Le Vent de la Chine Numéro 11

du 5 au 11 avril 2009

Editorial : G20 – chronique d’un succès inattendu

Les jours précédant le G20 de Londres, le 2/04, était hanté du souvenir de 1933: dans cette même métropole cette année-là, les puissances, paralysées par leurs égoïsmes nationaux, n’avaient pas pu trouver de remède à la crise de 1929. Or au G20, des blocs arrivaient divisés, attribuant chacun la récession à une cause différente, en fonction de leurs intérêts (pour l’Europe «la dérégulation», pour le bloc anglo-américain «les banques», pour Chine et Russie «le dollar»).

C’est sans doute ce pessimisme général qui a sauvé le sommet : l’échec apparaissait inéluctable, mais nul n’a voulu nul ne voulant en porter la responsabilité, et tous ces leaders voyaient progresser à toute vitesse dans leurs pays le chancre du chômage et du protectionnisme. Aussi chacun a mis en sourdine ses exigences pour se contenter du faisable, et de l’urgent. Et notamment, le bloc anglophone a renoncé à forcer la zone Euro à le suivre dans le surendettement.

Au plan du financement, 850MM$ vont à la Banque mondiale et surtout au Fonds monétaire international qui voit ses fonds triplés (à 750MM$) : avec 250MM$ offerts via d’autres canaux, 1100MM$ sont disponibles aux pays en développement et émergents.

Les leaders s’accordent pour réguler strictement les fonds de pension, les émoluments des PDG, les firmes évaluant la fiabilité des placements fiduciaires et le degré de risques permissibles aux banques. C’est dans ce contexte qu’eut lieu la semi-réconciliation entre les Présidents Hu Jintao et Nicolas Sarkozy : le Français exigeait la levée du secret bancaire des paradis fiscaux, que Hu refusait pour divers motifs techniques, ses deux vraies raisons étant le vieux différend sur le Tibet, et son souci d’obtenir une exemption pour Hong Kong et Macao… en fin de comptes, c’est Obama, qui prit un à un les deux hommes, dans un style très libre et créatif (s’adressant à eux sous le vocable de « guys », ou « les gars ») et leur vendit un compromis permettant de mettre au pilori ces paradis fiscaux, avec sursis (probablement fugace, car intenable) aux deux places asiatiques.

L’importante offre russo-chinoise de remplacer le dollar comme devise mondiale par une monnaie panier du FMI, n’est pas enterrée : Moscou a proposé une « étude sur la question », qui resurgira au prochain G20 de New York en septembre. Tandis que sur l’île sarde de La Maddalena en juillet, le G8 verra -peut-être- le marathon final pour la Ronde de Doha, série de concessions réciproques négociées depuis 2001 entre 180 pays membres de l’OMC. Selon Chen Deming, ministre du commerce, elles porteraient au monde 1000MM$ d’affaires industrielles supplémentaires, et 150MM$ en échanges agricoles.

Bilan : un Sommet tournant historique, même si ses déclarations en sont au stade de l’intention. La Chine, elle, est apparue à Londres une des forces sans laquelle aucun changement n’est possible !

 

 


A la loupe : Le protestantisme, un ‘poil à gratter’ de moralité ?

Introduit en Chine au début du XIX. siècle, le protestantisme comptait en Chine moins d’1 million de fidèles en 1949, contre 4 millions au catholicisme. En 2005, ils étaient 50 millions. Sorti il y a 10 mois, le rapport de Tocqueville (US) sur cette église chinoise estime que les «chrétiens non enregistrés (protestants à 80%) pourraient être le 1er groupe social autonome du pays». Si l’on ajoute que ces croyants se réunissent au foyer, comme les 1ères communautés chrétiennes sous l’empire romain, ou… comme les cellules communistes des temps héroïques d’avant ’49. Ce qui explique la surveillance rapprochée sur ces chapelles de salon. Ils sont en tout cas le groupe en expansion le plus rapide: ils devraient atteindre 10% de la population ou plus, 140 millions dès 2020.

