Le Vent de la Chine Numéro 3

du 22 janvier au 4 février 2001

Editorial : editorial_3_2001

Ce lundi, la Chine se replie sur le nid ancestral pour affronter le  chunjie, fête du Printemps (24/1): ne comptent plus que famille, amis et soi-même-moment rare ! En 40 jours auront eu lieu 800M de voyages, dont 90% par bus (Pékin-Shanghai en 16h par autoroute, ouverte depuis 2 mois), et seulement 7,3M par avion. Les transporteurs font fête: 30% de hausse spéciale pour train/avion, et 100% dans les bus!

Mais au fait, comment  chongdian, «recharger les batteries», dans cette société encore peu habituée aux loisirs? Les choix sont parlants. Humble et volontaire, une fraction refuse le repos et étudie (stage d’anglais, de compta…) pour s’élever socialement: c’est le zao bi tou guang, «percer le mur (du voisin) pour voler la lumière» (pour lire!). D’autres saisissent l’ultime chance de «laisser leurs erreurs au XX.», et se font pardonner par des présents, livrés par l’entremise d’une géniale messagerie des cadeaux d’excuses. Cadeaux dont les changements, par rapport à ’99, évoquent l’évolution rapide des moeurs: agendas palm, téléphone et PC portables, cartes téléphoniques, billets de loteries (qui font maintenant 40% de leur chiffre annuel), vivres, posters propitiatoires écarlates et dorés, CD de pétarades (ersatz des pétards interdits en ville), décorations. Fruits et fleurs sont en chute libre (trop bon marché), mais on craque pour des folies tels ces tromblons espagnols «antiques», vendus comme des petits pains 4000Y pièce à Shanghai… Avec des MM$ de chiffre en quelques jours, le commerce aura doublé dans les villes, faisant reculer d’1 à 2% l’indice de déflation du mois. Une attention très «in», est la présentation des voeux aux amis sur l’écran de leur tél. GSM, ou l’offrande «pour un an» d’une plante en location. La notion de cadeau glisse vers un sens neuf -moins pour l’argent, plus pour le ludique, le sentimental!

Le pouvoir de son côté, multiplie bonnes résolutions et gestes de fermeté. Condamné à 18 ans, un leader du printemps de Pékin, Zhang Jie est libéré six ans à l’avance, ainsi qu’un instituteur en prison à vie en ’89, pour avoir maculé le portrait de Mao place Tian An Men. Même chance pour deux condamnés, innocentés -l’un reçoit 107.000Y, pour ses 9 ans de vie gâchée en prison. On exécute aussi: deux séparatistes ouighours au Xinjiang, six voleurs à Hainan ,-sept kidnappeurs, de femmes dans le

Jiangsu, dix autres bandits à Shijiazhuang (Hebei)…  sha jixia hou, « tuer le poulet pour avertir le singe »!

Pour rétablir la confiance de l’investisseur à la veille de l’entrée à l’OMC, (à quoi ne s’opposent plus que deux exigences chinoises, de subventionner son agriculture et de protéger son marché de l’assurance), Pékin promet (sic) de «ne plus jamais faillir aux dettes étrangères de ses Cies financières publiques ». Autre rendez-vous phare de l’année,les Olympiades de 2008, où Pékin part favorite devant Paris en vertu de deux arguments-chocs:

¬ plus grand peuple du monde,

­ n’ayant jamais abrité les JO. Enfin, le serpent, 6ème des 12 branches terrestres, n’apporte pas que des choses rassurantes. Signe de la méditation voire de la religion, sage et intense, amoureux de la justice, il est aussi hostile, dit la tradition, aux taxes lourdes du paysan. Par sa capacité de dissimulation et sa vanité, il peut tenir la puissance en échec. C’est enfin le signe de la mue, des changes, comme le rappelle l’avant-dernier cycle, en 1977 (1ères manif. de l’après Révolution Culturelle), et le dernier en 1989, avec le Printemps de Pékin.

Face aux vertus inquiétantes du serpent, le pouvoir trouve néanmoins un allié, par ses vertus d’agronome et de guérisseur (ici, l’aspic chinois rejoint l’européen, avec le symbole du Caducée). Il comptera peut être surtout sur ses propres forces, à commencer par 156MM$ de réserves- de quoi panser bien des plaies, du moins celles qui se soignent par l’argent !

