Le Vent de la Chine Numéro 31

du 23 au 29 septembre 2007

Editorial : Les dossiers qui touchent les Chinois

Revoici le spectre de la grippe aviaire, à Panyu (près de HK), décimant 9830 canards, du 5 au 13/09… Suivant une routine éprouvée, 153.000 volatiles cantonais ont été abattus, l’export et la vente locale, fermés. Le ministère de l’agriculture dit la situation sous contrôle, mais aussi, que certaines régions ne sont pas bien préparées. Hong Kong elle, craint que le vaccin aviaire chinois ait permis au virus H5N1 de muter…

Autre chose : contrôlant le 24/05 les usines d’Unilever et de Hitachi à Hefei (Anhui), les inspecteurs de la SEPA constatèrent qu’elles dépassaient les plafonds d’effluents autorisés. Taxées de plus de 10.000², les firmes se sont dépêchées de se mettre en conformité. Mais ces usines étrangères, les seules visitées, étaient à 100% en infraction : pour la SEPA, l’agence nationale de protection de l’environnement, la leçon est claire, et il ne sera plus question à l’avenir d’exempter de contrôles les étrangères. Par ailleurs, les amendes, aujourd’hui non dissuasives, vont être alourdies et calculées par jour de pollution, pour mieux refléter le coût des dégâts.

Bo Xilai, le ministre du commerce est descendu à Taiyuan (Shanxi), coeur du bassin minier, rappeler l’importance stratégique des objectifs nationaux d’économie d’énergie (-20% d’ici 2010) et de baisse de pollution             (-10%). Surnommé le Moyen-Orient chinois, le Shanxi assure 1/3 du charbon du pays. En réponse à son injonction, la province promet de limiter sa hausse de production à +3 à 5%/an contre 10 à 20% depuis 2000, et de fermer sans retard ses petites mines produisant moins de 90.000t/an – et d’ici 2010, celles de 300.000t.                               

NB: La mission de Bo est suivie de près, vu sa stature de  présidentiable, et l’imminence du XVII. Congrès

Suite au veto chinois le 19/09, Taiwan a échoué à sa 15ème tentative d’entrer à l’ONU. L’île ne perd pourtant pas tout, ayant obtenu la réunion d’une commission à ce sujet. Cette action «légalement impossible », selon Ban Ki-moon, le Secrétaire Général, était à usage interne insulaire: pour renforcer aux présidentielles de décembre, les chances de Jimmy Hsieh, le candidat du DPP, parti indépendantiste au pouvoir. Le but étant aussi, pour le Président Chen Shui-bian, de provoquer Pékin.

Selon Boston Consulting, en 2006, les millionnaires chinois en $ étaient 250.000, 6ème rang mondial : 0,4% de la société détient 70% de la richesse. Mais ces riches n’ont pas bonne presse. Selon le Quotidien de la Jeunesse, 2/3 des 3990 jeunes interrogés leur attribue une faible à très faible moralité. Non que ces jeunes haïssent la fortune en soi. En Li Ka-shing (HK), le plus riche citoyen Chinois, ils voient un homme aux mains propres. Mais ils croient que la plupart des célestes Crésus doivent leur fortune à la magouille. Sans pour autant pratiquer l’amalgame : 56% reconnaissent l’esprit civique et l’honnêteté de certains nouveaux riches: tel Wang Shi, PDG de Vanke, ou Yao Ming, la star du basket…

Loin d’être anodines, ces tendances disparates forment la toile de fond d’un XVII. Congrès désormais tout proche. Elles influencent ses dirigeants. Elles inspireront ses débats et décisions !

 

 


Temps fort : Afrique : un virage politique fort

Face à l’Afrique, la Chine exprime un tournant graduel, mais spectaculaire.

Au Zimbabwe, insensiblement, elle lâche Robert Mugabe. Son aide s’y limite désormais à l’humanitaire et renonce aux projets de développement. « Trop de difficultés », dit Li Guijin, l’ambassadeur itinérant : les 7600% d’inflation, les 80% d’adultes au chômage, les rares crédits tout de suite détournés. Pékin a gelé les aides promises (2 écoles, un hôpital, un institut d’agronomie, un stade). Raison inavouée : Pékin est lasse d’être accusée par l’Ouest, de soutenir des dictatures.

