Le Vent de la Chine Numéro 22 (2016)

du 19 au 25 juin 2016

Editorial : Trois parfums du temps présent

Les relations entre Chine et Etats-Unis sont à l’orage. La tension provient de deux incidents – à vrai dire tous deux initiés depuis l’Amérique.

Le premier fut la dénonciation sèche le 10 juin, du projet de 370 km de TGV américain, 370km de Las Vegas à Los Angeles. CRI (China Railways International) devait délocaliser une part de la production. Peu locace, la partie américaine justifie le retrait par « des difficultés de CRI à tenir l’agenda », à « obtenir à temps la licence »… Pour l’industrie ferroviaire Céleste, c’est un coup dur, qui la prive de son seul fruit tangible à l’export en 20 ans d’efforts.

Le second calice que Pékin a dû boire, est politique : Barak Obama reçut le 15 juin le Dalai Lama au Salon des cartes à la Maison Blanche. Depuis des années, nul chef d’Etat n’avait osé une telle démarche, de peur d’encourir les foudres de Pékin. La veille encore, un porte-parole chinois accusait le pontife lamaïste de « colporter de par le monde ses ambitions de diviser la Chine » et avertissait que la rencontre, dût-elle avoir lieu, heurterait les sentiments du peuple chinois et endommagerait durablement la confiance mutuelle… Obama n’en a pas tenu compte. A 7 mois de la fin de son mandat, il ne prend plus de gants. Il ne s’est pas expliqué sur ses motivations : elles peuvent être une amitié ancienne entre les deux hommes, mais aussi une critique de l’expansion de Pékin en cette mer de Chine du Sud, et de sa tentative de modifier le droit maritime en sa faveur…

Autre sujet, le Parc Disney de Shanghai ouvrait le 16 juin, un espace de rêve qui n’aura manifestement pas manqué son rendez-vous auprès des habitants de la « tête du Dragon » (surnom de la métropole du Yangtzé). Deux semaines à l’avance, tous les billets étaient vendus, de 370 à 499 yuans. Murray King son vice-président, prédit 1300 yuans de dépenses sur place par visiteur, en frais d’hôtel, de restaurants et de souvenirs. En tablant sur la clientèle potentielle des 330 millions d’habitants de la bande côtière à 3 heures de TGV, les rentrées annuelles devraient s’élever à  19,5 milliards de yuans, frôlant 1% du PIB de la ville. Certaines voix critiques avaient prédit une désaffection du public local, à ce parc de loisirs aux thèmes pas assez chinois. Mais à ce qui semble, la métropole semble au contraire plutôt fière de disposer d’un espace « venu d’ailleurs ». Le professeur He Jianmin, de l’université shanghaïenne d’économie et finances, table sur la réussite d’un site permettant aux gens de se défouler dans une ambiance rafraichissante, contant des histoires  aux origines et valeurs différentes !  

Dernier point : la campagne anticorruption, et le changement de perspectives qu’elle induit auprès de la population après deux ans de poursuite à boulets rouges. Ainsi, pour dissuader ses lecteurs de céder à la tentation, le quotidien de la CCID (police anticorruption) fait appel à la saga du « Seigneur des anneaux », et avertit les candidats à la corruption de résister à leurs tentations pour éviter le sort de Gollum, le vilain personnage du roman, victime de ses désirs excessifs. 

La tentation pourtant, n’est plus ce qu’elle était : les cadres du Shanxi, une province dévastée l’an dernier par les arrestations massive de ses responsables, et son bureau politique quasi-entièrement décapité,  « n’osent plus » se laisser soudoyer.

Et un autre sondage auprès des femmes d’apparatchiks aboutit à cette révélation hilarante : ces dernières, quadra– ou quinquagénaires vouent toute leur gratitude envers la campagne de Xi Jinping. Désormais fidèles, leurs maris délaissent leurs « petits miels » et recommencent à vivre en famille. Les couples, et la morale sont enfin saufs !


