Le Vent de la Chine Numéro 27
«J0 – des mauvais perdants, une mauvaise gagnante» : tel est le scénario du pire, qui n’arrivera pas, mais en écoutant à Pékin les deux parties, après l’avalanche de victoires chinoises, on sent les tensions. Alors, pourquoi ne pas les étaler, manière d’exorcisme ?
La nuit du 24/08, la clôture des Jeux fut inoubliable: choeurs du «难说再见 nanshuo zaijian» (qu’il est difficile de dire adieu!), arabesques des troupes de ballet au sol et en l’air… Rien ne fut épargné, pour offrir un très beau « finale », sous la baguette du magicien Zhang Yimou.
De ses JO, la Chine tire ses propres médailles : celle de 1ère nation sportive, avec 51 Or (36 aux USA!), celle de l’organisation, avec ses infrastructures somptuaires, son corps de volontaires, sa sécurité sans faille… En tradition olympique, un record de qualité a été atteint, qui ne pourra être dépassé.
Pourtant, les critiques d’avant les Jeux ne sont pas éteintes, tant s’en faut. Sur les droits de l’homme, Pékin a encore resserré sa garde. Ersatz dérisoire de démocratie, les zones de protestation restèrent vides, faute à l’Etat d’avoir permis une seule des 70 demandes soumises : deux femmes retraitées qui réclamaient trop fort le droit de défiler, écopèrent de la menace d’un an de camp, et la dissidente anti-Sida Wang Xiaoqiao, incarcérée depuis janvier, prit en catimini un an de prison ferme.
En Europe et aux USA, on reproche aussi à la Chine une lecture propagandiste du sport, un mode d’emploi étriqué des Jeux: avoir acheté ses médailles d’or (« 3,6M²/pièce », coût moyen, sur la base du budget sportif officiel des JO) pour gagner dans des disciplines inconnues chez elle – beach volley, planche à voile…
Mais ces critiques sont vaines. Pékin aura beau jeu de répondre que ceux qui dénigrent sa victoire, sont les pays riches, 10% de l’humanité. Elle au moins, par ses succès, soutient les espoirs du reste du monde. Or une telle polémique n’est bonne pour personne : mieux vaut gracieusement concéder à Pékin son triomphe — et tirer les leçons de la fête.
La première : depuis ces JO, dorénavant, les échanges Chine/monde, dépassent l’économie, englobent le sport. Pas de la meilleure manière, c’est vrai: le sport chinois reste inféodé au Parti. Mais les temps changent: déjà des athlètes commencent à revendiquer le droit de s’organiser hors du joug de la Commission des sports. Le temps n’est plus loin, où ils voudront rejoindre la fraternité mondiale des stades, l’exigence de clubs, de vocation propre, ces idéaux de Pierre de Coubertin.
Enfin, à éplucher de plus près le palmarès, le grand vainqueur n’est pas Pékin mais l’Union Européenne, avec 87 médailles d’Or : par habitant, avec ses 493M d’âmes, c’est 4,5 fois plus que la Chine, et pour bien moins cher. Ce que ses 27 Etats membres ont investi, est un siècle de promotion des sports de masse, d’un sport géré par les sportifs, en fédérations autonomes aux dirigeants élus. Face à ce constat, la Chine est face à ce dilemme: plus elle s’enrichit, plus la demande s’accroît pour un sport au service des hommes, et non de la machine, et plus s’accroît le coût d’un tel investissement de prestige. Autrement dit : le sport chinois déployé à ces Jeux ne prouve rien, et ne sert à rien—il est au bord de l’anachronisme.
Pour la Chine, quels fruits olympiques ?
Les retombées des JO ne cessent de s’accumuler pour la Chine.
La CCTV, la télévision centrale, en droits de retransmission, a payé 19M$ pour l’exclusivité des droits sur les épreuves, mais en retirera 380M$ : les deux tiers du coût de sa tour à 500M$ (appelée «la culotte», par l’homme de la rue). Pékin se retrouve libre de 200 usines polluantes. Elle hérite du 1er parc sportif mondial, de 4 nouvelles lignes de métro (60km nouveaux), d’autoroutes, et d’innombrables parcs, spontanément adoptés.
Que la technique nationale des fusées à cristaux d’argent ait marché ou non, le ciel des Jeux, quoique capricieux, a été dégagé comme plus depuis longtemps, et le trafic urbain agréable—apprivoisé : la mairie envisage de maintenir à titre pérenne la circulation alternée des véhicules par n° de plaque pair et impair. D’autres lignes de métro sont pour bientôt. Va-t-on vers la réhabilitation du vélo ?
Grâce au symbole de sa 1ère place dans le sport mondial, la population prend une confiance qu’elle n’avait jamais eue. Avec ce moral de battants, on verra dès lors les hommes d’affaires, artistes, sportifs et autres, franchir leurs frontières, se montrer au monde, apprendre, et lui apprendre.
Quant au pouvoir socialiste, il dispose pour quelques mois sans doute, d’une marge de manoeuvre sans précédent pour s’attaquer à de vieux dilemmes, sans risquer la critique : régler le problème du Tibet (cf p.2), réformer la politique de l’énergie (cf p.2), celle de la convertibilité du ¥ (cf p.3). Il risque aussi de renforcer sa répression sur toute dissidence, comme celle du Xinjiang. En même temps le Président Hu Jintao, à Séoul, réitère sa ligne de poursuivre la politique d’ouverture «irréversible». Autrement dit, ses options sont pour l’instant extrêmement larges, et relativement imprédictibles, limitées par le seul souci d’éviter à l’économie, le double frein de la crise des subprimes et du syndrome post-olympique. JO Beijing 2008 – épilogue !
