Le Vent de la Chine Numéro 17

du 10 au 16 mai 1998

Editorial : Gamberge ‘huangshanaise’…

Plus connu pour sa Montagne, (pôle d’attraction de hordes infinies des touristes),  Huangshan, 1,4 M hts au sud de l’Anhui, mériterait de l’être pour son histoire et son architecture.

Aussi ancienne que la Chine, marchande, artisanale et lettrée, la ville compte parmi ses concitoyens   Qingshihuang, mythique empereur Jaune fondateur de l’empire en moins 221 avant JC. Même le dialecte local a ses lettres de noblesse: inaudible pour le Chinois moyen, il est proche du japonais, ce qui s’explique (à en croire les autochtones) par les racines ancestrales du Soleil Levant, dans cette ville-même. Et de fait, au village misérable de Chen Kan, à 30km, le manoir des Lou, riches fonctionnaires aujourd’hui retournés à leurs rizières, présente des similitudes troublantes avec les temples de Kyoto et Nara : mêmes colonnes altières de gingko, même charpente sans clous ni colle ni équerres, même enduit végétal imputrescible.

Mais le plus remarquable de Huangshan, est la culture locale, intacte dans ses montagnes, à commencer par son architecture unique au monde, compromis ingénieux pour repousser les pluies incessantes de mars à octobre, l’inclémence du soleil et l’insécurité de cette région jusqu’à hier affligée par les bandes de hors-la-loi. Les ruelles sont étroites, empêchant l’usage de béliers pour enfoncer les portails de brique blindée. Les parois blanches sont sans fenêtre. A l’intérieur, surprise, tout est de bois rouge sombre : lourds piliers ouvragés, deux mezzanines (à chaque étage), agrémentée de bas reliefs et de statuettes polychromes, encadrent un patio, ainsi qu’en toiture, l’ouverture sur le ciel étroite et rectangulaire qui laisse pénétrer juste assez de la lumière crue de l’extérieur. Un complexe système de cordes et de poulies permet le déploiement d’une bâche, alternativement pare-soleil ou parapluie. Les eaux de ruissellement alimentent le bassin au coeur de l’atrium ainsi que (par trop-plein) la citerne souterraine (autonomie en cas de siège). Par grosses chaleurs, l’évaporation, léchant les boiseries, induit le frais par échange de chaleur: sans électricité ni compresseurs, cette culture locale a (après les romains) réinventé, il y a de longs siècles, l’ancêtre direct de l’air conditionné.

 


A la loupe : Pékin : le Printemps introuvable

Tandis que l’administration Zhu se met, lentement en place et que la crise commence à frapper (l’Office Statistique annonce, jan à mars, une baisse de 82% des profits d’entreprises), le mois de mai pose une énigme: un Printemps politique est il aux portes? En faveur de la thèse, les photos et articles propagandistes de Wan Li, l’ancêtre réformiste, 81 ans, « en bonne santé »; le lancement 7 mois à l’avance du 20ème  anniversaire de la politique d’ouverture; le retour en mode de fantômes libéraux comme Hu Yaobang (décédé) ou Zhao Ziyang (en disgrâce)…

Mais par rapport au Printemps : 1989, 2 différences notoires:

[1] Aucune bataille de clans, juste un débat courtois. Obsédé par l’impératif de stabilité, Jiang Zemin le Président, ne tolère aucune polarisation de l’appareil, et a les moyens d’imposer sa discipline.

[2] Ce mouvement « libertaire » (ou plutôt « tolérant ») reste confiné aux hautes sphères, sans atteindre la rue, qui n’est ni sollicitée, ni intéressée. Ce qui confirme la règle: s’il est vrai qu’il n’est de libertés que conquises, ce printemps octroyé n’en est pas encore un, même si ses avatars sont toujours bons à prendre (cf notre rubrique «petit peuple»).

