Le Vent de la Chine Numéro 10

du 15 au 21 mars 2010

Editorial : ANP—un PLENUM de passions, et de contradictions

La 3e session de la 11e Assemblée nationale populaire (ANP) et de sa soeur CCPPC s’est achevée (14/03) en une atmosphère inédite : alternant scènes de défi et retours de flamme grondeurs, ce qui suggère déjà, deux ans à l’avance, une fin de règne !

Contestation: à la CCPPC (la plus audacieuse des 2 enceintes), Hu Zhibin élu du Xinjiang, a osé affirmer l’échec de 20 ans d’action publique en sa province. Ding Weiyue, médecin, a reproché aux instances de l’avoir élu à son insu. Puis le 7/03 en conférence de presse, confronté à une question gênante, Li Hongzhong, gouverneur du Hunan fit confisquer par ses gardes l’enregistreur d’une reporter au Quotidien du Peuple, l’organe du Parti. Mais l’affaire fit scandale: la veille de clôture, 210 journalistes et édiles réclamaient par lettre le limogeage du cadre. Enfin, le 7/03 Pékin sévissait contre un pamphlet publié par 13 quotidiens, qui réclamait l’abolition du hukou, permis de résidence discriminatoire: l’auteur, éditeur à l’Economic Observer était mis à pied pour son audace. Tout ceci est nouveau et révèle l’existence d’un conflit ouvert entre la presse et l’aile conservatrice de l’appareil !

Un autre intérêt du Plenum était d’évaluer les candidats leaders à la législature de 2012. Tel Bo Xilai, Secrétaire du Parti à Chongqing depuis 2007, écarté depuis par Pékin pour laisser le champ libre à la sélection officielle qui est un compromis entre Hu Jintao et ses adversaires: Xi Jinping (candi-dat-Président, l’homme du Bureau politique) et Li Keqiang (candidat-1er ministre, l’homme de Hu).

Or au Plenum, Bo s’est imposé en star, ovationné par la presse comme le casseur des triades et l’homme intègre et capable, en train de briser à Chongqing la spirale de misère, après l’avoir fait pour le Dongbei 10 ans en arrière. Pour la presse étrangère, les bains de foule du leader provincial signent le pari d’une course solitaire au pouvoir, défaisant les plans de succession de la camarilla de Zhong Nan Hai.

Le concept est séduisant. Avec à Pékin une coalition de vieux rivaux, Bo devrait voir en 2012 sa carrière frappée de «limite d’âge» (62 ans) – sauf à franchir le Rubicon du plébiscite populaire. Toutefois dans le passé, toutes les tentatives de ce type (Zhao Ziyang, Qiaoshi) se sont brisées au mur de vigilance d’un appareil toujours sur le qui-vive. Aussi, à l’ANP, sur les chances de Bo, les deux dernières nouvelles semblent se contredire: le vice maire de Chongqing avoue qu’une partie des 1,3M de paysans déplacés lors de l’érection du barrage des 3 Gorges, sont retournés sur leur habitat d’origine (constat d’échec). Mais d’autre part, Chongqing reçoit la 1ère zone hors taxe de l’intérieur du pays, la mettant à pied d’égalité des ZES de la côte : succès personnel pour Bo…

Enfin parlant d’émancipation des édiles de la nation, l’ultime surprise survient sur le dossier qu’on n’attendait pas : celui de l’environnement.

Le ministre Xie Zhenhua admet que «des pays» aient à se plaindre du deal obtenu en décembre au sommet climatique mondial, et exhorte à «apprendre de Copenhague» et à négocier avec plus de transparence à l’avenir. Disant les hauts espoirs de la Chine» d’un meilleur accord à Cancun (Mexique) en décembre, il annonce un renforcement prochain du plan d’économies d’énergie, afin d’assurer l’objectif de -20% sur 5 ans d’ici décembre. On note encore sur ce sujet, beaucoup de franc-parler, comme celui de Miao Wei, vice-ministre du MIIT (Ministère des Industries et des technologies de l’Information), décrivant l’immense plan chinois de centrales éoliennes («20 GW d’ici 2020, moyennant 12MM² d’investissement») comme un échec en puissance. Sec et chargé de sable, le vent chinois serait inadapté à cette technologie… C’est ainsi que ce dossier très sensible ouvre un débat vif et contradictoire, enfin affranchi des contraintes de l’idéologie.