Par cette rubrique, depuis janvier, le VdlC suivait les pulsations cardiaques des Jeux olympiques en pleins préparatifs. Elle va disparaître, mais en point d’orgue, voici quelques sujets qui occupent encore les medias locaux et mondiaux :
ª Les dernières idoles de la jeunesse chinoise sont olympiques.
Li Na bien sûr, la raquette d’argent (tennis), Tian Jia et Wang Jie, l’argent au beach Volley. Chez les hommes, Liu Xiang, le héros du 110m haies déchu, est relayé par Lin “Super” Dan, or en badminton et officier de l’armée. La palme revient à Guo Jingjing, double or de plongeon à Athènes et à Pékin, fine mouche en affaires, recrutée par McDo, Coca Cola, Toshiba, sortant avec Kenneth Kwok, play-boy milliardaire de Hong Kong.
ª Durant les Jeux, la police a su bloquer toute protestation publique, en arrêtant des centaines de pétitionnaires (22 au Liaoning), au moyen de barrières devant tout bureau de pétition, et du repérage au GPS des candidats par leur tel portable. Dix étrangers manifestant pour le Tibet ont été expulsés. Washington se dit “déçue”.
ª Litige résiduel : après quelques jours d’hésitation, le CIO, le Comité international olympique, enregistre la plainte sur cinq médaillées olympiques chinoises accusées d’être sous de l’âge minimal légal de 16 ans. Tout a débuté avec He Kexin, or en gymnastique : un expert US, Mike Walker, présente des documents officiels chinois évoquant un âge de 14 ans en 2008—pièces effacées de la toile chinoise depuis un an. Le ministre a d’abord nié, puis plaidé l’erreur administrative, tout en insistant que l’âge allégué était le bon. Jacques Rogge, Président du CIO, trouve l’affaire “très sérieuse”: une enquête est lancée, où Pékin est priée de fournir d’autres papiers… que le CIO déclare déjà, a priori “satisfaisants”. Le CIO démontrant ainsi sa marge de manoeuvre étroite, face à la puissance invitante.
ª Les Pékinois n’en reviennent pas d’un temps si clair, pour la cérémonie de clôture, alors qu’il pleuvait la veille. Selon le bureau de rectification climatique, quelques heures avant, huit aéronefs ont été lancés contre le front de cumulus du nord, qu’ils inséminèrent de 241 fusées chargées au sel d’argent. D’autres furent tirés depuis le sol, par mortiers. La technique n’est pas d’une efficacité éprouvée—mais le résultat était là.
Pour son 1er semestre, l’économie chinoise a maintenu un rythme ébouriffant de 10,40% contre 11,9% l’an dernier, quoiqu’en Europe et en Amérique, la crise des subprimes conduise l’activité au bord de la récession – selon Temasek, le bras financier de Singapour, elle devrait se poursuivre deux ans au bas mot.
Le « secret » de cette jouvence est double : [1] le séisme du Sichuan, avec ses contrats de reconstruction sur 5 à 10 ans (effort national), et [2] les JO aux 30MM² d’infrastructures entre sept villes. Entre la lutte contre l’inflation et la défense de ses exportations, la Chine avait fait le choix pour le second – elle s’apprête d’ailleurs à réviser l’objectif d’inflation, de 4% à «5 à 7%».
La conjoncture est variable : au passif, un quadruplement du parc auto invendu en juin, une chute du trafic aérien, un effritement du yuan face au dollar, une érosion forte de la croissance fiscale (+13,8%) en juillet). Mais à l’actif, en juillet, la hausse de l’export de 26,9%, de l’import à 33,7%, des ventes au détail de +15,4% (record depuis 1999). Tandis que l’indice des prix à la consommation entame sa redescente (+6,3% contre 8,8% en février).
Tout ceci n’empêche Pékin de concocter un plan de relance. Il pourrait paraître fantaisiste, vu le fort dynamisme des activités, et les années passées à tenter de juguler la surchauffe. Mais il a ses raisons. Les grandes entreprises d’Etat prospèrent, accélérant concentrations et fusions, mais 67.000 PME, surtout au sud et à Shanghai, ferment boutique. Par ailleurs, selon les pronostics d’économistes étrangers, au dessous de 9,5% de croissance, la Chine ne peut plus alimenter ses plans sociaux, vitaux pour éviter la fracture sociale ou géoéconomique du pays (villes ¹ province, côte ¹ intérieur, etc). Et notamment financer son programme de «société harmonieuse», de retraites, d’éducation et de santé de 800 M de ruraux.
Le problème est chez les PME : dès que les banques voient bridé leur robinet du prêt, elles pénalisent les petits emprunteurs. Au 1er trimestre, leur allocation baissa de 10% à 30MM². Quoique à la base de la moitié du PIB, elles n’empochaient que 15% du crédit. C’est surtout à leur intention que l’Etat vient de rallonger le quota de crédit de 5% pour les grandes banques et de 10% pour les petites -mais les banques octroient leurs prêts à qui elles l’entendent.
