Le Vent de la Chine Numéro 16

du 5 au 11 mai 2002

Editorial : editorial_16_2002

Semaine douce du 1erMai, fériée, comme deux autres semaines chaque an depuis 2000, progrès social et aiguillon du commerce. Les métropoles avalent des flots de provinciaux(emplissant 65 à 90% des hôtels),  Pékin-aéroport bat son record – 110.000 départs le 27/4.

Socialisme oblige, Pékin décore ses masses laborieuses (cf rubrique politique), annonce (28/4) la fin des contrats « vif ou mort» – qui dégageait jusqu’alors la firme de toute responsabilité en cas d’accident du travail. Messe ouvriériste donc, mais sous son apparente bonhomie, la Chine ne cache pas son souci:le spectre des manifestations du chômage hante depuis mars, des mises à pied de Liaoyang (Liaoning) et Daqing (Heilongjiang). Wang Dongjin, vice-ministre du travail, voit venir le triplement des chômeurs d’ici 2005, à 20M. Il s’agit d’un «chômage structurel», dû à un «sérieux excédent de demandeurs d’emplois, cumulé à une vague sans précédent de nouveaux arrivants». La capacité de réemploi des chômeurs baisse, du fait de leur bas niveau de formation et de leur âge. Avec l’entrée à l’OMC, vont  se multiplier débauchages et conflits, et se creuser les écarts entre riches et pauvres.

Pour éteindre la mèche, Zhu Rongji a convoqué pour plus tard dans l’année une conférence nationale, pratique banale en ce genre de situation, mais cette fois, d’une ampleur exceptionnelle. Il devrait s’agir d’ «Etats généraux du travail», faisant appel à toutes les imaginations (y-compris universitaires) et forces (même privées),  sérieusement préparée par 8 missions d’enquête à travers les provinces. Au plan financier, les crédits vont suivre, avec pour priorité, des stratégies de réemplois pour quinquagénaires. Shanghai est le ban d’essai : en 2002, 21.000 postes seront créés surtout féminins (groupe vulnérable), gardiennes, nettoyeuses ou jardinières, dont la moitié du salaire à charge de la ville.

A l’intérieur:

 Argent:                           la Chine, style pompier

J-V:              côté France, le Jiangsu a la cote   

R-V:         forum des affaires dans l’après-OMC  

 Petit Peuple: l’amour, aux temps du crépuscule

Politique:     "mettez un homme dans votre PC"

 
Wen Jiabao, futur 1er min pressenti, pense pouvoir créer 45M de jobs dans les services d’ici 2005 (+4%/an): voie naturelle pour accueillir les néo-diplômés. L’Etat ne se fait pas d’illusion – les années à venir seront tendues. D’autant que les chiffres publics sont trop bas : les experts disent le chômage urbain plus près de 10% de la pop. active, que des 3,6% officiels. Autrement dit, les 20M de sans-emploi attendus en 2005, seraient déjà atteints – sans compter les 150M de paysans sans terre!


Editorial : 1er mai – Pékin s’attaque au chômage

Semaine douce du 1erMai, fériée, comme deux autres semaines chaque an depuis 2000, progrès social et aiguillon du commerce.

Les métropoles avalent des flots de provinciaux (emplissant 65 à 90% des hôtels),  Pékin-aéroport bat son record – 110.000 départs le 27/4.

Socialisme oblige, Pékin décore ses masses laborieuses (cf rubrique politique), annonce (28/4) la fin des contrats « vif ou mort» – qui dégageait jusqu’alors la firme de toute responsabilité en cas d’accident du travail.

Messe ouvriériste donc, mais sous son apparente bonhomie, la Chine ne cache pas son souci : le spectre des manifestations du chômage hante depuis mars, des mises à pied de Liaoyang (Liaoning) et Daqing (Heilongjiang). Wang Dongjin, vice-ministre du travail, voit venir le triplement des chômeurs d’ici 2005, à 20M. Il s’agit d’un «chômage structurel», dû à un «sérieux excédent de demandeurs d’emplois, cumulé à une vague sans précédent de nouveaux arrivants». La capacité de réemploi des chômeurs baisse, du fait de leur bas niveau de formation et de leur âge. Avec l’entrée à l’OMC, vont  se multiplier débauchages et conflits, et se creuser les écarts entre riches et pauvres.