 


Editorial : Le dragon se meurt, d’une morsure de serpent !

Ce lundi, la Chine se replie sur le nid ancestral pour affronter le  chunjie, fête du Printemps (24/1): ne comptent plus que famille, amis et soi-même-moment rare ! En 40 jours auront eu lieu 800M de voyages, dont 90% par bus (Pékin-Shanghai en 16h par autoroute, ouverte depuis 2 mois), et seulement 7,3M par avion. Les transporteurs font fête: 30% de hausse spéciale pour train/avion, et 100% dans les bus!

Mais au fait, comment  chongdian, «recharger les batteries», dans cette société encore peu habituée aux loisirs? Les choix sont parlants. Humble et volontaire, une fraction refuse le repos et étudie (stage d’anglais, de compta…) pour s’élever socialement: c’est le zao bi tou guang, «percer le mur (du voisin) pour voler la lumière» (pour lire!). D’autres saisissent l’ultime chance de «laisser leurs erreurs au XX.», et se font pardonner par des présents, livrés par l’entremise d’une géniale messagerie des cadeaux d’excuses. Cadeaux dont les changements, par rapport à ’99, évoquent l’évolution rapide des moeurs: agendas palm, téléphone et PC portables, cartes téléphoniques, billets de loteries (qui font maintenant 40% de leur chiffre annuel), vivres, posters propitiatoires écarlates et dorés, CD de pétarades (ersatz des pétards interdits en ville), décorations. Fruits et fleurs sont en chute libre (trop bon marché), mais on craque pour des folies tels ces tromblons espagnols «antiques», vendus comme des petits pains 4000Y pièce à Shanghai… Avec des MM$ de chiffre en quelques jours, le commerce aura doublé dans les villes, faisant reculer d’1 à 2% l’indice de déflation du mois. Une attention très «in», est la présentation des voeux aux amis sur l’écran de leur tél. GSM, ou l’offrande «pour un an» d’une plante en location. La notion de cadeau glisse vers un sens neuf -moins pour l’argent, plus pour le ludique, le sentimental!

Le pouvoir de son côté, multiplie bonnes résolutions et gestes de fermeté. Condamné à 18 ans, un leader du printemps de Pékin, Zhang Jie est libéré six ans à l’avance, ainsi qu’un instituteur en prison à vie en ’89, pour avoir maculé le portrait de Mao place Tian An Men. Même chance pour deux condamnés, innocentés -l’un reçoit 107.000Y, pour ses 9 ans de vie gâchée en prison. On exécute aussi: deux séparatistes ouighours au Xinjiang, six voleurs à Hainan -sept kidnappeurs, de femmes dans le Jiangsu, dix autres bandits à Shijiazhuang (Hebei)…  sha jixia hou, « tuer le poulet pour avertir le singe »!

Pour rétablir la confiance de l’investisseur à la veille de l’entrée à l’OMC, (à quoi ne s’opposent plus que deux exigences chinoises, de subventionner son agriculture et de protéger son marché de l’assurance), Pékin promet (sic) de «ne plus jamais faillir aux dettes étrangères de ses Cies financières publiques ».

Autre rendez-vous phare de l’année, les Olympiades de 2008, où Pékin part favorite devant Paris en vertu de deux arguments-chocs:

– plus grand peuple du monde,

– n’ayant jamais abrité les JO.

Enfin, le serpent, 6ème des 12 branches terrestres, n’apporte pas que des choses rassurantes.

Signe de la méditation voire de la religion, sage et intense, amoureux de la justice, il est aussi hostile, dit la tradition, aux taxes lourdes du paysan. Par sa capacité de dissimulation et sa vanité, il peut tenir la puissance en échec. C’est enfin le signe de la mue, des changes, comme le rappelle l’avant-dernier cycle, en 1977 (1ères manif. de l’après Révolution Culturelle), et le dernier en 1989, avec le Printemps de Pékin.

Face aux vertus inquiétantes du serpent, le pouvoir trouve néanmoins un allié, par ses vertus d’agronome et de guérisseur (ici, l’aspic chinois rejoint l’européen, avec le symbole du Caducée). Il comptera peut être surtout sur ses propres forces, à commencer par 156MM$ de réserves- de quoi panser bien des plaies, du moins celles qui se soignent par l’argent !

 


Joint-venture : Assurances : le pré carré!

