’autre avec leurs traditions. Encore faut il remplacer ces dernières, par des images venue d’ailleurs, choisies pour leur attrait publicitaire: à Pékin surgissent les quartiers Financier, Dot.com, Green Olympique ou des arts. A Shanghai se prépare un centre commercial Xiehe villes du monde, avec petits "Paris", "Sydney", "HK" ou "New York". De ce complexe de 60.000m2 signé Concord World (HK), le fleuron devrait être une réplique grandeur nature du Titanic (269 m de long). Chongqing avait eu la même idée plus tôt, surnommant ainsi le complexe commercial et portuaire dans le bec entre Yangtzé et rivière Jialing. Curieusement, la référence au célèbre naufrage, très présente dans les esprits, est moins forte que celle au succès du film, qu’espère égaler Guan Zhaoqian, vice- président du groupe.

· La Banque Mondiale octroie à la Chine (31 jan) un prêt de 160M$, avec 5 ans de délai de grâce et étalement sur 20 ans des remboursements, pour étoffer le réseau ferroviaire du Nord Ouest et pour divers investissements, tel le doublement de la ligne Baoji (Shaanxi)-Lanzhou (Gansu) : ligne transversale, ayant pour vocation de désenclaver une des régions les plus pauvres du pays -condition préalable aux invests extérieurs.

· Après des années de négociations dures, la restructuration du paysage aérien chinois vient d’aboutir à un premier résultat – le feu vert par le Conseil d’Etat d’une fusion des 9 groupes sous tutelle directe CAAC, en 3 géants : Air China (Pékin), China Eastern (Shanghai) et China Southern (Canton), chacun doté de 6MM$ d’actifs comptables et de 120 à 180 appareils. Immédiatement après (6/02), apparaît le corollaire de ces regroupements en chaîne : les lignes entre ces villes, y-compris avec "stop-overs", seront réservées aux groupes ayant une base dans l’une d’entre elles : le marché se cloisonne, condition pour que ces groupes fassent des profits et épongent leurs dettes massives contractées depuis 15 ans. A condition – toute l’ambiguïté est là- de se convertir à fond aux modes de gestion non étatiques!

NB: en marge des trois groupes centraux, deux francs-tireurs se constituent, qui pourront exploiter ces lignes lucratives : Hainan Air, par sa filiale rachetée de Xinhua Air (Pékin), et China Sky, par sa filiale de Shanghai Air.

· Tout comme l’aviation, l’énergie elle, s’apprête à scinder la State Power Corp, "Etat dans l’Etat" de 1,4 M d’employés, au patrimoine de près de 100 MM$, d’une capacité installée de 150000 Mw (40% du parc thermique national). Quatre nouveaux groupes se partageraient l’empire : Datang (Beijing), Guohua, SP Power et Huaneng International, entités déjà existantes et cotées en bourse. Dans le même temps, les réseaux de distribution jusqu’alors largement locaux, seront interconnectés en deux groupes, Southern et Northern Power (les 5 provinces du sud, pour le premier), qui achèteront dès 2003 l’énergie aux enchères, pour la distribuer à moindre coût aux usagers.

 


Politique : politique_6_2002

· A Shenyang (Liaoning), au Congrès municipal annuel, 119 élus ont réclamé l’abandon d’un projet de mini centrale nucléaire (2 x 200Mw pour 168M$) par peur d’impéritie. Durant 5 mois d’hiver, la capitale nordique chauffe ses 6,7M d’hts au charbon, entraînant une forte pollution. Déjà approuvé par l’Etat, soutenu techniquement par l’université Qinghua (Pékin), le projet est en phase préparatoire avancée -10 groupes locaux se partagent les contrats. A ce stade, le plan n’est pas remis en cause – la motion des édiles n’a pas de force contraignante. Mais la face compte, et l’apparence de respect du verdict populaire. On attend les suites.

· 30 ans jour pour jour après celle, historique, de Richard Nixon, la visite de G.W. Bush, (21-22 /02) permettra de prendre la température réelle, en dents de scie, des rapports sino-US. Avant sept. 2001, le désaccord était complet. Après, l’on se découvrit une solidarité, sur fond de lutte contre le terrorisme intégriste. Tout récemment, l’on vit le directeur de la CIA George Tenet rappeler au Congrès US que "les objectifs de la Chine n’ont pas changé, notamment celui de s’imposer en Asie, par la création d’une armée moderne". La Chine, elle, dénonce les prétentions US à épingler "l’axe diabolique" à travers le monde. Pourtant, un premier différend a été réglé au profit de Bush, lui permettant de voir sa future conférence de presse diffusée en direct

NB : Jiang veut, et est invité à se rendre à Washington en "visite de travail" avant la fin de son mandat – donnant-donnant!