Battant le monde entier de vitesse, Pékin entre avec fracas en République démocratique du Congo. Jusqu’en 2004, l’état de guerre larvée de l’ex-Zaïre, et ses 8MM$ de dettes, freinaient l’arrivée de miniers, tels Rio Tinto ou BHP Billiton, et pourtant le Zaïre renferme 36% du cobalt sur terre, 10% du cuivre, sans compter ses diamants, son or, son fer, son bois précieux et son uranium. Des palabres étaient en cours avec Banque Mondiale, Fonds monétaire Int’l et Banque africaine de développement, pour éponger 80% de la dette d’ici 2008. Or, arrive Pékin avec un chèque de 5MM$, soit 25% de la ligne de crédit promise par Hu Jintao à l’Afrique, lors de sa visite au printemps dernier.

De ce pactole, dit le ministre Pierre Lumbi, 3MM$ iront en infrastructures civiles, une route de 3400km Kisangani-Kasumbalesa (frontière Zambie), une voie ferrée de 3200km de Matadi (port atlantique) au Katanga (région des mines), 5000 logis pour fonctionnaires, 31 hôpitaux, 100 dispensaires, deux universités de classe internationale… les 2MM$ restants iront à l’équipement de JV minières, sans précision. Lumbi ajoute que les projets «favoriseront l’emploi local », et «la protection de l’environnement». Inquiets, financiers et minéraliers internationaux demandent des éclaircissements – car Kinshasa, selon les règles, ne doit pas souscrire de nouvelles dettes, autres que concessionnaires… A suivre!

Enfin, c’est peu de choses, mais qui en change beaucoup : A. Natsios, l’envoyé américain au Darfour (Soudan) témoigne pour la 1ère fois que la Chine joue un rôle « positif » en coulisses, pour guider le Soudan hors de sa guerre civile ayant déjà coûté 200.000 vies. Pékin a déjà convaincu Khartoum d’accepter la force de paix mixte ONU/OUA (organisation de l’unité africaine), et prépare l’envoi de 300 ingénieurs en soutien, en octobre.

NB : Pas de doute : la Chine convoite toujours les richesses du sous-sol africain, mais commence à jouer selon les règles internationales. A ce stade de constitution de sa sphère d’influence, Pékin découvre l’intérêt de soigner son image, et de prouver son désir d’améliorer le sort des sociétés locales.

 

 


Pol : Avant XVII. Congrès : Remous derrière le rideau cramoisi

Remous derrière le rideau cramoisi

     Coup de théâtre politique, à 25 jours du XVII. Congrès. Jusqu’à présent, au nom de la stabilité, la plupart des analystes se résignaient à voir reconduire le Comité Permanent—l’organe suprême-, presque à l’identique, avec ses deux camps face à face, celui de Zeng Qinghong supposé fidèle à l’ex-leader Jiang Zemin, celui de Hu Jintao.

Or, deux nouvelles viennent lézarder cette façade un peu trop lisse.

[1] Hu vient d’obtenir la nomination capitale de Ling Jihua, son homme lige, à la tête du Secrétariat général du Comité Central, en remplacement de Wang Gang. Ainsi, Hu contrôle sans conteste cet organe suprême!

 [2] Surtout, un dernier bruit décrit Zeng comme d’accord pour partir en retraite, pour entraîner les deux derniers hommes de Jiang, Jia Qinglin et Li Changchun—laissant place nette pour tous les «jeunes» adoubés par Hu Jintao, et qui piaffent à la porte.

