Le Vent de la Chine Numéro 17

du 8 au 14 mai 2011

Editorial : Fruits de saison

En pleine campagne conservatrice, quand le régime réitère jour après jour sa volonté de maintenir le cap suivi depuis 2003, le 1er Ministre Wen Jiabao lance une note très personnelle en réitérant (pour la 8e fois depuis août) son exigence de réforme politique. En 8 jours, il le fait à 2 reprises, chacune devant un auditoire semi-étranger.

à Pékin, face à Ng Hongmun, politicien Hongkongais, à Kuala Lumpur face à des compatriotes, il dénonce des « traces de révolution culturelle… de féodalisme… décourageant les gens de parler vrai ». En même temps, dans un édito qui lui ressemble (28/05), le Quotidien du Peuple citant Voltaire appelle à la liberté d’expression et à la tolérance. On s’en doute, Wen n’est pas vraiment écouté: aux différentes mouvances du spectre politique, on le laisse parler, comme on pardonnerait ses lubies à un digne ancien -d’autres voient dans son homélie démocratique, le chant du cygne d’un leader anxieux de se réconcilier avec l’histoire, quitte à griffer (ô, bien légèrement) la discipline de Parti. Mais il faut lui reconnaître de la suite dans les idées. Le 29 mai 1989 à Pékin, il était place Tian an men avec Zhao Ziyang son patron, à adjurer (en vain) les étudiants de retourner chez eux. Par quel génie ensuite, lors de la purge qui suivit, sut-il retourner au pouvoir après avoir convaincu les conservateurs de sa fidélité ? Et sut-il en permanence jongler entre son allégeance et ses idées. En cela, en tout cas, ce personnage original tranche sur la grisaille de l’échiquier politique chinois, plus prévisible et compassé.

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L’été qui arrive rappelle au pays la puissance du réchauffement global. Au sud, 160.000ha de champs jaunissent. Au second trimestre, South Power Grid, distributeur d’électricité prédit 6,2Gw de déficit – jusqu’à 17% de la demande de centaines de millions de gens, de dizaines de milliers de PME. Déficit aussi dû aux arrêts de centrales préférant limiter les pertes, faute de pouvoir répercuter la hausse du coût du charbon.

Pour résoudre la contradiction de mines de charbon au Centre-Ouest et de leurs marchés à la côte, State Power Grid a lancé, dès 2005, son audacieux plan de super haute tension courant alternatif (UHVAC), investissant 5MM¥ dans la ligne-test Shanxi-Hubei. En cas de succès, un réseau complet devait suivre d’ici 2015, à 500MM¥. Hélas, à ce jour, elle n’a convoyé au maximum que 2,83MKw, durant 2 secondes (en janvier 2009) : échec colossal, dénoncé récemment par 23 experts, mais réfuté par State Grid, qui a les moyens de couvrir de sa voix celles de ses détracteurs… On apprend alors que Russie, Japon, Italie et USA, les pays ayant tâté de cette technique de pointe, ont tous connu les mêmes déboires.

Ce courage entrepreneurial, cette foi en des techniques de pointe non validées, se retrouve dans la multiplication des projets de désalinisation de l’eau en mer de Bohai. Tianjin Beijiang Power Plant, dessale 100.000m3/j—l’usine ayant coûté 26MMY (si-si!). Dès décembre, sa capacité sera doublée. Beijing Caofeidian monte sa propre usine, et l’administration océanique nationale prévoit que les 600.000m3 d’eau dessalée produite par jour en Chine, seront quintuplées d’ici 2020. Même si cette manne revient à 8.15¥/t (soit le double du prix de vente), et même si l’on ignore les effets à long terme de ces rejets de saumure en mer.

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Voici au moins une mesure qui va vers l’économie durable. La NDRC (National Development and Reform Commission) sort (26/04) un «pavé» de 111 pages de types industries à fermer, restreindre ou encourager. Une étape de plus dans un processus à long terme.

A fermer, sont les petites raffineries (40.000B/j), mines de houille (30.000t/an) et centrales thermiques (100Mw) ; à restreindre, les mines (métaux, terres rares) ; à encourager, le nucléaire, les grosses mines de charbon ou d’or à +de 1000m de fond et le forage off-shore de+120m.