 

 


A la loupe : Un TGV sino-planétaire?

En marge du Parlement, Wang Mengshu, professeur à Jiaotong (Pékin), dévoile une idée extraordinaire en cours de réalisation, qui en dit long sur la fébrile inventivité de ce pays, et sur sa capacité à générer des projets transversaux entre des territoires et des champs économiques sans aucun lien jusqu’alors.

Le concept, échanger une technologie contre des richesses du sous-sol, est déjà pratiqué dans des pays tels Gabon ou Congo mais pas encore vraiment validé, faisant prendre à la Chine des risques réels sur ses investissements, ce dont elle n’a cure.

La Chine prétend cette fois exporter son TGV à 17 pays d’Asie du Sud-Est et d’Asie Centrale.

Une ligne évidente, et la plus avancée dans les négociations, est Kunming-Singapour via Vietnam, Thaïlande, Birmanie et Malaisie, suivant la fameuse piste Stillwell par laquelle les USA approvisionnaient le Kuomintang dans les années 1940.

Partant d’Urumqi, une 2de ligne, véritable TGV pétrolier irait au Turkménistan via Kazakhstan et Ouzbékistan, avant de poursuivre ultérieurement sur Berlin.

Au départ de Harbin, la 3ème doublerait le Transsibérien à tous les sens du terme, à travers la Russie jusqu’à Berlin encore. Toutes ces lignes feraient au moins du 200km/h, et des pointes à 350km/h. La Chine aurait là la plus formidable des économies d’échelle et un marché de milliers de rames en perspective—elle fournirait à peu près tout, sauf les rails.

Et les pays bénéficiaires, souvent insolvables? Ils paieraient en minerai ou autres, telle la Birmanie qui troquerait son TGV contre des fournitures de lithium. Wang précise que les négociations multilatérales en sont au «stade technique». Un des problèmes étant l’exigence de certains pays, tel Kirghizistan, de conserver leur écartement de rails propre, ce qui est impossible : problème déjà réglé au Vietnam.

Les minéraux reviendraient en Chine via un réseau ferroviaire asiatique de 81.000km, en discussion depuis 2006 avec 28 pays. Ce projet est visionnaire, en fournissant à chaque partie ce qui lui manque, tout en liant les pays par une dépendance technique et financière envers la Chine: la Chine jette les bases d’un empire! Envers de la médaille du TGV chinois: les compagnies aériennes se plaignent d’une concurrence fatale pour elles sur toute route en dessous de 500km. Liu Shaoyang, Président de China Eastern, milite pour une « raisonnable division du travail, évitant le gaspillage de ressources, y compris de terres arables ».

Ce qui peut éclairer le projet d’Alstom, le groupe français du TGV, de participer à l’équipement et à l’entretien du réseau -intérieur, pour commencer. Car la Chine qui détient déjà 3300km de ligne à haute vitesse, prétend disposer sur son propre sol de 18.000km de TGV d’ici 2020—plus de la moitié du réseau mondial, moyennant 60MM²/an dans les trois ans à venir. Or Alstom, avec ses cinq JV chinoises et son nouveau train AGV détenteur du record mondial de vitesse commerciale (360km/h), est bien placé pour soutenir la compétition.

 

 

 

 


A la loupe : Minerai de fer—la Maldonne

Les palabres mondiales du prix du minerai de fer ont débuté. Premier importateur, la Chine sidérurgique a le moral bas, comme l’avoue à l’Assemblée nationale populaire (ANP) Deng Qilin, Président de Wuhan Steel (n°3 national, 30Mt en 2009) et de la CISA (le lobby sidérurgique chinois): «ce sont les fournisseurs qui imposent les prix. Mais nous ne pouvons pas accepter un minerai plus cher à la tonne, que l’acier » !

