Le Vent de la Chine Numéro 30

du 24 septembre au 30 septembre 2006

Editorial : La Chine avant la fête : trois regards

« Bois, riz, huile et sel » (expression chinoise pour « de bric et de broc ») : voici un éditorial sans sujet majeur, comme on peut l’attendre, à même époque, veille de la fête nationale.

[1] A mêmes maux, mêmes remèdes : dans les provinces pauvres, des écoles annoncent le renvoi des maîtres qu’elles ne peuvent plus payer : sont exemptés -pour raison sociale- divorcés ou veufs avec enfants à charge. A Dandong (Liaoning), l’école Tongxing devait libérer 11 postes : or, au 6/09, ils ont été 40 profs à avoir rompu leur mariage. Désarçonné, le bureau local de l’éducation a nommé une commission, pour débusquer les cas de «divorces blancs». 

[2] Europe et Chine tentent de rationaliser leurs échanges.

Concernant le trafic maritime, elles déploient un projet-pilote, signé Laszlo Kovacs et Mu Xinsheng, patrons respectifs des douanes . Entre Shenzhen, Rotterdam et Felixstowe, un réseau de douanes électroniques est créé, permettant de mieux détecter les produits contrefaits, et le matériel terroriste. Le système devrait être étendu à tous les ports de Chine et de l’Union Européenne, s’il s’avère efficace.

Concernant le trafic humain par contre, le 8/09, un charter de 70 migrants clandestins n’a pu décoller de Paris vers Pékin, faute de feu vert chinois. L’accord était acquis, mais le ministère de l’Intérieur (de Nicolas Sarkozy) aurait trop vite annoncé leur envol.

En clair : Pékin ne peut accueillir ses irréguliers, qu’une fois certain de pouvoir les retourner à l’arrivée, vers leurs provinces d’origine, ce qui n’était pas -encore- le cas.

[3] Clashs sociaux: à Foshan (Guangdong) le 15/09, avec 10 véhicules de police incendiés; à Pékin le 18, avec une manif devant l’ambassade américaine, de gens criant «on veut survivre».

Depuis toujours favorisée sur les campagnes, la ville devient à son tour un foyer de tensions, du fait de la hausse des taxes et des loyers.  En 2005, l’administration a ponctionné pour 93MM² de droits et amendes (sans parler des taxes), frappant bien plus les petits que les gros.

Chercheur à l’école du Parti, Zhou Tianyong croit que les PME vivent leur crise la plus rude en 20 ans et, en faisant faillite, viennent gonfler les rangs des chômeurs, qu’il estime à 16%. Ainsi les PME privées qui étaient 31,6M en 1999, ont chuté à 23,5M en 2004. Ce diagnostic était déjà celui du Président Hu Jintao en 2003, à son arrivée aux affaires. Que rien n’ait changé depuis, montre la faiblesse de l’exécutif et la surdité des provinces et de l’appareil. Cela explique aussi la rigueur publique face à la presse – manière de retarder l’impact de la crise

 


A la loupe : Aide chinoise à l’Afrique: l’Ouest fait les gros yeux

A Pékin, les 17-18/09, 48 pays d’Afrique et la Chine ont procédé à une répétition générale du 3ème Sommet Sino-Africain de la FOFAC, prévu les 3-5/11.

Ce Forum qui fera, en taille, un record historique, s’annonce sous un signe ambigu. La Chine, comme l’Inde, promet du développement et offre, à ces pays en difficulté, des prêts, sa technologie simple et sa main d’oeuvre pour (ré)ouvrir ports, routes, hôpitaux, et chemins de fer à prix imbattable. Mais son offre va, invariablement aux pays détenteurs de pétrole ou de minerai. Les outils créés servent souvent à acheminer vers la Chine ces denrées stratégiques… Les emplois sont souvent trustés par des firmes chinoises.

Ainsi, en 2005, les investissements chinois en Afrique ont explosé à 1,2MM$, avec 800 compagnies chinoises sur place, et les échanges ont décuplé en 10 ans, passant à 40MM$. Par cette politique de fraternité sélective, Pékin suit une stratégie à long terme de rachat de droits pétroliers, pour faire face d’ici 2020 à l’import de 60% de son or noir, dont jusqu’à 30% à partir de gisements sous sa propriété.

