Le Vent de la Chine Numéro 31
Chacun peut tirer dans son sens le rapport d’ouverture du 15 Congrès du PCC (Parti Communiste Chinois), vendr.12 par le Secrétaire Général Jiang Zemin: 61 feuillets lus en 150 minutes, dans un style volontairement confus -tant par tradition politique que par l’impératif de masquer des divergences internes.
Nous lisons ce rapport, programme du 15.Congrès et à peu de chose près, du Pays d’ici 2002, selon deux axes différents:
1. un programme complet de jouvence pour les E.E (Entreprise d’Etat) (dont le capital a en 1996 atteint 6,6 trillions de Y, soit +15,4%).
Étant entendu que Pékin conserve le contrôle du capital, toutes les techniques de refinancement sont admises (J.V, Bourse, coopératives ouvrières), et accompagnées par une couverture sociale complète. Pour cette réforme, un chef d’orchestre- le 1er Ministre présumé : Zhu Rongji
2. un «tour de vis» conservateur, destiné à contenir sur ses rails présents la réforme politique. Les élections doivent rester là où elles sont (dans les villages), le contrôle du Parti par la Loi n’est qu’un mot d’ordre (pas de contrôle du Parlement, comme en rêvait Qiao Shi, un Qiao des mauvais jours, qui quitta le podium une dizaine de minutes, au moment ou Jiang abordait ce chapitre)…
Le nom de Deng a été dit 55 fois, celui de Marx 40, celui de Mao 29. Dans ces redondances, se lit le pari de Jiang: devenir ingénieur en chef du marxisme scientifique, se hisser sur le piédestal de ses glorieux prédécesseurs. C’est le rêve, sincère, de la «société spirituelle socialiste» et d’une Chine inventant un modèle social là où les autres ont échoué – et surtout l’Ouest, «qu’il ne faut pas imiter».
Ce mandat répond-il aux besoins (en mobilité, en échanges, en contre-pouvoirs) d’une société urbaine déjà technique, enrichie et éduquée? L’appareil pourra-t-il continuer à fonctionner sous cette structure pyramidale, en faisant l’impasse sur un dialogue social? La suite du Congrès (surtout la fin, au moment des votes) devrait fournir des éléments de réponse!
Alanguie sous le soleil marin du Fujian, avec ses fermes blanchies à la chaux et son île de Gulangyu, Xiamen passait pour une villégiature sans histoire. Tout a changé, sous l’influence de son maire Hong Yongshi, avec le pari d’en faire une ville verte. Pari gagné (elle vient d’être sacrée «n°1 nationale de l’écologie»), grâce à un lourd effort: 3% par an de son budget. Xiamen a déjà 34% de son territoire boisé: 10m² par ht.
Cet environnement aimable, et sa position hors pair ont attiré chez elle 13 MM USD d’investissements et 3100 firmes étrangères. La ZES s’agrandit avec Haicang, 100 km² et 49 quais d’ici 1999, qui porteront la capacité du port à 90 Mt/an. En 2 ans, son PIB a cru de 23%, atteignant 3125 USD/an/ht: Xiamen est une des 10 plus riches villes de Chine. Enfin, sa Foire Internationale d’Investissement vient de réunir 5000 financiers autour de 10000 projets de tout le pays. Notamment de Taiwan, Xiamen étant un des 2 ports ouverts aux échanges maritimes avec l’île. 1er cas en Chine, d’une politique verte, qui rapporte!
Les taxes abusives ne fleurissent pas qu’à la campagne: le maire de Pékin, Jia Qinglin a ordonné une enquête sur 31 taxes imposées à MC Donald sur ses 38 restaurants, dont 17 outrageusement illégales et 8 douteuses.
Parmi celles du type «racket», cette taxe pour 3 mouches découvertes dans un des restaurants: 30 000Y d’amende, renégociée à 8000Y (soit 2700Y la mouche).
Taxes d’immondices; de «parking pour la sécurité du trafic» de «plantation d’arbres» (10Y/employé/ an); taxe de «dragage des rivières» (Pékin n’en comporte qu’une, et petite); taxes de «ville fleurie»; de propagande ( pour les calicots exhortant le peuple à être cultivé, dans le cadre de la «société spirituelle socialiste»); taxe pour le planning familial (2,5Y/an /employé); taxe d’exercices de sécurité (un homme par restaurant, ou 5000Y). Tout ceci «n’étant pas de la corruption», conclut le maire, honnête mais désabusé, «mais issu de la pression sur des administration dont on coupe les budgets tout en exigeant le même service! ». On ne peut mieux dire!
Destiné à un centre de recherche Pékinois, un superordinateur américain s’était perdu par inadvertance dans un institut militaire de Changsha (Hunan). Washington, craignant que l’instrument ne serve au design de bombes atomiques, exigeait son retour à Pékin: lequel vient d’obtempérer, juste à temps pour éviter un durcissement par le Sénat US, des règlements d’export de ces superstitieusement vers la Chine!