Diplomatie : Chine-Allemagne : la quête d’une voie nouvelle

La visite d’Etat d’Angela Merkel entre Pékin et Shenyang (12-14 juin) a connu un succès sans égal, lui ayant permis de décrocher pour ses 20 patrons d’entreprises du voyage, autant de contrats, pour 13 milliards d’€. Parmi eux, une chaîne de montage d’hélicoptères Airbus à Shenyang (100 appareils commandés, 3 ans d’ouvrage), l’usine en JV Daimler / BAIC de moteurs de voiture (0,6 milliards d’euros), et la cession du constructeur d’éoliennes maritimes WindMW au consortium hydroélectrique des Trois Gorges.

Cette visite se présentait pourtant sous des auspices difficiles. Au plan international, un conflit commercial fait rage, du fait des surplus d’acier chinois déversés à vil prix à travers le monde – l’Union Européenne prépare la riposte. Or, c’est aussi le moment où d’ici décembre, au titre du traité de 2001 d’accession de la Chine à l’OMC, Bruxelles est supposée abandonner, dans les 28 Etats-membres, son bouclier antidumping : de reconnaître à la Chine le statut de « pays d’économie de marché ».

Quoique lié à Merkel d’une amitié ancienne (cette visite était la 9ème depuis 2005), Li Keqiang n’a pas manqué de lui rappeler que « la Chine a rempli sa part du contrat. A présent, c’est à l’Europe de tenir sa parole », sous peine de voir la Chine se lancer dans des mesures « légales », préludes à une guerre commerciale.

La réponse de la Chancelière ressembla à celle de Bismarck, « main de fer dans un gant de velours ». Oui, elle et l’UE reconnaissent l’engagement pris en 2001, et elle-même s’engageait à jouer les entremetteurs entre le Conseil d’Etat chinois et la Commission Européenne : une solution devrait être trouvée, conforme à cette promesse. Mais d’abord, la Chine devrait aussi y mettre du sien : elle ne pourrait indéfiniment faire l’impasse sur l’Etat de droit, sous prétexte de pratiquer un type de gouvernance plus laxiste, « inspiré de la loi ». En matière d’acier, elle devrait négocier, tailler plus courageusement dans ses surcapacités. En matière commerciale, il était grand temps de passer à la réciprocité : ouvrir aux industries allemandes l’accès son marché intérieur, ses marchés publics, son secteur des services, des investissements, de la construction.

Cet appel de Merkel traduit un éveil en cours en Allemagne : cette Chine qu’elle voyait « complémentaire », devient rivale. Finies, les exportations de peluches pour bébés, ce que la Chine vise désormais est son marché des renouvelables, du high tech, tout ce qui fait le cœur de l’export d’outre-Rhin. Forte de sa finance, Pékin brigue 25 firmes allemandes à haute technologie, pour 9,1 milliards d’€, dont Kuka, la firme de robots automobiles d’Augsburg pour 4,6 milliards. Mais si elle acquiert  ces fleurons de R&D, que restera-t-il, en 2025, du plan fédéral « Industrie 4.0 » ? L’Allemagne s’inquiète, et la Chine réalise le risque : Midea, candidat repreneur de Kuka, se dépêche de réviser ses ambitions, à « seulement » 49% des parts…

En Chine-même, les groupes européens aussi sentent tourner le vent conjoncturel, et les barrières d’accès toujours plus fortes. Dans son rapport annuel de juin, la Chambre de Commerce Européenne révèle que seuls 47% des membres envisagent réinvestir au Céleste Empire en 2016, contre 56% en 2015, et 86% en 2013. On a l’impression d’arriver en fin de cycle : pour que redémarrent ces échanges et interconnexions réciproques, Allemagne (Europe)/Chine, la réforme promise par l’équipe Xi Jinping-Li Keqiang depuis 2012 va devoir enfin se déployer, en Chine-même, mais aussi en dehors.