Ce plan de relance serait doté de 20 à 40MM² (1,5% du PIB). 15MM² iraient en grâce d’impôt, 22MM² en dépenses publiques. Entre autres, elles concerneraient l’immobilier (l’accès au logement, l’isolation et rentabilité énergétique de la construction), la mise à niveau de la scolarité des 7,66M d’enfants migrants. Voire le tourisme, où Pékin prévoit, en un plan hyper ambitieux, de tripler le volume d’emplois, à 100M. Démontrant la détermination du régime d’aller de l’avant : chaque année, 20M d’emplois nouveaux sont nécessaires, pour amortir le choc de l’exode rural !
Enfin, ce plan parle de lui-même : moins qu’un demi-tour, il s’agit d’un simple réglage, sur une économie qui reste au beau-fixe, le seul phare de croissance au monde désormais.
Vents de réformes estivales et sociales
En Chine, la trêve estivale est un moment commode pour prendre des mesures délicates : cet été ne faillit pas à la tradition.
Ainsi, les patrons de mines, d’usines chimiques, textiles et de défense se réveillent sous l’épée de Damoclès d’une licence «de santé» de l’Administration de sécurité au travail (SAWS) qui prétend faire fermer toute usine dont la pollution compromet la santé de leurs personnels. La nouvelle licence prétend faire respecter des plafonds d’émission par substance et métier, calqués sur les normes de l’OMS, l’organisation mondiale de la santé. Au total, près de 200M d’ouvriers respirent des substances dangereuses, poussières minérales ou métalliques (sur 758M d’ouvriers en usines), dont 676.562 souffraient en 2006, de maladies professionnelles, telle la pneumoconiose. Cela dit, les usines à risques disposent d’un sursis, temps pour la SAWS d’établir les règles d’application pour chaque secteur. Pour l’Etat, le but est d’économiser sur les 30MM²/an de pertes (décès, soins) dues à ces fléaux. Reste à savoir si les provinces laisseront faire Pékin, au risque de perdre des dizaines de millions d’emplois.
Autre pas significatif de l’été, vers la libre convertibilité du Yuan : des chaînes de bureaux de change viennent d’être autorisées, redéployant l’échange des devises en dehors des banques. Travelex SMI (à Pékin), Zhangjiang ICE (Shanghai – ICE, britannique, est n°1 mondial) pourront vendre ou acheter jusqu’à 50.000$ /an (ou équivalent) de tout citoyen chinois, et 500$/jour de tout étranger -voire 1000$ par voyageur, en zone détaxée des aéroports. Le taux est imposé, la commission fixée à 50¥. D’autre part, un règlement du 6/08 abroge l’obligation à toute firme détenant des devises, de les revendre à une banque : de quoi re privatiser le marché des devises, et freiner la croissance vertigineuse des 1800MM$ de réserves publiques…
Enfin les Jeux Olympiques à peine bouclés, du 25 au 29/08, la session semestrielle du Bureau de l’ANP (Parlement) discute une riche palette de lois. L’une, en discussion depuis 2003, s’apprête à pénaliser de trois ans de prison (max) la diffusion indélicate des données confidentielles par les fonctionnaires. Une autre sur la corruption, doublera à dix ans la peine maximale aux détenteurs de fortunes inexplicables et gratifiera de sept ans ou plus, les proches d’apparatchiks convaincus de fraude.
Enfin, une ambitieuse loi du recyclage est au menu, applicable peut-être dès l’an prochain : les emballages doivent être standardisés et redessinés selon le principe des « 3R » : réduction, réutilisation, recyclage : les normes sont relevées, et l’Etat doit prévoir des fonds pour promouvoir l’éducation et la recherche et développement.
CMA-CGM à toute vapeur
«Invisible», du fait de son métier d’armateur, CMA-CGM n’en est pas moins un des principaux groupes français en Chine, avec 400 porte-conteneurs dont 100 en propriété -qui forment, en tonnage, la moitié de sa flotte. En 16 ans, le pays s’est imposé à CMA comme essentiel, lui offrant la moitié de son trafic, et l’ayant aidé à devenir 3ème armateur mondial sur le marché des «boites». Avec ses 30 services/semaine, il assure en Chine un départ toutes les six heures. Comme Shanghai, Shenzhen, Qingdao, Ningbo ou Xiamen, Tianjin est un pôle d’export traditionnel. A Tianjin en 2007, CMA-CGM traitait 0,4M d’EVP («boites» standard de 6,06m), sur les 7,1M assurés par ce port en pleine expansion, n°16 mondial, débouché naturel de Pékin et du golfe du Bohai. Soit pour l’armateur, plus de 10% du fret international du conteneur. Bonne affaire, car le marché domestique est réservé aux armateurs locaux, mais les meilleurs profits sont sur les lignes au long cours !
Tout ceci incite CMA-CGM à prendre 20% d’un terminal de ce port d’avenir, pour 80M², en partenariat avec Port de Tianjin (60%) et l’armateur Hongkongais GAIS (20%). Actif dès 2011, il consistera en un appontement de 1100m destiné à atteindre 2M d’EVP/an. Financé en BOT – Build – Operate – Transfer, il sera pour 50 ans propriété de ses bâtisseurs-gestionnaires, et aidera Tianjin à franchir la barre des 10M d’EVP annuels dans la prochaine décennie.
NB : CMA-CGM, qui en est à son 26ème investissement portuaire mondial, mise aussi sur le multimodal et le « Go West » : il a pris 8% des parts de China Rail Intermodal, réseau de 18 hubs ferroviaires de conteneurs pour un service «porte-à-porte» entre usines, supermarchés et ports vers le monde.