C’est pourtant ce qui s’annonce. Trustant 80% de l’offre mondiale, BHP-Billiton, Rio Tinto et Vale s’apprêtent à forcer un prix-contrat en hausse de +50%. On découvre alors un système chinois qui, après avoir offert à sa sidérurgie des décennies en or, la met soudain en position faible, du fait de son incapacité à s’autoréguler.

En ’09, les producteurs ont importé 628Mt de minerai (+42%, 50% du marché mondial), et produit 568Mt d’acier, dont 90Mt excédentaires financés par les milliards du stimulus public, faisant chuter les prix. Ils ont commandé 58Mt de capacités supplémentaires, dont les aciéries de Zhanjiang (Canton, au shanghaïen Baosteel) et de Fangcheng (Guangxi, à Wuhan Steel).

Depuis des années, la tutelle du MIIT (Ministère des Industries et des technologies de l’Information) tente d’imposer un plan de concentration, dès 2010, les dix majors auraient dû concentrer 50% de la coulée nationale. C’est compter sans les provinces qui résistent, pour protéger leurs emplois et qui aident leurs groupes à garder leur indépendance. Shagang, groupe privé du Jiangsu évite le mariage avec Baosteel. Anyang (Henan) résiste à Anshan (Liaoning) -même si ces groupes signent, comme pour gagner du temps, des déclarations d’intention avec leurs partenaires imposés. La vérité est que cette année en valeur, les contrats de fusion-acquisition ont baissé de plus de 50%.

Dernier élément de l’équation perdante, l’aciérie chinoise tente depuis des années, en vain de briser le cartel des fournisseurs. En 2009, elle refusait un prix-contrat en baisse de 30% (elle espérait une ristourne encore meilleure). Résultat, elle a dû acheter au marché libre, au prix fort, 142$/t, contre les 70$/t payés par Japon et Corée. Et comme on a vu, elle veut cette année encore rejeter ce système de prix, mais sans aucun levier pour réussir…

D’autres tentatives de solution apparaissent, telles :

[1] la fermeture annoncée par le MIIT de 16Mt de capacités obsolètes dans l’année,

[2] la demande des aciéries du Hebei de créer une société-holding d’achats groupés pour 16 grands hauts-fourneaux du pays et,

[3] les tentatives d’achats de mines hors Chine par les aciéries. Mais vu les hausses en flèche attendues en 2010, de production (600Mt) et des invendus, la seule solution qui demeure pour dompter la locomotive folle, semble la régulation par les prix mondiaux… du minerai !

La campagne chinoise contre le cartel semblerait malgré tout avoir un fruit : la refonte du mécanisme de fixation du cours mondial. BHP annonce un nouveau système de prix pour le charbon à coke, basé sur les tendances à court terme, qui vient de permettre la signature de contrats avec Europe, Chine, Inde et Japon. Système qui pourrait être bientôt étendu au minerai de fer. La Chine aurait pourtant tort d’en rêver un mieux-être tarifaire : le « cru » 2010, en charbon à coke, vaudra 200$/t, +55% !

 

 

 


Argent : ANP : Plus d’actions sociales

Mais si le régime se raidit face aux velléités libertaires, il perçoit aussi l’attente impérieuse de la base, d’un régime social plus moderne : il y travaille aussi vite qu’il peut, à travers de multiples initiatives explicitées aux députés :

[1] Nouvelle étape de la réforme judiciaire, une prochaine loi des camps de travail, sans aller jusqu’à les abolir, va brider l’arbitraire de ce système carcéral.