 


Joint-venture : US textile : ‘qui bene amat, bene castigat’

• Après avoir été longtemps des "eurosceptiques" monétaires, la Chine ne perd pas de temps pour tirer les conséquences de l’adoption de l’Euro par les 15, débuts fixés au 1er  janvier prochain. Sur les 100MM USD de sa dette extérieure, 41% viennent d’Europe, dont seulement 6% sont libellés en devises de l’U.E. La Chine compte transcrire en Euro la plupart de ces 41%, de même qu’une partie de ses réserves en devises (140MM USD). L’opération aura son coût, mais aussi ses avantages: réduction de sa dépendance à l’USD, des coûts d’exportation vers l’Europe, et une plus forte mobilité de ses exports, à intérieur de l’espace économique européen.

• Honda a achevé ses négociations pour reprendre les meubles de Peugeot/GPAC à Canton: 2  Joint-ventures, moteurs et tôlerie/montage (avec 50% de participation dans chaque). Prix du ticket d’entrée en Chine pour le géant nippon: 200M USD, pour une entrée en fonction prévue en octobre 1999. Capacité de production: 30 000 puis 50 000 unité : "en fonction des conditions du marché". Objectif et investissement prudent, donc.

• Après 8 ans, Legend, le constructeur pékinois d’ordinateurs, vient de sortir son millionième PC. Très soutenu par son marché, l’Etat et de grands groupes américains de soft- et hardware, et avec ses 500M USD de capital, Legend vise une vitesse de croisière d’1M unités/an pour l’an 2000, grâce à l’imminente 2ème usine de Huiyang (Guangdong).

• Petit pas de plus vers la libéralisation du marché bancaire: 8 banques étrangères à Shanghai (Pudong), déjà nanties de licences pour opérer en devises, ont reçu, à l’essai, celle qui leur ouvre le marché du Renminbi. Parmi celles-ci, les 2 poids lourds hongkongais HSBC et Standard Chartered, 4 nippones, Citibank, Crédit Agricole-Indosuez. Insolitement sur la touche, la Joint-venture sino-française de BNP, IBPS est la seule des 9 banques étrangères licenciées, à ne pas obtenir le privilège des autres.

• Nonobstant les grandes manoeuvres en cours entre Chine et USA, destinées à faire du voyage de Bill Clinton un succès sans équivoque, la Maison Blanche impose à la Chine 5M USD de droits compensatoires, pour fraudes sur son quota textile, par réexporté de vêtements chinois vers les USA à partir d’un pays tiers. Sanction peu gênante (en dépit des cris d’orfraie de Pékin): au total, Washington a déjà imposé pour 94M USD d’amendes textiles à la Chine, mais rien que l’an dernier, ce secteur a rapporté à cette dernière 33MM USD – les 3/4 de ses recettes d’exportation.

• Pour rattraper ses pertes immobilières (fruits d’une trop grande propension à l’investissement bulle de savon»), la puissante famille Ng, de Singapour, est contrainte de vendre à Danone pour 100M USD, 12,45% des parts de YHS, son fleuron de l’alimentation et des boissons conquis de haute lutte en ’95, sur un rival singapourien, après 4 mois de bataille sans merci. L’accord prévoit une prise de contrôle progressive par Danone, jusqu’à 51% des parts.

• Ericsson poursuit à toute vapeur la création de son Céleste Empire du téléphone sans fil: 3 contrats signés, au total 524M USD, pour construire ou étendre des réseaux GSM au Shandong, au Jiangsu, et à Harbin (Heilongjiang).

• Parmi la quinzaine des administrations ou ministères dissous en avril, figurait la CNNC (capital 2MM USD).Conséquence en mai: le gel des imports d’aluminium. Les 400000t exportées par le groupe australien Alcoa auraient dû passer à 600000t, mais CNNC Trading, chargé de reprendre les activités commerciales de CNNC, n’est pas encore en place.

 

 


A la loupe : La Suisse en Chine : photo de famille

Selon ce sondage de l’agence allemande Rol. Berger & Partner, 1/3 des usines suisses se sont installées à Shanghai, 21% à Pékin (et Hebei) et 13,7% sur Canton. Très ciblés, leurs investissements vont dans les produits de consommation (40%), la pharmacie et l’électronique (20% chacun). 281 firmes, dont une poignée de gros (Nestlé, Ciba) font l’essentiel du chiffre. Après 3 à 4 ans d’existence, selon les 98 répondants, ces firmes, Joint-venture à plus de 80%, si c’était à refaire, resteraient en Chine mais choisiraient la liberté, hors du cadre légal des Joint-ventures (25%) et des Z.E.S. (20%), devenues trop chères.