Pour éteindre la mèche, Zhu Rongji a convoqué pour plus tard dans l’année une conférence nationale, pratique banale en ce genre de situation, mais cette fois, d’une ampleur exceptionnelle. Il devrait s’agir d’ «Etats généraux du travail», faisant appel à toutes les imaginations (y-compris universitaires) et forces (même privées),  sérieusement préparée par 8 missions d’enquête à travers les provinces. Au plan financier, les crédits vont suivre, avec pour priorité, des stratégies de réemplois pour quinquagénaires. Shanghai est le ban d’essai : en 2002, 21.000 postes seront créés surtout féminins (groupe vulnérable), gardiennes, nettoyeuses ou jardinières, dont la moitié du salaire à charge de la ville.

Wen Jiabao, futur 1er ministre pressenti, pense pouvoir créer 45M de jobs dans les services d’ici 2005 (+4%/an) :

voie naturelle pour accueillir les néo-diplômés. L’Etat ne se fait pas d’illusion – les années à venir seront tendues. D’autant que les chiffres publics sont trop bas : les experts disent le chômage urbain plus près de 10% de la pop. active, que des 3,6% officiels. Autrement dit, les 20M de sans-emploi attendus en 2005, seraient déjà atteints – sans compter les 150M de paysans sans terre!


A la loupe : Insectes – raz de marée à l’horizon …

4 hivers anormalement chauds laissent nécessairement des traces sur la Chine, sous forme de dérèglements graves à attendre l’été prochain.

L’un d’entre eux (peut-être pas le seul), sera l’invasion des rares forêts que compte le pays par toutes sortes de vermines, «incendies sans fumée» qui ravagent chaque année 14M d’ha et consomment 17m3 de bois, pour un préjudice de 600M$. Chenilles, mites, larves du peuplier, doryphores crucifères, termites et crickets sont massés en fortes colonies, prêts à lancer l’attaque, du Nord et Nord-Ouest aux bassins du Yangtzé et de la Huai, Zhejiang et à l’Anhui au Sud. 8000 types de vermines et de rats sont identifiés, dont un quart nuisibles aux forêts. Ironiquement, Pékin venait en 1999, non sans courage, d’éradiquer le 1er prédateur de ses bois, le bûcheron, reconverti en sylviculteur! D’après la SFA (administration domaniale des forêts), 98% des forêts du Nord et du Nord-Est, mais aussi de la plupart des provinces centrales sont dégradés.

L’hiver n’est pas seul en cause : jouent aussi les pesticides des champs (qui détruisent les prédateurs des vermines) et curieusement, les grands chantiers comme les 3 Gorges,par photosynthèse : les éclairages puissants, permette 24h/24 la construction des barrages,mais aussi la reproduction des parasites, en modifiant l’écosystème.

Parmi les solutions envisagées : l’aspersion sélective (avec plan prédéfini par aérographie) des pesticides, l’usage de bio-pesticides (virus et bactéries inoffensives pour l’homme). Mais quels que soient les moyens mis en oeuvre, l’onde de choc sera rude, et les pertes importantes.


Pol : Mettez un homme dans votre PC

· La science chinoise est prête à faire une modélisation de l’homme chinois, super fichier informatique doté de tous les attributs humains sauf chair, sang et émotions. Cette création servirait à la recherche fondamentale et à l’établissement de diagnostics et traitements inapplicables sans danger à l’être vivant. Sous l’égide de la CAS, le projet des universités "Beijing" et "Tsinghua" est à l’étude du Conseil d’Etat. D’un coût de 2,4M$, cette compilation des données qui auront "les mêmes caractéristiques nationales, régionales et culturelles" (sic), prendra 6 à 12 mois. Corée, Japon et US disposent déjà de tels programmes.

· A Shanghai, le toutou n’a qu’à bien se tenir: depuis le 1er Mai, tous les chiens dépourvus de plaques sont passibles d’enlèvement et d’euthanasie. Sur les 7100 pauvres pensionnaires de la fourrière, seuls une poignée de chiens de race, chihuahuas ou pékinois doivent être épargnés. L’objectif est une reprise en main avant l’échéance des JO de 2008. Les chiens, en effet, coûtent à la ville, par leurs crottes dans les rues, et par les 50000 plaintes pour morsure enregistrées par an. Il s’agit à la fois de prélever une taxe (240$/an), et  de faire vacciner les chiens, précaution contre la rage, qui n’est pas rare.

NB : le chien fait un retour récent dans les villes chinoises, après 30 ans d’absence. Il offre loyalement compagnie et chaleur à une société qui en manque. La taxe est  élevée : de nombreux propriétaires cachent leur chien… hors surveillance vétérinaire! 

· Le 1er mai, on l’a vu, est le moment rituel de récompenser le labeur socialiste. Cette année pour la première fois, le PCC vient d’attribuer la médaille du travail à 4 patrons privés du Zhejiang, et le super titre de «travailleur modèle» à 17 autres dans le Shaanxi, pour leur «contribution à l’économie socialiste».

