Le Vent de la Chine Numéro 22

du 31 au 6 juin 2014

Editorial : Les leaders en campagne, à la campagne

Le 25ème anniversaire de la nuit du 3-4/06 1989, où la troupe tira sur les étudiants sur la place Tian An Men, a lieu cette semaine. Ce drame modifia la perception du Parti dans la société et installa jusqu’à ce jour au pouvoir une aile conservatrice hostile à toute ouverture démocratique. Depuis, dans les écoles et les media, nul effort n’ a été épargné pour refouler ce souvenir tragique. Ce qui n’a empêché début mai, les arrestations d’une quinzaine d’artistes et intellectuels (dont l’avocat Pu Zhiqiang, la journaliste Gao Yu, le couple d’activistes Yu Shiwen et Chen Wei) qui tentaient de raviver cette mémoire.

Parallèlement, sans doute pas par hasard, les 7 membres du Comité Permanent firent une tournée d’inspection dans les provinces, pour renforcer la stricte application de la « ligne de masse » contre les « styles malsains de vie et de travail ». Ils relancèrent les diverses campagnes lancées par Xi Jinping depuis 2013 :

– la purge de la propagande, qui restait encore aux mains d’hommes de Jiang Zemin. Depuis janvier, on compterait 7 cas de limogeage et 6 suicides, parmi les patrons locaux de groupes de presse et de « centres d’information et de nouvelles ». 

– la campagne anti-corruption, qui poursuit son long cours. Cette semaine tombent Huang Baodong, n°2 de Power Construction Corporation (groupe géant de l’énergie) et He Jintao, le fils de He Guoqiang, ex-patron de la police du Parti et membre du précédent Comité Permanent. Contraire à la règle, cette arrestation à un niveau si élevé, aurait été imposée par Xi en personne.
Par ailleurs, on assiste cette semaine à la 1ère sanction d’un « cadre nu », ayant fait émigrer sa famille et sa fortune en attendant de les rejoindre : Fang Xuan, vice-secrétaire à Canton, est limogé.

Cette fermeté de Xi Jinping, perçu comme « homme juste et inflexible », est payante : l’homme de la rue voit toujours plus en lui un « nouveau Mao » et se montre désormais prêt « à des sacrifices personnels, pour cet homme-là, au nom du renouveau du pays ».

– la campagne anti-pollution, où Pékin se débat avec l’énergie du désespoir. Cette année, à l’inverse des précédentes, pas question que les provinces manquent les objectifs : soit -3,9% d’usage d’énergie par point de croissance et –4% d’émissions de CO2. Or ce 1er trimestre, les chiffres sont mauvais : « 15 provinces sont en retard », dit Xu Shaoshi, patron de la NDRC

De plus, les six bourses d’échanges des titres d’émissions de CO2 (reliquats du quota octroyé chaque année à chaque firme) ne fonctionnent pas bien : les firmes détentrices refusent de vendre et tentent d’accumuler pour faire monter les prix. 

Dans ce climat tendu, on voit l’équipe de Xi Jinping tenter une démarche inattendue, voire un peu paradoxale : à ses cadres, elle prêche la tolérance et l’ouverture politique sous strict contrôle.
Le 22/05, le Quotidien du Peuple avertit contre la « stabilité à tout prix », slogan qui surgela le pays durant 10 ans sous l’ère de Hu Jintao. Quelques jours plus tôt, un autre éditorial évoquait l’impératif de combiner autorité et dialogue, surtout face à des communautés hostiles à des équipements collectifs, comme à Hangzhou en mai. C’est un appel à davantage communiquer et à moins imposer par la force : un ton nouveau.


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Diplomatie : Corée du Nord : oui aux échanges, mais pas trop…

Entre Chine et Corée du Nord, la relation n’a jamais cessé d’être complexe et secrète. 

La course à la bombe du Petit Poucet stalinien angoisse Pékin : le 26/05, Wang Yi, ministre des Affaires étrangères, déclarait gravement à Park Geun-hye, Présidente de Corée du Sud, que son pays est prêt à « assumer la responsabilité de libérer la péninsule coréenne du péril atomique. » Mais Pyongyang ne l’entend pas de cette oreille et annonce d’autres tests nucléaires pour cette année. Aussi pour l’en dissuader, Pékin coupe pour 4 mois ses livraisons de fuel, de 50.000 tonnes par mois. 