[2] Autre révision en vue : un durcissement du divorce, pour enrayer l’hécatombe des couples, 17millions en 2009, +10%, source officielle, et 30.000 à Pékin, quintuple du chiffre de 2001. Un délai de réflexion d’une semaine est envisagé.

[3] Face au vieillissement, le min. des affaires civiles va généraliser l’aide aux + de 80 ans (payable par le niveau local), et multiplier les centres de jour et les aides soignants, dont la Chine n’a que 20.000, face aux besoins évalués à 10M.

[4] Chen Zhu, ministre de la santé, prie les provinces de doubler à 300¥/an la prime de sécurité sociale du paysan : de reconnaître la santé comme principal atout, au-delà du béton, pour la croissance chinoise à l’avenir.

[5] Le syndicat unique ACFTU propose des sanctions contre les patrons pratiquant la rétention délibérée des salaires. Il fait aussi condamner à 40.000² de dommages une compagnie étrangère, pour renvoi d’un employé ayant fondé un syndicat avec le sceau de la firme, à son insu.

[6] Enfin, des édiles réclament des aides pour doter les villes petites et moyennes de 2 à 3000 cinémas.

 

 

 


Pol : ANP : Plus de poigne

Les tendances de ces deux brèves sont complémentaires, et typiques d’un régime conservateur à l’ancienne :

On constate une crispation autoritaire à l’ANP, pour reprendre contrôle d’un jeu social toujours plus instable :

[1] Suite à l’apparition récente des «journalistes citoyens», électrons libres qui enquêtent sur des affaires d’abus d’autorité (maisons-«clous» de Chongqing ou Pékin, meurtre d’autodéfense par une coiffeuse au Hunan), puis publient leur travail gratuitement sur internet, la GAPP, tutelle de la presse impose à tout aspirant journaliste à l’avenir un examen d’éthique marxiste. Sans préciser les sanctions à ceux qui oseront pratiquer sans le petit diplôme rouge.

[2] Déjà privées de reconnaissance officielle, les ONG, actives dans l’entraide à tout groupe faible (SIDA, femmes battues, prostituées, homosexuels) vivent à présent un durcissement des règles aux donations de l’étranger : nouveau moyen de les pénaliser, dit Wan Yanhai, Président de Aizhixin (ONG/SIDA). L’Etat craignant la remise en cause de son monopole de toute organisation sociale.

[3] Durant les Plenums, des retraités du Jilin furent stoppés par leurs enfants d’aller à Pékin déposer des pétitions contre leur ex-employeur, Baicheng-Electric : les fils, employés dans cette même compagnie, étaient menacés de mise à pied si les vieux arrivaient à Pékin. Et dans cette même rage contre les pétitionnaires, un édile a proposé 15 ans de prison comme peine aux plus enragés

 

 


Temps fort : Les petites brassées de la Chine vers l’Océan Arctique

L’été 2010, le vieux Xuelong, brise-glace racheté à l’Ukraine fera route vers le pôle, pour sa 4ème expédition arctique. Sur place, il communiquera avec la base chinoise de Ny-Ålesund (îles Svalbard, Norvège). Et dans trois ans, le pays lancera son nouveau brise-glace de 8000 tonnes, construit localement sur design étranger…

Tels sont les signes de l’intérêt de la Chine pour la région polaire, grandissant à mesure de la fonte des glaces, et d’un dégel inéluctable (conséquence du changement climatique) vers 2020-2030, alors que 50% de son PIB passe par la navigation. Dans son étude réalisée pour le SIPRI (Stockholm International Peace Research Institute) Linda Jakobson, chercheuse, constate qu’une traversée de Shanghai vers Rotterdam, via le détroit de Behring, économiserait 6400km, et que celle vers New York s’avèrerait à peine plus longue que la route classique vers Los Angeles (cf. notre carte).