Leur bond en avant est soutenu par les milliers de paroisses chinoises à Hong Kong, Singapour, en Australie, aux USA, au Canada (80, rien qu’à Vancouver), dont des membres viennent investir en Chine, mais aussi prier. Chez elles, elles attirent les étudiants chinois fraîchement débarqués. Elles soutiennent aussi leurs soeurs de Chine, en financement et en catéchèse.

Depuis 20 ans, les protestants chinois bénéficient d’une mutation d’image auprès des hauts milieux socio-économiques et politiques. Selon un de ses pasteurs, cette église a «brisé son statut de clandestin et se présente comme phare». Elle prêche un message innocent pour la pratique (par la foi) des valeurs quotidiennes (honnêteté, mariage, famille), contre l’aventurisme de mots d’ordre comme «salut national» ou «défense des droits civils». Elle refuse aussi le concept d’église «patriote», prôné par le régime: très sérieux, ces protestants ne croient qu’en Dieu, qui n’a pas de frontières.

Le travail de charité s’étend, soutenu par les églises-soeurs de l’étranger : des milliers d’oeuvres protestantes (écoles, orphelinats, homes) jaillissent dans le pays, la plupart en petite structure, faute d’un statut légal toujours interdit. Certaines sont directement financées par un PDG chinois, protestant millionnaire.

En somme : on voit jaillir une communauté libérée des complexes de cette société paralysée par manque de références morales. Les protestants embarrassent l’Etat, lequel conscient de leur utilité, tente de freiner ces rivaux potentiels, sans pouvoir les enrayer. Selon ce politologue, «tout ce qui leur manque est de croître en nombre, statut, et ressources financières». Autrement dit, le temps d’une à deux générations !

 

 


Joint-venture : Un Rotschild in, un Rotschild out

Un Rotschild in, un Rotschild out

La remise sur ses rails de la relation franco-chinoise (2/04) sera venue trop tard pour sauver le projet d’entrée de la Banque de Chine dans Compagnie Financière Edmond de Rothschild. La Banque de Chine voulait injecter 236M² pour 20% de la banque d’investissement française. La tutelle CBRC (China Banking Regulatory Commission) avait trois mois pour approuver -mais prenait son temps, faute de certitude sur la conjoncture. Faute de l’avoir fait, elle a reçu un second sursis à l’expiration duquel le 1/04, le contrat est caduc. CFEDR misait sur le réseau commercial de la 3ème banque chinoise pour trouver en ce pays de nouveaux marchés pour ses domaines de compétence, la gestion de portefeuilles et les fusions acquisitions. Toutefois, la Banque de Chine fait déjà savoir qu’elle pourrait tenter de reprendre la coopération par d’autres voies. A suivre.

En revanche, une autre branche de la famille, domaine Baron de Rothschild-Lafite signe fin mars avec CITIC la création d’un domaine vinicole à petite production, 25 hectares sur les collines maritimes, ensoleillées, bien drainées de Penglai (Shandong), sous la direction d’un maître de chais français installé en Chine depuis de longues années. Aucun montant n’est cité. Mais le groupe vise le haut de gamme.

 

 


A la loupe : Yitong, avocats sans froid aux yeux

Le 3/03, immédiatement diffusé par l’internet (mais pas par la presse!), le verdict du bureau de justice de Haidian (Pékin) prenait une ampleur nationale : le cabinet Yitong était suspendu, ses avocats interdits d’exercer pour six mois, ce qui, selon son directeur Li Jisong, équivalait pour la firme à sa faillite. Raison alléguée : un des associés, Li Subin, pratiquait sans licence. Yitong conteste l’accusation comme sans fondement : Li Subin, directeur-adjoint, ne plaidait pas, mais faisait dans le conseil juridique.