Face à cet effort sans précédent, les pays de l’Ouest s’inquiètent, USA en tête. Depuis Singapour (au congrès du FMI – Fonds monétaire international) Paul Wolfowitz, Président de la Banque Mondiale, et depuis Pékin Henry Paulson, Secrétaire d’Etat au commerce US, dénoncent les prêts chinois irresponsables, leurs montants lourds (66M$ au Ghana cet été, 2MM$ à l’Angola en 2004), et leur absence de conditions qui garantiraient un usage honnête et licite. Ils notent que ces prêts opportunistes viennent «remplacer» la dette de ces pays auprès de l’Europe ou l’Amérique, qui venaient d’annuler la leur. Ils voulaient une Afrique désendettée, mais la Chine devient son nouveau créancier, la  menaçant d’une dépendance de demain—d’une obligation de l’alimenter en pétrole.

L’Ouest n’est pas le seul à froncer les sourcils: au Botswana, en Zambie, au Nigéria, l’opposition dénonce le «pain empoisonné». Mais les régimes noirs répliquent que les aides promises d’Europe tardent, et que sans offrir à Pékin une partie de ses mines, comment obtenir les infrastructures pour vendre ses ressources? Enfin, ce débat reste largement académique, face au gigantesque tournant en cours : l’Afrique, aujourd’hui, regarde moins vers l’Europe, plus vers la Chine !

 

 

 


Joint-venture : ‘la prise de la Guangdong Development Bank’ – le dernier acte

MG Rover, le fleuron auto british démantelé l’an dernier, ne porte pas chance à SAIC – la Shanghai Automobile Industry Co. NAC de Nankin, lui avait soufflé la marque et la technologie de la MG, et s’apprête à en sortir 15.000/an, pour 15M² d’investissement. SAIC avait repris les droits des Rover 25 et 75, et pensait investir 1,34MM² dans un modèle dérivé, dont 16,5M$ pour le droit de la marque. Il eût été le fer de lance de son entrée en Europe, la cour des grands.

C’était compter sans un 3ème larron, Ford qui dès 2000 avait acquis Landrover (filiale Rover), et le droit de préemption sur la marque :pour 9M², il vient de l’exercer, pour (sic) «protéger la cohérence des séries Rover», mauvais coup qui a pour effet d’ôter l’insigne d’argent des capots sur le point de sortir des chaînes shanghaiennes. Ford utilise ce levier pour forcer SAIC à une concession? Pour retarder l’entrée du rival (SAIC est, des constructeurs chinois, le plus mûr pour sauter ce pas)  sur un marché de l’Union Européenne qui est le sien?

En tout cas, cette affaire met en évidence l’inexpérience des négociateurs chinois en la matière, et de comprendre leur longue hésitation à l’époque, pour reprendre Rover !

A peine baisse le prix du kérosène, les compagnies aériennes s’empressent de retourner au tapis vert pour ouvrir des lignes nouvelles.

— Pour les transporteurs américains, l’enjeu est de taille : il s’agira de la dernière distribution au terme du traité sino-US de 2004. Aussi ont-ils coordonné leurs demandes, dans un sens de non-concurrence.

Misant sur le potentiel commercial de la 10ième conurbation des USA, American veut relier Dallas et Pékin dès 2007. United Airlines vise la ligne politique en or, Washington-Pékin, aux avions remplis de diplomates. Northwest Airlines veut Detroit-Shanghai, et Continental, la Big Apple et la tête du dragon, New York-Shanghai.

Côté européen, Air France-KLM, n°1 européen en Chine (65 vols/semaine, vers 5 villes), veut «battre quand il est chaud, le fer » de ses 15% annuels de hausse de chiffre et négocie 2 vols/jour vers Shanghai, Pékin et Hong Kong, et 2 liaisons vers Wuhan et Wenzhou, en partage avec China Eastern.

Quant à la Japan Airlaine (JAL), elle va porter à 252 ses 240 liaisons/semaine (29 routes, 12 villes chinoises) – et un refus administratif est peu pensable : « business first » (class) !

— Lever du rideau pourpre sur le dernier acte de l’opéra à grand spectacle, dit la prise de la Guangdong Development Bank (GD).