Pétrole, Iraq : retour case départ
Que l’Iraq de l’après Saddam, pour son 1er grand contrat étranger, vise le pétrole, ne surprendra personne: rien de ce qui arrive à ce pays depuis 50 ans, n’est étranger à l’or noir. Que le contrat d’abord estimé à 1,2MM$, aboutisse à 3MM$ est aussi dans l’ordre des choses, vu l’explosion de la demande.
Mais que le contrat revienne à la CNPC, firme chinoise, peut interpeller : le nouveau gouvernement irakien se faisait hier un point d’honneur à dénoncer les contrats passés sous le régime maudit, et les USA, puissance occupante, ne sont guère connus pour faire des cadeaux aux rivaux dans la course au pétrole. Il est vrai que la CNPC avait la préséance, ayant signé ce contrat dès 1997, sur le champ d’ AlAdhab à 180km de la capitale.
Idem, Bagdad peut avoir besoin, face au monde arabe et son opposition sunnite, de se démarquer des USA, en accordant à la Chine les 225M de barils de pétrole de réserve et les 90000 barils/j de débit (10% de la production nationale). Pour reprendre pied en Iraq, la CNPC a dû toutefois faire une concession grandiose : renoncer au partage de la production. Pour sa fourniture d’expertise, main d’oeuvre et équipement, elle sera payée en dollar, pas en or noir, et si elle veut de ce pétrole, ce sera au cours du jour. D’autre part, la Chine se montre volontariste, car l’avenir de l’Iraq apparaît tout sauf stable.
Mais après avoir importé l’an passé plus de la moitié de ses besoins (163Mt,+12,4%), elle craint moins l’instabilité que la panne sèche—et l’Iraq qui vient de tripler ses réserves estimées, à 350MM barils, vaut bien, sinon une messe, du moins qu’on prenne des risques !
Le grignotage très chinois de Chinalco sur Rio Tinto
Même sept mois plus tard, l’achat surprise par Chinalco de 12% de Rio Tinto, 3ème firme minière anglo-australienne laisse toujours perplexe. Wayne Swan, ministre australien du Trésor vient d’avaliser l’investissement massif (14MM$), consentant à ce groupe d’Etat, 1er fondeur d’aluminium de Chine, de contrôler (avec l’américain Alcoa) 14,99% des parts de la branche de Rio cotée à Londres (RT Ltd), soit 11% du capital du groupe (RT PLC).
Cependant, l’Etat fédéral assortit son feu vert de deux conditions limitatives : toute autre prise de parts dans RT devra obtenir son aval préalable, et aucun cadre de Chinalco ne peut guigner un poste au Conseil de direction de Rio Tinto – PLC ou Rio Tinto – Ltd. Maigre fruit dans l’immédiat, pour un groupe qui vient de payer, en empruntant lourdement, l’équivalent de 80% de ses ventes de 2007…
Quel était l’objectif ? Nul n’y voit clair, vu l’absence de résultat convaincant. Cinq buts étaient plausibles, tels [1] Accéder aux actifs d’Alcan, puissant fondeur canadien juste racheté par Rio Tinto? [2] Réaliser une plus- value (Rio Tinto vient de rehausser ses profits de 55% ce semestre). [3] Sécuriser l’approvisionnement chinois en minerai dont le prix en 2008 a augmenté de 60%, mais Chinalco justement, n’est pas sidérurgiste. [4] Bloquer l’OPA sur Rio Tinto pour 150MM$ par BHP-Billiton, l’autre Australien, n°1 mondial, tentative qui inquiète toutes les aciéries du monde, et dont l’issue apparaîtra en 2009, suite aux enquêtes anti-monopoles de Canberra et de Bruxelles. En tout état de cause, en cas d’accord entre les groupes, Chinalco ne pourra rien faire. [5] Placer des billes chinoises sur des positions étrangères, « solides comme l’acier », pour servir de fonds de pension à une génération d’enfants uniques dépourvue d’une large couche de descendants.
Tous ces arguments étaient logiques, défendables. En achetant dans le plus grand secret, Chinalco a inquiété Canberra, qui a réagi en prenant ses précautions pour l’avenir. Pourtant, à ce qu’on dit, l’exécutif australien, lui non plus, n’aime pas trop l’alliance de ses deux Goliath minéraliers. Il exploite l’action de Chinalco, afin de laisser à Rio Tinto la chance de se défendre. Opportuniste, RT se garde de dire «non», mais trouve la mariée pas assez belle -il réclame une dot plus fournie. Lui aussi donc, utilise Chinalco à ses fins. C’est ainsi, à la dure, que le groupe d’Etat chinois va devoir apprendre la transparence, mère de la confiance des partenaires : celle-ci constituant, en fin de comptes, la meilleure garantie de défense de ses intérêts bien compris !
Mise à part celle de Taiwan, la question du Tibet est la plus tendue en Chine du XXI. siècle.
Question d’histoire : quel que soit son coût ou son utilité politique, stratégique ou économique, son occupation en 1959 par Mao fait partie de ces dogmes intangibles sur lesquels se fonde la légitimité du régime! Et pourtant, l’avènement des Jeux Olympiques a fait voler la chape de plomb et d’inaction sur le Toit du monde. En mars, Lhassa s’est révoltée, 1ère fois en 19 ans, suivie par d’autres villes. Nuisible à l’image du pays, l’émotion internationale a forcé Pékin à reprendre le dialogue avec des émissaires du Dalai Lama.