Mais tout ceci n’est qu’un coin du voile. Ce que le ministère de la Justice reproche à Yitong, est plus grave : avoir défendu [1] Hu Jia, le défenseur de causes humanitaires condamné à trois ans, titulaire d’un prix du Parlement européen; [2] Chen Guangcheng, l’apôtre des droits des femmes contre la stérilisation forcée (emprisonné pour 4 ans, titulaire d’un prix philippin); [3] les églises protestantes au foyer, sous le feu d’une persécution sensible depuis 2007; [4] les élections directes au barreau de Pékin : Yitong avait recruté plusieurs avocats chassés par d’autres maisons pour avoir réclamé cette démocratisation de la profession. [5] avoir repêché Li Subin, qui venait de gagner un procès contre le bureau de Justice du Henan pour faire baisser ses propres frais d’emprisonnement (391 jours !), ce qui n’avait pu qu’irriter les maîtres de la justice chinoise.

En fait, il n’y avait pas de cause assez désespérée que Yitong ne trouve digne de voler à son secours, en vrai Don Quichotte juridique de la Chine du XXI. siècle.

«Je poursuivrai le combat. Je ne leur ferai pas ce plaisir de désespérer de notre système légal, qui a tant progressé. Comparé à une tour de 100 étages, il en est au 70ème. Même si on pousse en bas, le simple maçon que je suis, je mourrai certes, mais ils ne pourront abattre les 70 étages déjà bâtis »… Li Jinsong, avocat-chef du cabinet Yitong

On voit cependant le malaise du pouvoir judiciaire, à lancer cette frappe : le procès se tient à quasi huis-clos (seul le directeur est autorisé à comparaître) ; et le verdict est soumis à révision, appel sous trois mois etc. Pas intimidées, les victimes se défendent bec et ongles, accusant « une poignée de cadres… de violer sciemment la loi ». Leur dé-fense est très commentée sur internet. Au passage, on peut imaginer le dilemme pour cette justice, de devoir frapper ses meilleurs espoirs: avant sa disgrâce, Gao Zhisheng, autre avocat « disparu » depuis six mois, avait été classé parmi les 10 meilleurs avocats du pays. Une des clés de tout cela : Gao Zhisheng, Hu Jia, Li Subin, sont tous de confession protestante, membres de cette minorité intellectuelle et légaliste, qui donne aujourd’hui le plus de fil à retordre aux autorités. (voir article suivant sur le protestantisme en Chine)

 

 

 

 

 

 


Argent : Bourse : grand nettoyage, et grande mousse de printemps ?

Durant cette semaine du « G20 », la bourse chinoise a poursuivi sa convalescence improbable, alors que se poursuit la contraction des commandes mondiales et de l’activité industrielle. Le 1er avril, la bourse de Shanghai gagnait 1,5%, celle de Shenzhen +1,9%, portées par le flot du crédit et la foi en ce mantra, «la Chine sortira 1ère de la crise», répété par des gens plus ou moins indépendants, tel Zhang Zhuo, courtier chez Galaxy, qui prédit pour l’année une hausse boursière de 27%. Un autre ressort de la reprise, est la faiblesse de l’offre, en l’absence d’émissions nouvelles depuis sept.

Après avoir parlé depuis 10 ans d’assainir la Bourse, la CSRC, la China Securities Regulatory Commission, (son vice-Président Fan Fuchun) s’est mise à nettoyer les écuries d’Augias, avec trois mesures en cours :

[1] la réforme des règles d’entrée en bourse. La CSRC l’avoue sans embarras. Depuis 1992, cette bourse était à l’avantage unique des firmes et des courtiers. Selon Wind Info, en 2007, les 125 firmes listées ont vu leurs parts s’envoler en moyenne de 191% entre l’achat initial et le 1er jour de cotation: poussée outrageuse et injustifiée. Sur le marché initial, les parts ne s’obtenaient que par loterie, jeu vicié qui maintenait un prix artificiel, sans rapport avec la réalité. Les acheteurs avisés se réunissaient en clubs (clandestins) pour multiplier les chances en loterie, mettre ensemble les parts acquises, et revendre après 3 à 6 semaines pour éviter l’inévitable chute. Ce système ayant causé l’an dernier une chute de la bourse de 65%. La CSRC cherche la parade, comme par exemple laisser, comme dans les grandes banques, des investisseurs stratégiques être servis à l’avance, afin que soit fixé un prix public réaliste…