Les deux gouvernements ont siégé ensemble pour tenter d’avancer en ce sens –Madame Merkel s’était déplacée avec 5 de ses ministres et 6 secrétaires d’Etat. La solution est évidemment hors des compétences bilatérales—elle consistera en un traité Chine-UE de protection des investissements, dont la négociation s’éternise depuis des années. Cependant, en bilatéral la visite d’Angela Merkel a permis d’enregistrer une modeste initiative : un Traité de coopération sur les pays et marchés tiers, avec deux premiers projets approuvés, tous deux en Afghanistan : pour une gestion commune urgente en cas de catastrophe naturelle, et une coopération universitaire sur la sécurité des mines de charbon.

Il est aussi question d’ouvrir des chantiers de coopération au Mali, où la Chine entretient des Casques Bleus, et où Berlin est intéressée à investir pour rétablir la croissance, en rempart à la menace islamique. 
C’est peu, mais d’autres dossiers sont « au four », telle l’équipement en technologies Siemens de TGV chinois destinés aux marchés tiers, ou le renfort technologique des rames de fret sur la « route de la soie ferroviaire » Chongqing-Duisbourg.

Angela Merkel et Li Keqiang ont désigné ce modèle une « nouvelle approche qualitative », en espérant la prévention de conflits commerciaux et la création de nouveaux produits combinant technologie européenne et bas coût chinois. 

Tout bien considéré, c’est exactement ce que tente de faire la France avec la Chine, en nucléaire et en agro-alimentaire, depuis 20 ans. Mais une conclusion s’impose dès maintenant, imparable : si la Chine, enfin, acceptait de s’allier commercialement avec des partenaires développés (Europe, Etats-Unis, Japon) sur ces marchés à haute technologie, vers les marchés tiers, son offre gagnerait en acceptabilité sous tous rapports – commercial, technologique, et politique.

 


Technologies & Internet : Le smartphone détrônera-t-il le portefeuille ?

En 2015, 358 millions de Chinois, soit la moitié des internautes se servirent de leur portable pour régler une note : sur 12 mois, ce dernier-né des modes de paiement avait gagné 60% en volume d’affaires.

Deux groupes de la toile chinoise s’étaient partagé l’essentiel de ce marché natif : Alibaba (68%, via Alipay) et Tencent (20%, via WeChat Pay). Mais la guerre fait rage : selon  iResearch, en 2015 Alipay perdait 14% de ce qui était alors son quasi-monopole, tandis que WeChat gagnait 11%. 200 groupes concurrents se partageaient les miettes des 12% restants du marché : parmi ceux-ci, certains tels Apple Pay et Samsung Pay, nouveaux venus, sont certains de ne pas en rester là, avec leurs offres respectives de milliers d’applications payantes.

D’où la question qui se pose : après avoir sauté l’étape  du chèque, la Chine serait-elle en train de faire de même avec la carte bancaire, au profit du paiement mobile ?

Tout bien considéré, ce pays est coutumier du fait, de ce saut sans complexe, comme d’un « petit dernier » dans une famille, qui apprend spontanément ce que l’aîné a mis de longues années à maîtriser. Ici, le téléphone portable a très vite enterré le téléphone fixe, l’impôt du particulier se calcule et se paie en ligne, et en cas d’accrochage automobile, une application  existe sur smartphone avant que notre bon vieux « constat-amiable », ait eu le temps de naître…

Comme l’explique Gu Yu, cofondateur de Mileslife (une application d’accumulation de points de fidélité) ce paiement mobile « est une contrepartie du développement tardif du pays ».