Citigroup, le ténor annonce (18/9) la substitution du partenaire Carlyle, par sa propre filiale AFC, qui reprendrait 5% du capital de GDB. Carlyle s’est retiré sur une objection implicite du régulateur chinois, mais justifie son dédit par une soudaine «chute d’intérêt». Pourtant, ce changement dans l’offre de Citigroup est doublement impossible: après le 31/08, les offres ne pouvaient plus être retouchées  -pas plus celle de Citi que celle du contralto Société Générale -dont le timbre monte en puissance, venant d’être désignée par Euromoney  banque de l’année.

En outre, Citi avec sa filiale, revendique désormais 25% de la Guangdong Development Bank : dépassant le plafond des 20% imposés. Pour tout simplifier, retourne sur scène un haute-contre oublié: l’assureur Ping An, qui garderait la belle Guangdong Development Bank rien qu’à la Chine, mais en la privant d’un savoir-faire bancaire à l’occidentale. Un peu de patience, nous dit-on, pour le final, désormais proche.

 

 


A la loupe : Bourse euro-française — l’appel d’offres

Le 21/09, un forum financier original se tenait à Pékin : celui de la « finance sino-française », pour défendre Europlace, la bourse de Paris, ainsi qu’Euronext, coordination des places financières de Paris, Bruxelles, Amsterdam et Lisbonne.

Une offre alléchante pour le monde chinois de l’investissement, qui avait dépêché des interlocuteurs de 1er plan tels Hu Xiaolian, présidente de la SAFE (Bureau d’Etat des changes), ou Xiang Huaicheng, Président du fonds de Sécurité sociale

Le moment est alors spécialement bon, à trois mois de l’ouverture des marchés financiers chinois, alors que les banques, fortes de leurs 20 partenaires étrangers et 18MM$ engrangés en 18 mois, vont en bourse de Hong Kong ou New York. Dans ce contexte, Christian Noyer, Gouverneur de la Banque de France et Gérard Mestrallet, Président d’Europlace, martelaient à leurs partenaires leur message : l’²uro rivalise désormais avec le US$ comme monnaie de référence, avec 20% des réserves mondiales et 60% des émissions internationales de dettes. Euronext dépasse Londres et Francfort, avec 1200 firmes cotées, 900MM² en marché de la dette, 250MM² en obligations (contre 180MM à Londres) et 2200MM² en gestion d’actifs.

Face à cela, les Chinois présentaient leurs chiffres modestes, leur courbe de croissance vertigineuse et leur marché sans fin. Le fonds de pension en août 2006, « pesait » 22,8MM², et s’apprêtait à investir à l’étranger, «même en Europe». Tout comme l’ICBC (Industrial & Commercial Bank of China), préparant sa monstrueuse entrée en bourses locale et étrangère qui lui rapportera 20MM$, et dont le vice Prsdt Li Xiaopeng (fils de Li Peng) pense investir bientôt dans « une banque étrangère ».

Bémol : Didier Balme (BNP) rappelait que les 50 banques européennes en Chine dont 14 françaises, ne tiennent que 2,5% du marché, et que la grande muraille les tenant à l’écart, sous forme d’obligation de capital, risque de se renforcer d’ici décembre, en les obligeant  à choisir entre une implantation de type «succursale» (comme banque d’affaires) ou «filiale» comme banque de détail… Manière de rappeler que la Chine financière, devra bientôt choisir : l’ouverture sera à double sens, ou ne sera pas !

 

 


Argent : Gome / Suning, la foire d’empoigne électroménagère

— Pour Gome, n°1 de la distribution d’électroménager, l’acquisition du n°3 Yolo en juillet, n’est  qu’une mise en bouche. Avec 670 magasins, 8MM$ de ventes/an et 9% du marché, il vise 15% en 2008, et rêve d’étouffer Suning, le rival nankinois aux 224 boutiques.

Mais Suning entend vendre chèrement sa peau, fort de ses 7,1% du marché, des 150M$ tirés en bourse de Shanghai et des 100M$ prêtés par la CDB (China Development Bank). Avant décembre, il va ouvrir 100 franchises, transférer son siège à Shanghai et ouvrir sept directions régionales, outil de construction d’un empire de 1400 surfaces d’ici 2010. Aujourd’hui, la bataille fait rage à Shanghai, où les rivaux bradent pour 891M$ de climatiseurs, aux prix cassés de 15 à 30%. Avec 70% du marché, c’est Gome qui mène la danse, mais Suning riposte sur un front insidieux : débauchant les vendeurs de Gome pour 30% de prime salariale.