Pourtant, la Corée du Nord devrait s’en trouver bien peu incommodée : Duowei, réseau d’information chinois émigré, estime à 500.000 tonnes les volumes de pétrole entrés « au noir » de Chine au Pays du matin calme, depuis janvier 2014. En outre, le boycott ne concerne que l’été, période où la Corée septentrionale n’a plus besoin de se chauffer… 

Malgré ce léger « froid » entre les deux pays, l’amitié continue : le 28/05, un nouveau pont débute sa construction sur la rivière Tumen, de 800m de long, pour un coût de 22 millions de $. 

Il faut donc maintenir des échanges, mais point trop n’en faut : la Corée de Kim Jong-un (cf photo) se lance dans un vaste programme de démolition de toute construction à moins de 200 mètres de la frontière, sur les 270km d’espace que traversent les principales routes de défection vers la Chine. Cette migration massive est surtout due à des causes économiques. Et si Pyongyang ne parvient pas à l’enrayer, c’est à cause de la corruption de son armée, qui pour un petit cachet, laisse passer les fuyards —voire, leur sert de guide vers la liberté.


Diplomatie : Mer de Chine : une ébauche de dialogue

Un mois après le forcing de la Chine sur ses voisins (l’installation à 220km des côtes vietnamiennes de la plateforme pétrolière HD981), la première occasion de s’expliquer a eu lieu au «  Shangri-La Dialogue » à Singapour (30/05-01/06), Forum asiatique de la sécurité. 

La Chine était présente, face aux pays riverains et aux Etats-Unis représentés l’émissaire d’Obama, l’expert stratégique Ch. Hagel. Elle affrontait aussi Shinzo Abe, le 1er ministre nippon qui faisait le discours d’ouverture. Abe était venu offrir à ses voisins de faire contrepoids à la puissance militaire chinoise (sans la nommer), comme complément et alternative à la US Navy. Pour ce faire, il faudrait changer la Constitution nippone, ainsi que le Traité de Défense avec les USA. Or, si des pays tels Malaisie, Myanmar, Laos et Cambodge craignent toujours de s’associer à cette démarche, vu leur dépendance directe à la Chine, d’autres tels les Philippines et le Vietnam se montrent prêts désormais à sauter le pas…Hanoi réclame déjà l’aide japonaise sous forme de navires garde-côtes en fin de carrière -Tokyo en a déjà remis 10 aux Philippines. Et désormais, le Vietnam envisage aussi de suivre Manille dans une plainte contre la Chine auprès d’une cour des Nations Unies, pour viol de ses eaux territoriales. 

Ce « Shangri-La Dialogue » marque donc un tournant dans les rapports stratégiques régionaux depuis 1945. Confronté à ce rendez-vous difficile, la Chine a joué finement. Pour estomper son image de « puissance militaire », elle se garda d’envoyer son ministre de la Défense, préférant se faire représenter par le n°2 de l’Etat-major, le lieutenant-général Wang Guanzhong. Et à la tête de sa délégation, elle plaça Mme Fu Ying, ex-vice ministre des Affaires étrangères. Jusqu’à récemment, Mme Fu passait pour une modérée, jusqu’au jour où elle s’avéra aussi mordante que le plus tenace des négociateurs chinois : avec elle, la Chine pouvait à la fois jouer la souplesse et l’intransigeance, défendre sa position sans rien céder, ni risquer de se retrouver totalement isolée. 

Comme toile de fond à l’ouverture du « Shangri-la Dialogue », deux incidents maritimes venaient d’avoir lieu, chacun illustrant la récente assertivité de la Chine face à ses voisins.
– Le 25/05, un quasi-accrochage avait lieu au-dessus de la mer de Chine de l’Est, entre aviations nippones et chinoises, chacune prétendant faire respecter sa zone de défense aérienne, chacun ayant édicté des zones se chevauchant, concurrentes et sans négociation préalable. 