Entre-temps, l’autre minorité de l’Ouest, celle des Ouighours du Xinjiang s’est embrasée.
A quelques jours des Jeux, par internet, un groupuscule d’Asie Centrale avait averti de la lancée d’une série d’actions en Chine : il a tenu parole ! En 8 jours, 6 attentats autour de Kashgar (4-12/08), 32 hommes dont 21 policiers ou cadres sont morts à l’arme blanche ou à la bombe. Le Xinjiang voit donc l’apparition d’une forme d’intifada qui, avec les émeutes tibétaines, marque l’échec de 60 ans de politique d’assimilation, coûteux mélange d’équipement en infrastructures et de main de fer anti-autonomiste.
Dans ce contexte, l’existence du Dalai Lama, traditionnellement mal vu par Pékin, est peut-être une chance pour la Chine qui doit s’en rendre compte. Cet été, le Dalai a fait de gros efforts pour, et a bien du mal à détourner la jeunesse tibétaine exilée d’un passage à la lutte armée . Il prie aussi le club des nations d’intégrer au plus vite la Chine en son sein, et renonce à rencontrer le Président français N. Sarkozy, estimant les temps «non propices» (pour Pékin). Surtout, il déclare qu’il «accepte l’ordre constitutionnel chinois», ce qui est interprété par un analyste de haut vol comme l’offre de démanteler son gouvernement en exil en échange d’un accord honorable. Justement, ce dernier, depuis son exil de Daramsala (Inde), préparerait un plan détaillé d’autonomie du Tibet (territorial, et historique), à soumettre à la Chine lors de la prochaine rencontre d’octobre.
Côté chinois, la réaction est mitigée : d’une part, on annonce six nouvelles lignes ferroviaires en 12 ans, destinées à mieux arrimer le Tibet à la Chine, on présente aussi de nouvelles explorations minéralières, et un plan d’investissement de 5,5MM$ au Tibet dans les prochaines années. Ce qui montre bien, si le moindre doute subsistait, que la Chine est là pour y rester. Sont annoncées alors la réouverture du monastère de Drepung et la fin de la restauration du Potala, son palais à Lhassa – à temps, en cas d’entente ?
En tout cas, ce rendez-vous d’octobre sera crucial. La Chine devra lâcher du lest ou s’engager dans de longues années d’instabilité locale. Le Tibet n’est pas seul en jeu : elle a besoin d’un modèle nouveau, pour le Xinjiang aussi. Le monde entier, alors, retient son souffle !
Tabac: un bébé géant de l’herbe de Nicot
Sans états d’âme vis-à-vis d’une industrie du tabac qui cause plus de 500.000 victimes par an, la corporation nationale du tabac – CNTC– tente d’optimiser un outil obsolète, atomisé en PME non rentables. Car ce marché n°1 mondial (350M de fumeurs, 2400MM de cigarettes), paie 3,9MM² de taxes en 2007, en hausse de 20% depuis 2003. Or, les géants du secteur Philip Morris (US), BAT (RU) et JT (Japon) perdent lentement la guerre de la nicotine sur leur propre sol et salivent aux portes du marché chinois, un des seuls qui leur reste à l’avenir. Aussi l’urgence est-elle à la concentration : quelques années de sursis pour rendre compétitif l’outil tabagique moyenâgeux. La tutelle CNTC tente de créer 10 groupes capables de résister au choc… 1er né : la fusion de “Nuage rouge” (Hongyun) et “Rivière rouge” (Honghe), tous deux du Yunnan (le “poumon d’acier du tabac en Chine”). Si Pékin approuve, ils deviendront 4ème mondial, à la capacité de 230MM de cigarettes (10% du marché intérieur), au chiffre d’affaires de 4,5MM².
NB : soutenues par l’OMS, l’organisation mondiale de la santé, des voix timides commencent à s’élever pour dénoncer la hausse de 80% des cancers du poumon en 30 ans, posant à la croissance un handicap (en morts et en soins hospitaliers) bien supérieures aux taxes de l’Etat. Depuis peu, aussi, fumer est interdit en tout lieu public. Mais l’ordre reste souvent lettre morte.
Suspense pour train suspendu…
A Shanghai, il a du mal à décoller, ce Maglev, train sans roues, à lévitation magnétique, quoique la section Longyang-Pudong (37km en 7 minutes, à 450km/h) existe depuis cinq ans. Depuis lors, tel le monstre du Loch Ness, l’extension vers Hangzhou et Hongqiao est annoncée, puis démentie. Le 18/08, le dernier permis manquant est acquis, dit le gouvernement du Zhejiang, mais «un permis environnemental manque encore», dit Xinhua. Ce que ce cafouillage masque de moins en moins, est une foire d’empoigne entre partisans et adversaires, dont les derniers sont les riverains, inquiets des radiations, qui obtenaient en mai 2007 la suspension du projet. Une série noire d’avaries n’arrangea rien, tel un incendie du compartiment des batteries, ou l’avarie d’un câble. Sur le fond, la bataille opposait le ministère des Chemins de fer à celui des Sciences et technologies, avec de puissants intérêts financiers à la clé, car les contrats pour la ligne TGV classique (ou le métro), et pour celle Maglev, ne revenaient pas aux mêmes groupes. Prétextant l’urgence de l’Exposition Universelle de 2010, les adversaires avaient d’ailleurs lancé les chantiers métro et TGV sans attendre. Dans la quasi-décision annoncée le 18/08, le Zhejiang semble avoir été influent – soucieux d’avoir les riches Shanghaïens à 1/2h de sa porte. Le Conseil d’Etat aussi, pour honorer un contrat secret avec Berlin, qui avait payé 500M$ pour placer en Chine cette ligne dont les Allemands ne voulaient pas. S’il doit se faire, le chantier démarrera en 2010 pour s’achever en 2014, pour un coût de 2,2MM² seulement – et non les 3,5MM² encore d’actualité il y a quelques mois… Mystérieuse épargne, peut-être fruit d’une révision chinoise du cahier de charge allemand… On en reparlera !