· L’assurance chinoise a engrangé 19,2 MM$ de primes en 2000, +14,5%.

Après la restructuration nationale en cours, la CIRC veut augmenter ce chiffre de 66% d’ici 2005, à 33,8MM$ (+12%/an), largement soutenue par des investissements extérieurs: en 2000, New China Life a ouvert 24,9% de son capital à l’étranger. A l’avenir, ce marché effervescent, dont PICC, China Life et China Re contrôlent 60% de leur secteur respectif, restera isolé de la concurrence étrangère, même après l’OMC : à ce jour, la Chine n’a accordé que 15 licences commerciales, et seules deux des sept licences promises à l’Europe en mai ont été re-mises (pour les cinq autres, une liste officieuse ne prévoit pas de licence aux groupe français sur les rangs – peut-être reflet d’un climat politique). Une nouvelle loi des assurances est en gestation, visant l’adaptation du secteur aux normes internationales, et un contrôle plus étroit des étrangers dans la place, dont certains outrepasse raient leurs licence, ou pratiqueraient le transfert illicite de profits et la fraude fiscale.

· Un terminal ouvrira en avril, à Chek Lap Kok (HK) pour transborder par mer le fret vers Shenzhen. Il préludera à la navette des passagers des deux aéroports. Afin de multiplier «ses» destinations en Chine (déjà au nombre de 40) CLK prépare la liaison avec Shenzhen par hovercrafts, et plaide «dès maintenant» pour la construction de ponts vers le Delta des Perles, ouvrant la voie vers le Guangxi et le grand Ouest. Ebauche d’un «hub» intégré entre les deux métropoles-soeurs.

· Se démarquant de la forte concurrence sur le créneau de la berline à 12.000$ (Sail de GM, Charade de Toyota, Bora de VW), Daimler-Chrysler parie sur le 4X4 de luxe, pour se "refaire" : Les ventes de sa vétuste Cherokee sont tombées de 30% en 1999, à 21.000. Suite à une injection de capital en sept., sa JV Beijing Jeep pense produire 1000 Grand Cherokee en 2001, (tout terrain de 4000cc à 4700cc, coûtant entre 71.000$ et 84.000$). La "Grand Cherokee" aura pour concurrent la Chevy Blazer de GM (bien moins chère, 29.500$ à 45.200$, faite à Shenyang), la Land Cruiser de Toyota, la Pajero de Mitsubishi et… la Grand Cherokee made in USA, dont 7 à 8000 passent les frontières chaque année !

NB: DCAC (Wuhan, Hubei) étoffe sa gamme, en commençant à monter son monospace compact Picasso, à quelques milliers d’unités en ’01. Il en sortira 10.000 en ’02.

 

 


A la loupe : Kim goûte les fruits de la réforme -chinoise !

Le 15/01, Kim Jong-il, le cher leader, était reçu en Chine avec tous les égards. Il pouvait se rendre à Shanghai dans son train privé, annuler l’ étape de Shenzhen (par phobie de l’avion), faire planer sur sa visite un secret de Polichinelle, et surtout, faire se déplacer à Shanghai, pour le voir, les N°1 et 2,Jiang et Zhu. Excentricités qui lui permettaient de mieux se fondre dans la stature de son père, le Grand Leader Kim Il-sung. Si la Chine lui donnait tant de face, c’est parce qu’en nov 2000, Kim avait reçu l’américaine M. Allbright, et failli recevoir B. Clinton. Chi Haotian, Min. de la défense, avait été dépêché pour rappeler le «lien du sang»: il était temps, entre Chine et Corée, de rétablir des liens privilégiés!

Comme l’indique son itinéraire, Kim était surtout venu étudier la politique d’ouverture chinoise, pour en reprendre tant que possible dans sa propre économie en ruine. Faute d’énergie, presque toute l’industrie a disparu. Pour son pétrole, la Corée du Nord dépend des livraisons US, et pour son alimentation, à 33% de l’ONU!

A Shanghai, Kim a pu constater la métamorphose depuis sa visite en 1983. Zhu l’a mené à Pudong pour lui présenter la JV de General Motors (1,5MM$), l’usine de semi-conducteurs de NEC (1,2MM$). Kim a aussi visité la bourse, le parc hi-tech de Zhangjiang, le Grand Théâtre.

