Le Vent de la Chine Numéro 34

du 26 octobre au 1 novembre 2009

Editorial : La saga de Yu Xiangdong, espion freelance

A l’aéroport O’hare (Chicago), ce 14/10, un quadragénaire bronzé franchit la ligne des douanes, valise en main. Instructeur chef en design chez BAIC (Beijing Automobile Industry Co, groupe automobile pékinois, 98.000 ventes en 2008), Yu Xiangdong retourne en congés à sa seconde patrie les Etats-Unis quand il se voit soudain arrêté, inculpé du vol de 4000 fichiers ultra-secrets de Ford, son ancienne maison (plans et schémas de moteurs, transmissions, circuits électriques, jusqu’aux armatures des portes), accusé de les avoir monnayés contre son nouvel emploi.

L’aspect radicalement nouveau de cette fraude, est qu’elle semble suivre une motivation purement personnelle, sans commandite d’une firme ou de son pays. Après 10 ans à Detroit, Yu constatait les pas en avant de l’automobile chinoise, en arrière de l’américaine. Il cherchait à refranchir le Pacifique pour faire d’une pierre deux coups : retourner au foyer, et dans une écurie qui gagne.

Selon l’acte d’accusation, il aurait d’abord piraté en décembre 2006 la base de données de Ford, puis trouvé un job d’attente chez Foxconn, firme taïwanaise. La position avait l’inconvénient d’être dans l’électronique—pas vraiment sa partie- mais l’avantage d’être située sur le continent, bon terrain de chasse pour négocier son «trésor de guerre». D’autre part ce délai lui permettait de se faire oublier de ses ex-patrons, de brouiller les pistes, pour le jour où Ford verrait ré émerger sa technologie au Céleste Empire.

Une première tentative échoua chez SAIC (Shanghai Automobile Industry Co) de Shanghai, l’allié de General Motors, concurrent direct de Ford. Soit que ses prétentions aient été trop hautes, soit que SAIC se soit méfié des risques juridiques associés à ce cas évident de piratage industriel. Yu réussit enfin chez BAIC, où il entra fin 2008 sous un contrat de trois ans. Ce qu’il ignorait, est qu’il été repéré par Ford, voire la CIA. Lorsqu’il choisit -imprudemment- de retourner aux USA mi-octobre, un mandat d’arrêt secret l’attendait. Pour ses 5 chefs d’accusations, il risque 45 ans de prison et 1,25 M$.

Le drame dans cette affaire, est que Yu était devenu un « enfant du pays» américain après y avoir été accueilli à bras ouverts, débarqué de son Jiangsu natal en 1985, pour des études post doctorales de mécanique entre les universités de Pennsylvanie et de l’Illinois. Après avoir passé la moitié de sa vie aux Etats-Unis à 47 ans, l’ingénieur n’était plus soupçonnable d’espionnage, et moins encore, s’il le pratiquait « en free lance ».

Autre victime: BAIC. Quoique tenu à l’écart de l’affaire, le groupe vient de se voir refuser le rachat d’Opel par General Motors, quoiqu’il soit peut-être le meilleur candidat. Il semble aussi voué à rater le rachat de Volvo (de Ford), et n’a pu reprendre qu’une part minoritaire de Saab (filiale GM), confié au suédois Koenigsegg. Tout se passe comme si les 2 géants de Detroit s’étaient tacitement ligués pour bloquer la cession de leurs bijoux européens à la nouvelle maison de Yu Xiangdong.

Deux remarques pour conclure :

Œ en droit américain, Yu reste présumé innocent, jusqu’au jugement.

 Ce genre d’affaires d’espionnage industriel se produit beaucoup plus dans le Nouveau monde qu’en Europe. Pourquoi ?

A ce qui nous semble, cette vulnérabilité de l’Amérique, réside dans cette qualité qui fait aussi sa fortune: son ouverture d’esprit et des frontières. Tous les continents comptent, en Amérique, des communautés ethniques en permanence alimentées en permanence par de nouveaux arrivés. Tous sont égaux en droits, citoyens à part entière, et peuvent occuper des postes à haute responsabilité. C’est démocratique- et sous l’angle du contre-espionnage, c’est contrôlable !

 

 


A la loupe : Taiwan-Chine, fin de la lune de miel

18 mois d’embellie sino-taiwanaise sont inopinément enrayés.