Nb : Sous réserve d’inventaire, cette dernière rumeur signifie que Hu, seul maître à bord, pourrait s’il le souhaite, entamer une réforme politique jusqu’alors indéfiniment repoussée. D’autre part, Zeng qui l’avait déjà aidé dès 2004 à pousser Jiang- hors de son dernier mandat militaire, puis en 2007, à déboulonner pour corruption Chen Liangyu, le « roi » de Shanghai, s’est comporté en allié loyal et non en rival, selon le poncif martelé jusqu’alors. Preuve du devoir d’humilité des analystes et de l’immense pauvreté de l’information circulant sur les maîtres de ce pays d’un quart de la terre : la censure, en ce pays, n’est pas un vain mot !

Un escroc chinois gagne sa bataille contre Pékin

     En octobre 1999 débutait le plus grand scandale de l’histoire du régime (cf VdlC n°04/V) : celui de Lai Changxing, qui avec sa nébuleuse commerciale Yuan Hua, venait en peu d’années, d’importer pour 10MM$ de biens hors-taxe, flouant les finances publiques de 3MM$ de recettes.

Lai avait pu fuir au Canada, où la Chine le débusquait, demandant son extradition. Ottawa, en tels cas, accepte souvent (elle est d’ailleurs en train d’expulser deux frères Li, réfugiés sur son sol depuis 2004, coupables de fraudes pour 25M$). Pékin offrit même l’assurance rarissime, de ne pas l’exécuter. Et pourtant aujourd’hui, Lai toujours à Vancouver, vient de voir Ottawa retirer son appel contre une décision de la Cour Fédérale… Que s’est-il passé ? D’abord, depuis deux ans, les relations entre les deux capitales sont fraîches. Ensuite, la justice canadienne, très indépendante, doute que Pékin tienne sa parole. Pire : en 2006, alors que l’extradition semblait en bonne voie, un porte-parole pékinois mit lui-même en doute cette promesse, offrant ainsi un atout béni pour l’avocat de l’escroc.                   

NB : En apparence, des gens à Pékin ne souhaitaient pas trop le retour de cet homme embarrassant et qui en savait trop. Le trafic de Lai, à son époque, n’avait rien de clandestin. Des personnages importants y étaient impliqués. Y-compris Lin Youfang, à l’époque épouse de Jia Qinglin, avant leur divorce-éclair.  

 

Une ministre française, en éclaireuse

     De passage à Pékin les 20-21/09, Christine Lagarde, ministre française des finances, outre une rencontre avec son tout nouvel homologue Xie Xuren, eut les honneurs d’une entrevue avec le 1er ministre Wen Jiabao.

Pour évoquer les inquiétudes de l’Union Européenne face à la chute libre du dollar et du RMB face à l’Euro ; surtout, pour préparer la visite du Président Sarkozy en novembre—la 1ère d’une série de trois en 12 mois, record historique.

Christine Lagarde a aussi invité Wu Xiaoling, brillante n°2 de la Banque centrale, à un groupe de veille qu’elle crée, entre femmes ministres des finances et celles gouverneurs de banques centrales. Entre la française, la polonaise, l’algérienne et la chinoise, elles seraient 6 à 7 à travers le monde. En quête d’une nouvelle sensibilité en politique financière, transcendant continents et régimes ?

 

 


Argent : La Grande Muraille verte a le hoquet

La grande Muraille Verte a le hoquet

Depuis ‘2000, la Chine a lancé un des plus ambitieux programmes de reforestation au monde, la Grande Muraille verte.

Avec 54M ha, sa forêt artificielle est aujourd’hui la 1ère, dont 9M obtenus depuis lors, en reconvertissant des mauvais champs de blé ou maïs. Mais le plan fait grincer quelques dents au sein de l’appareil, alors que la récolte de 2007 s’annonce médiocre et que les villes dévorent (illégalement) les bonnes terres autour d’elles pour bâtir : le 10/09, le Conseil d’Etat annonçait la «suspension» du projet, le temps de quelques «ajustements». Immédiatement, les forestiers sont montés au créneau, tel Qin Yucai, du Bureau pour le développement de l’Ouest, qui rectifie : « l’objectif de retourner d’ici 2010 jusqu’à 1,3M ha de mauvaises emblavures vers la prairie ou la forêt, n’est pas remis en cause… ». Sous huit ans, le projet « Muraille verte » recevra 20MM² d’argent frais – il en aura obtenu, au total, 43MM², pour compenser les fermiers pour leur manque à gagner, et payer les gardes forestiers qui, l’an dernier, ont établi 210.000 procès verbaux pour abattage ou transport illégal de grumes.