Discrétion helvétique oblige: ces firmes, tout en restant avares de chiffres, admettent à 69%, n’avoir pas atteint l’équilibre financier en 1997.

Raisons: les divergences de vues entre partenaires, les coûts de production trop élevés, et les produits suisses mal ciblés pour le marché local. A l’inverse, les clés du succès résident dans une position dominante sur le marché et un circuit de distribution efficace en Chine. Angoisses de près de 2/3 de ces managers pour 1998: la concurrence grandissante, due à la crise asiatique, le réseau commercial, la baisse de la demande, et la hausse des coûts salariaux.

Dernier détail, qui éclaire les ennuis de cette industrie par ailleurs brillante (« surdouée », pour un pays de taille si réduite): les firmes suisses admettent (52%), être passées par HongKong comme « étape intermédiaire », contrairement à l’industrie allemande, qui a investi directement. Prudence qui sapai aujourd’hui, en terme de connaissance moindre du terrain!

 


Argent : Canton : faux départ du crédit hypothécaire

La crise, en Chine, est forcément aussi affaire paysanne. Après 3 grosses récoltes, les provinces perdent de l’argent, forcées qu’elles sont de racheter à prix imposé le grain qu’elles revendent ensuite (moins cher) sur le marché. Pékin éponge par l’Agricultural Development Bank (ADB) interposée. Zhu Rongji vient de présenter son plan d’assainissement. Pas de miracle: les provinces ont une date limite pour payer leurs dettes à l’Agricultural Development Bank (ADB), que Pékin ne renflouera plus. Les offices du grain poursuivront les achats au prix imposé, mais en volumes désormais bridés, tout en tenant compte de la stabilité de l’offre et des prix. Ainsi, un lent déstockage devrait permettre de ranimer la demande et réduire l’écart entre les 2 niveaux de prix. A noter que Zhu a reculé, pour l’instant, devant une décision politiquement insupportable pour les provinces céréalières (pas encore si ouvertes !): le remplacement des offices du grain (fleuron maoïste) par des firmes commerciales privées!

Récolte nationale n°2, le coton connaît une crise similaire: après des décennies de déficit et le fléau de la peste une fois jugulé, la production s’emballe, la Chine devient exportatrice nette: fin mars, les stocks atteignaient 700 000t, +40% en 12 mois, et 6 mois de réserve. Dépourvu du stockage nécessaire, l’office du coton a perdu dans les intempéries, pour 1MMY en 1997, non remboursé par le pouvoir. Crise aggravée par la chute des monnaies asiatiques: les exports de fil ont chuté de 23% durant le 1er  trim.

Ici, Pékin vient d’annoncer, pour la 1ère  fois depuis la fondation du régime, un accroc à son système de contrôle des prix: baisse des prix d’achat, de 700 à 650Y/50Kg, et feu vert aux provinces pour une fluctuation de plus ou moins 5%.Au Xinjiang, responsable de 25% de la production, l’office provincial peut fluctuer sans limites, et vend 220000t aux USA, à prix non précisé, sous réserve d’interdit de réimportation. Cette solution témoigne d’une inspiration identique à celle du marché des grains: ne rien toucher aux instruments d’Etat, mais se rapprocher du marché. C’est un 1er pas !

• Le Heilongjiang, un des foyers industriels ruinés du pays (la seule motivation à cet investissement maoïste, dans les années 1960, avait été le souci politique de renforcer la zone, pour mieux résister à une invasion, jugée inéluctable, de l’URSS), veut vendre 1000 PMEE au secteur privé, le plus grand nombre de firmes bradées à ce jour. Mais où trouver autant d’acheteurs?

• Afin de lancer ses fonds mutuels, la China Securities Regulatory Commission (CSRC) leur avait octroyé le privilège d’un droit de préemption de 5% sur toutes émissions de parts « A » (réservées au marché chinois). Mais le succès foudroyant de ces nouveaux titres, pousse la China Securities Regulatory Commission (CSRC) à la prudence. Ces SICAV ont été lancées pour tempérer la spéculation, non l’inverse: le privilège sur les parts « A » est suspendu fin avril, après seulement 8 jours.