C’est aussi, en partie, l’expression d’une liberté associée au smartphone, et d’une certaine méfiance profondément ancrée dans l’homme de la rue, envers les banques, ainsi que leur extension, la carte bancaire

Fondé en 2002 par 85 banques locales, UnionPay, enregistrait en 2015 selon Bloomberg 2100 milliards de $ (équivalent) de paiements par cartes de débit, et 660 milliards sur cartes de crédit. Or ces 14 ans de monopole national sur la monnaie « plastique », pourraient bien être la cause de sa désaffection actuelle : la concurrence étrangère (Visa, MasterCard…) a été barrée du marché, permettant  à la banque locale de mieux exploiter ces centaines de millions de clients privés d’alternative. 

Un autre symptôme de ce rejet des banques, est le nombre des fonds de placement alternatifs qui explosent en Chine. Exemple : des fermes « bio » qui offrent à leurs investisseurs individuels, en échange de leur bas de laine, une rémunération en espèces assortie de livraisons hebdomadaires ou mensuelles en produits du terroir garantis cultivés sans chimie… Souvent, les clients de tels circuits, ferment leur compte en banque, ou le laissent dormant.

Le smartphone pour sa part, s’avère bien plus facile et immédiat, qu’il s’agisse de régler son loyer, sa note d’électricité, de restaurant ou de taxi. La clientèle est très jeune : seuls 14% des paiements proviennent d’usagers de plus de 40 ans.

Le succès foudroyant du téléphone portable, comme remplacement du portefeuille, s’explique d’abord par l’intégration des services. Alipay et WeChat ont greffé leurs caisses virtuelles à leurs plateformes commerciales et/ou sociales (Tmall, WeChat), avec passerelles vers les banques. Instantané,  le paiement est débité du compte de l’usager, ou de son compte en banque.

Cette souplesse d’usage permet le lien à d’autres applications telles Didi Chuxing ou Ele.me, et à des millions de commerces, de l’épicerie de quartier aux caisses de Carrefour, McDonald’s ou Uniqlo. Pour les clients, le coût de l’opération oscille entre la gratuité et 0,1%, en cas de virement vers sa banque via Wechat.

Autre élément d’explication de sa popularité, le paiement mobile est trop récent pour avoir subi des scandales de piratage ou de détournement : il conserve sa crédibilité auprès du grand public.
Discrètement de leurs côtés, Etat et consortia publics favorisent ce paiement : il promet d’être une source inépuisable de données individuelles, qui alimentent des centaines de millions de profils, pour des usages multiples. Les groupes peuvent affiner leurs offres publicitaires à chacun  en fonction de son âge, sexe, de ses affinités. Chaque corps de l’Etat peut puiser dans cette base de données : pour calculer ses besoins en services sociaux, ainsi que l’innocuité ou nocivité de tout un chacun, selon ses besoins…Une telle perspective pourrait être inquiétante pour l’usager du paiement mobile. Et pourtant elle le laisse parfaitement froid. 

L’avenir du paiement mobile semble donc radieux, avec une inconnue toutefois, non des moindres : en juillet 2015, la Banque Centrale planchait sur une législation du paiement mobile, et pour protéger l’usager contre lui-même, réfléchit à un plafond maximal de ses dépenses mensuelles en ligne. Depuis lors, plus aucune information n’a filtré sur le sujet. On peut comprendre que l’administration prenne son temps – afin d’accumuler de l’expérience avant de statuer, et de ne pas risquer de compromettre l’avenir de ce marché qui s’avère florissant !


Exploration : 20.000 lieues sous les mers du Sud

Preuve de la détermination de la Chine à poursuivre son expansion en mer de Chine du Sud : ce projet, dévoilé en mars, de créer une base sous-marine à grande profondeur  en seconde position sur la liste des 100 projets scientifiques prioritaires du plan quinquennal (2016-2020). En mai, lors d’une conférence académique nationale, le Président Xi Jinping notait que « le fond des mers détenait des trésors encore inexplorés et inexploités. Pour les conquérir, nous devons maîtriser les technologies d’accès à ces profondeurs… ».

