Le Vent de la Chine Numéro 19

du 28 mai au 3 juin 2006

Editorial : Vinexpo à Hong Kong, Airbus à Tianjin…

600 exposants des 5 continents, dont 48% de Français, 6000 visiteurs sur la prestigieuse presqu’île artificielle du Convention Center: tel fut le décor de la 6ème édition du salon bordelais Vinexpo (Asie-Pacifique) du 23 au 25/05 à Hong Kong. Quelques groupes chinois aux ambitions d’export étaient présents, comme Dynasty, Grace ou de petits acteurs, tel Tayshi (France Tech China).

En filigrane se lisait la crise bordelaise (1200 faillites), fruit de surplantation et de multiplication du nombre des châteaux et AOC (appellation d’origine contrôlée), rendant le produit confus hors de l’Hexagone. D’ici 2009, la Chine, 1er buveur d’Asie continentale (4Mhl en 2004) absorbera 5,7 Mhl. Australie et Chili s’octroient l’essentiel de l’import, en gros volumes à bas prix, mélangé (souvent sans le dire) à du vin local.

A Vinexpo-Hong Kong, les deux clubs de châteaux bordelais « Grands Crus classés » et « Rive Droite » s’efforcèrent de communiquer et d’expliquer leur vin, multipliant les dégustations et améliorant l’étiquetage pour mentionner les cépages. Sachant que la Chine se forme le palais, et importera plus cher, pour se rapprocher du voisin nippon qui consommait en 2004 pour 2,6MM$ de vin, contre 1,13MM$ au Céleste Empire!

Vinexpo terminé, tous ces cavistes et marchands de vin reprenaient leur avion pour Shanghai et le SIAL (29-31/05), autre salon d’origine française.

Autre rendez-vous très attendu : après un an de lobbying des quatre villes sur les rangs, le site de la chaîne de montage d’Airbus en Chine est choisi. Xi’an et Shanghai avaient été d’abord écartés, l’un trop enclavé, l’autre au port saturé. Restaient Zhuhai (face à Macao) et Tianjin, dont Dai Xianglong, le maire faisait antichambre à Paris début juin. Tianjin gagne, sur arbitrage direct du Président Hu Jintao, et montera donc  quatre avions A320 par mois, aux pièces essentielles importées d’Union Européenne. Entre juin et septembre se déroulera l’étude de faisabilité, suivie par l’équipement et la production.

L’enjeu serait en fait l’après-A320 : l’A350, où le partenaire AVIC doublerait la participation pour gonfler le projet, face à la concurrence vive du Dreamliner B787. Surtout, Airbus (EADS) et la Chine négocient le développement d’un monocouloir de 100 places et plus, « l’autobus aérien » des pays émergents, dont 600 se vendront en Chine sous 5 ans. Vu les coûts, « nous ne sommes pas pressés », déclarait  Laurence Barron, Président d’Airbus-China : cet investissement prenant les aspects d’une course avec Boeing : « dès que l’un se lancera, l’autre suivra ! »

 

 


A la loupe : Angela Merkel en Chine – un 1er contact tonique

Les 21-23/05 Angela Merkel, 1ère Chancelière de l’histoire allemande faisait en Chine une visite tout sauf simple : fille de la défunte RDA – République démocratique allemande –  et chrétienne démocrate, elle voulait y exprimer une autre voix que celle du socio-démocrate G. Schroeder, plus à cheval sur les principes humanitaires, mais sans abîmer les relations flamboyantes forgées depuis 10 ans : en 2005, l’Allemagne pèse un tiers des échanges sino-européens avec 62MM², dont 18MM² à l’exportation. Aussi durant ce séjour, Mme Merkel et ses ministres prononcèrent des mots d’une fermeté plus connue depuis des lustres : 

— sur la lutte anti-piratage intellectuel, qui sera en 2006 « au coeur du débat juridique », et

— sur les droits de l’homme : Brigit Zypries, la ministre de la justice, interpella son collègue Cao Kangtai sur les arrestations arbitraires et le verdict de 12 ans à l’écrivain Yang Tianshui qui plaidait pour une révolution douce de la Chine, comme en Europe de l’Est.

Les deux pays se turent sur leurs demandes en souffrance.

Pour la Chine, la levée de l’embargo de l’Union Européenne sur les ventes d’armes, le statut d’«économie de marché», et pour Berlin, un siège permanent au Conseil de sécurité de l’ONU.