De manière spectaculaire, il traduit dans la pratique, la reconnaissance théorique du secteur privé, par Jiang Zemin depuis juillet 2001, dans son Discours sur les trois Représentativités invitant les entrepreneurs à adhérer au Parti. Parmi les quatre "médaillés du travail", deux étaient déjà membres du PCC.

NB : cette ouverture de l’organisation ouvrière aux chefs d’entreprises "capitalistes" l’été dernier a irrité une frange de l’opinion, entre les ouvriers appauvris et les vieux intellectuels nostalgique. La direction du PCC a passé outre, et semble avoir gagné.


Argent : La Chine, style pompier

· Pearl River deviendra t-il une marque de référence dans les conservatoires, comme Steinway ou Bösendorfer? Fondée en 1992, cette Entreprise d’Etat (E.E) de Canton fait sa place sur le marché mondial du pianoforte. Les ventes de piano ont-elles chuté de 12% aux US en 2001? Celles de Pearl y ont monté de  44%, prenant 5% du marché – elle en espère 17% sous 5 ans – ce qui lui ferait 15.000 pianos exportés aux US. Le marché intérieur est très bon : en 2000, Pearl vendait 62.000 pianos contre 53.000 en 1997. Malgré la crise, en 2001, il exportait 12.000 unités – tour de force, dans un secteur jusqu’alors trusté par Europe et Japon. Pearl a deux atouts maîtres :

[1] une JV de 10M$ depuis 1995 avec le n°1 Yamaha, qui lui a donné la technologie de production et de marketing,

[2] la plus grande usine du monde (300.000 m²), pratiquant la découpe informatisée du bois, d’une capacité de 250 pianos/jour, d’où une imbattable économie d’échelle. En outre, Pearl a acheté en 1999 un concurrent allemand, Rittmüller, ouvert son entrepôt à Los Angeles, s’est diversifié en guitare, tambour et trompette, et prépare la sortie aux US de son "grande queue", plus rémunérateur: manière de claironner qu’elle connaît la musique!

· Deux news montrent l’accélération de la concurrence dans les télécoms, phénomène nouveau, dû à la rupture du monopole.

[1] A Suining (Sichuan), Unicom a vu ses locaux vandalisés par des ouvriers de chez China Telecom qui ont de plus volé ses fichiers clients : rétorsion à sa propre incursion sur le marché des lignes fixes, dernière chasse gardée de China Telecom.

[2] A Guizhou,  China Mobile viole un embargo national, et offre à ses abonnés de téléphone portable, la facturation au seul appeleur – jusqu’alors, elle était partagée, garantissant au groupe de téléphonie double bénéfice. La réaction du MII, tutelle nationale, n’est pas connue.

NB : le Henan aussi, cette semaine, a vu la vandalisation par les milices d’un géant pétrolier, de stations services rachetées par son concurrent. Face à ces scènes de violence industrielle, la police dépassée se tient à l’écart!

 

· 74,5% des villes se sont déjà dotées d’un plan Orsec contre les catastrophes naturelles, contre 50% en 1997 – un quart d’entre elles  ne disposent donc toujours d’aucun dispositif.

Selon le ministre de la sécurité publique Jia Chunwang, en 5 ans, la Chine s’est dotée de 374 casernes de pompiers, 140.000 bouches à incendie et 30 brigades d’intervention (moyennant 120M$).

La Chine reste en arrière en ce domaine, avec moins d’un pompier pour 10.000 hts, contre 10 ou plus en Occident, malgré un environnement dégradé, vétuste et hors normes. C’est Li Peng, qui fit faire ce constat, le 28/04 face au bureau de l’ANP, tout en intimant aux mairies d’intégrer un budget "pompiers" dans leurs plans quinquennaux, et en annonçant l’envoi en juin de 6 missions de contrôle. A quelques mois de la fin de son mandat, Li Peng, manifestement, s’inquiète de son bilan. 


Politique : politique_16_2002

· La science chinoise est prête à faire une modélisation de l’homme chinois, super fichier informatique doté de tous les attributs humains sauf chair, sang et émotions. Cette création servirait à la recherche fondamentale et à l’établissement de diagnostics et traitements inapplicables sans danger à l’être vivant. Sous l’égide de la CAS, le projet des universités "Beijing" et "Tsinghua" est à l’étude du Conseil d’Etat. D’un coût de 2,4M$, cette compilation des données qui auront "les mêmes caractéristiques nationales, régionales et culturelles" (sic), prendra 6 à 12 mois. Corée, Japon et US disposent déjà de tels programmes.