Comme en tous autres domaines d’exploration extrême (Arctique, spatiale, vulcanologique), la Chine veut rattraper son retard par rapport aux autres puissances – les bathyscaphes occidentaux furent développés dans les années ‘60 (cf  photo : le « Trieste » américain). Mais le projet chinois va plus loin, en projetant un séjour d’un mois sur place, au fond de fosses marines, jusqu’à 3000m, pour des dizaines de personnes embarquées, ce qui suppose à bord, l’air, les vivres et tout le nécessaire au programme de recherche. Son constructeur, la CSIC (Corporation nationale de construction navale), ne communique pas sur sa structure, devant résister à 300 atmosphères, son équipement (hublots, cameras, bras-robots, sous-marin annexe). Pas plus que sur son coût ou sa date de mise en eau.

A quoi servira-t-il ? D’abord, à étudier la structure géologique des gisements pétroliers et gaziers de cette mer, qui devraient totaliser 11 milliards de barils selon les Etats-Unis, et 125 milliards selon la CNOOC. Il pourrait aussi analyser la présence et teneur en nodules polymétalliques du fond marin, pouvant signifier des volumes immenses de fer, cuivre et métaux rares.

Pékin évoque aussi comme fonction possible l’écoute sous-marine, complétée par un champ d’« oreilles de mer » plantées au fond des éléments dans le but de repérer les sous-marins ennemis. Selon Bryan Clarck toutefois, l’ancien sous-marinier nucléaire, devenu stratège américain du monde du silence, une telle approche est de faible intérêt militaire, vu son coût exorbitant et sa vulnérabilité à la détection. Mais cela permet à la Chine, à tout le moins, de rattraper son retard et de pouvoir se profiler, sous 20 ans, en égale parmi les puissances sous-marinières.

 


Chiffres de la semaine : 91ème mondial, 700 chaque jour, un tiers des retards, plus du double en 10 ans…

En 2015, seulement 68% des 3,37 millions de vols opérés par les compagnies aériennes chinoises, étaient à l’heure.

La durée moyenne des retards était de 21 minutes (2 minutes de plus qu’en 2014). 30% de ces retards aériens sont imputés à l’armée chinoise (APL) pour sa « gestion du contrôle aérien », 29% à cause de « mauvaises conditions météo ». Cause n°3 : les « compagnies aériennes » elle-mêmes (19%) – (source : Administration Chinoise de l’Aviation Civile).

Une situation qui, nous l’espérons, ne va pas s’aggraver avec la construction de 66 nouveaux aéroports civils à travers tout le pays  d’ici 5 ans !
En parallèle, plus de 200 nouvelles routes aériennes internationales doivent être ouvertes cette année, en particulier vers les pays du programme « Une ceinture, Une route » (Asie Centrale et de l’Ouest). Elles s’ajouteront aux 663 routes déjà existantes, reliant la Chine à 118 pays.

*****************

Les Chinois en voyage à l’étranger (dont les ressources du foyer sont supérieures à 20,000 $ par an) dépenseront plus du double dans 10 ans ! Ils étaient déjà les plus dépensiers au monde, avec 137 milliards de $ dépensés en 2015. Mais en 2025, Visa (CB) et Oxford Economics prévoient une augmentation de 86%, à 255,4 milliards de $. Cette étude prend en compte les dépenses pendant le voyage (hôtel, restauration…) mais exclut le prix du billet d’avion.

*****************

700 : c’est le nombre de personnes en moyenne qui décèdent chaque jour en Chine d’accidents de la route (estimation de l’OMS) – pour un total annuel d’environ 260 000 personnes. Parmi les victimes, six personnes sur 10 seraient considérés comme « vulnérables », à savoir piétons, cyclistes et motocyclistes.