[2] le renforcement des marchés à terme par la création le 27/03 en bourse de Shanghai, d’un marché des aciers, permettant aux producteurs de compter sur des prix fixes à un semestre. Cette création permit au cours du fer à béton de monter de 5,6%.

[3] après 10 ans d’attente, due au lobbying des places primaires et des grandes entreprises d’Etat, le Growth Enterprise Board (GEB) voit ses règles approuvées. Cette place des marchés à risques, ouvre à Shenzhen une « petite » concurrence à la bourse traditionnelle, en acceptant d’ici mai une dizaine de start-up triées sur le volet, qui tenteront de capter pour 24M² d’épargne en moyenne. Liant enfin après 10 ans, les petites firmes à haute technologie, et les investisseurs. Grand espoir : sur les 200 PME cantonaises attendant leur tour en bourse, une soixantaine a parié sur le Growth Enterprise Board.

2009, l’année Unicom

Ca roule pour China Unicom. C’était voulu par la tutelle MIIT (Ministère des Industries et des technologies de l’Information), pour lui permettre de remonter la pente face au géant China Mobile. Unicom a vu en 2008 ses profits monter de 58% à 4,96MM$, en dépit d’une érosion de trafic et de la fermeture de Little smart, le réseau sans fil du groupe Netcom absorbé par Unicom dans le cadre de la refonte du paysage téléphonique chinois. Secret de ce profit : la vente de sa branche mobile CDMA à China Telecom pour 6,4MM$. Unicom va aussi lancer le 17 mai dans 55 villes son réseau 3G. Pour ce faire, il a tiré le bon numéro : la technologie européenne WCDMA (contrairement à China Mobile, affligé de la filière nationale TD-SCDMA). Unicom pourrait aussi souffler à China Mobile le contrat iPhone, populaire en Chine. En tout cas, Steve Jobs, le patron d’Apple lassé de faire du sur-place dans les palabres avec Mobile (qui exige sa part d’iTunes, la maison de services d’iPhone) négocie désormais des deux côtés!

 

 

 

 


Pol : Espionnage chinois nouveau genre : virtuel !

Espionnage chinois nouveau genre : virtuel !

A mesure que l’internet conquiert tous les métiers du monde, l’espionnage suit, attiré par cette ressource inépuisable de renseignements. En pointe de cette écoute virtuelle, se trouvent des pays tels USA, Russie, Israël, Royaume-Uni ou… Chine. Chez Symantec, n°1 mondial de l’anti-virus, les alertes de ce type sont passées de 2 par semaine en 2005, à 53/jour en 2008. Quoique démentie par des universités et diplomates chinois, l’information qui suit est digne de réflexion. Durant trois semaines de juin 2008, des experts des universités de Toronto et de Cambridge explorèrent (à l’invitation de leurs propriétaires) les ordinateurs du gouvernement Tibétain en exil à Dharamsala. Ils y découvrirent un logiciel malveillant, implanté depuis un e-mail, qui permettait la prise de contrôle complète de l’appareil. De fil en aiguille, ils remontèrent à une source : ils mirent à jour un réseau «Ghostnet», et des victimes disséminées à travers la planète.