Le 19/10 sans crier gare, Taibei reporte les palabres pour l’EFCA (Economic Framework Cooperation Agreement), futur traité commercial bilatéral, soi-disant pour se concentrer sur le vote du budget. En fait, le cabinet KMT de Ma Ying-jeou a perdu sa popularité, suite à sa faible réaction au terrible typhon de septembre. Baisse de cote renforcée par les actuels 6% de chômage, record auquel Taiwan n’est pas habitué. Joue surtout la déchirure de l’électorat, suite à la perpétuité infligée à Chen Shui-bian, l’ex-Président indépendantiste inculpé pour corruption… Ma repousse donc ce rendez-vous avec Pékin et promet, une fois le traité convenu, de le soumettre au Parlement: histoire de rassurer et de rassembler.

Mais le désamour envers Ma et la normalisation, est renforcé par des maladresses du rivage d’en face :

[1] Kao Koon-lian, de la Straits Exchange Foundation (l’instance du dialogue sino-taiwanais) reproche à Pékin d’être «peu malin» (sic) à boycotter Kaohsiung, parce qu’elle a reçu le Dalai Lama et projeté un film sur la Ouighoure R. Kadeer. Du coup, cette seconde ville de l’île perd chaque jour des milliers de touristes chinois—ce qui n’alimente pas le sentiment envers le continent.

[2] Ma s’impatiente de la poursuite chinoise de la course aux armements, notamment des 1300 missiles de courte portée, tactiques, balistiques et cruise pointés sur l’île (et toujours plus). «Si nous devons négocier un traité de paix, dit-il, il va falloir soit les ôter, soit les désarmer ». Dans un livre blanc (20/10), l’État-major accuse les « forces communistes » de « se préparer toujours à une guerre» et fait le point sur le danger «pour l’Asie» de cette Armée populaire de libération (APL) aux crédits quadruplés en 9 ans (48MM² cette année), à la capacité «logicielle» renforcée (soldats diplômés, cyber-armements, guerre psychologique). Conséquence confirmée par Ma Ying-jeou : Taiwan va commander un autre lot d’avions, radars, navires etc aux USA, pour rétablir la parité, tout en poursuivant la démobilisation de 385.000 soldats en 2004 à 215.000 en 2013. Dans le réarmement spectaculaire chinois, il faut bien noter la contradiction d’intérêts. Face à l’ambition de Pékin et du KMT de réunification, la course aux armements ne sert que l’APL, mais ni le Parti communiste chinois, ni Ma qui n’a d’autre choix que de se réarmer à son tour.

NB : En définitive, si le rapprochement marque le pas, c’est qu’en ces 18 mois de mandat de Ma Ying-jeou, les deux rivages ont épuisé toutes les voies de rapprochement à leur portée pour l’instant. Sur le terrain, le macrocosme chinois et le microcosme taïwanais sont deux univers que tout continue à opposer- sauf la langue.

 

 


Joint-venture : Branle-bas dans l’empire du vent

La tempête souffle sur l’empire des éoliennes chinoises, dont le parc doit s’accroître de 12GW en 2008 à 150 d’ici 2020. Longyuan, filiale de l’électricien Guodian vise 1MM$ en bourse de HK pour nourrir son expansion. Avec 3GW, il pesait 25% du parc national en 2008. En 2020, il veut avoir 20GW et donc redescendre en valeur relative, à 7,5%. Vestas le danois, 23% du parc mondial renforce sa nouvelle usine de 130.000m² à Tianjin, et veut avoir investi d’ici décembre 300M² en Chine, et employer 3000 personnes: ce sera sa plus grande usine au monde.

Le poids lourd Xiangtan, du Hunan, vient de racheter pour 10M² le hollandais Darwind, dans le but avoué de vendre en Europe des hyper-éoliennes de 5MW, tout en quadruplant la production. Patron à 80% de Vensys (Allemagne), Goldwind, du Xinjiang (33% du marché), s’apprête à produire pour les Etats-Unis des parcs d’éoliennes. Mais pourquoi, pour ces groupes locaux, aller chercher le marché étranger alors que la Chine dispose d’un tel marché immense? Peut-être par ce que l’Etat a décidé de faire le ménage, au profit de Shanghai Electric, groupe public qui recevra la part du lion des 7 bases d’éoliennes prévues d’ici 2020, de 120GW au total : l’empereur du vent de la Chine de demain. Dans cette perspective, il peut être sens, pour les outsiders, de préparer leur parachutage ailleurs !