Mme Merkel et le Président Hu Jintao s’entendirent contre l’arme nucléaire à l’Iran – sans préciser les moyens de lui en barrer la route.

Pékin et Berlin faillirent s’entendre sur l’extension du train Maglev, bijou allemand à 1MM$ flottant à 430km /h sur 30km à Shanghai-Pudong (aéroport). Il serait prolongé jusqu’à Hangzhou sur 170km, et aussi vers l’autre aéroport shanghaïen de Hongqiao.

Cette coopération a pour but d’en baisser le coût (aujourd’hui 38M$/km), pour la rendre exploitable. De ces contrats, l’Allemagne ne recevrait qu’une fraction mince (300M² pour Siemens, sur les 4,3MM² du contrat). Aussi les dures palabres visaient de sauvegarder la maîtrise technologique de Siemens et Thyssen-Krupp… Seul un consensus fut acquis, mais non un accord (attendu fin 2006).

Siemens empocha encore un contrat de 500 locomotives, à 1,2MM², pour sa JV de Zhuzhou, et en télécom, pour 156M² d’équipements à China Mobile et Unicom… Mais d’autres contrats sont restés au vestiaire, signe d’un mécontentement de Pékin, après la douche froide infligée par la Chancelière ! 

 


Joint-venture : La solitude du coureur de fond Baosteel

— “Les aciéries asiatiques acceptent des prix délirants», fulmine le CISA, lobby de l’acier chinois, «nous faisant subir une pression injuste… violant notre entente régionale tacite » !

«L’accord avec la Chine est encore loin », rétorque le Président de BHP Billiton «peut-être vaudrait-il mieux nous séparer quelques temps»…

Ces 2 thèses opposées, montrent bien qui est à l’aise et qui perd pied, dans le bras de fer entre Chine et livreurs de minerai de fer, BHP, Rio Tinto et CVRD qui détiennent ensemble 70% de la ressource.

Des mois de fronde des aciéries chinoises sous l’étendard de Baosteel, débouchent sur l’impasse : coréens, européens et nippons, l’un après l’autre, ont signé pour +19%… Par ailleurs, un malheur n’arrivant jamais seul, la hausse du ¥ (VdlC n°18) la semaine passée, a induit une baisse du pétrole (6%), de l’or (-14%), du cuivre (-11%), d’ où une fuite des fonds de placements et une chute boursière asiatique (-3% à HK)…

— Le vent du téléphone se renforce en Chine, avec 79M de portables vendus en 2005 (209M en Asie) et une progression de 8%. Toutes les marques, chinoises et étrangères affûtent leurs armes avant l’ouverture du marché de la licence 3G.

L’avantage est chez les internationaux -ceux qui restent- seuls disposant de la technologie pour faire la différence.

A tout seigneur, tout honneur : Nokia -1er fabriquant mondial avec 32,5% du marché – annonce son nouveau quartier général à 45M², à Pékin au coeur de la zone de développement BDA. Dès l’automne 2007, il abritera 2000 emplois (R&D, vente et marketing, logistique, achat de pièces et assemblage) dans les nouveaux locaux, en plus de l’usine de portables déjà en place.

Depuis 2000, ce parc Xingwang a attiré 20 équipementiers, 30.000 emplois et pour 1,25MM$ d’invest, pour une production, l’an dernier, de 8,75MM$, de portables majoritairement exportés.

NB : Motorola, Nortel et Ericsson ont aussi installé leur Quartier Général à Pékin dans la zone de Wangjing. Nokia a dû aller à BDA, faute de trouver ailleurs, la place suffisante pour son expansion!

— Qu’est-ce qui peut pousser la Cnooc, monopole chinois du pétrole offshore, à céder à Royal Dutch Shell une part de sa raffinerie à 2,4MM$ en construction à Nanhai (Guangdong), d’une capacité de 12Mt/an dès 2008 ?

Les négociations seraient à un stade avancé. Le Numéro 3 mondial offre d’intégrer cet outil dans leur Joint-Venture voisine, à 4,3MM$  (45% Cnooc, 50% Shell), ouverte en mars. Shell qui a  investi 3,5MM$ en Chine, y-compris dans 200 stations services autour de Suzhou, prévoit de dépenser encore 500M$ cette année.