A l’origine l’enquête, était un mail adressé par les diplomates tibétains à un collègue étranger pour lui offrir une rencontre avec le Dalai Lama : avant d’avoir pu répondre, ce fonctionnaire avait reçu un appel officiel chinois l’avisant de renoncer à l’entretien. Les vérificateurs universitaires purent pénétrer dans un des centres de contrôle, apprendre ses commandes : ils parvinrent à « rétro-infecter » un de leurs propres ordinateurs, et à voir, à son insu, un espion inspecter à distance son contenu. Ainsi, ils purent récupérer la liste des 1200 ordinateurs piratés à travers le monde. 30% étaient des cibles « de choix » : cabinets d’avocats new yorkais, le bureau d’Associated Press à Londres, les ministères des affaires étrangères , à Djakarta, Manille, Téhéran, le 1er ministre du Laos, une ambassade d’Inde, un ordinateur non protégé au quartier général de l’OTAN (Organisation du Traité Atlantique Nord) à Bruxelles…

Qui est responsable ? Rien n’est certain, à part le fait que trois des quatre bases de commandes fussent situées en Chine (Hainan, Guangdong, Sichuan, la quatrième étant une société d’hébergement en Californie). L’Etat chinois dispose notoirement de son réseau. Mais en l’occurrence, l’organisation aurait aussi bien pu être étrangère-mercenaire, ou chinoise-privée. La Chine compte aujourd’hui 270M d’internautes. Et ce pays en pleine effervescence nationaliste peut compter des millions de gens motivés pour un espionnage patriote, disposant des compétences techniques nécessaires, et capables de s’organiser en associations à l’insu, ou sans l’accord du pouvoir.

Telle est l’inquiétante conclusion des chercheurs: «ce que des barbouzes chinois font en 2008, la mafia russe le reproduira en 2010, possiblement suivie de gangsters du tiers-monde». Parce que ce n’est pas cher et ça peut rapporter gros. Sauf si la communauté de l’internet se dote des outils pour se protéger…

Linfen, au bout du rouleau ?

Linfen (4,1M hts, Shanxi), ville de mine et de chimie serait, selon l’institut Blacksmith (US) la plus polluée du monde. Elle a aussi un record d’accidents miniers, tels les coups de grisou de novembre 2006 (24 morts), mars 2007 (27 morts), février 2008 (105 morts), ou la rupture d’une digue de décantation en septembre 2008 (270 noyés): ultime catastrophe qui avait valu la révocation au maire, au secrétaire du Parti et au Secrétaire provincial Meng Xuenong. Or, voici à présent du jamais vu en Chine : depuis, le Parti cherche en vain un maire, un secrétaire. Même le conseil municipal n’a pas pu se tenir, pour confirmer un maire par intérim. Nul ne veut de ces postes qui brisent les carrières. Gao Xinmin, professeur à l’école du Parti observe: «cessons de limoger les leaders au 1er accident… ». Il faut dire que Linfen, en trpos ans, a vu défiler quatre maires -un par sinistre.

NB :dès l’antiquité, un empereur déclarait: «quand le général perd la bataille, il faut lui couper la tête». Mais pour Linfen, si l’on veut lui laisser le temps de remonter la pente, il faudra passer à un autre style administratif, combinant compétence et patience !

L’APL fidèle au Parti plus qu’à la nation

Général de 67 ans, ayant servi la Costind (division de recherche en armement), puis Commissaire politique au département de l’armement, puis à la Commission centrale (CMC), «gouvernement» de l’armée populaire de Chine (APL), Li Jinai est un homme qui compte et qu’il faut écouter. Il annonce, dans la revue théorique Qiushi, que l’armée doit se libérer d’« erreurs libérales » telles que «dépolitiser» l’armée -lui faire changer d’allégeance, du Parti vers la Nation. C’est une mise au point adressée à une frange invisible, réformiste de l’APL. Elle peut se lire de plusieurs manières: [1] Elle est la réponse de l’armée aux appels de la Charte ’08, pour une réforme constitutionnelle : fin de non-recevoir qui peut refléter les vues de Hu Jintao, n°1 de la CMC. [2] Cette position évoque la quête morale d’un rôle d’avenir pour l’armée populaire de Chine, si la question de Taiwan se résout, pourquoi maintenir la course à l’armement et à la professionnalisation? L’APL peut-elle perdre son rôle de bras armé de la dictature du prolétariat ? [3] Enfin, question de budget : en 2009, la défense touche +15% de crédit (70MM$), permettant des hausses de salaires. Grâce au Parti—pas à la nation.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Temps fort : L’Australie en fièvre