Le nerf de la croissance…

     Une foule de contrôles macro-économiques nouveaux vient d’être prise pour stabiliser le cadre économique et faire chuter à 4,2% une inflation montée à 6,5%.

[1] Six ministères annoncent le gel des prix sous leur contrôle jusqu’en décembre : sol, transport, eau, gaz etc.

[2] Des règlements nouveaux sortent, contre le délit d’initiés en bourse, et la CSRC (China Securities Regulatory Commission) négocie avec 11 autres organes pour échanger les données et accorder leurs violons.

[3] Pour permettre aux 4M de PME chinoises (60% du PIB) de survivre à la hausse des prix et des salaires, l’Etat baisse la taxe des affaires, de 7 à 4% au commerce, de 15 à 5% et 20 à 7% à l’industrie. [4] Pour calmer le marché du logement toujours incendiaire (les prix nationaux ont monté de 8% et le stock d’invendus a baissé de 9%) le ministère du sol, en une campagne de 100 jours, s’attaque aux achats fonciers clandestins -vaste programme ! 

 

 


A la loupe : La mort prédite de la troisième Corée

Elle est si discrète qu’on ne la voit pas : la «3ème Corée», celle chinoise, aux 2M d’âmes dont 0,8M résidant dans leur préfecture autonome de Yanbian (Jilin), voisine de la Corée du Nord. Andrei Lankov, chercheur parlant chinois et coréen, en a fait une étude dont nous empruntons ce portrait.

L’arrivée des Coréens à Yanbian est récente. Fuyant les Japonais, attirés par une Manchourie au terroir fertile, ils sont venus par vagues entre 1880 et 1920, surtout (à 80%) après 1945, et l’établissement d’une Corée du Nord, en guerre et en famine. Leur enclave reste peu peuplée : 42.700km², à peine une demi-Corée du Sud en surface, laquelle compte 48M d’âmes !

Paysans riziculteurs, ces Coréens bien plus riches que les nordistes, bien plus pauvres que les sudistes, ont suivi le décollage de la Chine : les routes sont bonnes, et partout surgissent des lotissements prétentieux et des hôtels pour touristes et businessmen sud-coréens : Yanbian est un sas vers le Pays du Matin Calme.

Comme à ses autres minorités, la Chine leur a octroyé (tradition soviétique) des privilèges pour préserver leur identité : TV propre, réseau scolaire et presse en coréen. L’entrée à leur université en coréen est facilitée… Depuis la normalisation avec Séoul dans les années ’90, Pékin a pu craindre l’émergence d’un sentiment « pan-coréen », notamment face aux visites des milieux nationalistes de ce pays, qui croient voir sur cette terre, le berceau d’un grand « Koguryo » antique—d’un empire non chinois.

Mais ces craintes s’estompent. Les Coréo-chinois nourrissent envers leurs frères de langue, des sentiments mitigés. Face aux nordistes, ils ressentent sympathie, mais aussi dérision, pour des gens « incapables de suivre le modèle chinois ». Face à la Corée du Sud, qu’ils connaissent (236.000 d’entre eux y résident), ils s’y sentent mal accueillis (emplois bas de gamme et mal payés).

Surtout, cette 3ème Corée est obligée, pour surfer sur la vague nationale, de parler mandarin : ses écoles propres ferment (53% des professeurs ont changé de métier en 10 ans). Les jeunes connaissent un « boom » éducationnel sans précédent, mais en chinois. Ils vont de plus en plus aux universités chinoises, partent pour la ville (Pékin, Shenyang), ce qui leur permet d’accéder à des emplois bien rémunérés, dans les JV (sud)-coréennes. Ils parlent coréen avec leurs parents, mais chinois entre eux.