Chine/Corée du Sud: les liens se resserrent
Il y a dix ans encore, Chinois et Sud-Coréens ne s’appréciaient guère -mais leurs capitales se comprenaient parfaitement. C’est ce qui a permis aux relations, après leur tardif rétablissement en 1992, de progresser plus vite qu’avec n’importe quel autre.
L’an passé vit l’explosion de nombreux records traduisant l’excellente santé des rapports entre ces voisins: en 2007, 6M franchirent la frontière à bord de l’un des 830 vols de ligne hebdomadaires. 64.000 Sud-Coréens étudièrent dans les facultés chinoises et 34.000 Chinois, vice versa. Les échanges atteignirent 160MM$, dont 19MM de surplus à la Corée qui avait dès lors investi chez le partenaire 22,54MM$. Aussi, pour manifester l’amitié orientale, Hu Jintao en visite les 25-26/08 (sa 1ère sortie après les JO) annonçait l’envoi d’un couple d’aigrettes couronnées (espèce rarissime) et plantait, avec le Président Lee Myung-bak quelques arbustes au nouveau parc forestier de Séoul. L’agenda de leur rencontre fut aussi avare de détails, que crucial pour l’avenir : [1] la dénucléarisation nord-coréenne « dans le cadre du groupe des 6 » -alors que Pyongyang renâcle une fois de plus. Depuis 2003, Pékin servait d’intermédiaire seul, ce qui convenait à Kim Jong-il, le cher leader. Mais quand ce dernier bloque le démantèlement, af-fectant d’attendre le prochain Président US, Pékin montre son déplaisir en associant Séoul à ses palabres; [2] le règlement de vieilles querelles sur la possession des îles Ieodo-Suyan ; [3] la négociation d’un accord de libre échange.
Terrorisme: la Banque de Chine sous les projecteurs
La Banque de Chine, écran financier du Hamas et du Hezbollah ?
Par personnes interposées, Israël l’affirme, en portant plainte le 21/08 devant un tribunal de Los Angeles pour «financement du terrorisme», contre cette 2de banque chinoise par les actifs, 1ère par le réseau à l’étranger. Les plaignants sont une 100aine de citoyens israéliens victimes entre 2004 et 2007 d’attentats du Hamas et du Jihad islamique. Le procès est en fait signé Shurat HaDin, pool d’avocats pour le compte des ministères israéliens des Affaires étrangères et de la Défense. La plainte évoque des transferts par la Banque de Chine entre Canton et les USA, depuis 2003, de «10aines de M$» au profit de Said Al Shurafa, leader terroriste présumé. En 2005, la Banque de Chine aurait rejeté l’appel de cadres du Mossad, à mettre un terme au flirt avec le diable. L’accusation est très dommageable pour la Banque de Chine qui nie tout en bloc, se posant en fidèle défenseur des normes de l’ONU sur le combat de l’argent sale et du terrorisme. Il se trouve que la Chine, depuis deux ans, tente d’endiguer ses financements occultes. Votée fin 2006, en vigueur en 2007, sa loi anti-blanchiment prétend réguler ses circuits financiers. Dès 2006, Pékin révélait 1239 transactions suspectes sur son sol, portant sur 56M$. Puis elle interdisait au Banco Delta, à Macao de servir de robinet de financement d’affaires nord-coréennes imprésentables. On peut supposer que Tel Aviv, avant de se lancer dans cette épreuve de force, a épuisé tous les canaux de négociation —et que le débat se poursuit aussi en sous-main. Mais les relations sino-israéliennes qui semblaient abonnées au beau fixe, sont en crise. L’affaire risque de porter un coup aux relations, alors que la Chine vient de supplanter l’Allemagne comme second fournisseur d’Israël en 2007, avec 4,6MM$ d’export, contre 3,3MM$ aux firmes d’Outre-Rhin.
Loi anti-trust : du grain à moudre pour l’État
A peine en vigueur (au 1er/08), la loi anti-monopole a déjà des plaignants, qui se bousculent au portillon d’une cour de Pékin pour attaquer l’Etat, en l’occurrence l’AQSIQ, l’administration de la qualité des produits. Dès 2005, l’AQSIQ avait rendue obligatoire la certification et l’apposition d’un code–barres sur tout article de la vie courante, à fin de traçage. Une firme, la CCIT, reçut le monopole de l’activité et taxa toute firme usagère, de 600¥ par an et par code. Mais l’AQSIQ se trouve être actionnaire à 30% de ce trop florissant business, qui empocha l’an dernier 6M$ (+569%) en installant sa bidouille légale chez 68.000 firmes. L’AQSIQ pourrait aller plus loin, venant d’ajouter (nov.’07) 69 autres articles à sa liste des produits corvéables. «Pour rien», accuse Ma Yong, secrétaire général des spiritueux à la CFIA, puisque le code-barres ne fait que répéter des infos présentes sur l’emballage et n’est imposé qu’aux 105.000 firmes honnêtes, membres de sa guilde, mais non aux 300.000 contrefacteurs dans l’ombre. Mais aux yeux des juristes, les chances de la démarche sont minces: le législateur ayant pris soin d’exclure du champ de la directive les monopoles d’Etat, responsables uniquement devant une mystérieuse et bénigne «autorité d’application de la loi anti-monopole».