NB : Pour Shell, le renforcement de l’alliance confirmerait sa position dominante en Chine du Sud, et la chance d’un partenariat stratégique avec Cnooc. Chez Cnooc, elle  accélérerait la création de son outil commercial et ses acquisitions de droits pétroliers hors du pays !

 

 


A la loupe : Bank of China qui rit, Banque de l’Agriculture qui pleure, la Poste qui grimace!

Pas de surprise, lors de l’entrée de la Bank of China en bourse de Hong Kong : 10,5% du capital en parts ont été arrachés par les 95% de candidats institutionnels et 5% de privés. Elle obtient 9,7MM$ et si, comme elle le peut, elle émet une tranche «de consolation», le score final sera de 11,2MM$ – le record de la CCB, la China Construction Bank, (9,2MM$ en octobre 2005) est pulvérisé.

Les 75 scandales de l’an passé (51M$) n’ont rien changé : la finance mondiale achète l’entrée au club chinois jusqu’alors fermé, et un outil irremplaçable! Aux partenaires déjà en place, RBS + Li Kashing (10%), Temasek (5%), UBS et ADB (la Banque asiatique de développement), s’ajoute le prince saoudien Alwadeed, qui prend 2,7% de Bank of China pour 2MM$. C’est un des «deals» secrets, stratégiques négociés depuis longtemps entre les 2 régimes : une partie des US$ exportés par Pékin en Arabie Saoudite pour son pétrole, retourne à la maison!

Pendant que la Bank of China recompte sa caisse, se joue le sort de la ABC, la banque de l’Agriculture, très vieux jeu, aux  500.000 salaires, aux profits chutés de 48% à 100M² en 2005. Officiellement grevée de 25% de prêts irrécupérables (73MM²), le chiffre réel serait 50%, selon les experts.

Le 9/05, Zhou Xiaochuan, gouverneur de la BPdC – la Banque centrale – soumettait au Conseil d’Etat deux scenarii pour son sauvetage :

[1] le renflouage déjà octroyé aux 3 autres grandes banques —mais pour la Banque chinoise de l’Agriculture, la caisse centrale Huijin devrait payer au moins 60MM$, et autant que pour l’ensemble des 3 autres.

[2] et le démantèlement pur et simple —les 28.000 agences étant fermées, ou reconverties en banques locales. Zhou vient de démentir cette hypothèse catastrophique- mais cela ne préjuge en rien de la décision finale !

C’est d’ailleurs peut-être un indice : le Conseil d’Etat approuve (24/5) la naissance de la Banque d’épargne postale, scindée de la Poste. Numéro 5 nationale, elle aura 10% de l’épargne des foyers (123MM²), 36.000 agences, 260M de comptes, 70M de cartes de débit, surtout à la campagne : c’est un complément, ou substitut possible à la Banque de l’agriculture!

Ce faisant, l’Etat espère boucher le tonneau des Danaïdes des subventions. Les deux tiers des agences sont rurales et donc moins rentables. Corruption et incompétence y règnent en maître, et les clients sont pauvres. Quel service? Quel profit dans ces microcrédits? L’avenir reste trouble et lointain !

 

 


Argent : Daqing, pour la chimie, le maïs chasse l’or noir

— Invariablement, les lourds investissements des venture capitalists étrangers en Chine se placent dans la finance.

Avec une très grosse exception, toute récente : CVC Asia Pacific, filiale de CVC et de Citigroup, prend des parts de Chenming (Shandong), n°2 chinois du papier. Pour 500M², il en achète 30%. CVC n’a pas hésité à payer 10% au dessus de la valeur en bourse.

CVC pense au plan en cours, de fermeture massive des PME (voir rubrique « politique »). Pour l’instant, le marché du papier est atomisé, avec 12% aux 5 majors. Mais cela va changer, avec une consommation devant monter à 70Mt d’ici 2010.

CVC veut placer l’argent frais dans l’augmentation de 50% de la capacité de l’usine cantonaise de pulpe du groupe, à 4,5Mt/an.

—  Le cours du pétrole remodèle le paysage du Dongbei, poussant ce grenier à céréales vers la bio énergie et chimie.

Fin février (VdlC n°7), Global Biochem, groupe Hongkongais investissait 100 M² au Jilin dans différents projets agro industriels dont le doublement de sa production d‘isoglucose.