 

 


A la loupe : Pétrole—la faim pousse la Chine hors du bois

En matière de pétrole, on voit se poursuivre les efforts des groupes chinois pour augmenter leurs réserves hors frontière à n’importe quel prix. La nouvelle du jour est que cela marche moins bien qu’hier. Sous la pression des pays producteurs, Pékin doit changer son fusil d’épaule et se battre avec les autres acheteurs, à armes égales !

En Afrique, les trois compagnies pétrolières chinoises subissent leur 3ème échec en trois mois. [1] Pour la reprise des parts du groupe Jubilee (Ghana), Exxon l’emporta en août sur la CNOOC. [2] En septembre, la reprise du rachat de parts de Marathon en Angola par CNOOC et Sinopec (pour 1,3MM$), fut bloquée par le gouvernement de Luanda, [3] En Lybie, la reprise des actifs de Verenex (Canada) par la CNPC, la compagnie nationale pétrolière, pour 482M$ devrait, disent les experts, connaître le même sort.

Ce qui se passe, est que le temps des rachats faciles est terminé, où l’on obtenait un gisement pour une route et un port, saupoudrés de quelques villas et Mercedes. Aujourd’hui, les pays ne cèdent plus ni gisement, ni pétrole, mais seulement la prime d’extraction, voire la garantie de livraison, au prix du marché (futur).

Or la Chine a besoin de toujours plus, de 8M barils/jour l’an passé, à 11M barils/jour en 2014, et 30 en 2030. Aussi est-elle obligée de renoncer aux arguments du type « fraternité tiers-mondiste», et payer plus. CNPC, alliée à British Petroleum, signe avec Bagdad son 1er gros contrat pétrolier post-Saddam : 38% du gisement chacun, mais pour 14 à 20MM$ d’investissement, ils n’obtiendront que 2$/baril de royalties d’extraction—et s’ils veulent emporter le pétrole, ce sera au prix fort.

Idem, la CNOOC accueille à Shenzhen (18/10) son 1er méthanier de Qatargaz, 216.000m3 de GNL (Gaz Naturel Liquéfié), d’un contrat de 2Mt/an. Le prix du gaz sera calqué sur le marché nippon – une fortune, et un recul très net par rapport aux exigences du passé, de tarifs fixes et bas en échange de la fidélisation « longue durée » du contrat de 25 ans. Idem, le groupe offshore s’apprête à obtenir ses premiers 20 derricks de forage en golfe du Mexique (aux USA), une première, mais le prix reste secret, et CNOOC n’obtiendra que ces 20 unités, sur les 471 à remettre…

Or, voilà que B. Obama demande à ses alliés arabes de livrer plus de pétrole à la Chine, et ceux-ci font mine d’accepter, tels les Emirats qui vont quadrupler leurs livraisons sous six mois à 200.000b/j. En échange, le Président américain prie Pékin de freiner ses commandes à l’Iran et surtout de voter les sanctions contre sa course à la bombe. Cela marchera t-il? C’est douteux, tant la soif de Chine en or noir est inextinguible !

 

 

 

 


Argent : Picsou ouvre son coffre aux pauvres

La richesse en Chine fluctue. Chen Fashu en sait quelque chose, passé de 400e fortune nationale en octobre 2008 (liste Forbes) avec 6,4MM$, à 15e aujourd’hui avec 25MM¥ (liste Hurun). La base de sa prospérité réside dans Zijin, 1er mineur d’or du pays, et dans son groupe Newhuadu.

De manière insolite, ce jeune fujianois de 47 ans devient le 30/09 le 1er mécène de l’histoire moderne chinoise en cédant aux pauvres 45% de son trésor. Après «2 ans de réflexion», il met à disposition 8,3MM¥, à commencer par 10M¥ placés dans des centaines d’écoles en régions déshéritées, et autant de bourses pour étudiants faméliques.

Manquant d’expérience en gestion de si gros fonds de charité, il crée Philanthropic Newhuadu, fondation calquée sur celle de Bill & Melinda Gates, avec bureau de directeurs indépendants, qui devraient bientôt associer au pilotage de l’oeuvre, les experts de l’organisation soeur…

Cependant on sent bien dans cette histoire, que quelque chose « ne colle pas ». La décision de Chen, dit la presse, doit beaucoup à l’enquête lancée depuis septembre par le Bureau national des taxes sur les comptes du milliardaire, pour une évasion fiscale sur les ventes de parts Zijin.