En Australie, le cabinet de Kevin Rudd (centre gauche) traverse une tempête, soupçonné par l’opinion de trop de sympathie envers l’empire du Milieu, voire de lui céder à vil prix les bijoux de famille.

Il faut dire que depuis le début de la crise, les démarches chinoises de rachat de mines australes se multiplient.

Chinalco offre 19,5 MM$ pour 18% de Rio Tinto, argent qu’il se voit prêter … à 110% par quatre grandes banques (Banque de Chine, Banque de l’agriculture, la Banque de la construction et du développement et l’Ex-ImBank)

Valin l’aciériste chinois offre 1,2MM$ pour 18% des mines de Fortescue.

Minmetals, le consortium minier prétendait aux mines d’or, cuivre et autres minerais d’OZ, pour 1,7MM$.

Symptomatiquement, c’est juste 48h après que Pékin ait interdit le rachat de Huiyuan par Coca-Cola (2,4MM$) que Canberra a rejeté l’offre de Minmetals : soi-disant, une de ses mines était voisine d’un champ de tir militaire. En fait, le rejet du deal Coke-Huiyuan a dû influencer l’autorité australienne, qui a aussi voulu prouver à son opinion intérieure sa fermeté face à la Chine.

La presse locale, au même moment, découvrait des rendez-vous curieusement cachés par Kevin Rudd, avec Li Changchun, tsar de la propagande et Zhou Yongkang, patron de toutes les polices; des invitations secrètes en Chine, entre 2002 et 2005, de l’actuel ministre de la défense J. Fitzgibbon. Et d’autres allégations de la même eau.

Kevin Rudd justifie sa politique d’alliance avec la Chine par la nécessité : Pékin est le 1er client naturel de l’Australie, usine du monde, en besoin illimité des matières 1ères dont l’Australie est un « poids lourd » mondial.

Aussi, à peine le veto à Minmetals proféré, une version fraîche du contrat était reficelée, qui a cette fois toutes les chances de passer. De même, Valin a obtenu en 48h le feu vert pour son contrat avec Fortescue. Et concernant Rio Tinto, on tranchera « au cas par cas »: avec bienveillance, s’entend.

NB : Le malaise remonte peut-être lors du passage de la flamme olympique à Canberra en avril 2008. De tout le pays, des milliers d’étudiants chinois avaient convergé vers la capitale, portant T-shirts rouges et drapeaux chinois, inquiétant la population par leur démonstration de puissance. D’ailleurs à Lausanne, le Comité olympique international, ayant retenu la leçon, vient de bannir tout défilé de torches olympiques hors des frontières du pays hôte des Jeux.

C’est ainsi que la crise réveille à la fois des appétits de concentration financière, et les nationalismes locaux : en Asie, comme en Australie ou ailleurs. Réactions normales à pareille époque, mais aussi antagonistes, et qui nécessitent chez les politiciens plus que d’habitude, du doigté et de la capacité de compromis.

 

 

 


Petit Peuple : Changsha: le piège au Parc des travailleurs

Un samedi printanier de 2006, à Changsha (Hunan)«, les jeunes Qian Dawei et Lin Ling prenaient l’air main dans la main au Parc des Travailleurs quand une souillon les aborda : «pardon m’sieu-dames si v’z avez fini vos Coca, pourriez pas m’ donner les boites»? Scène banale, mais qui fit pâlir et chanceler le garçon, tandis que la clocharde tentait de disparaître, mais trop tard : par malheureux hasard, une mère et son fils venaient de buter l’un contre l’autre, au mauvais moment !