• Expérimenté depuis janvier à Canton, le crédit hypothécaire démarre mal. Les 3 banques autorisées à offrir ce type de prêts sur le marché immobilier d’occasion, n’ont guère fait mieux, ensemble, qu’une poignée de logis vendus. Le crédit hypothécaire n’a pas pris, disent les experts, pour 3 raisons:

[1] Les vendeurs, n’ont pas en main les titres légaux. Les promoteurs ne les ont pas obtenus, faute d’avoir payé toutes les taxes, souvent illégales: construire une maison, aujourd’hui, n’exige pas moins de 118 tampons, qui grèvent de 15 à 20% le budget total;

[2] Les procédures sont confuses et punitives (manque d’expérience);

[3] Le coût bancaire, lui aussi, est usuraire: 8% de la transaction (hors intérêts), en rapports d’experts, actes notariés, consultations et (encore) taxes variées. Pour relancer l’économie par le logement, Zhu Rongji aura à faire !

 

 


Pol : Macao : de pendules et dents cassées

• En lâchant sa bombe le 3 mai, G. Fernandes, nouveau Ministre indien de la Défense, a suscité plus d’embarras que de courroux, tant à Pékin qu’à New Delhi : la Chine était "danger n°1 pour l’Inde, bien avant le Pakistan"; « la Chine aurait installé un parapluie nucléaire au Tibet, et une oreille électronique dans les îles Coco (birmanes), 40km au large de l‘archipel(indien) d’Andaman : il conviendrait de renforcer les défenses indiennes aux frontières communes! ». Devant le tollé, le nouveau 1er ministre indien BJP s’est distancié de son bouillant ministre (partenaire socialiste dans sa coalition), et Pékin, bon prince, a passé l’éponge après une protestation de pure forme. NB : la foucade de m. Fernandes se situe une semaine après la visite indienne de Fu Quanyou, n°2 actuel de l’Armée Populaire de Libération (APL), officier peu connu pour faire dans la dentelle.

• El Niño oblige, la récolte 1998 promet d’être plus que médiocre. Au Nord 2,1M d’ha de blé d’hiver est touchée par l’aridité, et 6,7M ha n’ont pas (encore) été plantés. Au Sud 1,3M d’ha de rizière attende, en jachère forcée. Les pluies récentes ne suffisent pas à combler un an de ciel à sec. Du point de vue des désastres naturels, la Chine paie 20 ans de laxisme (non entretien de digues, saignée à blanc des forêts etc): ses experts en évaluent le coût à 250MMY en l’an 2000, contre 100MMY en 1990.

• Macao: lancement, place Tian An Men, de la pendule chinoise du compte à rebours du retour à la mère patrie (jour « J » moins 573), et remise des pendules à l’heure par le Portugal, avec des arrestations de gangsters en série, et notamment celle du  tou’r (chef) de la triade K14, "Koi-dent cassée", 2 jours après un attentat à la bombe contre la voiture du Procureur général. Tentative bien tardive et velléitaire de maîtriser la situation, à la veille du retour à la Chine.

 Mais tout Macao vibre. Rien que la nuit de vendredi, 5 voitures ont brûlé, accompagnées par deux magasins, sous les torches des malfrats. Les pandores lusitaniens voient peu de raison de risquer la mort pour une enclave vouée à repasser sous souveraineté chinoise, après un intermède portugais de 5 siècles, dans 570 jours. Autrement dit, la libération sous 30 jours de Dents Cassées « faute de preuves », est inéluctable, malgré un pathétique plaidoyer des magistrats, « pour l’honneur de la justice »)!

• Zhu Rongji a reçu Fumio Kyuma, directeur de l’« agence japonaise pour la Défense » (l’équivalent d’un ministère), quoique ce dossier ne relève pas de son mandat. Zhu  vient aussi d’être nommé n°2 de la Commission de Politique étrangère. Le nouveau 1er Ministre affiche ainsi, sans attendre, ses ambitions diplomatiques. Bien conscient que l’état de grâce dont il bénéficie actuellement à l’intérieur, ne durera pas, il prépare dès maintenant le 2ème  étage de sa fusée: après le toilettage de l’économie chinoise, il pense pouvoir s’occuper prioritairement, dès l’année prochaine, des relations avec l’étranger, territoire de Jiang.