*****************

La Chine se classerait au 91ème rang mondial de la vitesse internet, avec une moyenne de 9,46 Mb par seconde (selon une étude publiée par China Daily). La Corée du Sud est n°1 avec 26,7 Mb/s , suivie de la Suède et de la Norvège. Rappelons qu’il y a en Chine 688 millions d’internautes, dont 90,1% sur mobile. 358 millions d’entre eux font des achats en ligne. 152 millions utilisent des services médicaux en ligne, 110 millions s’y forment, et 96,64 millions commandent des taxis sur des applications mobiles.


Petit Peuple : Chongqing – Seule contre tous… (1ère partie)

Depuis des décennies, ce fut la plus étrange des noces à Shuanglong (à  80km de Chongqing), au Nouvel an lunaire de 2000, année du Dragon d’or. Les invités étaient rares, pour une fête de prestige : 30 à peine, endimanchés selon leurs maigres moyens de paysans du Sichuan.

Sur leurs lourdes vareuses de laine, les femmes portaient de grands carrés de coton écarlates aux motifs de roses, signe propitiatoire de bonheur. Gelés dans leurs anoraks vieillis, les hommes se frottaient les mains pour se réchauffer. Un violoneux aveugle tirait de son erhu des airs entêtants, sous la frappe incertaine d’un gamin sur son tambourin.

Large sourire aux lèvres, Ma Zhengsong, oncle et tuteur légal de la mariée, occupait la place des parents. Contre lui se serrait son épouse chétive et soumise. Sous le voile rouge qui la couvrait jusqu’à la taille, Ma Banyan, la mariée semblait minuscule face à l’immense Chen Xuesheng, son promis en costume de coton noir, chemise blanche sans col et gros châle.

Dans les yeux des parents du marié  se lisait la fierté, mêlée au soulagement : après tant d’années, ils réussissaient enfin à caser leur garçon ! Ils auraient bien voulu une fête plus fastueuse, mais les moyens manquaient, une fois payée la dot. Dans leur montagne, les filles, denrée rare, se payaient à prix d’or, 8000¥ dans le cas de Banyan, soit un an de leur labeur : ils ne pouvaient assumer plus.

A part une foule dense, brillait par son absence le prêtre taoïste : c’était le maire qui le remplaçait dans le rôle d’ordonnateur des rites. Pourquoi ? Pour leur éviter des frais, sans doute, ou bien pour garder sur cette fête le profil bas. D’ailleurs, pas par hasard, la noce avait aussi omis de passer par le bureau des mariages, privant ainsi l’union de toute légalité.

Et pour cause : cette union était illégale. Car si Xuesheng avait 29 ans révolus, Banyan n’alignait que 12 printemps, en infraction patente à la loi de la  République populaire –selon la norme, pour les filles, pas de fête nuptiale avant 20 ans révolus ! Heureusement que le maire était de connivence : il fallait bien des mariages, des naissances pour compenser l’hémorragie des jeunes, surtout des filles qui se sauvaient pour aller découvrir les lumières de la ville. En péril après tant de migration, le village de Shuanglong devait se défendre. Lier poings et poignets des filles avant qu’elle ne tombent dans ces chimères d’abandon de leur communauté, était pour  Shuanglong une simple question de vie ou de mort !

Pour Banyan, à l’instar de ses deux sœurs aînée et cadette, le guignon avait débuté en 1997. Le long de leur enfance, leur maman s’était montrée plutôt bonne mère, mais il lui arrivait régulièrement de perdre la boule, de tomber à l’Ouest. Quand venaient ses crises, elle devenait incontrôlable, bave à la bouche, survoltée d’une puissance physique que nul n’eût attendu d’un corps si fluet.

Dans cet état, un jour de mai, elle avait poignardé à mort le père, qui tentait de la maîtriser. Le juge l’avait reconnue irresponsable, et l’avait renvoyée au village – la famille n’avait pas l’argent pour payer sa place en institution. Puis à la prochaine crise, la pauvre démente s’était sauvée pour ne jamais revenir.