Le 22/5, Daqing PetroChem, producteur de lubrifiants et d’anticorrosifs met 28M² dans cette production d’amidon et glucose à Mudanjiang (Heilongjiang), en partenariat avec Gaoke BioChem, groupe pharmaceutique de cette ville proche de la frontière russe.

Il s’agit de diversifier et réorienter ce groupe trop dépendant d’un gisement pétrolier en fin de course, et d’exploiter le maïs surabondant pour en faire, entre autres, l’acide acétique hier obtenu du pétrole. Ce financement par Daqing, est tiré d’une ligne de crédit public, de 88M² sur 3 ans, complétée par 4,3M² de 6 nouveaux investisseurs privés.

NB : la 2de hausse à la pompe en 3 mois arrive, +10 à 12% cette fois, pour rappeler le grand avenir qui attend ces investissements de substitution au pétrole! La barre des 5¥/litre est passée, et ce n’est pas fini : on reste au tiers du prix européen!  

 

 


Pol : Pollution — le bâton, mais aussi la carotte !

— Pour épargner l’environnement, le gong sonne pour des 10aines de milliers de PME inefficaces. Pour accélérer les fermetures, la SEPA, l’agence chinoise de protection de l’environnement, développe un cadre administratif alliant carotte et bâton.

L’aspect répressif tient à un bilan annuel du respect des lois vertes par les cadres de base : au-dessous de telle note, pas de promotion, et 163 cadres coupables de laxisme, voire d’accidents  ont été châtiés en 2005.

Faiblesse du système : les sanctions sont secrètes et sans doute symboliques. Au fonctionnement très autonome, aux réflexes solidaires, le Parti reste hors des lois.

L’aspect incitatif tient aux droits d’émission de CO² : selon le protocole de Kyoto, la Chine, sans s’être engagé à les réduire, peut faire acter ses coupures d’émission sur son sol (ces PME fermées), et à en vendre les droits à partir de 2012, aux pays ayant pris des engagements et se trouvant incapables de les tenir.

Alors, ce sont 16.6M d’ «unités Kyoto» (=droits d’émettre du CO2 dans l’air, en Mt) que la Chine aura à vendre, dont une part du profit bien sûr, reviendra au niveau local. La grande inconnue, est si l’effort international de Kyoto pourra être maintenu : les US refusent toujours de le signer et de réduire leurs émissions. Dans ces conditions, un pays comme le Canada estime qu’après 2012, «la plaisanterie a assez duré», et a donné à ses négociateurs instruction de n’accepter aucun effort supplémentaire… Risquant de faire désespérer Europe et Japon, s’ils demeuraient les seuls soutiens de l’effort des nations contre le réchauffement global!  

 

 — Fidèle à sa stratégie d’investissements en Afrique, Pékin vient d’accorder un prêt de 1MM$ au Nigeria, ligne de crédit pour réhabiliter le réseau ferré vétuste de ce pays qui se trouve au demeurant producteur de pétrole —ce n’est pas un hasard.

En janvier, la Cnooc, le n°3 du pétrole chinois avait pu acquérir pour 2,3MM$, 45% d’un gisement offshore nigérian—c’était le plus gros investissement pétrolier chinois hors frontière.

En principe, le prêt financera le travail d’entreprises chinoises en signalisation, rails, ouvrages et matériel roulant. Il a pu être conclu dès avril, lors de la visite de Hu Jintao, entre ses étapes marocaine et kenyane. Ce plan est coulé dans le moule utilisé en Angola (autre producteur de pétrole, fournisseur prioritaire à la Chine) où depuis mars, 500M$ vont dans la modernisation de la ligne de Benguela : des douzaines de viaducs et de gares sont à refaire, par des ingénieurs chinois. Rappelons encore le contrat gagné par le consortium CITIC en Algérie, pour 6,5MM$ et les 2/3 des 1200km de l’autoroute transmaghrébine.

Contrat commercial, obtenu de haute main sur appel d’offre, mais l’Algérie est aussi être producteur d’hydrocarbures, et plusieurs de ses projets en centaines de M$, sont aux mains de firmes chinoises.

 


Temps fort : Lai Changxing — ultimes pirouettes d’un aigrefin visionnaire !

En Chine aussi, les bandits ont-ils sept vies?

Lai Changxing, l’homme le plus recherché de la police du pays vient d’obtenir miraculeusement sa énième chance de salut!