C’est ainsi qu’à Yanji, sa capitale, la population coréophone ne s’élève plus qu’à 36% de sa population en 2006, contre 60% en 1953. Elle ne fera plus que 25% en 2020. Sauf tournant de l’histoi-re, ses jours sont comptés -effet d’un choix, sans regrets ni coercition. Une parenthèse coréenne en Chine, qui aura duré 150 ans.

 

 


A la loupe : Planning familial—une épée de Damoclès

38 ans après sa mise en place en 1979, Pékin s’enorgueillit de sa politique de l’enfant unique, machine, aux M de cadres, qui suit chaque femme et lui dicte le moment pour concevoir ses un ou (max) deux enfants. Pékin avance les 400M de bouches à nourrir économisées. Mais disant à haute voix les arguments de bien des démographes locaux, l’étranger tente d’en évaluer les risques.

A Dalian, lors du Sommet de Davos quelques jours plus tôt, Nic. Eberstadt, démographe, rappelle que la femme chinoise porte 1,7 enfants en 2007, et moins d’un enfant dans les grandes villes. Pour lui, d’ici 2030, cette évolution sera porteuse de maux. Alors, le nombre des jeunes de15-24 ans diminuera de 20% (et donc, les postes dans les usines). Celui des +65ans passera de 100M à 235M, aux retraites faméliques, dont un tiers n’auront pas d’enfants pour les soutenir. Pire, à 123 garçons nés pour 100 filles (résultat de l’avortement sélectif, peu réprimé), d’ici 15 ans, 30M de jeunes hommes ne pourront convoler. Ce qui imposera au passage, le maintien d’un haut nombre de prostituées – estimé dès l’an 2000 à 20M.

Ce déficit en travailleurs et en épouses influera donc gravement sur la qualité de la vie, mais aussi sur la croissance : c’est le rôle d’usine du monde de la Chine, aux coûts salariaux les plus bas, qui risque de repartir aussi vite qu’il était venu. D’où le plaidoyer d’Eberstadt, pour l’élimination du contrôle coercitif des naissances.

A. Kroeber, autre analyste, offre un éclairage sur les raisons historiques d’imposer cette politique. Selon lui, la chute des naissances en Chine, avait débuté avant le planning familial (presque 5 enfants début ’70, et deux de moins en ’79). Depuis, elle s’est réalisée souvent ailleurs en Asie, sans les «gendarmes des berceaux», par le simple ressort, comme en Chine (pense Kroeber) de l’exode rural et de l’industrialisation. De son système autoritaire, le régime aurait moins attendu les profits économiques de la baisse des naissances, que le contrôle social, dont il avait besoin alors qu’il ouvrait la voie à une liberté d’initiative au nom de la croissance économique, à un moment (juste après la Révolution culturelle) où l’image du Parti était au plus bas.

En 2007, l’image est (partiellement) restaurée par le taux de croissance, mais le maintien du Planning exprimerait la volonté de cette bureaucratie de se maintenir – voire celle du Parti, de conserver ses instruments de surveillance du monde urbain et paysan.

La Commission nationale du planning annonce (14/09) le durcissement des amendes, de manière à taxer les riches pour leurs enfants hors-plan, en proportion de leur fortune. Car ces riches paient désormais sans sourciller, posant ainsi un précédent pour les autres classes sociales et un défi au système en place, dont le régime vient de décider cet été (à Beidaihe) la défense prioritaire.

 

 


Joint-venture : Le Salon de l’aviation, et les trois AVIC

Le salon de l’aviation, et les trois AVIC

     Avec 179 exposants de 22 pays, le salon de l’aviation de Pékin (alterné tous les deux ans avec Zhuhai) exprime la santé radieuse du secteur—sauf chez les transporteurs.

Boeing révise ses estimations : avec une hausse annuelle du km/passager à 8,8%, le marché intérieur va quintupler sous 20 ans, et dépasser celui d’Amérique du Nord. Les compagnies devront acheter 3400 appareils à 100M$ pièce, dont les 2/3 en tailles types B 737 ou A 310. Avec l’Europe et l’Amérique, les liaisons feront plus que doubler, et les destinations tripler.