D’autres atouts ne peuvent que faire rêver Pékin, dans sa soif insatiable en ressources nouvelles : hydrocarbures, métaux rares sont détectés sous la banquise. Cet attrait fait d’ailleurs craindre à un colonel Han Xudong «des conflits dans l’Arctique sous 5 à 10 ans, suite à des disputes de souveraineté»: via leurs ZEE des 200 milles, selon le droit de la mer, cinq pays monopolisent 88% des richesses connues. Réunis en Conseil Arctique, Canada, USA, Russie, Danemark et Norvège laissent l’ONU légiférer sur la zone, mais revendiquent d’avance sa propriété et y renforcent leur présence militaire, surtout la Russie qui y fait quadriller ses patrouilles aériennes et y a immergé ostensiblement un drapeau national, en août 2007.

Face à cela la Chine joue la prudence. Elle reconnaît les droits des pays riverains, tout en affirmant le besoin, face à cet Arctique «patrimoine de l’humanité, d’affiner le droit international » dans le sens du respect des droits des autres nations. Ce qui, au passage, pourrait être la position d’autres régions non riveraines telle l’Union Européenne. Ce que la Chine redoute, est l’imposition de droits de passage élevés par la Russie, la plus assertive dans sa prétention d’exploitation exclusive de « sa » part de l’Arctique.

Dans les faits, ces espoirs sont prématurés : [1] Les bas-fonds de Behring fermeront la route aux super tankers, les icebergs la rendront dangereuse et lente : les primes d’assurance ne seront pas forcément moins lourdes que celles de la route de Malacca, décuplés en cinq ans sous les frappes du piratage.

[2] Le reste du monde voudra et aura les moyens de contraindre les riverains à partager cette richesse voire à garantir la protection de cette « pompe à oxygène » et « pompe à froid » de la planète bleue.

Aux yeux scandinaves, le dégel offre une chance exceptionnelle vis-à-vis de la Chine : celle de s’en faire entendre, avec enfin une monnaie d’échange à faire valoir: l’offre de JV polaires minières et de transport, où ils apporteront leurs droits souverains et leurs technologies!

NB : Pékin vient de faire un pas vers son rêve arctique, en louant «pour 10 ans» à la Corée du Nord le port de Rajin. Rouvrant ainsi à son Dongbei une porte sur la mer du Japon, fermée depuis le XIXs, suite à une guerre perdue. Désormais, le Jilin est à 10h de Niigata (Japon), et bien plus proche des routes polaires vers l’Europe et l’Amérique…

 

 


Petit Peuple : Shijiazhuang – splendeurs et misères d’une courtisane

En ces temps de plenum, l’histoire sordide de Wang Yali passionne, quoique pleine de flou artistique selon les média qui la relatent. C’est qu’en coulisses se battent deux factions, l’une pour la couler et l’autre la défendre: on conçoit que pour sa carrière, le journaliste y regarde à deux fois, entre la croustillante histoire à raconter, et la peur de se trouver entre faucille et marteau: le portrait de la femme reste occulté derrière ces luttes d’influence.

Ce qui est sûr: Wang Yali est née en 1969 à Wuji près de Shijiazhuang (capitale du Hebei), sous le nom de Ding Zhengxing, fille de pauvres fermiers. Puis à 20 ans, la fleur de province est montée à la ville, avec pour tout pécule un faible bagage scolaire mais en revanche une beauté à couper le souffle et la rage de s’arracher à une enfance de misère Elle se fit vite remarquer de Wang Bopan, chevalier d’industrie qui la tira du ruisseau pour en faire sa « ertaitai », 2ème épouse.

Durant 7 ans, la liaison lui fut immensément profitable. Pas sotte, elle apprit vite, au contact des relations de Bopan dans le club très fermé des apparatchiks de la province. Quand la liaison éclata en 1997, Yali elle faisait déjà partie de ce cercle exclusif, et sure de son ascendant sur ces hommes de pouvoir, n’avait plus besoin de papa-gâteau. Elle était désormais maîtresse, non plus d’un seul homme, mais de tous à la fois—et de son propre corps.