NB: l’AQSIQ n‘a pas bonne cote, se retrouvant trop souvent au coeur d’«affaires». C’est le reflet des difficultés de son terrain : peu de moyens, un océan de firmes à surveiller, la tentation des bakchich. Wu Jianping, son directeur alimentaire s’est suicidé le 2/08. Zheng Xiaoyu, chef de la FDA, l’instance-soeur, fut exécuté en juin 2007. On a ici, clairement, un cas de monopole abusif, et surprotégé.
Pour AEG, « l’après-JO » avec la NBA
Un défi de l’après J-O, est celui d’un avenir pour ces 12 stades ou gymnases neufs, bâtis à frais somptuaires. Pékin veut les rentabiliser par une botte secrète : en faisant appel à l’étranger, pour qui ces partenariats privé-public semblent de l’or en barre. 84% des Chinois disent vouloir visiter ces ouvrages mythiques qu’ils n’ont pas encore pu approcher. Et ces Jeux aux 51 médailles d’or, ont suscité un appel d’air : un potentiel brûlant pour développer l’industrie du sport-spectacle. Apparaissent des professionnels anglo-US aux dents longues, tel le milliardaire californien Ph. Anschutz, propriétaire du club Galaxy de D. Beckham. AEG, sa société de management sportif a réservé la salle de Wukesong, site des épreuves de basket-ball (18.700 sièges). AEG veut y organiser des shows en association avec la NBA, dont le patron D. Stern rêve de renommer la station de métro «NBA city» et de créer partout dans le pays des académies de basket pour découvrir de nouveaux Yao Ming. AEG parle d’investir 100M$ d’ici 2013 et de gérer un certain nombre de stades. Ailleurs, les financiers veulent vendre au plus offrant, un nouveau nom du Nid d’Oiseau pour 30 ans—6 multinationales sont réputées sur les rangs. Dix partenariats spécifiques sont aussi à prendre, comme le monopole des ventes de boissons, ou des animations audiovisuelles. Mais pour amortir les 500M$ de cet espace, il faudra des dizaines d’années, en compétition avec d’autres sites déjà amortis et plus centraux comme le Stade des Travailleurs… Le Cube d’eau, de même, risque d’être gagne-petit… L’aspect le plus fascinant, ici, est la nouvelle mentalité visible, ce concept tout juste atterri des USA : faire fortune, en désennuyant le Chinois, le week-end : saturday night’s sporting fever !
On ne l’a pas senti à Pékin durant les Jeux – question de prestige – mais la Chine a subi cet été sa pire crise énergétique depuis 2004, avec un déficit de 16Mkw.
En charbon, la réserve moyenne n’est que de 11 jours. Même en dépassant leurs quotas, les mines ne peuvent suivre la demande – le Shanxi, 25% de la production nationale a augmenté ses extractions de 14%. Le cours de la houille s’envole, (+100¥ /t de janvier à mai, un doublement en deux ans), mais le système d’Etat ne parvient pas à répercuter sur le consommateur.
C’est au producteur d’abord, de l’avaler. Datang, gros électricien, vient de perdre 150M² en 5 mois. 80% des centrales thermiques, travaillant à perte, préfèrent chômer (défiant les consignes): au 1er semestre, elles ont travaillé 50 heures de moins qu’un an avant. L’Etat vient bien de leur offrir deux hausses consécutives de 5%, ne compensant pas toutes celles de la matière 1ère, et c’est au distributeur seul d’en supporter la charge, par peur de l’Etat de nourrir l’inflation. Mauvaise pioche pour State Grid, avec son réseau sur 22 provinces, qui voit compromis son plan d’investissement de 175MM$ sur 5 ans d’ici 2010… Et ce n’est pas fini : l’hiver s’en vient, alors que les barrages, faute d’eau, tournent à bas régime. Déjà l’Etat se prépare à des mesures d’urgence, pour gérer l’exacerbation de la pénurie.
En pétrole, la situation n’est pas plus stable.
La hausse de 17% des prix à la pompe en juin, n’a pu que maintenir un tarif moyen à moitié du cours mondial. L’octroi de subventions depuis 10 mois, a permis d’éliminer les files d’attente, mais en créant d’autres distorsions : CNPC et Sinopec importent et stockent à tout va. Ainsi, ils créent les 30 jours de réserve nationale stipulés par l’Etat, mais ils ont dû acheter au pire moment (140$ /baril) au prix fort, puis vont devoir y renoncer dès octobre, alors que les cours redescendent… Tandis que le citoyen continue à jouer de l’accélérateur en toute insouciance, faute de signal du pouvoir, d’épargner une ressource qui se fait rare… Mis à part le doublement de la taxe sur les voitures de grosse cylindrée (de plus de 4l, qui fera monter de 40% leur prix-étiquette).