NB : Placer le produit du détournement sur le compte des pauvres est un geste élégant qui lui offre deux avantages majeurs : éteindre cette action potentiellement catastrophique, et s’acheter une auréole.

 

 


Temps fort : Qui nettoie la mafia à Chongqing?

En 2000 les sociétés noires (黑社会, heishehui) comptaient 1 million de malfrats. En 2004, elles avaient triplé, rattrapant la Russie. En 2009, elles auraient 4200 syndicats et 4 millions d’émules selon le professeur Ming Xia (City University., NY). Le ressort de ce terrible succès, est l’incapacité des cadres à résister à leur noyautage. Cette faiblesse elle-même, est due à deux faits du système : la disparition de l’idéal socialiste, qui n’a pas été relayé par un esprit citoyen, et l’absence des outils de la stabilité des pays de l’Ouest—justice et presse indépendantes.

Dans ce contexte, la série de procès de Chongqing fait l’effet d’un tsunami dans la société chinoise, comparable dans l’histoire, à celui de la bande des Quatre, fin des années ’70. Pour commencer, cinq procès portent sur des dizaines d’accusés de meurtres (souvent horribles), d’extorsion sur tous les métiers (mines, chantiers, taxis…), de trafic de drogue, prostitution. Parmi ceux-ci, deux jumeaux de 23 ans, un élu local qui avait imposé une grève aux 8000 taxis en novembre 2008, le n°2 de la brigade des stupéfiants, une patronne de 20 salons de jeu clandestin (qui entretenait un harem de 16 jeunes gens pour ses besoins privés)…

Le cas hors du commun, est celui de Wen Qiang, ex-chef de la justice depuis 16 ans, qui rançonnait la ville (la patronne des tripots était sa belle-soeur). Wen est accusé de protection de cet univers du crime. Dès le 21, six bandits étaient condamnés à mort. 1544 cadres/bandits ont été arrêtés depuis l’été, dont 14 cadres du plus haut niveau. Il se passe quelque chose, comme si la ville ou le Parti avait décidé de terrasser ce chancre.

La presse prête ostensiblement le crédit de l’opération à Bo Xilai, nouveau «M. Propre». Il avait déjà quitté en pleine gloire un poste provincial à problème dans le Dongbei, secrétaire/maire de Dalian, puis gouverneur du Liaoning. Dynamique, aux capacités gestionnaires fortes, l’homme mérite sans doute ces compliments—mais on sait bien qu’en ce pays, le mérite n’est rien sans l’aval central. D’aucuns s’aventurent même à lui prédire un rôle majeur au sommet de l’Etat après 2012—quoique les rôles soient déjà distribués de longue date, Xi Jinping en tête (candidat du Parti) , voire Li Keqiang (l’homme de Hu Jintao).

Que se passe t’il donc? L’action prêtée à Bo, viole la règle de silence tacite respectée par Jiang Zemin puis Hu Jintao, au nom de la stabilité sociale. D’ailleurs, Bo Xilai vient de faire un étrange aveu dans la presse : il n’a pas « décidé » de le faire, mais y a été contraint par la croissance hyperbolique de cette mala vita.

Chongqing, d’autre part, a d’autres fers au feu. Une fois guérie de son fléau, elle veut lancer un plan de reconstruction «vert» et «durable» de sa métropole de 33M d’âmes, axé principalement sur la sécurité, la santé, reforestation et transports, les technologies de l’information et les énergies nouvelles. Ce plan pourrait devenir l’espoir de la Chine pauvre de l’intérieur. En 4 ans, selon le vice maire Huang Qifan, 100MM² devraient y être investis, la moitié aux frais de l’Etat, l’autre privée. Autant d’effets d’annonce faits pour remettre en selle Bo Xilai, le politicien qu’on disait hier le moins apprécié de l’appareil, et le plus par la jeunesse chinoise.

 

 

 


Petit Peuple : Beifang—trop d’aisance nuit

Sur les pentes ocres du Guizhou entre rizières et pinèdes, les bus foncent, avalant les épingles à cheveux, inconscients de leur surcharge de passagers, valises fatiguées et paniers de porcelets rapportés du marché. Touristes et vacanciers, tous ont hâte d’arriver. Tant pis pour les vessies malmenées: on ne s’arrête pas !