Ceci sous les yeux du géant US Best Buy, électroménagiste entré en Chine trois mois avant (136 magasins), qui se demande, dans cette foire d’empoigne, comment tirer son plan.

— Richissime, le Guangdong a toujours soutenu sa croissance par des travaux d’infrastructures, source à bakchich pour cadres et entrepreneurs bien connectés.

Au titre du 11.Plan cependant, l’effort apparaît encore plus rare : 29MM² d’ici 2010, dont 20MM aux routes (2800km, surtout en zones montagneuses), 8.5MM aux ports (140 appontements de plus de 10.000t), 500M aux transports fluviaux. Du coup, les fonds publics ne suffiront plus et Canton, à la pointe du progrès comme souvent, envisage la privatisation complète des outils, et l’émission d’obligations.

 Dossier typique : la voie ferrée publique Luoding-Cenxi, 76km, en faillite quoique neuve (ouverte en 2000). Elle est rachetée par le groupe privé Zhongji (Shenzhen) pour 5M$ (une « bouchée de pain »), plus les dettes (104M$), et la promesse de boucler les travaux d’ici 2009 (185M$, dont 65% prêtés par des banques) : elle sera amortie en 2020. Un autre projet, est une zone économique de 100km² autour de l’aéroport de Baiyun.

Nb: cet équipement lourd reflète l’obligation pour Canton de maintenir son attractivité, face aux délocalisations internes.HK, face à ces plans, craint sa marginalisation – et demande à être associée !   

 

 


Pol : Tokyo : nouveau 1er ministre, ancienne querelle

— «Les paroles du Pape ont gravement offensé les Chinois» : telle fut la réaction (18/09) de Chen Guangyuan, Président de l’Association Islamique nationale, aux propos de Benedict XVI, six jours plus tôt en Bavière.

Que ces propos aient reçu une large couverture dans la presse, impliquent l’aval du pouvoir. Face à ses 20 à 30M de fidèles islamiques (principalement «Hui», proches des Han, et Ouïghours turkmènes), Pékin se montre toujours vigilant à tout ce qui pourrait choquer leurs convictions. En retour, il exige d’eux un démarquage sans faille de tout séparatisme ou intégrisme.

Publier cette critique en la faisant sienne, vise à prévenir tout geste de colère de sa turbulente minorité, et mettre en porte-à-faux les meneurs. L’action pourrait aussi retarder la normalisation avec le Vatican, pour laquelle Pékin a tout son temps. Tout en maintenant les bons contacts avec l’ensemble du tiers-monde islamique, et en se démarquant commodément de l’Ouest.   

— Elu (20/9) Président du Parti libéral démocratique à Tokyo, Shinzo Abe, le nouveau 1er ministre n’a pas tardé à recevoir des conseils de Pékin : «les leaders nippons devraient montrer leurs regrets pour les agressions durant la guerre».

Ce sont surtout les visites du prédécesseur J. Koizumi au sanctuaire de Yasukuni qui sont visées. Cette annonce publique chinoise confirme sa volonté de maintenir, avec Tokyo, le rapport conflictuel. A moins qu’Abe décide de prendre le risque du tournant dramatique. Une rencontre bilatérale « à haut niveau » avait lieu ce week-end. Prélude à un sommet entre 1ers ministres,  dans les semaines à venir ! 

Le même jour, le coup d’Etat militaire en Thaïlande sollicite l’attention chinoise.

Pékin s’abstient de toute évaluation morale sur la chute du cabinet Thaksin, mais craint qu’elle ne dérange la succession de Kofi Annan aux rênes des Nations Unies (ONU).

Vice 1er ministre, S. Surakiart était le poulain de l’ASEAN (Association des Nations d’Asie du Sud-Est) et de Pékin, qui avait choisi de le soutenir, en attendant de pouvoir présenter un homme de son sérail. A New York, à l’Assemblée Générale des Nations Unies, Li Zhaoxing, ministre chinois des affaires étrangères, rappelle que le poste doit revenir à « un asiatique » : peut-être son collègue coréen Ban Ki Moon, qui a aujourd’hui le vent en poupe !

