Le Vent de la Chine Numéro 28
1. 100MMY: tel est le crédit que la Commission au Plan de Développement va réunir, par émission de bons d’Etat, comme effort de reconstruction, après les crues.
Argent destiné, pour 36,5%, à des projets de maîtrise de l’eau, le reste se répartissant entre renfort de digues, transports, télécomm, infrastructure urbaine, logement privé, et silos géants, poste qui voit sa dotation fuser (x17,5 le montant de 1997). L’essentiel de ces crédits ira au Centre et à l’Ouest. Moyennant cet effort, et au marché généré par les destructions, Pékin attend un bon 3. trimestre, et une croissance globale (1998) de 8%, comme planifié.
2. Hong Kong annonce un plan visant à bloquer les achats de titres boursiers à court terme.
Mesure qui ressemble, en moins absolu, à la fermeture des frontières monétaires, décidées en Malaisie par le 1er Ministre Mahatir Mohammed, et qui brisent de facto le libéralisme en Asie, fondement de son bien-être. Plan Hong kongais fort contesté, notamment par Milton Friedman, Prix Nobel d’économie, qui prédit une dévaluation « inéluctable » du HKD « sous 3 à 6 moi s», voire le glas, si Hong Kong persiste, de ses ambitions de place monétaire mondiale.
3. Pékin (ville) réagit, enfin à son statut peu enviable de ville à l’air le plus vicié de Chine: au 1er jan 1999, toute voiture neuve devra disposer d’allumage électronique et de pot catalytique, pour atteindre les valeurs d’émissions de gaz autorisées, celles de l’Union Européenne en 1992 (les actuelles sont celles de nos années 1970).
Dans le même souci, d’ici 2000, 105 km² (1/5 de la ville) seront chauffés au gaz, le reste au charbon à basse teneur en souffre (moins de 0,5%), épargnant ainsi à l’atmosphère le rejet de dizaines de milliers de tonnes de monoxyde de carbone et dioxyde de souffre. Ainsi, la capitale vit peut-être l’instant où se brise, pour elle, la spirale de descente vers l’enfer.
Le marché noir du RBM, qui existait jusqu’en 1993 (tirant parti de l’existence de deux monnaies distinctes en Chine, avec le monnaie des étrangers, aujourd’hui défunte (FEC), réservé aux étrangers) refait surface sur les marchés libres: dans les grandes villes, s’y pratique l’achat du USD au taux de 8,5, au lieu du taux légal de 8,29.Ces fonds changeraient ensuite de main et seraient à Wenzhou (Fujian, capitale notoire de la contrefaçon), à 9,5Y/USD.
Une autre technique pour accaparer le billet vert, consiste à les obtenir des banques (avec leur complicité), moyennant titres commerciaux ou chèques falsifiés, et remboursement de taxes sur des exportations fictives. Toutes ces pratiques viennent d’être une fois de plus interdites par la Cour suprême, sous peine de châtiments sévères. Elles expriment la demande générale en valeurs-refuge, le spectre de la dévaluation. Jiang ne s’y trompe d’ailleurs pas en réaffirmant, cette semaine à des hôtes nippons, « ne pouvoir exclure à 100% une baisse du RMB ».Même si cette annonce, du type « retenez moi, ou …», a aussi pour objet de faire pression sur le Japon, sur des dossiers monétaires et autres! (voir rubrique politique)
La petite soeur chinoise du magazine ELLE (Hachette-Phillipacci) a fait un coup médiatique en renonçant à sa soirée de gala de 2MY pour son 10ème anniversaire, et donner la somme à la Croix Rouge chinoise, en aide aux victimes des inondations.
390M de doses de vaccin pour volailles par an: c’est ce que produira, dès fin 1999, Merial SAS, leader français du marché, en coopé (JV 50/50) avec la vénérable Usine Pharma. De Nankin (65 ans). « Nanjing-Merial Animal Health ltd », coûte 12,4 M USD à ses auteurs, mais pourra compter sur la forte demande de ce 1er marché mondial pour les oeufs, comme pour la viande avine.
En diplomatie, le 1er semestre avait été celui des USA, conclu par la visite fastueuse de Bill Clinton à Pékin. Ce second semestre sera celui de l’Europe, avec, d’octobre à décembre, les visites de pas moins de 6 Premiers Ministres de l’UE, ainsi que du Président de la Commission Jacques Santer.
L’Europe engrange dès à présent un bénéfice de cette montée en puissance, avec une nouvelle offre chinoise pour son entrée à l’OMC, jugée « en progrès » par les intéressés. Europe et Chine ont un objectif commun, pour la venue de J. Santer: désherber le terrain pour 3 sujets prioritaires, càd le libre établissement des cabinets d’avocats, d’audit et du commerce de détail (supermarchés). D’autres offres chinoises concernent banque, tourisme, transports maritimes et télécoms, ici, les services de « bip » s’ouvriraient à la concurrence le jour de l’entrée à l’OMC, et le téléphone mobile, 5 ans plus tard (seulement en Joint-venture, et dans certaines villes, non spécifiées). Il faut dire que la Chine, hier portée sur la procrastination (du fait d’oppositions internes idéologiques), veut mettre la vapeur, pour boucler son entrée au club des nations marchandes. En 2000, débute un nouveau Round multilatéral, et les négociateurs chinois se trouveraient en position de faiblesse, s’ils devaient alors être au four et au moulin à ferrailler sur les deux fronts.