Que les transporteurs soient sans le sou, se voit au deal arrangé par la mairie de Shanghai entre ses deux géants de l’air, AVIC-I l’avionneur et China Eastern le carrier : ils annoncent une JV aérienne pour sillonner l’Ouest chinois, dotée de 100M² de capital (60% à AVIC-1), et de10 turboprop MA60.  AVIC-2, l’autre avionneur (Xi’an) annonce son propre projet d’avenir : une alliance avec l’ukrainien Antonov, pour une version cargo d’un gros porteur, et établit dès cette année à Pékin, un centre de design de 50 ingénieurs. Synergie entre deux groupes en quête d’avenir, étouffés par les géants euro-américains.

Le salon voit la naissance d’un 3èmelarron, AVIC-III, par mariage des deux autres AVIC : vieux rêve politique, imposé par le Conseil d’Etat et la Costind afin de dessiner et produire un gros porteur d’ici 2020 -concurrençant Airbus et Boeing. Une affaire à suivre.                       

NB: un énorme deal est sur toutes les bouches au Salon. Avec Air China, Cathay préparerait la reprise totale de China Eastern, pour 4MM$ – tuant ainsi dans l’oeuf l’offre (acceptée mais non approuvée) de reprise de 24% par Singapore Airlines (SIA), pour 930M$…

 

Goldman Sachs, banquier blousé ?

      En décembre 2004, après 10 ans de Chine, Goldman Sachs, la banque d’investissement américaine, prêtait 100M$ au banquier Fang Fenglei pour démarrer leur JV de courtage : Goldman Sachs Gao Hua, qui allait placer en bourse de Hong Kong et New York de grands noms de l’industrie chinoise. Puis profiter dès fin 2005 du décollage de Shanghai et Shenzhen… via cette JV dont il avait 33%, il recevait la licence en parts «A», réservées aux Chinois—privilège rare !

Mais voilà que Fang décide de faire cavalier seul, pour lancer son fonds privé. Grâce à l’expérience et au carnet d’adresse de Goldman, il veut ratisser jusqu’à 2MM$ d’épargne. Le préjudice est d’abord financier : Fang emporte les 100M$. Surtout, Goldman perd en image : un banquier se faisant gruger, même en Chine, a du mal à inspirer confiance aux clients potentiels.

Et bien dansez, maintenant !

      Alliance inédite en Chine : la JV le 17/09 entre CAEG (China arts and entertainment group), émanation du ministère de la culture et Sir Cameron Mackintosh, le producteur londonien de musicals, afin d’animer le Théâtre National de Paul Andreu.

La JV d’acteurs chinois et directeurs étrangers, montera en mandarin les hits mondiaux – Les Misérables d’après V. Hugo en novembre 2008 suivi de Cats, Mary Poppins, My fair Lady et le Roi Lion. Par cette alliance et d’autres, Ding Wei, vice ministre de la culture, s’attend à ce que Pékin et Shanghai (la troupe mixte devant se produire dans les deux villes) passent sous cinq ans au 3ème rang du marché musical, derrière New York et Londres.

 

 


JO : Athlètes et Apparatchiks

Athlètes et apparatchiks

[1] La police des frontières élimine le formulaire d’entrée/sortie pour les voyageurs en transit (– de 24h). Histoire d’alléger la montagne de papiers des 340M passages attendus. Mouvement inverse sur les visas permanents : Pékin serre la vis aux étrangers pas en règle (a-mahs philippines, profs de langue…), craignant lors des JO, des actions intégristes, et du Falungong!

[2] Le test de réduction d’1,3M d’autos dans Pékin fin août, a plu : le pouvoir tenta de le répéter ce WE dans 108 villes, et pria les chauffeurs de prendre le bus. Succès des plus limités cette fois : bus et métro ne purent absorber la charge supplémentaire.

[3] Secretaire du Parti de Pékin et Président du Bocog,  Liu Qi dément les  rumeurs, la mairie ne fermera pas les usines pour les Jeux :  il suffira, dit-il, de les amener en conformité  avec les règlements.