A la loupe : Conférence monétaire- un compromis terne

Une Conférence nationale financière (5-7/2, Pé-kin) devait fixer l’agenda d’ici 2006 des réformes financières. Elle se déroulait sous le feu de deux urgences, surgies de l’entrée à l’OMC:

¬ la dévaluation persistante du yen nippon,

­ le flot d’irrégularités révélées à la BdC (cf VdlC d°5). De bonne source, ce sommet des argentiers et de leaders nationaux aurait souffert, comme le VdlC l’avait prédit, de réflexes corporatistes: un débat verrouillé n’a abouti qu’ à un compromis faible.

Au chapitre réforme des banques fut décidée la création d’une Commission de régulation bancaire, dirigée par mme Wu Xiaoling, branche de la BPdC, qui sauve ainsi ses deux casquettes (contradictoi-res) de planche à billets et de gendarme des banques: pas d’indépendance pour le «chien de garde». Même si Wei Jianing, économiste au Conseil d’Etat, veut interdire (voeu pieux, en l’absence de mesure statutaire) l’interférence des corps de l’Etat sur sa Banque centrale.

De ce fait,les banques n’ont pas le feu vert pour s’engager dans d’autres métiers parallèles, assurance (pensions!) et bourse. Aucune mesure n’est prise pour assainir la banque agricole – alors que la part de capital évanouie en mauvaises dettes, à l’ABC, atteindrait 80%.

Au chapitre monétaire (2d volet de la Conférence), un tournant semble proche, par rapport à 10 ans de taux fixe. La Chine voit chuter le Yen de 125Y /$ à (bientôt)150. L’effet voulu, est de freiner les transferts d’activités high tech nippone vers le continent – alors que 50% des Cies du Japon veulent délocaliser,dont 70% vers la Chine. Face à cette défense, et à l’érosion visible de la croissance chinoise, la BPdC n’aurait d’ alternative, à terme, que de remplacer sa parité de 8,3Y/1$, par un système plus flexible – une dévaluation qui pourrait intervenir, idéalement au moment des fêtes. La conséquence inéluctable devant être un effet dominos sur les autres monnaies d’Asie.


Joint-venture : Un lock-out technique de Coke à Pékin

· Il y a de l’eau dans le gaz entre Coca-Cola et ses 3 fournisseurs pékinois de cannettes métal, qui revendiquent une hausse unitaire de 0.0018$ (soit +2400$/jour), et ont interrompu les livraisons à la veille du Chunjie – moment du "coup de feu", en matière de vente de limonades. Refusant le chantage, et menacé de rupture de stock, Coke a porté plainte devant le bureau de l’industrie et du commerce de la zone industrielle de Pékin, et commandé d’urgence des cannettes fraîches entre Shanghai (Baoshan) et Jiangsu.

Selon la presse spécialisée chinoise, l’incident affiche les limites de 7 ans de localisation par le groupe d’Atlanta : sur ses chaînes de remplissage, Coke a férocement compressé ses coûts, parvenant à maintenir ses prix en compensant (et limitant) hausses de salaire et des produits de base -eux-mêmes à 98% locaux.

Cet avantage compétitif ayant contribué à lui faire contrôler 33% du marché, s’effrite aujourd’hui.

· Avec plus d’un semestre de retard, PetroChina annonce (05/02) les 1ers coups de pelleteuse du gazoduc de 4200 km Urumqi-Shanghai après feu vert du Conseil d’Etat. Le chantier lourd s’ébranlera d’ici juin. (pour plus de détails, voir VDLC n°2/VII). Rappelons, dans le consortium étranger (45% de la JV), la présence des russes Gazprom et Stroitransgaz, et  de HK & China Gas – l’entrée d’ Exxon Mobil reste possible.

NB : le retard du contrat, et la composition du consortium expriment les doutes de l’étranger, quant à :

[1] la viabilité du projet, qui nécessitera un total de 18MM$ en incluant le réseau de distribution,

[2] aux risques environnementaux,

[3] à ceux de conflits avec les minorités (ouighoures, mongoles…),

[4] à l’ approvisionnement en gaz (pour l’instant, 12 ans de réserve) et enfin, … au prix à l’arrivée : les dernières estimations, à 1,3 Y/m3 dépassent de 15% le prix acceptable pour les clients (l’allemand BASF, Shanghai ville), et de 30% le cours mondial.