Pékin a intérêt à voir son petit voisin suivre son modèle ET s’enrichir. L’alternative étant l’effondrement, les M de réfugiés coréens vers la Chine (elle en a déjà 100.000), et une réunification coréenne accélérée, remplaçant deux nains par un voisin de poids. En outre, une Corée du Nord moins agressive et nucléaire, priverait les USA de leur argument n°1 pour déployer leur réseau spatial antimissile TMD, auquel Pékin reste très opposée. Thème de forte actualité à la veille de l’ intronisation (20/01) du Président G.W. Bush Junior, très sensible au poids militaire, en Asie, d’une Chine « non partenaire » (sic) !

 


Politique : politique_3_2001

· L’arrestation pour corruption de Zha Keming, vice-président de la State Power Corp (ex-vice Ministre de l’énergie), et Tan Aixing, son chef du bureau international a été annoncées (15/1). Tan serait aux arrêts depuis juillet. L’un et l’autre auraient été pris en train de fuir le pays, après avoir accumulé un pactole en numéraire. Un flou d’information accompagne ces péripéties très politiques, autour du 1er groupe électricien de Chine, super poids lourd qui contrôle 15% de tous les actifs industriels publics, et fait un (rare) profit de 1,1MM$ en 2000.

Membres de l’entreprise, non impliqués dans ce scandale, figurent deux enfants de Li Peng, Président de l’ANP et ex-ministre de l’énergie. Au moins, l’enquête apporte de l’eau au moulin de Zhu Rongji, qui préconise l’éclatement du monopole de l’électricité et la mise en place d’un "chien de garde" pour le superviser. La réforme vise à séparer production électrique et distribution, afin de faire jouer la concurrence.

NB: indépendamment de cette enquête, le secteur en excédent de capacité se voit «brider» depuis plus d’un an par un moratoire sur  tous les projets de production en JV, et il est question de renégocier celles signées lors des années ’90, dont les contrats incluent la promesse, aujourd’hui intenable, d’un retour sur investissement de 15%/an.

· Le 11/12, en publiant son projet d’amendement à la Loi du Mariage, l’ANP sollicite pour la 1ère fois l’opinion des chinois sur ce sujet. Ils auront jusqu’au 28 fév., date du vote pour s’exprimer par courrier, presse ou internet.

La clause la plus controversée est celle des deux ans de séparation obligatoire avant divorce: "la liberté de séparation apportera une meilleure qualité de la vie de la famille" dit ce correspondant sur la «toile». "Faire du divorce un parcours d’obstacles n’arrangera rien»" avertit cet autre. La disposition envisagée concerne les femmes au 1er chef: ce sont elles, dans 65% des cas, qui prennent l’initiative de la séparation,soit pour cause d’infidélité du mari (50% des cas), soit pour sa violence (présente dans 3 foyers sur 10).

Les hommes pourtant, se plaignent d’être les laissés pour compte d’un système qui ne protège pas leurs droits, alors que commencent à apparaître, chez le sexe faible à son tour, les  bao er ye (littéralement «le deuxième homme», càd amant)! Sur ce dossier-clé pour l’évolution sociétale, conservateurs et libéraux s’affrontent, défendant valeurs traditionnelles de la famille d’une part, droit à l’amour et à l’épanouissement de l’autre, avec un souci spécifique de protection de la femme -qui reste encore, en ce domaine, la victime. Refusant pour une fois d’intervenir, l’Etat semble avoir opté, habilement, pour la neutralité et le consensus.

· Le 20jan au soir, Pékin annonce réception de 28M$ du gouvernement Clinton, en compensation de la destruction par les bombes de l’OTAN de son ambassade à Belgrade, le 7 mai ’99. La Chine pour sa part, paie 3M$ de réparation de l’ambassade US à Pékin, lapidée par la foule : affaire réglée !

 

 


Argent : Le long hiver de la pub dans l’éther

· Dès 1996, prenant acte de l’anarchie réglementaire de la construction immobilière et de son lourd excédent, Pékin fermait au secteur les portes de la bourse. Cette semaine, Goldfield (Shenzhen) et Tianhong Baoye (Pékin), sont les 1ers depuis 1993 à obtenir le feu vert pour la corbeille de Shanghai, où ils escomptent récoler 100M$ et 48,5M$ pour le soutien de leurs prochains chantiers. Il aura fallu cinq ans pour lever l’interdiction, le temps pour l’immobilier de s’assainir et renouer avec la croissance (+40% de ventes de jan. à sept. en 2000!). Pour Pékin, c’est une nouvelle "valeur sûre", qui vient à point pour maintenir la dynamique boursière.