[4] Au China Open, Peng Shuai bat la suissesse Hingis, puis la française Mauresmo, accédant en demi-finale, tout comme l’équipe nationale en Coupe du monde de football féminin : dans la montée en puissance sportive chinoise, la femme fait sa part ! 

 

 


Petit Peuple : Canton- la coupe-fileuse du Henan

A Canton, ce soir de décembre 2005, Jiang Yufeng, jeune paysanne débarquée de Xihua (Henan), attendait depuis 70 minutes au guichet d’une banque, quand un inconnu, à brûle pourpoint, lui offrit 30¥ pour sa place dans la file. Jiang venait de perdre son job de balayeuse dans un supermarché, mais ces 30¥ avaient été le prix de sa journée de travail : heureuse de l’aubaine, elle accepta !

Le hasard voulut que le lendemain soir, elle se retrouve en une autre queue, guignant des fruits de mer à demi-tarif, quand au moment de se faire servir, elle réalisa qu’elle était sans le sou : « qui veut ma place, s’é-cria-t-elle catastrophée, 15¥! » D’emblée, un homme s’avança pour prendre l’offre, faisant s’éteindre les ricanements des cruelles ménagères toujours en quête d’une victime à déchirer. Par son geste inspiré de l’urgence, Yufeng venait de faire d’une pierre deux coups : elle obtenait le cash dont elle avait besoin, et un précieux allié. Car A-Qiang, le repreneur de sa position, était acheteur pour des grands restaurants : avec force gestes de reconnaissance, il lui témoigna que par son geste inespéré, elle lui avait sauvé sa journée.

A partir de cet instant, démentant son peu d’instruction, la jeune femme déploya un génie inattendu. Avec un sens très sûr de la formule, elle forgea ce slogan qu’elle fit graver sur sa carte : « le temps c’est de l’argent. En attendant à votre place, je crée votre valeur »: elle venait d’inventer un emploi inédit, celui de coupe-fileuse !

Mais tout métier a ses tours de main : Yufeng ne maîtrisait pas encore ceux de celui-ci, et cette absence, dans les 1ers temps, la fatigua fort pour un profit minime. Aussi alla-t-elle voir A-Qiang, qui se fit un plaisir de lui prodiguer 2 conseils en or : identifier systématiquement les marchés porteurs, et s’enregistrer légalement.

Sans perdre plus de temps, l’entrepreneuse néophyte s’a-bonna aux 2 journaux locaux, qu’elle éplucha chaque jour. Elle fixa ses tarifs (5¥ l’heure, 10 au-delà). Et s’en alla faire le pied de grue pour le compte de ses clients.

Ainsi, de mars à août 2006, elle gagna plus de 3000¥ par mois. Le 20/08, elle obtint sa licence, qui lui valut d’occuper la position de 1ère coupe-fileuse légale du pays. Elle recruta, fit sa pub, et reçut en retour, chaque jour une dizaine de commandes…

A présent, la voici reine des files d’attente de Canton, celles pour investir dans des actions en bourse, celles pour poster les lettres, celles du médecin, des achats d’appartements, des billets du prochain concert de jazz, du match de football… Pour toutes ces bonnes choses, en ce pays, il faut traîner savate, ce dont Jiang Yufeng vous dispense.

Voici comment cette ex-chômeuse de 22 ans, avec 20 employées, empoche 10.000 ¥/mois de profit : tout cela pour n’avoir pas attendu sur sa chaise, que tourne le vent de la chance. Ce qu’en chinois, on appelle 守株待兔,shou zhu dai tu : « attendre que le lièvre vienne s’assommer contre la souche » !

 

 


Rendez-vous : Pingyao, le règne de la photographie

21 sept, HK : Asian Financial Forum

26-28 sept. Shanghai: Salon ATOP sur les pièces détachées auto, et accessoires

19 sept, Pingyao : un mois de Festival de la photographie

22 sept-14 oct, Beijing : Dangdai Int’l Art Festival

25 sept : partout en Chine, Fête de  la mi-automne