À 7, 9 et 11 ans, les fillettes avaient été confiées à leur oncle, personnage retors et sans cœur qui les avait aussitôt sorties de l’école pour les faire trimer du matin au soir, entre les champs et la couture. De fil en aiguille, il avait fini par réaliser la mine d’or sur laquelle il siégeait : il fallait les marier, pour la dot !

Dès que chacune passa ses 12 ans, il la casa au plus offrant des célibataires vieillissants qui faisaient antichambre devant sa porte. Entre ces trois mariages, l’argent qu’il amassa lui permit de se mettre quelques années au vert, à la guinguette, à boire, jouer et fumer.

Voilà pourquoi Banyan, pré-pubère, se retrouvait sous ce voile, que son fiancé retirait à présent sous les trilles du violoneux et les applaudissements clairsemés, tandis que le maire les disait mari et femme…

Le lendemain, Xuesheng emmena sa femme-enfant au train, en route pour le Fujian, à 2500 km. Une fois installée avec lui dans leur chambrette, Banyan dut apprendre ce que le mariage signifiait : l’épreuve que lui infligea chaque nuit cet homme grossier, le lui fit détester à jamais. 

Il l’enfermait le matin pour aller travailler. Mais très vite, elle trouva la clé des champs, en escaladant un vasistas. Avec en poche quelques centaines de yuans d’argent du ménage, elle retraversa la Chine par bus locaux, se tassant dans son siège, « bouche cousue et ravalant sa souffrance » (chīyǎ bakuī , 吃哑巴亏). L’instinct de survie la faisait se murer en son silence.

Arrivée à Shuanglong, logée par une de ses sœurs, elle alla à la police porter plainte, solliciter la protection de la loi. L’accueil fut d’abord sympathisant. Mais très vite, la chance la quitta, quand le commissaire, appelant le maire, raccrocha d’un air entendu : elle était mariée, et il ne pouvait donc rien faire, face à cette banale querelle de ménage. La solution consistait à la rendre au mari. En l’occurrence, à ses parents, le temps que Xuesheng revienne la chercher du Fujian. Goguenard, son père lui conseillerait de garder sa femme plus serrée : pour Banyan, l’avenir s’annonçait plus sombre que jamais.

Mais chez les femmes chinoises, les épreuves sont une chose, le caractère une autre : Ma Banyan est jeune, l’âme d’acier trempé. On le découvrira dès la semaine prochaine !


Rendez-vous : Semaine du 20 au 26 juin 2016
Semaine du 20 au 26 juin 2016

20-22 juin, Pékin : AIAE,- Asian Int’l Industrial Automation Exhibition, Sont int’l de l’automation industrielle

hichina

21-23 juin, Shanghai : BIOPH China, Salon de la pharmacologie et des biotechnologies

21-23 juin, Shanghai : FI Food Ingredients Asia China, Salon int’l des ingrédients almentaires

21-23 juin, Shanghai: CPHI China, HI China, Salons des ingrédients pharmaceutiques, et des ingrédients de santé

21-23 juin, Shanghai : ICSE Chna, Salon de l’industrie pharmaceutique

innopackchina21-23 juin, Shanghai : INNOPACK China, Salon professionnel de l’emballage produits pharmaceutiques

21-23 juin, Shanghai : LABWORLD China, Salon pour le secteur des équipements de laboratoire, du matériel d’analyse et des biotechnologies

21-23 juin, Shanghai : P-MEC China, Salon des machines et équipements pour l’industrie pharamaceutique

21-23 juin Shanghai : EXPO STARCH, Salon int’l dédié à l’amidon et aux produits dérivés

21-23 juin, Shanghai : RISI Asian Conference, Conférence asiatique sur le papier et la pâte à papier

22-26 juin, Pékin : CIMES, Salon int’l de la machine outils

bitebejing24-26 juin, Pékin : BITE – Beijing Int’l Tourism Expo, Salon int’l du tourisme et des loisirs