A l’étude au MOFTEC (Ministère de la Coopération Economique et Commerciale): un rétablissement (limité au secteur des investissement étrangers high tech), de la franchise de taxes sur les biens d’équipements. Supprimée en avril ’96, la franchise générale comporte encore un délai de grâce pour les projets signés avant cette date, jusqu’à décembre 1997 en dessous d’un plafond de 30MUSD, décembre 1998 pour ceux qui l’excèdent. La révision résulte tarissement (60%) des fonds étrangers) et des producteurs de l’intérieur, face à la recrudescence des imports!
L’Allemand Allianz vient d’être autorisé à former à Shanghai, avec le groupe Dazhong, la 2de J.V. d’assurance vie en Chine. La 1ère, Zhonghong, étant constituée par Manulife (Canada) et Sinochem. Comme pour Zhong-hong, la nouvelle J.V. sera contrôlée à 51% par le partenaire étranger. Au début de l’année, Allianz s’était faite dépasser sur le fil par le Suisse Winterthur, pour la 1ère licence d’assurance accordée à un groupe européen.
Verdict mercredi 10 de la Comm. de Discipline contre Chen Xitong,: l’ex-Secrétaire du PCC pour Pékin a été exclu du Parti, sans préjudice des suites judiciaires. Il était accusé d’irrégularités portant sur 2 MUSD. Jugement, dans Pékin, perçu de 2 manières:
Ceux qui y voient la capacité du Parti, pour la 1ère fois, à balayer devant sa porte. Sérieux, notamment de Wei Jianxing, patron de la Comm.,et de Jia Jinglin, le nouveau maire. Grâce à cette peine, Jiang obtient son diplôme de chevalier blanc.
Et ceux qui constatent le verdict, 15 jours plus tôt, conte le fils de Chen Xitong, sur le même dossier, de 12 ans de prison: ils y voient cette pratique biblique ET chinoise, de faire payer par le fils les fautes du père: «en Chine», dit Liu Binnian, dissident, «la lourdeur des peines est inversement proportionnelle au grade»…
L’avenir dira quelle thèse est la bonne. Remarquons que Chen, depuis le verdict, est en prison. L’enjeu de cette affaire étant la crédibilité de la campagne imminente contre la corruption, un des héritages les plus contestables de l’ère de Deng Xiaoping!
Version moderne de piratage intellectuel, en plein essor dans cette Chine qui s’ouvre, en demande de livres étrangers: payées par des éditeurs peu scrupuleux, des équipes de compilateurs sortent en quelques mois, des «traductions» à partir de celles déjà publiées. Délit encore interdit par aucune loi.
Comme bien d’autres E.E (Entreprise d’Etat), l’imprimerie n°4 de Pékin pratique, en matière d’emploi, les trois «ni» : ni lauréats, ni diplômés citadins, ni diplômés d’universités célèbres: engager des talents, avec son mode de gestion, lui fait perdre de l’argent!
Extraits du rapport de Jiang Zemin
Théorie de Deng: (elle) constitue un système scientifique nouveau, théorie d’un socialisme aux couleurs de la Chine(…) Adhérer à la théorie de Deng signifie vraiment adhérer au Marxisme Léninisme et à la pensée de Mao, tenir la bannière de la pensée de Deng signifie vraiment tenir celle du M-L et de la pensée de Mao.
Ligne: la Chine est au stade primitif du socialisme… Au moins pour 100 ans (Deng parlait de 50 ans, NDLR)(…) phase historique que nous ne pouvons sauter. Nous devons éliminer les facteurs menaçant la stabilité, refuser le libéralisme bourgeois, nous protéger des forces hostiles intérieures et extérieures, aux actions d’infiltration, subversives et séparatistes.
Propriété collective l’Etat doit y maintenir une position de contrôle, et développer côte à côte diverses formes de propriété.(…) L’Etat jouira des profits de l’E.E. au prorata du capital qu’il y aura investi, et portera une responsabilité limitée sur ses dette. Sa gestion sera indépendante. Nous améliorerons sa direction, et y ferons jouer leur rôle de noyau politique aux organisations du Parti, tout en adhérant au principe du lien organique à la classe ouvrière.
Contrôles macro-économiques: nous supprimerons les obstacles au commerce, briserons les blocus régionaux, les monopoles sectoriels, afin de créer au plus tôt un marché ouvert et uni du point de vue des règles de concurrence.
Ouverture au monde: nous utiliserons rationnellement et efficacement le capital étranger. Le secteur des services sera ouvert par étapes. En accord avec la loi, nous protégerons les droits et intérêts des entreprises à capitaux étrangers, leur conférant le même traitement qu’aux chinoises, tout en améliorant leur guidance et leur cadre réglementaire.