Ainsi, le marché de l’énergie aboutit à une situation ingérable, prix à payer pour le maintien anachronique d’un prix « socialiste » d’un pétrole que la planète entière s’arrache. Résultat : en juillet, les prix industriels ont monté de 10% (record historique) à cause de l’énergie, et Pékin admet déjà ne plus pouvoir atteindre l’objectif fixé pour 2010, d’un plafond de consommation à 3MMt de TEC – tonne équivalent charbon.
A ce retard, il y a une raison structurelle : le blocage par les lobbies d’un ministère de l’énergie et d’une politique nationale transsectorielle. Mais l’agence nationale de l’énergie, née en mars (Président Zhang Guobao) annonce une «réforme des prix de l’énergie, dans le sens du marché mondial ». Même son chez Li Rongrong, Président de la SASAC (tutelle des Grandes entreprises d’Etat).
Sans date, mais la tendance est claire : c’est la fin de l’âge d’or des dinosaures.
Comme partout ailleurs, les jeunes en Chine, au cap des 20 ans, doivent franchir la barrière houleuse de l’enfance vers l’état adulte -barrière initiatique. Brûler le pantin de leur enfance, le Pinocchio ou vilain petit canard qu’on a été, avant de prendre son envol. L’on pense aux souffrances du Jeune Werther, qui préféra mettre fin à ses jours plutôt que s’affirmer.
Dissiper tout doute sur son courage propre : tel est le sens du geste que vient d’accomplir à Pékin Fu Guiyuan, étudiant en art à l’université Qinghua. Le jeune sculpteur aurait eu toutes les raisons de s’estimer hautement, ayant été pris dans ce prestigieux établissement, décroché une bourse rarissime et s’étant fait remarquer de Sir Norman Foster le concepteur du Terminal 3 de l’aéroport, qui lui avait acheté une oeuvre.
Mais aucun de ces succès n’empêchait le jeune de douter de lui : avant d’entrer à Qinghua, il avait triplé sa terminale, et se rappelait ses cauchemars glauques de l’époque, qui lui prédisaient l’échec, faute de valeur propre.
Aussi à l’issue de sa 1ère année, il saisit le taureau par les cornes, déterminé à se prouver qu’il «en avait». Mais quelle épreuve suffirait pour le faire ? Quelle est la suprême défense en Chine, l’ultime Grande Muraille ? C’est celle des vêtements, dont dépend la face. Nu, l’on rougit, l’on perd toute contenance, le droit à la parole, celui à se défendre des quolibets et lazzis.
Fu Guiyuan décida donc de braver l’interdit, en parcourant deux tours du stade Zejing (Qinghua), en tenue d’Adam. Epreuve préolympique d’un genre imprévu, mais qui renouait parfaitement en esprit, quoique sans le savoir, avec celles de la Grèce antique !
Guiyuan ne commit son acte en un seul coup, mais par étapes : manière d’échauffer son audace et de ruser avec soi-même, ce qui est la marque de fabrique du vrai courage.
Fu commença par se saouler avec deux copains, qu’il attira dans l’aventure. La date de l’action était programmée pour l’avant-veille de la fermeture de la fac (8/07), moment où ils pouvaient espérer l’inattention générale, et à l’heure la plus discrète, 1heure du matin.
Ils firent un tour initial en slip, mais cette demi-audace lui parut plus ridicule qu’autre chose: à ce stade, fallait y aller, que diable : sur la cendrée, il ôta le bas, et parvint non sans peine à convaincre un de ses acolytes de l’accompagner dans un second tour, en tenue d’Adam cette fois, qu’il effectua en hurlant n’ importe quoi (pour se donner du courage), sous les yeux médusés d’étudiants qui prenaient le frais nocturne, des amoureux enquête de calme : son grand oeuvre était accompli, son fantôme était évanoui !
La suite est délectable : Fu posta sur internet des photos de son aventure nudiste, retouchées pour se conformer aux règles pudibondes du rectorat. Mais un jaloux anonyme y substitua les images véridiques, lui faisant risquer maille à partir avec la police.
C’est alors que cet esprit instable mais inspiré retoucha le sens de son acte : il avait voulu, prétendit-il, insuffler à son école le grain de folie créatrice qui lui manquait, et lui apporter le sel de la Terre : un happening. Pris dans l’ouragan de sa verve géniale, il prétendit exiger de sa faculté de sculpture moins de bachotage et d’examens, plus de créativité et d’expositions. Tour cela, pour s’être montré nu au monde !
L’affaire entière moussa à travers toute la Chine. Fu était un des premiers à rejeter frontalement la malédiction de Mao sur les artistes, dans son discours de Yan An (1942), qui inféodait leur création aux besoins propagandistes de la dictature du prolétariat.
Les filles surtout se montrèrent tendrement sensibles à son corps bien fait, et à son indiscutable virilité : celle de celui qui se risque dans l’inconnu, que l’on appelle, en chinois, « la 1ère personne qui mange du crabe » (第一个吃螃蟹的人, di yige chi pangxie de ren).
C’est pourquoi une autre épreuve attend notre jeune à la rentrée : ce sera à l’étudiante qui, la 1ère, goûtera en premier au jeune artiste : juste retour des choses !
1-5 sept, Shenyang : Salon equipment Manufacturing
3-5 sept, Shanghai : Salon de l’alimentation mondiale, de l’agro alimentaire et de l’emballage
3-5 sept, Shanghai : Salon de la mode, du cuir
3-6 sept, Shanghai : Salon de l’animal familier