Pendant ce temps, le verdict est imminent pour le contrat de fourniture de 5Mt de GNL (en 2005) puis 8Mt (en 2008) au terminal de Shenzhen (Guangdong). Contrat de 10MM$ sur 20 ans. Le consortium Tangguh LNG (JV de Pertamina, Indonésie, + BP) semble bien placé pour emporter tout ou partie du marché. BP a gagné en mars la participation étrangère (30%) dans le terminal, pour 600M$. La partie "approvisionnement" de ce projet, apparaît la plus lucrative. En contrepartie, Pertamina céderait à la CNOOC des parts du gisement de Tangguh.

 


Temps fort : Le Dalai Lama invité à rentrer

C’est un message inédit qui vient d’être adressé au Dalai Lama par voie de presse: «le Gouernement (…) attend toujours du 14. Dalai Lama qu’il retourne à la maison! Le message reprend une of-fre de Deng dès 1978, assortie d’une curieuse précision du patriarche: «que le patriotisme lui vienne tôt ou bien tard, n’a pas d’importance»!

La date n’est pas fortuite : c’est la veille du Nouvel An, moment de régler les litiges. Peu avant, Pékin a tendu une autre main vers Taiwan, invitant en Chine le DPP (parti indépendantiste, au pouvoir). On peut y lire une volonté de détente, à laquelle on peut prêter trois causes politiques:

[1] alors que l’Asie sort difficilement de sa crise, la Chine poursuit sa croissance, au prix d’invests en 10aines de MM$/an. Faire la paix avec le Tibet, serait épargner de lourds frais militaires.

[2] après les attentats du 11 sept., Pékin tente d’éradiquer l’intégrisme ouighour, auteur de nombreux attentats jusque dans Pékin. Mais la reprise en main se passe mal: un attentat-suicide a eu lieu à Urumqi (Xinjiang): il serait bon pour la Chine, de rétrécir à l’Ouest le front des régions sous sur-veillance.

[3] un engouement pour le Tibet traverse la Chine éduquée, celle que Jiang veut rallier par sa campagne des  sange daibiao (trois représentativités): des millions de citadins y redécouvrent ce qu’ils ont perdu-spiritualité et nature. Un concordat avec le Dalai-Lama vaudrait à Pékin une bouffée bienvenue de popularité.

Quelles sont les chances que le Dalai Lama sai-sisse la chance offerte ? Tout dépend des conditions concrètes de l’offre- qu’on peut supposer aux mains du souverain pontife : lui rendre son palais du Potala à Lhassa, ne saurait suffire, des concessions politiques seront inévitables. Mais pour le Dalai, opposer une fin de non-recevoir, serait lourd de conséquences. Pékin n’aurait alors d’alternative, que celle d’attendre la mort du premier prélat lamaïste, pour le remplacer par un enfant sous son contrôle, privant ainsi durablement le Tibet d’un défenseur légitime !

 


Petit Peuple : le tour de magie d’Harry Potter

· Harry Potter à l’école des sorciers, le film à méga budget est en train de battre les records d’audience: 200 copies vendues en 5 jours, 2 M$ de recettes, une distribution dans 20 villes ! La date a été soigneusement choisie, à quelques jours des congés: dans les enveloppes rouges des cadeaux, à côté des billets de banques se trouvent sou- vent, cette année, celui du cinéma où se donne le film coqueluche!

En oct. 2000 pourtant, à la sortie des quatre premiers tomes d’H.Potter en mandarin, un expert prédisait doctement le bide: «L’histoire n’évoque rien pour nous. L’Occident en crise se réfugie dans ses fantasmes. Mais nous, nous sommes en croissance – nous n’avons pas besoin de ce genre d’exutoire!». En fait, le risque était réel de voir le film interdit, comme superstitieux et sectaire !

C’est alors que s’est produit l’incroyable : des hommes tel Zhong Jiehua, du ministère de la culture, spécialiste en livres d’enfants, sont  montés au créneau : «Le rêve créatif, voilà exactement ce qu’il faut à nos enfants, stressés de trop de devoirs et leçons – vive l’inutile » ! Xu, doublure vocale du héros, donne sa sensibilité filiale : «Harry, c’est un type super, il est courageux, sympa, et il aime ses parents »! Hao Jian, de l’institut du Ciné de Pékin donne une autre clé de cette complicité avec le héros de JK.Rawlings: «La Chine a un riche passé de littérature fantastique. Prenez ‘Le voyage à l’Ouest’, notre roman national : tout y est, dragons, monstres sanguinaires, apprentis sorciers, vol magique dans les airs : nous revivons tout cela à travers H.Potterl».

C’est ainsi que sans en avoir l’air, Harry Potter arrive en Chine pour aider la jeunesse à réhabiliter une vertu perdue : celle de  xuwu piaomiao, "le monde des limbes et de l’au-delà" – l’imagination, le rêve, le gratuit!