Les heureux élus, Chinois ou étrangers, se verront attribuer des licences, prêts préférentiels et taxes allégées. Mais à cet aiguillage de l’économie manquent encore des éléments-clés, telles que subventions et mesures de soutien : on n’est pas encore dans le changement du modèle de croissance, qui est le but ultime du gouvernement !

 

 

 


A la loupe : La Chine rouge… d’embarras

« Le climat d’affaires empire », témoigne un diplomate. « Nos firmes nationales multiplient leurs expression de souci face à des fraudes et pressions au bakchich ». Vérification faite, la tendance est bien là. Mais sans viser expressément l’étranger, elle dénote un climat universel.

[1] La face visible de l’iceberg est la sécurité alimentaire.

Le 26/04, Jixida (Chongqing) est surprise avec 26t de poudre de lait à la mélamine. Le 22/04 à Yulin (Shaanxi), 251 écoliers tombent malades au lait Mengniu. Suivent le riz au cadmium, la viande aux hormones (clenbuterol, ractopamine—risque d’arrêts cardiaques), les petits pains aux eaux usées, les pousses de soja à l’urée et au nitrite…

Tout cela ravive la méfiance de la presse, et des foyers, bien sûr: la perte de confiance dans la guidance publique. Refusant la thèse officielle qu’il s’agirait de «cas isolés», elle parle de fraudes systémiques et de sanctions trop indulgentes -une amende du décuple du chiffre de la fraude. En septembre, la peine capitale est ajoutée à l’éventail—mais sous des conditions floues, et dont les cadres sont exempts. Caixin, journal de Mme Hu Shuli dénonce l’inertie du ministère de la Santé, se retranchant derrière la police.

L’État n’est pourtant pas passif: 16 trafiquants d’hormones sont arrêtés (28/04) au Hunan à la tête d’un réseau sur 16 provinces. Entre Shanxi et Hebei, 14 trafiquants de mélamine prennent de la prison (29/04), six d’entre eux, entre 10 ans et la perpétuité. Mais le problème réside dans un cadre légal atomisé entre 40 textes et 300 instances de sécurité alimentaire: sur le terrain, nul n’est responsable. L’autoritarisme n’arrange rien: conscients des lourdes sanctions pesant sur qui va trop loin, les média ne réclament pas la liberté de la presse et l’autonomie de la justice, outils essentiels de la sécurité alimentaire ailleurs dans le monde : la Chine paie toujours plus cher, en définitive, la non-séparation du Parti et de l’État.

[2] Ailleurs, l’État semble plus disposé à bouger.

En piratage et contrefaçon, 480.000 boutiques et dépôts ont été visités depuis janvier, occasionnant la confiscation de 100.000 lots de matériel copié : livres, DVD, logiciels, aliments, semences, médicaments etc. Relancée la semaine passée par le vice 1er Wang Qishan, la campagne est d’une ampleur «sans précédent». Li Chenggang, directeur général du département Traités au ministère du commerce n’en rappelle pas moins que «contrefaçon et piratage restent courants, et la sensibilisation du public basse» – On n’en est qu’au début.

Variante de la contrefaçon: le faux étiquetage et la fausse promotion sont traqués, en lutte contre l’inflation. On se surprend de retrouver les plus grandes enseignes dans le lot – elles ont été taxées jusqu’à 500.000¥ l’infraction.

[3] Reste la face cachée de l’iceberg : la corruption du cadre, tel l’ex-maire de Shenzhen Xu Zongheng qui a acheté son poste en 2001, amortissant son investissement jusqu’en 2009, empochant jusqu’à 5M$.

Ce trafic des prébendes serait monnaie courante au sein du Département de l’Organisation du Parti communiste chinois. Xu aurait causé sa propre perte en tentant d’acheter le poste de secrétaire du Parti pour Shenzhen auprès d’un cadre suprême, qui l’aurait dénoncé à la Commission de Discipline du Parti. L’affaire fait désordre, alors que le Département doit renouveler toute la haute administration d’ici octobre 2012 : remue-ménage qui affecte toutes les carrières, et sans doute influence toutes les décisions politiques des 18 prochains mois !