· Janvier porte un regard dégrisant sur l’internet chinois.

Le sondage «Iamasia» auprès de 32.219 personnes dans 13 villes, permet d’évaluer l’existence de 15,2M internautes, un bon quart de moins que les 22,5M affichés par la CNNIC (17/01).

· Affligé d’une côte boursière en pleine déroute, les portails chinois poursuivent leur course à la coupe des coûts et des pertes. Sohu licencie 20% de son personnel et vise la diversification. Sina tente de faire oublier ses pertes de 5,4M$ entre octobre et décembre, en montant en épingle «la masse de ses fidèles clients», et la hausse de son chiffre d’affaire dans la période, à 7,6M$ (+6%).

Les rumeurs abondent, sur un rachat de Netease, dont le directeur financier a démissionné. Comme repreneurs, China Daily voit Lycos, Yahoo ou AOL – le plus probable demeure Chinadotcom, riche de ses 485M$ de cash. Les recettes de la pub online poursuivant leur descente vers l’abîme (Merrill Lynch a révisé ses prévisions pour 2001 à la baisse, de 120M$ à 80M$), et des firmes comme Sohu, refusant de se prononcer sur leurs chiffres d’affaires en 2001, difficile de conserver les grâces de l’investisseur étranger : même des grands noms comme Softbank ont rigoureusement taillé dans leur présence en Chine – c’est un hiver long et glacial!

 


Pol : l’ANP veut gérer les querelles de ménage

· L’arrestation pour corruption de Zha Keming, vice-président de la State Power Corp (ex-vice Ministre de l’énergie), et Tan Aixing, son chef du bureau international a été annoncées (15/1). Tan serait aux arrêts depuis juillet. L’un et l’autre auraient été pris en train de fuir le pays, après avoir accumulé un pactole en numéraire. Un flou d’information accompagne ces péripéties très politiques, autour du 1er groupe électricien de Chine, super poids lourd qui contrôle 15% de tous les actifs industriels publics, et fait un (rare) profit de 1,1MM$ en 2000.

Membres de l’entreprise, non impliqués dans ce scandale, figurent deux enfants de Li Peng, Président de l’ANP et ex-ministre de l’énergie. Au moins, l’enquête apporte de l’eau au moulin de Zhu Rongji, qui préconise l’éclatement du monopole de l’électricité et la mise en place d’un "chien de garde" pour le superviser. La réforme vise à séparer production électrique et distribution, afin de faire jouer la concurrence.

NB: indépendamment de cette enquête, le secteur en excédent de capacité se voit «brider» depuis plus d’un an par un moratoire sur  tous les projets de production en JV, et il est question de renégocier celles signées lors des années ’90, dont les contrats incluent la promesse, aujourd’hui intenable, d’un retour sur investissement de 15%/an.

· Le 11/12, en publiant son projet d’amendement à la Loi du Mariage, l’ANP sollicite pour la 1ère fois l’opinion des chinois sur ce sujet. Ils auront jusqu’au 28 fév., date du vote pour s’exprimer par courrier, presse ou internet.

La clause la plus controversée est celle des deux ans de séparation obligatoire avant divorce: "la liberté de séparation apportera une meilleure qualité de la vie de la famille" dit ce correspondant sur la «toile». "Faire du divorce un parcours d’obstacles n’arrangera rien»" avertit cet autre. La disposition envisagée concerne les femmes au 1er chef: ce sont elles, dans 65% des cas, qui prennent l’initiative de la séparation,soit pour cause d’infidélité du mari (50% des cas), soit pour sa violence (présente dans 3 foyers sur 10).

Les hommes pourtant, se plaignent d’être les laissés pour compte d’un système qui ne protège pas leurs droits, alors que commencent à apparaître, chez le sexe faible à son tour, les  bao er ye (littéralement «le deuxième homme», càd amant)! Sur ce dossier-clé pour l’évolution sociétale, conservateurs et libéraux s’affrontent, défendant valeurs traditionnelles de la famille d’une part, droit à l’amour et à l’épanouissement de l’autre, avec un souci spécifique de protection de la femme -qui reste encore, en ce domaine, la victime. Refusant pour une fois d’intervenir, l’Etat semble avoir opté, habilement, pour la neutralité et le consensus.