· A Shanghai, le toutou n’a qu’à bien se tenir: depuis le 1er Mai, tous les chiens dépourvus de plaques sont passibles d’enlèvement et d’euthanasie. Sur les 7100 pauvres pensionnaires de la fourrière, seuls une poignée de chiens de race, chihuahuas ou pékinois doivent être épargnés. L’objectif est une reprise en main avant l’échéance des JO de 2008. Les chiens, en effet, coûtent à la ville, par leurs crottes dans les rues, et par les 50000 plaintes pour morsure enregistrées par an. Il s’agit à la fois de prélever une taxe (240$/an), et  de faire vacciner les chiens, précaution contre la rage, qui n’est pas rare.

NB : le chien fait un retour récent dans les villes chinoises, après 30 ans d’absence. Il offre loyalement compagnie et chaleur à une société qui en manque. La taxe est  élevée : de nombreux propriétaires cachent leur chien… hors surveillance vétérinaire! 

· Le 1er mai, on l’a vu, est le moment rituel de récompenser le labeur socialiste. Cette année pour la première fois, le PCC vient d’attribuer la médaille du travail à 4 patrons privés du Zhejiang, et le super titre de «travailleur modèle» à 17 autres dans le Shaanxi, pour leur «contribution à l’économie socialiste».

De manière spectaculaire, il traduit dans la pratique, la reconnaissance théorique du secteur privé, par Jiang Zemin depuis juillet 2001, dans son Discours sur les trois Représentativités invitant les entrepreneurs à adhérer au Parti. Parmi les quatre "médaillés du travail", deux étaient déjà membres du PCC.

NB : cette ouverture de l’organisation ouvrière aux chefs d’entreprises "capitalistes" l’été dernier a irrité une frange de l’opinion, entre les ouvriers appauvris et les vieux intellectuels nostalgique. La direction du PCC a passé outre, et semble avoir gagné.


A la loupe : Hu Jintao fait ses classes américaines

Jeune vice-Président voire Président (si sa nomination se confirme, au 16.Congrès d’octobre), Hu Jintao poursuit sa présentation sur la scène mondiale. Une mission en Asie semaine passée (Malaisie, Singapour, 23-26) avait surtout pour but de lui donner un début d’image personnelle – de démentir son profil de personnage «pâle» ou «sybillin», explicité par moults jeux de mot de la presse anglophone, genre « who is Hu ? ».

Puis dès samedi 27, suivait le «gros morceau», les USA. Satisfait de devenir l’aîné dans le tandem des deux pays, G.W. Bush était curieux de voir s’il pourrait prendre l’ascendant sur Hu.

Lequel en revanche prenait ses distances, en  dénonçant le soutien US à Taiwan et en offrant, en monnaie d’échange, une discrète médiation dans la reprise du dialogue avec Pyongyang, désirée par Washington.

Mais ostensiblement, tout en recevant son hôte, G. Bush annonçait le renforcement de l’alliance US-taiwanaise, qu’il revendiquait «moins comme un problème (comme le faisait Clinton), que comme un plein succès»! Bush lui, prétendait raffermir le soutien chinois à sa politique anti-terroriste, et lui faire accepter l’idée d’une éviction de Saddam Hussein en Irak…Voeu également irréalisable! Paradoxalement, l’étape où Hu fut le mieux accueilli, se révéla être le QG des forces Pacifiques US, et l’amiral Dennis Blair, patron de 300000 hommes, 1400 avions, 190 bâtiments, et partisan du dialogue.

Entre Bush et Hu, ce fut l’accord pour diverger dans une irréelle convivialité – comme si ces deux ne croyaient pas un mot du langage qu’ils devaient tenir. Hu eut droit à un tour complet des US (6 jours), d’Honolulu à San Francisco via NY et Washington. A chaque étape,il réitéra son souci de créer des relations«toujours plus étroites»: dévoilant le but profond de ce voyage, renforcer l’alliance avec les US, seul partenaire qui compte, à toutes les époques, au-delà des hommes et gouvernements!


Joint-venture : Côté France, le Jiangsu a la cote

· Le Jiangsu est peut-être la province qui profite le plus de la reprise, ayant attiré de jan à mars 2002,  231 investisseurs étrangers rien qu’à Suzhou, +143,6%.