Jeune comprador aimable et débrouillard, Lai avait gagné la clientèle des grands de la province, puis du pays, et créé à Xiamen (Fujian) Yuanhua, son réseau d’ import parallèle. Qu’il ne paie pas les taxes, ne dérangeait alors personne. Mais qu’il casse les prix de l’or noir, alors à 20$ le baril, et viole le monopole de Sinopec et CNPC, était impardonnable! En 1999, Zhu Rongji le 1er ministre réclama son arrestation. Lai s’enfuit à Vancouver.

On constata alors qu’entre tabac, voitures, engrais et diesel, il avait fait rentrer pour 10MM$ de matériel, grugeant le fisc de 1,5 MM$ de taxes. Pékin exigea l’extradition. Les meules de la justice canadienne s’ébranlèrent.  Ayant épuisé ses recours, Lai (53 ans) devait être livré le 26/05, Pékin ayant promis d’épargner sa vie. Mais mettant en doute la capacité chinoise à tenir sa parole, l’avocat vient d’obtenir une ultime comparution -une semaine de répit! C’est alors que Pékin fit un coup de théâtre, en refusant soudain de garantir (24/5) la vie du financier véreux en cas de retour. Ce faisant, il ne laissait guère de choix aux juges canadiens.

La raison de cette volte-face est transparente : Lai en sait beaucoup, sur bien des gens en haut lieu. Ainsi en mars 2000, l’épouse du Secrétaire du Parti à Pékin Jia Qingling, avait été arrêtée par la Commission de discipline: Jiang Zemin avait sauvé son lieutenant, fait libérer sa femme, et l’affaire avait été enterrée. Or cette dame n’était autre que la chef du principal organe d’investissement du Fujian et la partenaire de Lai Changxing, dont le retour en Chine, tous comptes faits, n’apparaît plus aujourd’hui, si urgent ni opportun !

 

 


Petit Peuple : Guangdong — le téléphone, moderne gourdin

Au coeur du maelstrom qui les malmène, les Chinois ont une épave où se raccrocher : leur téléphone portable. C’est à travers lui que se poursuit l’éternel combat entre l’être et le pouvoir, 官逼民反guan bi min fan «le pouvoir opprime, le peuple se rebelle ». Un combat, moins contre l’empereur qu’entre employés/consommateurs, et firmes, tout à tour responsables du prétexte de la guerre!

L’entreprise abuse : à Shenzhen, Li Lanlian travaillait depuis 2 semaines aux assurances Sun, quand elles lui changèrent sa sonnerie sacrée (un air de l’idole Hongkongaise Jay Chou), pour une pub-maison.

Par ce viol d’intimité, la compagnie espérait empêcher l’employée d’exercer 2 métiers à la fois -pratique courante en Chine du Sud. Mais croyant à un faux numéro, les amis de Lanlian raccrochaient  les uns après les autres et comme la direction refusait de lui rendre sa sonnerie, Li démissionna et porta plainte -l’affaire est en cours d’instruction.  

L’individu abuse: à Canton, Chen Degui a découvert le plaisir de traîner les opérateurs en justice. Telle une drogue, c’est devenu sa raison d’être.

Victime en 2004 d’une pratique déloyale de China Motion et Shenzhen Mobile, il porta plainte contre eux, et perdit. Outré, il attaqua son nouvel hébergeur Guangdong Mobile au prochain prétexte :la surfacturation abusive de son nouveau numéro, qu’il avait choisi pour ses chiffres propices : il obtint cette fois 80¥. Depuis, il passe sa vie entre prétoire et avocat, affutant ses arguments!

Cette infllation des litiges dans la vie des gens, peut décevoir. Elle respecte pourtant la tradition antique.

Les assurances Sun suivent la thèse du roman historique « Les 3 Royaumes », pour qui l’armée doit faire corps avec son Général. Le combat de Chen est fidèle au roman épique « Au bord de l’eau », histoire de lutte entre un contre-pouvoir vertueux et une administration corrompue.     

Vue ainsi, la Chine apparaît moins décadente ou teigneuse, qu’en marche sur son chemin de toujours, le GSM ayant remplacé l’épée !

 

 


Rendez-vous : Le salon du SIAL à Shanghai

29-31/05, Shanghai, Pudong : SIAL, Salon de l’alimentation

29-31/05, Pékin : ReAsia 2006 (Energie, Technologie)