· Le 20jan au soir, Pékin annonce réception de 28M$ du gouvernement Clinton, en compensation de la destruction par les bombes de l’OTAN de son ambassade à Belgrade, le 7 mai ’99. La Chine pour sa part, paie 3M$ de réparation de l’ambassade US à Pékin, lapidée par la foule : affaire réglée !

 

 


Temps fort : La grogne sociale, avant les fêtes

A Guiyang (Guizhou), 1000 «canuts» manifestaient (12/01) devant leur cotonnerie qui venait d’en congédier 1500, avec 5000Y de viatique. A Jilin (Jilin) 500 ouvriers (17/18 jan) scandaient aux portes de leur complexe d’engrais, "on veut manger", "du boulot!". 80.000 ouvriers (sur 130.000 de l’Entreprise d’Etat) attendaient la mise à pied avec 15.000Y chacun mais pas de retraite!

Comme toute la Chine, les EE sont sensées se mettre au net avant le . Les licenciements pleuvent. Les humeurs ont peu de chance de se détendre en l’année du serpent. En 2000, les 125.000 retraités du Ningxia n’ont reçu que 4½ mois de pension, portant ces arriérés à 34M$. 70% des mauvais payeurs étaient publics, dont 124 GEE qui devaient 80% du montant. Après enquête publique, il s’est avéré que 70% des EE pouvaient payer, au moins en partie, mais préféraient éviter ces "dépenses optionnelles". La colère ouvrière étant une «nuisance supportable», et de toute manière, à gérer par l’Etat, pas par la firme!

Ce qui éclaire le voeu N°1 des citoyens de Pékin, Shanghai et Canton d’ici 2005 (sondage de l’Office statistique): la mise en place d’un véritable fonds d’assurance chômage. Après le démantèlement depuis le 2 jan., du statut de  xiagang («descendu au port», càd chômeur au noir), et la reprise par l’Etat de cette charge, l’urgence d’une protection sociale fiable se fait sentir, pour les 700M d’actifs publics, mais aussi privés, libéraux (33M) et surtout ruraux (73% de l’emploi, sans pension). Tâche herculéenne. Le décalage apparaît évident entre les besoins incompressibles, et l’indigence des moyens, surtout à la campagne et en zones industrielles délitées. Huang Qifan, Président de la Commission Economique de Shanghai, affirme qu’ avec 40% d’ouvriers remerciés en 5 ans et 2M d’ouvriers sur 7M d’actifs, la restructuration locale « est achevée ». C’est pour le reste de la Chine, une -bien pâle- lueur d’espoir.

 


Petit Peuple : ‘bai bai Chinglish’

· Pour gonfler ses chances d’être capitale olympique en 2008, (dépôt du dossier, à Lausanne le 16/01), Pékin presse ses citoyens de rafraîchir leur anglais. Mais l’on n’est jamais trahi que par les siens: alors qu’il venait de commander son ravier de poulet au KFC de Jingjiang (Jiangsu), Qin Yi sentit le rouge de la honte l’envahir, en recevant son ticket de caisse dans la langue de Michael Jordan: traducteur d’anglais de son état, il était incapable d’y comprendre un traître mot. Qin Yi intenta à la chaîne yankee, un procès au nom de la défense des droits du client (à savoir ce qu’il mange), du citoyen (à protéger son environnement national)…

Outre des dommages modestes (5100Y), le linguiste irascible réclame à l’avenir la délivrance de tous tickets et factures, à travers l’empire, en mandarin de bon aloi !

NB : dans la même veine, on doit signaler l’entrée en vigueur d’une loi sur le langage, sommant médias, publicités et marques, d’utiliser leur idiome propre, en caractères simplifiés exclusivement (ce qu’a toujours fait le VDLC !) afin de "préserver l’unité nationale, attaquée par 100 dialectes et 30 langues écrites". Auteur de la loi, le Parlement réagit contre une vague déferlante d’anglophilie parmi la jeunesse, assimilant aveuglément des termes tels «WTO» (dans le texte), «I titanicked» (pour «j’ai raté l’ exam»), sans oublier l’inévitable "bye bye". Les réticents iront en «classes de rééducation ».■