 

 


A la loupe : Infatigables diplomates

L’hyperactivité de l’US-Army dans le monde arabe force la Chine dirigeante à un éventail de sentiments parfois discordants. Ainsi dans l’assassinat d’Oussama Ben Laden (02/05), l’Armée populaire de libération (APL) admire secrètement la maîtrise technique, mais note la perte d’un hélicoptère, et l’incapacité des commandos à sortir vivant le maître d’Al Qaeda.

La diplomatie chinoise elle, salue «une avancée majeure dans l’action internationale antiterroriste» mais pour préciser dans la foulée que «cela ne réglera pas tout». Elle veut aussi laver le Pakistan du soupçon de double jeu, d’avoir caché la présence de Ben Laden, à Abbottabad, nord d’Islamabad.

Ces remarques reflètent l’agacement de Pékin face aux agissements américains dans une zone où elle a des intérêts, et où elle redoute un surcroît de déstabilisation. La dualité contradictoire des diplomates reflète assez celle de la presse et de la toile chinoises. Un internaute voit en Ben Laden un «ennemi» dont il remercie les USA d’avoir débarrassé la Chine. Mais d’autres pleurent la perte d’un « autre héros anti-américain », ou d’« un de ces rares soldats idéalistes et spirituels sur Terre »…

La peur d’un Ouest-éléphant dans le magasin de porcelaine arabe s’exprime tout net face à la Libye. Loin de réclamer, comme le fait la Turquie, le départ du dictateur M. Kadhafi, Pékin dénonce (après la mort d’un de ses fils et de 3 de ses petits- fils) des frappes aériennes de l’Otan «non autorisées par le Conseil de Sécurité», et réclame un «retour à la paix par le dialogue et la négociation» -c’est-à-dire un indéfendable maintien de Kadhafi en place.

Face à l’Egypte, Pékin doit se livrer au grand écart rhétorique. Avoir mandé au Caire 2 ministres en 6 jours prouve l’importance extrême de la région pour la Chine. Fu Ziying, n°2 du commerce (27/04, qui se rendait aussi en Tunisie et dans 4 autres pays d’Afrique), puis Yang Jiechi, le ministre des affaires étrangères, (02/05, aussi en visite aux émirats, en Suisse, Serbie et Russie), respectent « la volonté et les choix du peuple égyptien». Ce qui n’empêche Yang de rencontrer le lendemain H. Tantawi, maître de l’armée, voire du pays, pour soutenir le retour à la «stabilité» et aux affaires…

Wen Jiabao poursuivait une offensive de charme en Indonésie (27/04), puis en Malaisie, offrant 3MM$ à Kuala Lumpur sur 14 contrats et surtout 20MM$ à Jakarta (10 en contrats, 9 en projets d’infrastructures et 1MM$ en un Fonds commun maritime). Ce dernier chèque, quoique lourd, pesait peu face à l’effort promis à Jakarta par le Japon, 50MM$ : nouvelle stratégie de Tokyo, qui vise à réduire la dépendance des deux pays envers la Chine, et à s’allier face au déploiement chinois en mer de Chine…

Face à l’ASEAN (Association des Nations d’Asie du Sud-Est), Wen venait «recréer l’harmonie» après la tension maritime de 2010. Le partage de cette mer, véritable Méditerranée d’Asie, devrait se faire «par le dialogue» – mais bilatéral, et non multilatéral selon le voeu des riverains et des Etats-Unis qui ont promis de parrainer ces palabres. Ainsi, la solution apparaît plus lointaine que jamais.

D’autant que l’APL promet au même moment d’adjoindre à sa «force de surveillance» d’une mer qu’elle prétend sienne, 36 navires en cinq ans (dont son 1er porte-avions), 1000 officiers, 10.000 marins. Comme pour rappeler que ses objectifs ne coïncident pas forcément avec ceux du pouvoir civil, et ceux des diplomates—défendant pourtant le même pays qu’eux.