Nouvelle ligne de chemin de fer en construction (une des 10 prévues en ’98, dans le cadre du plan d’infrastructures, locomotive des affaires en ces temps de vaches maigres): Zhangjiang (Canton), Sanya (Hainan), 542km, pour un coût d’1MUSD/ km -financé par l’emprunt d’Etat de 100 MMUSD (cf p.1). Achèvement des travaux pour 2001. Cette ligne, surtout a vocation « fret » (capacité, à terme, de 31Mt/ an), comporte une rupture de charge: les 25 km du détroit de Qiongzhou, par ferry capable de résister à des typhons de force 8. Les responsables envisagent, plus tard, de forer des tunnels, dès que les crédits seront là.
Prévue pour être la fierté de Pékin, la gare de l’Ouest, inaugurée de janvier 1996 après « seulement » 3 ans de travaux, avait coûté 580MUSD. Aujourd’hui, son état lamentable en fait objet de dérision, et la justice a épinglé six petits responsables: ces fonctionnaires et patrons d’entreprises avaient contracté pour 2,4MUSD de valves de haute qualité, et livré l’essentiel en matériel de contrefaçon, plongeant la gare dans des inondations où le Yangtzé n’avait rien à voir, tout en forçant le Chef de gare à tout faire remplacer, au prix fort.
Attestée par plusieurs chinois de retour de séjours prolongés à l’étranger, la libéralisation du régime est indéniable. Ainsi, on se demande ce qui fût advenu cinq ans plus tôt de Lin Xinshu, vétéran dissident qui vient d’être assigné à résidence pour avoir comparé la crue du Yangtzé à un baromètre de la corruption du régime. Idem, Wang Youcai, autre objecteur, est relâché de prison (confiné chez lui), quelques semaines après avoir tenté de faire enregistrer une formation d’opposition, le « Parti de la démocratie ». Ses compagnons qui n’avaient pas, comme lui, signé une « autocritique », restent sous les verrous, mais 136 autres dissidents, enhardis, n’ont pas perdu de temps à signer des pétitions.
Une autre preuve d’embellie: à Shanghai, Lin Hai, fondateur d’une Cie informatique, avait remis à un groupe démocratique US 30 000 adresses E-mail chinoises, et la police l’avait arrêté pour subversion: le procureur a ordonné aux limiers de rouvrir leur enquête. En clair, le chef d’accusation ne tient pas la route – Lin, en attendant, reste en prison. Dernier indice d’amélioration : la peine de mort a reculé, l’an passé, de 31% sur 1996, avec 3000 exécutions recensées (bien moins que la réalité, le chiffre réel est secret d’Etat; mais la tendance est là, attestée par A.I.). Raison N°1 du changement : l’introduction du nouveau Code criminel, qui restreint l’application de la peine capitale. En bref : la Chine s’humanise.
A l’occasion de la visite de Bill Clinton, le Président Jiang avait marqué une victoire personnelle, en faisant épouser par son hôte, la thèse officielle chinoise concernant Taiwan, dite des trois « non » (consistant à réduire le réduit nationaliste au statut indigeste de province rebelle). Sur sa lancée, Jiang, à la veille de se rendre au Japon, semble attendre de Tokyo la même concession, ce qui suscite sur place une vive indisposition dans les milieux financiers. Pour l’Empire du Soleil Levant, « lâcher » Taiwan n’a pas de sens, vu la proximité géographique, et serait contraire à ses intérêts.
Réapparaît la rumeur d’un renforcement du statut de Jiang Zemin au sein du Parti Communiste Chinois (PCC): de 1er Secrétaire au coeur du Parti, au titre, en apparence plus sobre, de lingxiu (Leader), qu’avaient porté, avant lui, Mao et Deng. Pour justifier cette ambition, le succès du Sommet sino-US, et la gestion des inondations. Par contre, sur les deux dossiers politiques cruciaux du régime, c’est la prudence qui l’emporte: la réforme politique serait pour le début du XXI siècle, et pour accélérer la rentrée de Taiwan dans le giron de la patrie, Jiang envisage d’« élaborer » (cad d’améliorer la formule de Deng, « un pays deux systèmes ».