– Le 27/05, un chalutier vietnamien enfoncé par un navire chinois, coula. Les 10 hommes d’équipage furent recueillis par leurs compatriotes. Il s’ensuivit une cacophonie d’accusations réciproques. En arrivant sur la zone litigieuse, la flottille vietnamienne avait une surprise : la plateforme HD981 avait disparu ! La COSL, sa firme gestionnaire, l’avait déplacée vers une autre zone, tout en faisant deux annonces : le travail de prospection ici, était fini, et elle était « très confiante » de trouver du gaz sur la zone. Ce qui, si la Chine commence à l’exploiter, ne pourra que porter l’animosité à de nouveaux sommets… 

Mais pourquoi, au fond, Xi Jinping a-t-il décidé cette action qui exacerbe des sentiments négatifs envers son pays ? C’est la question que B. Aquino, Président Philippin, avoue se poser « chaque matin ». 

A cette interrogation légitime, nous suggérons cette double réponse:

– Comme on le voit sur internet, l’aura personnelle du Président Xi en ressort très renforcée : la majorité cocardière lui dédie sa gratitude, pour cette expression sans complexe de la puissance nouvelle du pays. 

‚ – Même l’isolement de la Chine, qui découle de cette offensive, joue en faveur de Xi : les alliances de défense qui se tissent, ranime la vieille hantise chinoise d’être « bloquée » dans sa croissance par une coalition dirigée par les Etats-Unis. Et face à ce « danger fictif », Xi voit la discipline et la loyauté au Parti, de l’armée et des citoyens, renforcées. Ce qui lui permet de réaliser ses programmes d’expansion territoriale et de réformes, sur mer comme sur terre.


Energie : Barrage de Ludila – la catastrophe cachée

Tel un mustang mal dompté, la rivière Jinsha, sur le cours supérieur du Yangtzé, est harnachée de 12 barrages d’une puissance de 59GW, presque l’équivalent du parc hydro des Etats-Unis. Parmi ceux-ci, bâti entre 2008 et 2013, Ludila (cf photo) au Yunnan se dresse à 140m, estimé à 5GW (soit 5 réacteurs nucléaires classiques). 

Depuis mai, Ludila est au cœur d’un scandale suite aux révélations courageuses de China Enterprise News (CEN).
Au 29/06/2013, le manteau du barrage subissait un accident : une vanne, qui protégeait trois turbines, céda sous une pression d’eau, trois fois plus forte que prévu. Depuis, selon le journaliste de China Enterprise News, une autre faille s’est déclarée à la base, si grave qu’elle ne peut être inspectée par des plongeurs, vu la force du courant. 

Sur l’accident, Jinsha Hydro, la firme gestionnaire, prétend (faussement, semble-t-il) que tout est réglé.
Huadian, la maison-mère, se retranche derrière une « enquête en cours ». Seul Liu Qi, vice-directeur à l’Agence Nationale de l’Energie, ose dénoncer une « mauvaise qualité des travaux et des préparatifs précipités par une firme avide de retour sur investissement ».
China Enterprise News évoque une perte de 600 millions de ¥, en électricité non produite quoique déjà contractée. Mais vu le coût d’investissement de 3,5 milliards de $ et les destructions sur l’environnement, en amont (réservoir vide, aride) et en aval (berges et fonds arrachés), on est loin du compte. Ma Jun, d’un institut d’affaires publiques et environnementales, parle de « dommages irréversibles ». 

Ce qui frappe ici, est la puissance apparente du lobby entre un groupe électricien (Huadian, 10% du courant national) et une province (le Yunnan), face à la faiblesse de l’Etat.
En 2009, constatant de multiples irrégularités et l’absence d’étude d’impact écologique, le ministère de l’Environnement avait fait interdire Ludila, lequel mystérieusement, obtenait son feu vert en 2012. Le lancement eut lieu en mai 2013 – un bref laps de temps qui suggère que les travaux n’ont jamais cessé. Après quelques semaines de fonctionnement seulement, eut lieu l’accident. Alors l’opérateur et la province parvenaient à maintenir une censure totale, « secret d’Etat », en dépit des risques vitaux pour les communautés en aval. 