 

 


Argent : Guerre fratricide des telecoms chinois

Huawei et ZTE sont jumeaux : nés dans le même sud, à la même période, d’un même lit militaro-étatique, ayant épongé les technologies mondiales des télécoms pour avaler leur marché protégé avant d’aller dévorer le monde avec prix et financements imbattables (2 ans de grâce, puis 2% d’intérêt)…

En 2010, Huawei est n°2 mondial avec 12MM$ de chiffre (15,7% du marché), ZTE n°6, avec 5MM$ (7.2% du marché).

Ceci n’empêche les deux maisons de se livrer une guerre fratricide.

Huawei attaque ZTE en Hongrie, France et Allemagne pour piratage d’une ligne de produits, abus de droit d’une marque. ZTE lance la plainte-miroir en France ET en Chine. Le gros accuse le petit de lui avoir copié des produits protégés par brevets, modems Wifi et sa technologie «LTE» de transmission à haut débit de 4ème génération.

Impossible à ce stade, de savoir qui a lésé qui. Ce qui est sûr, est qu’une fois leur marché intérieur saturé, la lutte est inévitable sur les marchés mondiaux, occidentaux d’abord. Un conflit à rapprocher de celui entre les centaures de la toile chinoise, Tencent et Qihoo.

Mais une solution d’avenir se profile : Huawei, le poids lourd de 110.000 jobs, suit IBM et Intel sur la piste de l’informatique « en nuage » (cloud computing) pour le soutien et l’hébergement des firmes, et ZTE veut suivre Google, défier Apple sur le marché des smartphones et tablettes «intelligentes». Deux marchés séparés, qui pourraient aider à terme à enterrer les hostilités.

 

 


Pol : Confucius, vagues et ressac

Depuis 1949, Confucius se retrouve ballotté par les vagues politiques — la campagne de Mao «pi Lin pi Kong», « contre Lin Biao et Confucius » reste en toutes les mémoires.

Depuis Deng Xiaoping par contre, les écoles Confucius sont de retour, rendant les bonnes manières aux fils de bonne famille. Symbole de paix, il a aussi donné son nom à des centaines de centres culturels sur les cinq continents, et à un Prix en 2010, pour rivaliser avec le Nobel de la Paix, lequel avait eu le malheur de déplaire par ici.

Une expo s’est ouverte à Shanghai en avril, sur Einstein, auquel les autorités ont cru bon plaquer l’auteur des Analectes, sans explication. L’un et l’autre, grands hommes, étant peut-être vus comme des penseurs dominants de leurs époques, amoureux des études et des valeurs morales.

En janvier, le pouvoir installait, place Tian An Men, en face du portrait de Mao, une majestueuse statue du penseur antique, 9.5m de haut en bronze et vert de gris. Le symbole était évident et bénin : deux géants retrouvés, l’histoire réconciliée, les deux creusets de valeur chinoise en interaction oecuménique…

Mais voilà que le 28/04, la statue est repartie dans la nuit, sans tambours ni trompettes. Fièvre maoïste ? Querelle des anciens et des modernes? En tout cas, l’indécision au sommet, semble bien respecter la parole du maître qui affirmait, 2500 ans en arrière : « je ne peux rien, pour qui ne se pose pas de questions ».

 

 


Temps fort : Bilan du Recensement : La Chine s’apprête à manger son pain noir

Juste avant les fêtes du 1er mai, l’État publie le recensement de 2010, par six millions d’enquêteurs auprès des 400 millions de foyers de l’Empire. Il a ses raisons de rester discret, car ces chiffres dressent un bilan de son planning familial, de plus en plus contesté, mais qu’il n’est aujourd’hui pas prêt à sacrifier—quoique les «30 ans» de vie que le Parti lui allouait à sa naissance en 1979, soient aujourd’hui révolus.