Car leur rencontre dynamitait un gros mensonge. Étudiant en 3ème année de physique, Qian ne doutait pas que Xie, sa mère fût une riche cadre de direction dans son usine d’Etat, planque increvable. Aussi, en bon «petit dragon» (enfant unique), il la «tapait» sans scrupule pour payer ses sorties au karaoké, au bar, son shopping, à lui et à Lin Ling, moins fortunée. Or voilà qu’il surprenait sa mère à mendier, et qu’elle s’enfuyait: «ne te sauve pas, maman – n’aies pas honte… Je n’ai qu’une mère… ce qu’en pense ma copine, je m’en f..» !

Laquelle copine, ne faisant ni une ni deux, s’était éclipsée : sur un banc, la mère lui avoua que depuis 13 mois, la boite avait fermé et qu’une fois les chiches indemnités dépensées, à 50 ans sonnés, elle s’était trouvée incapable de retrouver un emploi : cela faisait six mois qu’elle lui cachait sa ruine !

Le rouge aux joues, Dawei se rappela alors comment, huit jours avant, Xie avait hésité deux à trois secondes à lui tendre les 300¥ qu’il réclamait « pour acheter des livres » -en réalité, c’était pour sortir avec Lin Ling. La veille, il avait perdu la face en refusant d’aller passer la soirée en boite avec elle, sans oser avouer que sa bourse était plate…

De retour à sa chambrée, un peu plus tard, Dawei constata que décidément, sa vie venait de prendre un tournant à angle droit: dans le message humide qu’il vit sur sa table, Ling lui  annonçait une prise de distance, « le temps de réfléchir ».

Sous ces coups du sort, notre brave potache se retroussa les manches. Il raya les fêtes de son agenda, étudia plus dur, prit des jobs de week-end pour gagner sa vie et soulager sa mère du fardeau financier.

En juin 2007, après les examens finaux (que Dawei avait franchi haut la main), le rectorat organisa sur le campus la traditionnelle remise des diplômes. Après celle-ci, dans la nuit, Dawei rentrait à sa bonne vieille chambrée, quand une voix le héla derrière lui : c’était Lin Ling qui ressurgissait, pour lui avouer toute la vérité sur leur chaotique séparation.

Lors du fameux WE de la sortie ratée, le fait que son ami soit fauché avait mis à Ling la puce à l’oreille. Quelques appels lui avaient permis de découvrir le secret de la mère, et réaliser l’innocent machisme du fils gâté : immédiatement, elle avait orchestré le stratagème de la ballade au parc, pour le confronter à sa réalité. Tant par solidarité entre femmes, que pour mettre un terme à leur vie aux crochets. Et Lin Ling conclut qu’il était remonté très haut dans son estime, ce matin-là au parc, en s’affirmant devant tout le monde comme fils de cette mendiante, et en ne la reniant pas. Si la jeune fille, par la suite, avait préféré prendre ses distances, c’était pour aider Dawei à se recentrer sur ses études – et à résister aux tentations faciles.

Elle le rejoignait, à présent qu’il avait « remonté la pente ». Ce qui, en chinois, se dit 迷途知返 tú zhī fǎn, « qui perd la voie, peine à la retrouver ». Un indice, sans doute, que la morale reste vivante en ce pays… 

«afin de préserver l’anonymat des héros de cette aventure qui est réelle (comme toutes nos chroniques du « petit peuple »), la ville, les dates et les noms en sont ici fictifs. 

 

 

 


Rendez-vous : A Pékin, le rendez-vous du Comité France-Chine et ses 500 participants

4-23 avril, Shanghai : Pharmachina, Salon pharmaceutique

8-9 avril, Pékin : Comité France-Chine, avec 500 participants

5-7 avril, Canton : Refrigeration Expo

6-11 avril, Pékin, CIMT, Salon de la machine outil

9-11 avril, Pékin, Salon mondial du voyage