Tout ceci rappelle, l’été orageux de 1998 qui avait fait monter l’étiage du Yangtzé, brisant des digues sur le cours inférieur.
Les grandes villes en aval, dont Shanghai, n’avaient évité la submersion que par la mobilisation de l’armée et de centaines de milliers de volontaires, durant 3 jours et 3 nuits, colportant des sacs de sable. Le 1er ministre Zhu Rongji avait alors fulminé contre les « digues de tofou », avant de lancer un programme en milliards de $ pour vérifier toutes les digues du pays. Aujourd’hui, sur le réseau de barrages du haut-Yunnan, le problème semble resurgir.


Xinjiang : Pékin en guerre contre la guerre sainte

La très sérieuse Jamestown Foundation l’affirme dans son rapport du 23/05 : les attentats depuis novembre 2013 entre Pékin, Kunming, Canton et Urumqi (plus de 80 morts, des centaines de blessés) seraient l’œuvre du « Turkestan Islamic Party » (TIP), groupuscule de 300-500 Ouighours en Afghanistan et au Pakistan. Créé en 2008 et dirigé par Abdullah Mansour, le TIP serait soutenu par un «grand frère » proche d’Al Qaeda, l’« Islamic Movement of Uzbekistan ».
Visant les Hans, ces attaques suivraient la même stratégie que celle de l’ « Emirat du Caucase » contre les Russes ethniques de la zone : redoubler les violences pour les intimider et les inciter à repartir. 

La Chine apparaît donc une cible de choix pour une organisation internationale terroriste panislamique d’Asie centrale pour trois raisons : 

– 1. en tant que riche nation émergente

– 2. elle est voisine du Pakistan, Afghanistan, Kazakhstan et Kirghizstan (d’où matériel et instructeurs peuvent s’infiltrer de presque toutes les frontières du Xinjiang)

– 3. la Chine peuvent devenir le nouveau front potentiel, pour relayer celui d’Afghanistan, en cours d’extinction avec le retrait inéluctable de l’US Army. 

Très meurtrière (44 morts, 90 blessés), la frappe au marché d’Urumqi (22/05) a choqué toute la Chine, de la rue aux antichambres du pouvoir. Guo Shengkun (cf photo), ministre de la Sécurité Publique, fut dépêché sur place pour lancer une contre-offensive sans états d’âme. Huit jours après, sous réserve d’inventaire (de sources seulement officielles), les 5 auteurs ont été identifiés et le seul survivant arrêté. 

A Yarkand (Kashgar), 4 bombes furent désamorcées (24/05), mais une explosa – les dégâts ne sont pas connus. Le même jour, une rafle simultanée sur Yili, Hotan et Kashgar démantela 23 cellules et arrêta 200 apprentis terroristes qui se formaient au moyen de cassettes passées sous le manteau.
À Hotan, 2 arsenaux furent découverts (1,8 tonne d’explosifs et autres matériaux saisis) et 5 hommes arrêtés, dont le chef Abuliz Dawut, « sur le point de lancer une frappe du même scénario qu’Urumqi, visant un bain de sang ». 

Guo Shengkun Urumqi

A Pékin les 26-27/05, le Politburo décrète une année de guerre à la violence, sous forme d’une campagne yándǎ (严打, « frapper fort »). Apparaissent sur le champ à Pékin et Shanghai, des véhicules importés, blindés (jeeps à 8 places, bus grillagés), des hélicoptères destinés à convoyer les tireurs d’élite et des patrouilles.

L’approche du 25ème anniversaire de Tian An Men fait monter la tension.
A Pékin, les SWAT, pelotons antiterroristes, ont ordre de tirer sans sommation. À Urumqi, les troupes campent et patrouillent devant la Grande mosquée, les écoles, supermarchés, karaokés…
À Chengdu, 8.000 policiers et 30.000 miliciens crapahutent en quête de suspects. 80.000 brochures sont distribuées à Kunming, sur les moyens de repérer le terroriste, et de s’en protéger. À Yili (Xinjiang, 27/05, cf photo), 7000 Hans assistent dans un stade aux de 55 malfaiteurs verdicts (3 peines de mort) aux noms pour la plupart ouighours.