• Après 3 jours à Pékin (29 avril -1er  mai), Madeleine Albright parle d’embellie, et les « contours médiatiques de la visite Clinton se précisent: 10 jours du 24 juin au 3 juillet, 1200 participants, 4 Boeing pour 6 étapes à travers la Chine (Xi’an, Pékin, Shanghai, Guilin, et HongKong) -grand spectacle en dolby stéréo pour gagner la bataille de l’opinion publique US.

• "Il faut que cesse immédiatement ce phénomènes des juges qui rendent leurs verdicts en suivant des ordres et non les lois", voilà ce que concluent publiquement les professeurs de droit, en colloque en marge du centenaire de l’Université de Pékin. Peut-être "angéliques" mais réalistes, ces intellectuels reconnaissent "qu’il ne pourra en être ainsi tant que le pouvoir judiciaire n’aura pas reçu son indépendance de l’exécutif". L’expression du refus, est souvent le point de départ du changement.

• Luosang Jiangcun, maire (non élu) de Lhassa (Tibet) depuis 1995, est en visite d’un mois aux USA, à travers 10 villes du pays. Quoique ce voyage garde volontairement un profil bas, il représente un « coup » d’une très grande force par les autorités chinoises, leur apportant trois profits sans aucun handicap :

[1] Le patron de la plus enclavée des provinces va apprendre, en un mois, bien des techniques modernes de management, et faire son carnet d’adresses;

[2] Il va obtenir des capitaux pour le Toit du monde, chouchou de l’Amérique;

[3] Et par dessus tout, il va prouver par sa présence physique que le leadership tibétain n’est pas han, que le régime n’est pas si intolérant qu’on dit, faisant ainsi baisser de plusieurs tons les critiques.


Temps fort : À Nanping : Confucius, indemne!

Si vous êtes de ceux qui croient en une Chine monolithique sans diversité, le VdlC vous offre le cas de Nanping, village de Huangshan retranché du monde. Quoique Nanping soit ignoré des hordes de touristes, le canton  entier (Yixian) est restreint aux étrangers : il faut un permis, chichement accordé. Officiellement, en raison d’un sous-développement local. Pourtant, Nanping montre toute autre chose. Dans ces splendides maisons Ming, tout, de la décoration à l’organisation du travail, ramène la morale toujours assidûment vécue de Confucius. Chacune des colonnes du patio affiche les maximes des aïeux: étudier dur pour accéder aux honneurs, ou respecter les pères, en labourant profond. Au fond, une table, à gauche, un miroir (jing), signifiant par homophonie, la réflexion avant l’action;à droite, une jarre  (ping) pour assurer le retour sain et sauf des enfants partis au loin. Coup éblouissant : Nanping, contrairement à la région, a réussi à traverser indemne la Révolution Culturelle. La route, alors, n’existait pas: Nanping a simplement gommé le chemin, et vécu 10 ans en vase clos – preuve d’une impeccable discipline.

Aujourd’hui, Nanping et ses soeurs doivent faire face à un danger autrement angoissant : la course au profit, la mécanisation, l’exode rural, le bond en avant vers un Occident mal compris. Déjà à Xidi, quelques km plus loin, chaque maison s’est convertie en dépôt d’antiquaire, qui écoule les merveilleuses statuettes et bas reliefs… Tant qu’il en reste… L’acculturation aux portes!

Ce qui résout l’énigme de la fermeture partielle à l’étranger: le canton tire parti des lois du socialisme pour se protéger. Attend, pour tirer les leçons des erreurs des autres, pour voir si n’émergeraient pas des formes de progrès plus douces et compatibles avec leurs valeurs – le tourisme culturel, par example, mais ceci est une autre histoire!