La Foire d’Urumqi (Xinjiang) s’ouvre dans un climat détestable. Non seulement du fait de l’absence des clients principaux, les Russes éliminés du marché par l’implosion de leur monnaie, mais aussi du fait de la loi martiale sur la 2ème ville de la province, Kashgar. Wang Lequan, Secrétaire du Parti, signale à cette occasion que 19 camps d’entraînement au terrorisme sont repérés dans la province, fonctionnant avec le soutien du mouvement islamique afghan Taliban. M. Wang nie que des séparatistes aient récemment pris une prison d’assaut et libéré 80 séparatistes ouighours. Paradoxalement, ce malaise intervient, au moment où les autorités tentent de relancer la croissance et soulever la chape policière sur cette province stratégique.
Mystérieux achat par une compagnie écran de Shenzhen du Minsk, porte-avion et vaisseau amiral de l’ex-flotte pacifique soviétique. Désarmé, le Minsk est au mouillage à Dongguan (Canton): ni canons, ni radars, ni avions.
Mardi 1er Septembre sonnait pour près de 300 M de bambins du Céleste Empire, la rentrée des classes. Un événement politique, dans ce pays limité à un enfant par couple, et dont l’école, élitaire dès la première année, constitue la seule chance de quitter les rizières pour gravir les gradins de la promotion sociale.
Cependant pour 8,5M d’enfants en zones inondées, la rentrée s’est faite les pieds dans l’eau, à cause des 45000 écoles détruites ou lézardées par les crues. Pour Pékin, le redémarrage des écoles sinistrées (symbole du retour à la normale) a été une priorité absolue. L’armée a été mise à contribution, jour et nuit, pour installer des locaux. Une chanceuse minorité a été transbordée par bateau/ autobus vers des internats de fortune, entrepôts recyclés, ou maisons réquisitionnées. Les autres, ont reçu des écoles sous tente, sur les digues. Grâce à des subventions, sont gratuits cette année, livres, cahiers et crayons, droits d’inscription et même, en zones à 100% détruites, la cantine de plein air.
C’est ainsi que 97% de ces enfants, en ce 1er jour d’école, avaient troqué la joyeuse excitation des rentrées normales pour une attention presque religieuse aux paroles du maître. On les comprend : les crues qui se poursuivent, et les pertes terribles subies par leurs parents, leur ont fait passer l’envie de chahuter. D’ailleurs, les directeurs ne se font aucune illusion : passés les 1ers jours, le taux d’absentéisme sera le plus lourd des 20 dernières années. L’école buissonnière, consistant en l’occurrence à prêter main forte aux parents, dans l’éreintante reconquête de leurs champs et de leurs maisons!
Juge adjoint à la Cour intermédiaire de Auhui ( banlieue de Wuhu, Sud de Nankin), Gu Ping vivait sans ennuis, jusqu’au jour de 1996, où il fut jeté en prison.
Sept mois plus tard, devant la Cour, il put apprendre le chef d’accusation: corruption, et falsification pour couvrir un criminel. Gu eut alors, en une illumination, souvenir du détail à l’origine de sa disgrâce: en 1995, il avait averti le Ministère d’une indélicatesse du Président du Tribunal… Deux ans d’appel, et l’absence de preuves à charge, ont fini par rendre sa liberté à l’imprudent magistrat, momentanément au chômage. Cette aventure digne d’un Soljenytsine, illustre le proverbe : (laohu pigu mobude, il ne fait pas bon fouetter les fesses du tigre).
NB : Li Guoguang, Vice-Président de la Cour suprême, annonce un nouveau système de supervision de la magistrature, afin de « rendre les travailleurs de la Loi plus responsable », et « promouvoir des tribunaux propres et honnêtes, tout en garantissant que justice sera rendue ». J’ai dit!
A Pingdingshan, gros centre industriel du Henan (5M habitants, aciéries, textiles, charbon), afin d’augmenter le rendement de sa meishijie, rue à guinguettes ou complexe de restaurants, ce patron à l’ancienne n’a rien trouvé mieux que lancer une mini Révolution Culturelle.
Afin de se « libérer des 5 attitudes erronées », tel le goût du profit, tous les employés sont depuis juin contraints de rédiger des « auto-analyses » ou dénonciations à rallonge, de se critiquer et torturer mutuellement. Déjà une serveuse a tenté de se donner la mort. Raisons de cette action extraordinaire:
[1] La « rue à guinguettes » est en quasi-faillite, moins à cause de l’esprit bourgeois des employés, que de la crise des industries traditionnelles, surtout en Chine de l’intérieur (les travailleurs de Pingdingshan se rabattent sur leurs sandwichs)
[2] Les provinces enclavées, ne manquent pas de cadres nostalgiques du Rouge-Mao. Mais la différence avec le passé, est que cette fois, des Chinois parlent : des journaux dénoncent la « culture de la délation », et épinglent la campagne de Pingdingshan pour ce qu’elle est anachronique et indésirable.
8-12 septembre, Xiamen: Foire internat d’investissement
11 septembre, Pékin: Séminaire helvétique /technologies de l’environnement
7-11 septembre, Pékin: Salon de l’immobilier
15-18septembre, Shanghai: Salon ameublement
11-15 septembre, Pyongyang : fêtes/50. Anniversaire de la fondation de la RDP de Corée (Nord)