 


Temps fort : La nouvelle croisade des PME italiennes au Céleste Empire

En  Chine (12-18/9) entre Nankin, Shanghai, Canton et Tianjin, Romano Prodi, nouveau 1er ministre italien s’appliqua à ravauder des relations abîmées par son prédécesseur Silvio Berlusconi qui raillait une Chine, dite «sans intérêt», pour une économie transalpine, pauvre en grands groupes et filières si courtisés par Pékin.

Comme gage d’amitié, Prodi apportait une concession de poids : son ralliement au clan—mené par Paris – pour la levée de l’embargo des ventes d’armes à la Chine. Ce présent lui valut une réception de 1ère classe, par Hu Jintao puis Wen Jiabao.

Le Président du Conseil s’était  entouré de 8 membres de son cabinet, de 500 petits patrons, 15 banquiers, 26 associations industrielles.

Objectif : stopper la course du déficit commercial, 3,7MM² au 1er semestre (+42%), via une campagne (calquée sur celle de la France de J. Chirac, l’an passé) pour marier ses PME de luxe parmi les 4,2M de chinoises, en vue de délocalisation. L’Italie compte déjà 1400 firmes actives en Chine, mais 83% sont en fait filiales de ses complexes industriels ou financiers.

A Nankin, fief de Fiat, le PDG L. Montezemolo, signa avec NAC, partenaire local, le rachat de Yuejin Motor Corp., qui sera incorporé à la JV d’Iveco (filiale «véhicules commerciaux» de Fiat). Il en espère le quintuplement de ses ventes, à 100.000 unités.

Plus tard à Tianjin, Prodi assistait à la signature de 15 contrats pour 200M² : « roba di poco » (« pas grand chose »), comme on dit au pays de Dante, mais le Président du Conseil repart avec le soulagement d’un contentieux assaini, et l’espoir d’ouvrir en Italie une porte chinoise sur l’Europe méridionale.

 

 

 

 


Petit Peuple : Chongqing, faire le moine à moitié

A 34 ans, Wang Shiming, de Chongqing, est l’un de ces 8M de patrons privés -il a créé seul sa PME textile en plein essor. De ce succès, il est très fier, mais il le paie au prix fort. Il doit tout régler seul, la note d’électricité (au guichet local), choisir la prochaine collection, publicité ou le prochain emprunt. Résultat : de jovial, il devient stressé voire odieux. Les soirées de karaoké avec les amis ne le dérident plus. La nuit, il se retourne sur ses soucis. Au bureau, il angoisse sur tout et terrorise son personnel -telle cette secrétaire arrivée 5 minutes en retard, disputée au point de la faire s’effondrer en larmes. De sa propre violence, Wang est resté interdit : était-ce lui, ce monstre?

Tétanisé par cette alerte, il ne réagit pas le surlendemain quand arriva la vraie «tuile»: la fille de la compta venait de laisser filer un client fauché, avec un impayé de 100.000¥, sur lesquels il comptait pour couvrir une traite…

Alors, Wang a éteint son portable, et arrêtant le temps, s’est rendu à Huayan, temple bouddhiste voisin. Après un repas frugal, une nuit passée sur une natte, il s’est levé à 5 heures, Il a passé le jour à prier, écouter les sermons, discuter théologie, aider les moines dans leurs corvées, avant une douche froide et le coucher à 8h30.Il lui en a coûté

8¥ d’hébergement – c’est peu, pour retrouver la paix de son âme ! Avec lui, ils étaient 20 autres managers surmenés, à s’être retirés de la vie mondaine, ce week-end-là. Revenue au goût du jour, cette pratique antique se dit « faire le moine d’un jour» (做一日和尚, zuo yi ri heshang). Curieusement, le proverbe ajoute d’un ton acerbe, que c’est aussi «sonner la cloche d’un jour» (撞一天钟, zhuang yi tian zhong), c’est-à-dire s’enfermer dans le dérisoire, faute d’assumer son choix en entrant vraiment dans les ordres. Message un peu dur, et qui sonne ici plutôt taoïste : pour sortir de sa condition, il faut tout abandonner—comme le jeune homme riche de la Bible—ou bien accepter sa médiocrité !

 


Rendez-vous : Shanghai, la foire internationale du ‘sourcing’

28-29/09, Pékin, Foire de l’optique

23-26/09, Wuhan, Salon des produits électroniques & mécaniques

26-28/09, Shanghai, Foire Internationale du Sourcing

25-28/09, Shanghai  Wire China 2006