Lors de sa session, le Politburo a aussi reconfirmé sa stratégie : fermeté et croissance. Cette année, le territoire, grand comme trois fois la France, dépensera 150 millions de $ dans des formations aux métiers traditionnels (artisanat, agriculture, médecine ouighoure) pour garantir « au moins un emploi par foyer ». L’Etat souhaite ainsi réduire l’écart de revenus entre Ouighours et Hans, qui va du simple au triple (dans le monde agricole, 3900¥ par an contre 12.100¥ par an).
Il prétend aussi promouvoir le bilinguisme, éliminer les vexations inutiles contre la « religion patriote » et multiplier les activités entre ethnies, pour qu’elles se connaissent et s’acceptent. 

Enfin, une mesure d’urgence est prise, pour pallier la chute dramatique du tourisme (-40% en 2013) : tout visiteur au Xinjiang recevra une prime de 500¥, et les 8 pays frontaliers seront sollicités pour faciliter les visas touristiques depuis le territoire. Mais sur le terrain, dans la spirale des attentats, la suspicion réciproque est insoutenable. 

Détail qui doit inquiéter à Pékin : 65 cadres ouighours, y compris des militaires et des membres du Parti, ont été sanctionnés pour commentaires antichinois ou emails appelant à l’intifada…

 Le 27/05, le Politburo concluait par une formule dérangeante : « la politique de la nation à l’égard du Xinjiang a démontré sa totale justesse ». Heureusement, cette phrase semble fai-te pour rassurer les ultraconservateurs—mais totalement contredite par les principes énoncés plus haut (plus d’emploi, de liberté de religion et d’activités interethniques).
Or, dès juin un 5ème Plenum du Comité Central va clarifier et renforcer ces mesures. La Chine est peut-être en train, sur son Xinjiang, d’opérer un virage à 180° !


Petit Peuple : Xiangshan (Zhejiang) : Shi Haoyun, un mariage extrême (2ème partie)

A Xiangshan (Ningbo, Zhejiang), le 13 avril, Shi Haoyun, agriculteur de 32 ans est pris en flagrant délit sur Weibo, épousant deux jolies demoiselles (cf photo). Mais l’administration ne retrouve aucune trace du mariage civil, et crie à la fraude…

Après la noce, Shi apparut dans toute la presse pour avouer, toute honte bue, qu’il avait voulu faire un 冲喜 « chongxi ». Préconisée par les maîtres devins taoïstes, cette pratique consiste à « nettoyer la page du destin », inverser une tendance néfaste détectée dans l’avenir du sujet ou d’un de ses proches. 

La mère de Shi souffrait le martyre, percluse d’arthrose, tandis que son père n’allait guère mieux. Pour tout dire, les deux vieillards étaient au bout du rouleau. Or, au monastère local, le prieur avait fait à la pieuse femme cette prédiction audacieuse : la conjonction astrale funeste serait dissipée et leurs maux disparaîtraient, le jour où leur fils prendrait non une, mais 2 épouses : le qi (气 ) cumulé d’un Yang (阳) et de deux Yin (阴) ferait fuir les démons qui grignotaient depuis tant d’années le compte de leurs jours…

Bien sûr, Shi connaissait très bien la loi nationale interdisant la bigamie. Aussi, cette union avait été uniquement à usage votif, comme qui dirait « pour rire », et non enregistrée au bureau des mariages. Et à présent, celui-ci, consulté, vérifiait dans ses registres et statuait sans objection possible : au jour d’aujourd’hui, de par la loi de la République Populaire, le garçon était toujours célibataire et donc, un affabulateur ! 

Shi et ses parents s’expliquèrent devant les journalistes : les deux fiancées avaient été recrutées par la mère, louées à 100 yuans par personne, au tarif de groupe. Shi Haoyun n’avait pas eu droit à la parole dans cette mascarade : à la charge de ses parents, il s’était retrouvé devant le fait accompli, quand sa mère lui avait annoncé son mariage pour le lendemain. Sa protestation avait été balayée d’un simple revers de la main de la terrible mère.