Réforme politique: à la pré condition de maintenir les 4 points Cardinaux (voie socialiste, dictature du prolétariat, leadership du PCC et pensée de Mao, NDLR), nous devrions continuer à pousser vers la réforme de la structure politique, élargir le cadre de la démocratie socialiste, améliorer le système socialiste légal, gouverner le pays selon la loi.
APL: l’armée doit respecter le leadership absolu du Parti (la Constitution elle, place l’APL sous les ordres de l’Etat NDLR); déjà allégée d’1 M d’hommes. dans les années 1980, elle le sera encore de 500 000 h. sous 3 ans.
Taiwan: Sauf une poignée d’avocats obstinés de l’indépendance, nous sommes prêts à discuter avec n’importe qui. Rappel solennel: (nous appelons à) négocier d’abord la fin de l’état de guerre, sur le principe d’une Chine seule et unique -tout le reste est négociable.
A Washington semaine passée, Tung Chee Hwa, patron de Hong Kong, a dû essuyer les avertissements des autorités US: le Secrétaire d’Etat Madeleine Albright, le Sénat, Bill Clinton. L’Amérique s’inquiète du pas en arrière (imposé par Pékin) aux législatives de 1998: 20 sur 60 seulement, éligibles au suffrage universel comme avant’ 95…
«C.H.» a balayé ces remontrances d’un revers de main: «Nous autres Asiatiques voyons les choses différemment!»: réplique qui eût pu être «soufflée» par Lee Kwan Yu, l’ex-leader de Singapour qu’il venait de voir, inventeur du «néo-autoritarisme», ombrageusement anti-occidental.
L’important, bien sûr, n’est pas là: le retour à la Chine a créé pour Hong Kong un rapport de force que peu avaient prévu. Otage de Pékin sur les affaires de Droits de l’Homme, CH.Tung l’est aussi des USA. Donc, en vertu du principe de «moins par moins donne plus», il est maître du jeu, en position de contenir les 2 bords, au nom de leurs capacités respectives de nuisance sur Hong Kong, l’enclave essentielle pour chacun.
De ce fait, Tung jouit d’une marge de manoeuvre supérieure à celle dont disposait Chris Patten, fonctionnaire de sa Majesté. La preuve: Tung brille par son absence au 15. Congrès qu’en bonne logique, nouveau vassal, il n’eût pas dû manquer. Peut-être, tous comptes faits, de son retour à la mère patrie chinoise, la nouvelle Région Administrative Spéciale (RAS) se retrouve renforcée, et non fragilisée!
Un chauffard à Zhengzhou (Henan) fauche 2 cyclistes, un fils de 11 ans, (qui meurt), un père qu’il traîne sous son véhicule. Stupéfaction des policiers qui le forcent à l’arrêt 1600m plus loin: c’était un des leurs, ex-commissaire adjoint… L’embarras et l’esprit de corps l’ont fait relâcher le lendemain, le meurtrier se présentait à l’hôpital, pour faire baisser sa tension… C’est finalement la presse locale, soutenue par des milliers d’appels télé, qui a forcé son arrestation, après 4 jours, le 27 août.
Capitaines peu courageux: le Oriental pearl (port d’attache Chongqing), en croisière sur le Yangtzé, carambole avec un cargo: l’équipage abandonne le navire et ses 300 passagers sauvés 4 heures plus tard par d’autres navires…
Suite à la dernière enquête de la Comm. Nationale Anti-drogue, le portrait robot du toxicomane pékinois se précise: en majorité (entrepreneur privé), et dépensant en paradis artificiels 10 000Y/mois en moyenne.
Élections ou pas, le pouvoir au village reste souvent dictatorial: à Hunnan (Henan), le tort de Liang Qingshan a été de s’abonner au journal local, et d’y lire les règlements sur le prix d’État des céréales. Quand Liu Qingxu, le Secrétaire, commença à réquisitionner à bas prix, Liang ameuta le village: Liu le fit rouer de coup par ses hommes, et le tribunal refusa d’enregistrer la plainte pour cette bagatelle. Seule nouveauté, mais de taille: un autre excellent!) a exposé toute l’affaire, y compris journal (le quotidien d’info Canton/HK, bien d’autres abus par cette mafia au pouvoir!
Lundi. 22 septembre, HK: journée «Chine» à la Conférence du FMI, et discours de Zhu Rongji et Li Peng, les deux 1er Ministres entrant et sortant. Commentaire d’un diplomate: «Dans le paysage troublé des monnaies asiatiques, la Chine et HK s’en tirent plutôt bien: la Conférence du FMI sera, pour Zhu, l’occasion de prendre ses marques et d’amasser à la pelle la confiance internationale»!
21-29 septembre : en France, Deng Nan, vice Présidente de la Commission d’État aux Sciences et Techniques. fille de Xiaoping, elle pourrait perdre sa fonction lors du 15.Congrès: guerre en cours contre les Petits Princes, et limitation envisagée, d’un poste au sommet par famille (dans le cas du Clan Deng, c’est Deng Pufang, le garçon, paraplégique, qui aurait été choisi).