Le régime est fier d’avoir contenu la croissance nette à 74 millions en 10 ans, pour un total de 1,34milliard, et d’avoir épargné 400millions de bébés ou total. Mais la fécondité est en chute libre à 0,57%/an, moitié du chiffre de 2000 et, croient les démographes, 1,5 à 1,6 enfants par femme, depuis 20 ans en deçà des 2,1 du taux de renouvellement. Et cela choquera plus d’un Chinois de voir l’Inde (1,2MM) dépasser son pays sous 10 ans. Ce déficit impose désormais à l’Etat, heureusement nanti de 3000MM$ de réserves en devises, une marche forcée vers un régime de retraite complet et solvable. Ceci, pour éviter la grave mésaventure de devenir «vieux, avant que d’être riche».

Selon le recensement les sexagénaires sont 13,3% contre 10,4% en 2000. Les jeunes de -14 ans sont 16,6%, contre 22,9% hier. J. Walker (Asianomics) voit dès 2015 le recul de la population active, déjà présent chez les 20-24 ans. Idem, à 49,7%, les villes font la moitié de la population, après avoir absorbé 13,6% en 10 ans : avancée bien trop rapide, qui n’a pas permis de bâtir assez d’hôpitaux, écoles, transports etc. Depuis, les migrants ont augmenté de 81%, à 261millions, et si rien ne change d’ici 20 ans, ils seront 350millions : source d’instabilité et de rancoeur envers leur société qui les aura maintenu dans un statut de citadins de 2de zone .

De même, la migration s’est poursuivie de Chine «jaune» de l’intérieur, vers celle «bleue», plus riche de la côte qui passe de 35,6% à 38% : la barrière administrative du hukou n’a fait que freiner, et non stopper le déferlement.

Dans les campagnes, un résultat du planning a été l’avortement sélectif massif : la Chine de 2010 engendre 118 mâles pour 100 filles, donc 34 millions de fils immariables. Dans 20 ans, ces célibataires forcés -dites «branches sèches», seront 15%, entraînant avec eux une explosion prévisible de la prostitution et de la délinquance.

Les étrangers ne sont que 593.000 – goutte d’eau dans cet océan de 23% de l’humanité. Ce qui révèle le souci constant de ce régime autoritaire, de prévenir la «pollution» démocratique de l’extérieur. Sans vouloir admettre que ce choix (contradictoire avec son principe de politique d’ouverture), prive sa société de tout un capital d’Investissement Direct Etranger, d’emplois, d’ONG etc. dont bénéficient d’autres pays d’Asie.

Un fait positif : depuis 2000, le pays s’est éduqué, faisant plus que doubler le taux d’universitaires, à 8,9%.

On voit donc poindre à l’horizon la fin des bénéfices d’une natalité bridée : hausse des salaires et de l’inflation, baisse du PIB sont les suites d’un déficit en main d’oeuvre. Face à cela, l’État se montre divisé. Les experts poussent à l’abandon du planning malthusien. Mais le leadership veut pour 15 ans au moins «maintenir et améliorer le planning, conserver un bas taux de natalité» (Hu Jintao, 26/04). Une rigidité qui reflète le lobby du contrôle des naissances, 5 millions de cadres, en comptant les intérimaires, qui vivent des amendes prélevées sur les parents trop prolifiques.

C’est ainsi qu’en fin de compte, le régime défend moins une basse natalité qu’un style autoritaire de pouvoir, et les privilèges d’une caste. Il est vrai que l’équipe actuelle quitte le pouvoir dans 18 mois, en octobre 2012 : la suite n’est plus son problème !


Petit Peuple : Sichuan – Maoxian, l’amour sous les décombres – en souvenir du séisme du Sichuan, 12/05/08, 3ème anniversaire

A Chongqing, Chen Guozhen est pauvresse parmi les pauvres, marchande « sur le tapis » (baiditan) à même le sol, quitte à remballer sa calamiteuse camelote à la vitesse de l’éclair, à l’approche des argousins.

A 30 ans, elle souffrit l’abandon par un mari lui laissant 2 enfants et un vieillard à charge, son père adoptif. Ce qui en Chine, vaut une condamnation au célibat à vie, aucun homme n’allant reprendre une divorcée affligée de marmaille.

Pourtant la providence plaça sur son orbite Zhaxi, 37 ans, son rival en déveine, orphelin d’ethnie Qiang sans savoir-faire ni métier- le genre de gars dont nulle femme n’aurait voulu en temps ordinaire. Ils associèrent leurs misères, liaison de convenance et de soutien mutuel, plus que d’amour. Zhaxi l’aida dans son commerce, et partagea ses nuits.