Shi devait bien l’avouer, sa mésaventure était un cas extrême, où il se retrouvait manipulé par les auteurs de ses jours, embringué dans une aventure douteuse sous l’angle de la loi. Il était projeté dans une pratique de superstition millénaire, pour obtenir une guérison, au nom du proverbe : « plus on met d’argile, plus la statue de Bouddha est grande », (泥多佛大« ní duō fó dà »), et plus les Dieux sont honorés, plus ils octroient la santé ! 

Cependant, ni le Parti, ni la mairie n’ aiment qu’on se paie leur tête. Tambour battant, le plaisantin fut sommé de faire son autocritique (cf photo). Laquelle s’avère être un petit bijou du genre, chef d’œuvre d’anthologie, aussi hypocrite que politiquement correct. 

Double Mariage Lettre

Shi y exprime sa désolation de s’être lancé dans cette action illégale sans se rendre compte des beaux draps dans lesquels il se lovait. Il avoue sa profonde honte, d’avoir déclenché les sarcasmes et railleries de la Chine entière, et se dit bien puni de sa bêtise. Et pour prouver sa bonne foi, à tout le moins, il conclut : « Comment vouliez-vous que je cherche sérieusement à m’embarrasser de deux légitimes ? C’était totalement impensable – beaucoup trop cher, et hors de mes moyens. Aussi, croyez-le, ce mariage bigame n’exista que pour la chance astrale, et pour mes parents ». 

Cependant les meules de la justice, une fois ébranlées, sont lentes à se figer : Chen Minxin, avocat au cabinet Tongji, dans le Zhejiang, déclare que Shi pourrait bien continuer à avoir maille à partir avec l’Etat, si la rumeur se confirmait qu’il aurait cohabité avec l’une ou l’autre donzelle, ou avec les deux ensemble. Une intuition sur laquelle aucune des parties ne se prononce pour confirmer ou infirmer. Un autre internaute estime le comportement folâtre de Shi, « moralement inacceptable, impardonnable et illégal ». Tandis qu’un accusateur enfonce le clou, déclarant qu’à son avis, Shi était divorcé et père de deux enfants… 

Sur cette mer agitée, l’enquête se poursuit – Shi n’est pas sorti de l’auberge. Et pour éviter de tels soucis à l’avenir, peut-être ferait il mieux de prendre comme conseillère, contrebalançant les lubies de sa mère, une conjointe pour la vie, une seule, une vraie !


Rendez-vous : Semaine du 2 au 8 juin 2014 – Roland Garros en Chine
Semaine du 2 au 8 juin 2014 – Roland Garros en Chine

Roland Garros en Chine (3ème édition) du 4 au 8 juin 2014 : Fort de ses deux dernières éditions de « Roland Garros in Beijing » (2012 et 2013) qui ont réuni plus de 100.000 visiteurs, Roland Garros revient à Pékin au Parc Olympique Sud ( 北京奥林匹克公园中心区庆典广场), de 10h du matin à 10h du soir  

Chaque jour des animations y seront organisées avec les partenaires Peugeot et Longines : un vrai terrain en terre battue, des mini-courts, ateliers d’initiation pour petits et grands, jump-tennis, et séances de coaching personnalisées à gagner. En fin d’après-midi, les matchs du tournoi parisien seront retransmis en direct.

6-8 juin, à Pékin : le « 48 heures start-up »  organisé par la Jeune Chambre Economique Française. Pour s’inscire, cliquez ici. 

4-6 juin Pékin : Top Wine China, Salon des vins et spiritueux


4-6 juin, Shanghai : Offshore Wind China, Salon de l’énergie éolienne


5-7 juin, Shanghai : China Auto Parts & Services, Salon des pièces détachées


5-7 juin, Shanghai : LuxeHome, Salon de la décoration intérieure


5-7 juin, Shanghai : Aviation MRO – Aviation interior & design / Aviation Food & Supplies


6-8 juin Chengdu : Fastener Trade Show, Salon international de la fixation


6-8 juin Urumqi : ICME, Salon de l’industrie du charbon en Asie Centrale