Suzhou reçoit la moitié des investissements directs étrangers (IDE) du Jiangsu (37 MM$ en 2001), et accueille 81 des 500 majors tels Matsushita, Sony, Samsung et Dupont. Canon les rejoint le 24/4, annonçant  500M$ d’investissements pour 3 usines (photo, optique, copieurs) – en plus des 8 unités déjà présentes en Chine. Nankin, 5M d’hts et 2ème poumon industriel du pays, va aussi de l’avant, avec une forte présence française. Carrefour va y ouvrir avant décembre un hypermarché, 1er d’une série de 10 : son différend réglé avec l’Etat, le géant de la distribution peut relancer son expansion.

Alstom vient d’obtenir le contrat de livraison entre 2004 et 2006, avec un partenaire local, 120 voitures de métro pour la ligne nord-sud (1ère tranche). Parmi les autres contrats nankinois du moment, AC-Delco (US), spécialiste en garage-express, va ouvrir 100 garages d’ici fin 2002 – sur un marché saturé de 2000 PME, dont bon nombre devront plier bagages!


Temps fort : Ouest – terre promise, ou mirage?

Après 2 ans de programme national de rattrapage de l’Ouest, quel bilan tirer?

Côté étranger, quelques beaux résultats sont là, tel le groupe Messer (RFA), qui y a installé 6 usines d’équipements gaziers pour 87M$, 49% de son investissement en Chine. Ondéo (Fr.) a repris pour 30 ans (26/4) l’approvisionnement en eau de 450.000 hts de Chongqing, distribution comprise, moyennant 150M²  pour renforcer 2 usines de traitement de 275.000 à 375.000 m3/j.

Côté Chine, la Sdu Barrage des 3 Gorges ouvre 120M$ de son capital à des investisseurs privilégiés (Huaneng vient de prendre 3%, pour 30M$),  puis 600M$ en bourse de Shanghai, puis (du moins en rêve-t-elle) en  bourse de New York.

Il faut dire que l’effort de l’Etat atteint aujourd’hui son pic, ayant dépensé en 2001 dans l’Ouest 46% de son budget routier et 24% de plus qu’en 2000. A Chongqing, ville-clé (appelée à devenir le pôle de développement et "hub" de l’intérieur chinois), Pékin investira pas moins de 200MM$ en 10 ans, autant que sur Shanghai dans les années 1990. Ce budget pharaonique est censé nettoyer la ville, l’équiper, la vider de M de migrants – créer les conditions pour attirer l’étranger.

Mais comme partout au monde, l’argent seul ne suffit pas à moderniser les régions en retard : il faut aussi du temps, du consensus,de l’éducation. Déversé en masses, l’argent disparaît, tonneau des Danaïdes. Lu Wanli, boss des transports du Guizhou, a fui après avoir, en 5 ans, siphonné 486 M$ via 10 sociétés de paille. Depuis 1996,  le Guizhou a reçu 2MM$ d’aides au transport – dont une bonne part disparu.

Face à ce malaise, l’administration locale pratique la méthode Coué. Des villes tentent de séduire les patrons étrangers -cf. la 10ème Foire aux Investissements de Lanzhou (Gansu, 26-30 /8). Ces derniers préfèrent attendre. Cela dit, qu’on se rappelle, 20 ans avant, ces mêmes doutes valaient pour la Chine entière (cf notre titre). Le fait qu’ils ne concernent aujourd’hui que l’Ouest, nouvelle frontière, montre les progrès accomplis, et l’avenir!

 


Petit Peuple : L’amour, aux temps du crépuscule

Toute son existence, à Nankin (Jiangsu) le vieux Zhao attendit son 3ème âge comme le bel âge,  saison de cueillette du fruit de sa vie, où il pourrait jouer les han yi nong sun   (pépé sucre d’orge pour ses petits-enfants), et agir enfin à sa guise, dégagé des responsabilités. Parvenu à cet âge, il dut déchanter. Lao Xin, sa bonne voisine avec qui il souhaitait convoler et rompre sa solitude (car il était devenu veuf), ne convenait en aucun cas à ses héritiers. D’abord, ces derniers se réservaient le droit de refaire sa vie. Ensuite, ils souhaitaient tout, sauf une marâtre qui harponnerait leur patrimoine… Cependant, pleins d’usages et raison, nos tourtereaux ridés trouvèrent la parade : ils exigèrent de leurs rejetons qu’ils les placent à l’hospice, pour y passer ensemble leurs existences en concubins. L’anecdote (fictive) recouvre plus qu’une mode, un trait sociologique assez marquant pour occuper des pages de la meilleure presse chinoise, tel le Yangcheng de Canton.

Laissés-pour-compte des temps modernes,  négligés par les jeunes générations, les vieux chinois doivent meubler seuls leur existence. Ce phénomène souvent observé par le VDLC est partiellement à la base de la naissance du Falungong, et de nombreux procès de parents contre leurs enfants, pour abandon!