En mai ’08, il fit un pas de plus : quittant leur gourbi, laissant les fillettes au papi, il l’emmena en escapade à Maoxian, sa ville natale. Tacitement, c’était pour la présenter aux âmes de ses parents défunts. Et c’est là, le 12/05 à 14h07, dans leur chambre au 3ème étage d’un hôtel borgne, que les surprit le grand séisme du Sichuan. Panique, chacun pour soi. Zhaxi sauta du palier du 1er tandis qu’elle descendait 4 à 4 l’escalier, pour aller le récupérer au rez-de-chaussée, la jambe proprement cassée.

Commença alors la scène héroïque et burlesque: ce petit bout de femme tout en nerfs se mit à porter cet échalas d’1m79 pesant le double d’elle (40kg). Soufflant comme un phoque, elle le porta sur 2km jusqu’à l’aire de repli. Tous les 100m, elle s’arrêta, ahana, mais jamais n’abandonna. Tandis que ce dadais pleurait à chaudes larmes, sous les élancements de la fracture et sous la découverte de la volonté de fer de son amie.

Le 13, avec 2 cousins à lui, en bus, à moto, comme elle put, elle l’amena à Chengdu : 130km en 3 jours. Puis à l’hôpital, elle resta un mois à ses côtés avant de le ramener à la maison…

Par suite, la relation gagna en tendresse et intimité, confirmant l’adage «c’est en l’adversité que naît le vrai amour » (患难见真情, huàn nàn jiàn zhēn qíng).

Quant il fallut retrouver du travail, la chance changea de personne. Avec la modeste prime octroyée par l’Etat, Zhaxi put se mettre à vendre une marchandise plus chère -moulins à poivre, moulins à prière, simples médicinales, le fameux poivre du Sichuan. De la sorte, il gagne 2000¥/mois. Tandis que Chen a dû abandonner son trafic, faute de profit: elle balaie et nettoie le parvis du grand magasin Shenli, amassant à grand peine 900 yuans…

Il faut savoir que Zhaxi, quoique bon et intègre, est bourru et peu porté aux effusions. Jamais un SMS (qu’il ne saurait d’ailleurs écrire, pas plus qu’elle le lire), ni un cadeau, à part ce ridicule père Noël à 5¥ dont il la gratifia en décembre: en bref, Zhaxi est aux antipodes de ce que l’on pourrait qualifier de romantique.

Tout ceci explique la réaction stupéfaite, teintée de félicité et d’angoisse qui assaillit le 14/02, Chen Guozhen (une Chen en vareuse fluo, son balai de sorgho au bout des bras), quand elle vit surgir de nulle part une masse de fleurs d’un rouge braillard, porté par Zhaxi qui d’ une voix de stentor (comme d’un être ayant longuement lutté pour vaincre sa timidité) lui fit sa demande lapidaire et définitive : « veux-tu m’épouser » ?

Les 518¥ qu’avaient coûté (après âpres palabres) les 99 roses, étaient une fortune: mais elle trouva sa rétribution immédiate dans le sourire extasié de Chen. A part son «oui» qu’elle chevrota plus qu’elle ne dit, le dernier mot de l’histoire re-vient à sa fille aînée de 13 ans, Xiaoqian, qui déclara quelques heures plus tard, découvrant toute l’affaire : «oncle Zhaxi (son appellation coutumière, qu’elle avait bien conscience d’utiliser pour l’ultime fois) est si ‘langman’ romantique !

 

 


Rendez-vous : A Shanghai : les Salons, du verre et de l’électronique – NEPCON

11-12 mai, Pékin : VOIP & Next Generation Telecom

11-13 mai, Shanghai : NEPCON, Salon des industries électroniques

11-14 mai, Shanghai : Bakery China

11-14 mai, Shanghai : China Glass, Salon du verre

12-15 mai, Shanghai : WTF, World Travel Fair, Salon mondial du voyage

13-16 mai, Shenzhen : ICIF, Salon des industries de la culture