Depuis un an en fait, elle avait Wang Zhifeng, grand patron du bureau municipal de la circulation, où elle fut employée jusqu’en 2001. Elle avait aussi Zhang Zhengjiang, vice-Président du parlement local qui la fit entrer successivement au Parti, à la CCPPC (assemblée consultative) locale et surtout dès 1999 à la Ligue de la jeunesse, tremplin de toute carrière sérieuse en ce pays : voilà Yali lancée, brûlant les étapes et les hommes au passage.

En mars 2007, au grand moment des chaises musicales des promotions à travers le pays, c’est son apogée: elle est nommée n°2 de la Ligue (« plus jeune dirigeant au plan national », disait la presse d’alors), n°2 de la CCPPC et voyait se profiler la charge de vice-maire – à 38 ans seulement : belle revanche pour le sexe «faible», dans ce monde d’hommes !

Mais plus dure sera la chute, d’ autant plus cuisante que ce n’est qu’à elle seule qu’elle la devra, suite à une lourde erreur. Quand en août ’08 décède Bo-pan d’un arrêt cardiaque (son ex amant au prénom prémonitoire de « assiette cassée »), Yali débarqua au funérarium avec une escouade de 20 policiers pour essayer de contraindre les héritiers à accepter une autopsie, les accusant d’empoisonnement. Non sans toupet, elle-même se revendiquait fille «unique» du défunt, pour empocher les 65M$ d’héritage. Elle était présomptueuse. Elle savait dominer les hommes, mais pas les femmes: Cuimian, fille de Bopan se défendit pied à pied. D’abord, pas d’autopsie, et la ridicule accusation de poison tomba d’elle-même. Puis Cuimian déterra un témoignage lourd: en 1997, au coffre de son père, Yali aurait «fauché» 1,1M$ de cash, indélicatesse qui aurait été la cause de la rupture. Surtout, pour entrer à la Ligue, elle aurait falsifié son CV, se rajeunissant de 9 ans, avançant des états de service de soldat et pharmacienne militaire, à l’âge tendre de 12 ans. Le faux nom apparut aussi, modifié pour usurper l’héritage…

Entre ces femmes, c’est la lutte à mort. Cuimian dénonce Yali auprès de la Commission de la discipline, la police du Parti, jusqu’à Pékin, accusant le Bureau du Commerce d’avoir «égaré» le certificat d’enregistrement de Jinhua, la compagnie de son père : Qi Zhigang, n°2 du Bureau a à son tour succombé aux charmes de Yali. D’abord divisée, la Commission finit par admettre les faits.

Dès juin 1909, Yali aux abois est réduite à se battre pour sauver sa tête. Il lui reste un atout: si elle saute, c’est tout Shijiazhuang qui saute. Et là, la chance change de camp: pour valider sa guerre contre la corruption, Pékin a besoin d’un nettoyage en province, d’un cas assez probant pour impressionner, mais sans trop faire de casse. Dès lors, en janv.2010, la Commission nationale de discipline débarque à Shijiazhuang et parvient à convaincrai la mairie de lâcher sa protégée. Convaincue de fraude et usurpation, Yali est transmis à la justice ordinaire.

C’est le hallali. Désespérément, elle s’abrite derrière la prétention que Bopan serait son père biologique – mais une analyse d’ADN d’elle-même et de Cuimian devrait très bientôt briser ce dernier rempart et «soulevant la robe, dévoiler la queue du renard» (狐狸尾巴 húli wěi ba) : exposer au monde la noirceur de son âme !

 

 

 


Rendez-vous : Pékin : Salon des nouvelles énergies et de l’environnement

16-18 mars, Pékin : CNEE 2010, Salon des nouvelles énergies et de la protection de l’environnement

15-17 mars, Pékin : CIHE-HVAC, Salon de la ventilation, du chauffage et de l’air conditionné

16-18 mars, Shanghai : Solarcon, Salon de l’énergie photovoltaïque

16-18 mars, Shanghai : Semicon, Salon des semi conducteurs