 


Petit Peuple : Comment faire procès à un tigre de Sibérie

• L’interdiction des ventes pyramidales en Chine (par des groupes américains comme Avon ou Amway) a désespéré les candidats investisseurs (le principe de ces ventes, étant la perte totale pour quiconque investissant en bout de chaîne). Le groupe Kangfubao avait été assez imprudent pour conserver des bureaux à Changsha (Hunan): 3000 petits épargnants du Fujian, Sichuan, Jiangxi, Zhejiang et Jiangsu, qui avaient tous payé 600Y la licence de revente, se sont rassemblés devant les locaux pour exiger leur dû.

N’ayant rien à perdre (rien en poche, fût-ce pour manger ou rentrer chez soi), ils se sont heurtés à la police durant 4 jours. A chaque heure, selon Sud Week-end, les otages recevaient quelques gifles. De guerre lasse, le 23 avril, Kangfubao a sorti 1MY pour payer les colporteurs.

• Procès contre « X » à Changchun (Jilin): 3 paysans de cette province nordique accusent un magnifique tigre de Sibérie d’avoir dévoré à chacun, un buffle (leur 1er outil aratoire). Pour leur avocat ergoteur, dans la mesure où l’espèce est protégée, l’État serait responsable des actes du fauve sanguinaire. La Cour n’en disconvient pas, mais ne trouve dans la loi aucune clause de compensation. Affaire suivie de près par un autre paysan du Xichuangbanna (Yunnan, frontière laotienne, dernier sanctuaire chinois de tigres et d’éléphants), qui avait déposé une plainte similaire 10 ans plus tôt. L’avenir dira à ces braves gens si faire un procès à un tigre, était plus efficace que   (dui niu tan qin, « jouer du luth pour la vache »: équivalent lettré, pour « perdre son temps »)!

• Après 5 ans dans la disgrâce, Cui Jian, l’enfant terrible du rock chinois sort de l’ombre: un concert confidentiel, et surtout, un 4ème  disque en cours de parution.

• Pensum de 200 M de jeunes têtes brunes, le manuel scolaire politique est trop théorique, parle trop de lutte des classes, de réforme agraire, et de «  » (« vive Lénine »); il tend aussi à démontrer (ce qui ne va nullement de soi) que le capitalisme court à sa perte et que la victoire du socialisme est inéluctable. En somme, ce manuel est indigeste, sec et peu appétissant comme un biscuit de marine. Ce n’est pas un dangereux dissident qui parle, mais un choeur de 44 professeurs, qui viennent d’achever la rédaction du nouveau livre de classe : dès septembre prochain, le nouvel outil de propagande dévoilera les secrets des actions en Bourse, des corporations, de la finance, de la taxation, des contrats à durée indéterminée et autres progrès des temps modernes. « Cette fois », se plaît à dire le Président du Comité, « nous avons eu plus de liberté de manoeuvre », sans trop de mots d’ordres et oukases tombés d’en haut.

• En dépit des efforts des pouvoirs publics, drogue et SIDA grimpe sans fatigue leur courbe exponentielle poids du passé. Côté SIDA, la Chine reconnaît officiellement 10 000 sidéens, officieusement 250 000, et que le fléau est entré dans une « phase d’accélération ». Côté soleils noirs, le pays compte désormais « 540 000 drogués, sans doute bien plus » dont 80% de jeunes. De janvier à mars, le nombre de cas détectés a monté de 6% (22000), les arrestations de 7,6% (28000) les saisies d’héroïne (qui se concluent toujours par des condamnations à mort) de près de 60% (1,6t), tandis que l’opium signe son retour (310kg, +99%).

 


Rendez-vous : 16 mai: Cambaluc, recherche Khan, désespérément

14-15 mai, Pékin: Visite en Chine du Président de PSA, Jean-Marie Foltz.

8- 12 mai, Pékin: « festival » de l’ordinateur dans le quartier high-technologie de Zhongguancun.

12-15 mai, Pékin: salons internationaux de l’aéroport, des services aériens, et de l’électronique de défense

11-15 mai, Pékin: semaine internationale des Industries high-technologie

16 mai, Pékin PPP: Rallye de Cambaluc à la découverte de Pékin, organisé par l’UFE. Parcours (bicyclette, cheval, voiture, aérostat…) d’épreuves culturelles ou physiques, puis soirée flonflons-lampions au Lycée Français. Inscriptions jusqu’au 13 mai, près des sociétés Shooter, Total ou Framatome.