C’est pourquoi ce 23/08 à 13:30, quand leur Pullman s’arrêta devait les édicules de Beifang, bourg du pays Miao, ces 2 jeunes touristes (une femme, un homme) poussèrent un soupir de soulagement, voyant arriver leur délivrance. Problème, il n’y avait qu’une place: bien élevé, Lian (nom d’emprunt), laissa passer la femme, et se retira au coin le plus discret à proximité, un bout de mur de brique : mal lui en prit !

Propriété de Zhang Futang, quinquagénaire râleur, la maison était la prunelle de ses yeux. Sacrifiant l’épargne de toute une vie, il venait de faire rebâtir la bicoque de roseau, désormais anoblie par la brique, orgueil de ses vieux jours. Et voila qu’un corniaud de triste sire venait la compisser: Zhang surgit une bêche à la main, hurlant que le jeune homme l’humiliait. Puis rejetant sa bêche (car au fond, il n’était pas méchant), il le flanqua à terre d’un magistral coup de pied au fondement.

Se relevant, Lian se rua sur son agresseur. Les deux hommes roulèrent à terre, avant d’être séparés et d’entamer les palabres. Zhang s’était égratigné la main dans l’algarade, ce qui avait fait baisser son taux d’agressivité. Il ne voulait plus que 10¥ pour se faire soigner: sentant le roussi, le chauffeur se dépêcha de les lui tirer du graisseux tiroir-caisse.

Mais le ciel était pour Zhang. Au coeur du combat incertain, tel Blücher à Waterloo, débarquèrent une 15aine de voisins en goguette : renfort inopiné qui permit au lésé de redonner de la voix. Le préjudice était terrible. L’urine avait pollué le mur à hauteur du four, symbole de fortune et d’harmonie familiale. L’âtre sacré était donc profané et avec lui, la paix du foyer, les mânes des ancêtres, l’honneur du village. A Beifang, on était tous du même clan, 葭莩之亲 jia fu zhi qin tous du même roseau, les uns de la sève, les autres de la tige»).

La position de Lian-le-pisseur se faisait des plus précaires. Avec le guide et le chauffeur comme médiateurs, il était au coeur d’un anneau mouvant qui vociférait des exigences, qui de 22.000¥, qui de 6.000¥, tandis que d’autres amoncelaient des pavés devant le bus pour l’empêcher de prendre la clé des champs…

Comme dans un scénario bien réglé, la police choisit ce moment pour débarquer. Avec ses hommes, le commissaire Yao partageait évidemment les coutumes claniques de la région: assez vite, il offrit au voyageur pour régler le litige, de payer un Xi Zhai (洗寨) ou « lavage du village», à savoir un «3×120». Lian ne saisissant toujours pas, il fallut tout lui dire : il allait régaler Beifang d’un banquet de 120 livres de porc, 120 de riz et 120 d’alcool blanc. Magnanimes, les paysans paieraient le res-te, les poivrons, les oignons, les tomates, la façon… Avec 800¥ d’infirmerie supplémentaires, il y en avait pour 2900¥: c’ était donné, pour la paix des ancêtres! Lian voyait bien les choses autrement, une extorsion de fonds éhontée. Mais il n’avait pas le choix, d’autant que les autres passagers, non solidaires, le pressaient d’en finir : il paya et l’on en resta là.

Sauf sur les forums de l’internet, où toute la Chine pousse un éclat de rire, sous l’hypocrite prétexte d’étude sociétale: de nos jours les rites sont-ils bons ou mauvais ? Les citadins peuvent-ils se comporter à la campagne comme en pays conquis? Bien peu admettent que pour une fois, ce sont les villageois qui ont roulé la ville dans la farine, lui extorquant un festin digne de ceux du village d’Astérix !

 

 


Rendez-vous : Shanghai, le rendez-vous de l’industrie pharmaceutique

26-29 oct. : Shanghai, PTC Asia, Salon de la transmission

27-30 oct. : Shanghai, Salon de l’industrie pharmaceutique

28-30 oct. : Xian, Salon des aménagements intérieurs et garnitures d’avions

28-31 oct. : Chengdu, Salon des équipements médicaux

29 octobre : Pékin, China Foodtech